Pierre Jeusset : né en 1919 à Brest (Finistère) ; domicilié à Montrouge (Seine) ; manœuvre à la gare Montparnasse ; ancien des brigades internationales ; Arrêté le 24 décembre 1941 ; interné aux camps des Tourrelles et de Compiègne ; déporté le 6 juillet 1942 à Auschwitz où il meurt le 23 août 1942.

Pierre Jeusset est né le 9 juillet 1919 à Brest (Finistère). Il habite chez sa mère au 108, rue de Bagneux à Montrouge (Seine / Hauts-de-Seine) au moment de son arrestation.
Il est le fils de Marie Joséphine Abjean (31 ans), cuisinière, née à Lesneven (Finistère) le 7 février 1888 et de Ange Marie Jeusset (28 ans), né le 11 juin 1891 à Saint-Brieuc (Côtes du Nord), coiffeur, son époux. Il a un frère aîné, Albert, Georges, Yves, né à Brest le 19 septembre 1917. Leurs parents se sont mariés à Brest, le 21 octobre 1916.  A cette date, leur père est sergent au 19 e Régiment d’Infanterie au camp de Kéraziou à Brest. Leur mère est domiciliée au 71, faubourg Saint-Honoré à Paris.
Pierre Jeusset est adopté par la Nation suivant jugement du tribunal civil de première instance de la Seine du 7 octobre 1923.
Il est célibataire et travaille comme manœuvre à la gare Montparnasse.

Brigadistes et insigne des BI, montage Pierre Cardon

Comme un autre Montrougien, Auguste Ducher, Pierre Jeusset, sympathisant communiste, s’est engagé comme volontaire pour défendre la République espagnole et a combattu dans les rangs des Brigades internationales de septembre 1936 à mai 1937.

En 1939, il habite avec son frère, aide économe, chez leur mère, veuve, au 108, rue de Bagneux à Montrouge..

Le vendredi 14 juin 1940, les troupes de la Wehrmacht entrent dans Paris, vidée des deux tiers de sa population. La ville cesse d’être la capitale du pays et devient le siège du commandement militaire allemand en France. Un premier  détachement  allemand  occupe  la mairie de Nanterre et l’état-major  s’y  installe. Le 22 juin, l’armistice est signé. Le 10 juillet 1940 le maréchal Pétain, investi des pleins pouvoirs par l’Assemblée nationale, s’octroie le lendemain le titre de « chef de l’Etat français » et lance la « révolution nationale » en rupture avec nombre de principes républicains (confusion des pouvoirs législatifs et exécutifs ; rejet du multipartisme, suppression des syndicats et du droit de grève, antisémitisme d’état…).

Recommandations de la Préfecture pour l’arrestation de 18 Brigadistes

La Préfecture possède des listes d’anciens volontaires ayant combattu en Espagne dans les Brigades internationales. Le 23 décembre 1941, les commissariats de leurs domiciles reçoivent le 23 décembre les noms et adresses avec des recommandations.
Dans un premier temps perquisition du domicile, puis arrestations par deux inspecteurs.
Pierre Jeusset qui figure sur cette liste est arrêté le 24 décembre 1941 à Montrouge par la police française. Il est interné à la prison des Tourelles du 24 décembre 1941 jusqu’au 5 mai 1942.

Pierre Jeusset : liste des Brigadistes (montage photo Pierre Cardon). Au crayon le nom de l’inspecteur responsable

Il est remis aux autorités allemandes à leur demande, avec d’autres brigadistes et des détenus de droit commun (37 hommes au total).

Celles-ci l’internent au camp de Royallieu à Compiègne le 5 mai 1942 (comme le seront tous les futurs déportés du convoi dit des « 45000 » anciens brigadistes internés aux Tourelles) en vue de sa déportation comme otage. A Compiègne il reçoit le matricule 5287.
Depuis ce camp administré par la Wehrmacht, il va être déporté à destination d’Auschwitz. Pour comprendre la politique de l’Occupant qui mène à sa déportation, on lira les deux articles du site qui exposent les raisons des internements, des fusillades et de la déportation : La politique allemande des otages (août 1941-octobre 1942) et «une déportation d’otages».

Depuis le camp de Compiègne, Pierre Jeusset est déporté à Auschwitz dans le convoi du 6 juillet 1942

Cf Article du site : Les wagons de la Déportation. 

Ce convoi est composé au départ de Compiègne, de 1175 hommes (1100 « otages communistes » – jeunes communistes, anciens responsables politiques et élus du Parti communiste, syndicalistes de la CGT et délégués du personnel d’avant-guerre, militants et syndicalistes clandestins, résistants – de cinquante  « otages juifs » et de quelques « droits communs »). Il faisait partie des mesures de terreur allemandes destinées à combattre, en France, les judéo-bolcheviks responsables, aux yeux de Hitler, des actions armées organisées par le parti communiste clandestin contre des officiers et des soldats de la Wehrmacht, à partir d’août 1941. Lire dans le site le récit des deux jours du transport : Compiègne-Auschwitz : 6-8 juillet 1942. Sur les 1175 otages partis de Compiègne le 6 juillet 1942, 1170 sont présents à l’arrivée du train en gare d’Auschwitz le 8 juillet 1942. Ces derniers sont enregistrés et photographiés au Stammlager d’Auschwitz (camp souche ou camp principal, dénommé en 1943 Auschwitz-I) entre les numéros « 45157 » et « 46326 », d’où le nom de « convoi des 45000 », sous lequel les déportés du camp désignaient ce convoi. Ce matricule – qu’il doit apprendre à dire en allemand et en polonais à toute demande des Kapos et des SS – sera désormais sa seule identité. Lire dans le site : Le KL Auschwitz-Birkenau.

Son numéro d’immatriculation à Auschwitz n’est pas connu, à moins qu’un témoignage permette de confirmer l’hypothèse concernant la photo placée au débit de la notice.. 

Lire dans le site le récit de leur premier jour à Auschwitz : L’arrivée au camp principal, 8 juillet 1942. et 8 juillet 1942 : Tonte, désinfection, paquetage, « visite médicale ».  Après l’enregistrement, il passe la nuit au Block 13 (les 1170 déportés du convoi y sont entassés dans deux pièces). Le 9 juillet tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau (Brzezinka), situé à 4 km du camp principal. Le 13 juillet il est interrogé sur sa profession. Les spécialistes dont les SS ont besoin pour leurs ateliers sont sélectionnés et vont retourner à Auschwitz I (approximativement la moitié du convoi. Les autres, restent à Birkenau, employés au terrassement et à la construction des Blocks.

Dessin de Franz Reisz, 1946

Pierre Jeusset meurt à Auschwitz le 23 août 1942 d’après son certificat de décès établi au camp pour le registre d’état civil de la municipalité d’Auschwitz (inDeath Books from Auschwitz ,Tome 2 page 515).Sa fiche d’état civil établie en France après la Libération porte toujours la mention « décédé le11 juillet 1942 à Auschwitz (Pologne)». Il serait souhaitable que le ministère corrige ces dates fictives qui furent apposées dans les années d’après guerre sur les état civils, afin de donner accès aux titres et pensions aux familles des déportés. Cette démarche est rendue possible depuis la parution de l’ouvrage « Death Books from Auschwitz » publié par les historiens polonais du Musée d’Auschwitz en 1995. Lire dans le blog Les dates de décès à Auschwitz.

L’arrêté ministériel du 7 juillet 1994 (Journal Officiel du 17 août 1994) a porté apposition de la mention «Mort en déportation» sur son acte de décès, en modifiant le précédent arrêté qui fixait la date de son décès à celle du départ du convoi.
Il est déclaré « Mort pour la France » le 5 mai 1958. Le titre de «Déporté politique» lui a été attribué en 1956.
Son nom figure sur la plaque commémorative (en Mairie) dédiée aux habitants de Montrouge morts pour la France.

Sources

  • Death Books from Auschwitz, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, 1995 (basé essentiellement sur les registres – incomplets – de l’état civil de la ville d’Auschwitz ayant enregistré, entre le 27 juillet 1941 et le 31 décembre 1943, le décès des détenus immatriculés).
  • Fichier national de la Division des archives des victimes des conflits contemporains (DAVCC), Ministère de la Défense, Caen (dossier statut 2010).
  • Légifrance, JO 189-17 août 1994.
  • Archives municipales de Brest. 
  • © Dessin de Franz Reisz, in « Témoignages sur Auschwitz », ouvrage édité par l’Amicale des déportés d’Auschwitz
    (1946).

Notice biographique rédigée en août 2010, modifiée en 2011 et 2019, par Claudine Cardon-Hamet (docteur en Histoire, auteur des ouvrages :Triangles rouges à Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 dit des « 45000 », éditions Autrement, Paris 2005) et de Mille otages pour Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 dit des « 45000 », éditions Graphein, Paris 1997 et 2000 (épuisé).Prière de mentionner ces références (auteur et coordonnées de ce blog) en cas de reproduction ou d’utilisation totale ou partielle de cette biographie.

Pour compléter ou corriger cette biographie, vous pouvez me faire un courriel à deportes.politiques.auschwitz@gmail.com 

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