Matricule « 46 241 » à Auschwitz
Maurice Graffin : né en 1920 à Donnemain-St-Mamès (Eure-et-Loir) ; domicilié au 98, rue de Bourgogne à Orléans (Loiret); ouvrier maçon ; arrêté le 21 avril pour propagande communiste ; interné à Chateaubriand, puis Compiègne ; déporté et mort à Auschwitz le 15 novembre 1942.
Maurice Graffin est né le 1er janvier 1920 à Donnemain-Saint-Mamès (Eure-et-Loir).
Il habite un hôtel au 98, rue de Bourgogne à Orléans (Loiret) au moment de son arrestation.
Il est le fils de Juliette Fontaine, 24 ans, née à Donnemain-Saint-Mamès en 1896. Après son divorce d’avec Mélanie Lemaire, Albert Graffin, 47 ans, cantonnier, épouse Juliette Fontaine le 24 mai 1924 et reconnaît et / ou légitime l’enfant.
En 1921, Maurice Graffin habite chez sa grand-mère maternelle au lieu-dit Deury, à Donnemain.
Au recensement de 1931, la famille Graffin habite au hameau de Rochefort à Jallans (Eure-et-Loir) où habitait Albert Graffin en 1906.
Maurice Graffin a deux sœurs et un frère : Gisèle née en 1924 à Châteaudun, Geneviève née en 1925 et Marcel en 1930, tous deux à Jallans.
En 1936, Maurice Graffin n’habite plus avec sa famille à Jallans.
Il est ouvrier maçon.
Au moment de son arrestation, il habite un hôtel meublé au 98, rue de Bourgogne à Orléans (Loiret), avec Herminia Esteban, jeune andalouse, née en 1921 dans la province d’Alméria, arrivée en France après la défaite de la République espagnole et la prise de Barcelone par les franquistes (des milliers de Républicains se réfugient en France : cet épisode est appelé la Retirada).
Le 14 juin 1940, la Wehrmacht défile à Paris, sur les Champs-Élysées. La ville cesse alors d’être la capitale du pays et devient le siège du commandement militaire allemand en France. Le 16 juin Orléans est occupé après de violents bombardements. La moitié nord de la France et toute la façade ouest sont occupées. Le 22 juin 1940, l’armistice est signé : la moitié nord de la France et toute la façade ouest sont occupées. Le pays est coupé en deux par la « ligne de démarcation » qui sépare la zone occupée et celle administrée par Vichy. Le 10 juillet 1940 Pétain, investi des pleins pouvoirs par l’Assemblée nationale, s’octroie le lendemain le titre de « chef de l’Etat français ». Il lance la « Révolution nationale » en rupture avec nombre de principes républicains (confusion des pouvoirs législatifs et exécutifs ; rejet du multipartisme, suppression des syndicats et du droit de grève, antisémitisme d’état…).
Maurice Graffin est arrêté le 12 février 1941, pour avoir tenu des « propos communistes » (qui sont les seuls qu’il reconnaît). Suspect de «propagande communiste» le Préfet signe à son encontre un arrêté d’internement administratif le 15 février 1941. Ecroué à la prison d’Orléans, il y est rejoint par André Gaullier et Roger Pinault. arrêtés le 21 avril. Sa compagne, Herminia Estéban est refoulée en Espagne par un autre arrêté préfectoral.
Ecroué à la prison d’Orléans, Maurice Graffin est ensuite interné aux camps de Fontevraud (avec Roger Pinault et André Gaullier selon le témoignage d’André Bolze), puis au camp de Choisel à Châteaubriant, le 14 mai 1941 où il reçoit le matricule 718. Marius Thirouard, également de Jallans est lui aussi interné à Châteaubriant après son arrestation le 22 juin 1941.
Il est remis avec ses deux camarades aux autorités allemandes à leur demande.
Lire dans le site : Du camp de Choisel de Chateaubriant à Auschwitz, via Compiègne et Camp de Choisel, les photos de Maurice Guy et l’hommage aux fusillés de Châteaubriant.
Dans le premier article on lira un texte caché dans les « Maximes de La Rochefoucault » qui nous est parvenu : 7 avril 1942 : Aujourd’hui encore, trois de nos meilleurs camarades nous sont enlevés, trois jeunes gars de vingt ans, originaires d’Orléans. Nous apprenons quelques jours plus tard qu’ils n’ont pas été fusillés, mais ce sursis durera-t-il ? Voilà les noms de ces trois petits copains GAULLIER André, PINAULT Roger, GRAFFIN Maurice. Ils avaient été convoqués au bureau pour 8 h. 30 avec leur nécessaire de toilette et les Allemands sont venus prendre cette livraison de chair fraiche et leur mirent les menottes dans le dos.
Maurice Graffin et ses deux camarades sont internés au camp allemand de Royallieu à Compiègne (le Frontstalag 122), le 9 avril 1942, en vue de sa déportation comme otage.
Depuis ce camp, il va être déporté à destination d’Auschwitz.
Pour comprendre la politique de l’Occupant qui mène à sa déportation, voir les deux articles : La politique allemande des otages (août 1941-octobre 1942) et «une déportation d’otages».
Depuis le camp de Compiègne, Maurice Graffin est déporté à Auschwitz dans le convoi du 6 juillet 1942.
Cf Article du site : Les wagons de la Déportation
Ce convoi est composé au départ de Compiègne, de 1175 hommes (1100 « otages communistes » – jeunes communistes, anciens responsables politiques et élus du Parti communiste, syndicalistes de la CGT et délégués du personnel d’avant-guerre, militants et syndicalistes clandestins, résistants – de cinquante « otages juifs » et de quelques « droits communs »). Il faisait partie des mesures de terreur allemandes destinées à combattre, en France, les judéo-bolcheviks, responsables aux yeux de Hitler, des actions armées organisées par le Parti communiste clandestin contre des officiers et des soldats de la Wehrmacht, à partir d’août 1941.
Lire dans le site le récit des deux jours du transport : Compiègne-Auschwitz : 6-8 juillet 1942.
Sur les 1175 otages partis de Compiègne le 6 juillet 1942, 1170 sont présents à l’arrivée du train en gare d’Auschwitz le 8 juillet 1942. Ces derniers sont enregistrés et photographiés au Stammlager d’Auschwitz (camp souche ou camp principal, dénommé en 1943 Auschwitz-I) entre les numéros « 45 157 » et « 46 326 », d’où le nom de « convoi des 45 000 », sous lequel les déportés du camp désignaient ce convoi. Ce matricule – qu’il doit apprendre à dire en allemand et en polonais à toute demande des Kapos et des SS – sera désormais sa seule identité.
Lire dans le site : Le KL Auschwitz-Birkenau.
Il est enregistré à son arrivée à Auschwitz le 8 juillet 1942 sous le numéro « 46 241 » selon la liste par matricules du convoi établie en 1974 par les historiens polonais du Musée d’Etat d’Auschwitz.
Sa photo d’immatriculation à Auschwitz n’a pas été retrouvée parmi celles que des membres de la Résistance intérieure du camp avaient camouflées pour les sauver de la destruction, ordonnée par les SS peu de temps avant l’évacuation d’Auschwitz.
Lire dans le site le récit de leur premier jour à Auschwitz : L’arrivée au camp principal, 8 juillet 1942. et 8 juillet 1942 : Tonte, désinfection, paquetage, « visite médicale ».
Après l’enregistrement, il passe la nuit au Block 13 (les 1170 déportés du convoi y sont entassés dans deux pièces). Le 9 juillet tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau (Brzezinka), situé à 4 km du camp principal. Le 13 juillet il est interrogé sur sa profession. Les spécialistes dont les SS ont besoin pour leurs ateliers sont sélectionnés et vont retourner à Auschwitz I (approximativement la moitié du convoi. Les autres, restent à Birkenau, employés au terrassement et à la construction des Blocks.
Aucun des documents sauvés de la destruction ordonnée par les SS peu de temps avant l’évacuation d’Auschwitz, ne nous permet de savoir dans quel camp il est affecté à cette date
Maurice Graffin meurt à Auschwitz le 15 novembre 1942, d’après son certificat de décès établi au camp pour le registre d’état civil de la municipalité d’Auschwitz (in Death Books from Auschwitz Tome 2 page 380).
Un arrêté paru au J.O. du 27 décembre 1993 porte apposition de la mention «Mort en déportation» sur son acte de décès, et «décédé en déportation».
Si le J.O. du 18 février 1994 a précisé cette mention en y apposant une date fictive (le 31 juillet 1942), il serait souhaitable que le ministère prenne désormais en compte les dates des archives du camp d’Auschwitz emportées par les soviétiques en 1945, et qui sont accessibles depuis 1995.
Sources
- Témoignage d’André Gaullier, rescapé du convoi.
- Echange de courriers avec Louis Oury, écrivain, à la suite de ses recherches aux archives de Nantes et celles du camp de Châteaubriant (dossiers, bordereaux), en avril et mai 1991.
Listes – incomplètes – du convoi établies par la FNDIRP après la guerre (archives de la F.N.D.I.R.P). - Bureau de la Division ou pôle des archives des conflits contemporains (DAVCC), Ministère de la Défense, Caen (dossier individuel).
- Liste (incomplète) par matricule du convoi du 6 juillet 1942 établie en 1974 par les historiens du Musée d’Etat d’Auschwitz-Birkenau (Bureau des archives des victimes des conflits contemporains (Ministère de la Défense, Caen) indiquant généralement la date de décès au camp.
- © Site Legifrance.gouv.fr
- © Dessin de Franz Reisz, in « Témoignages sur Auschwitz », ouvrage édité par l’Amicale des déportés d’Auschwitz (1946).
- André Bolze. Récit : De la Seine à l’Elbe, MRN Champigny.
- Archives départementales du Loiret, Orléans : Internements administratifs, listes, dossiers individuels.
Notice biographique rédigée en 2007, complétée en 2017, 2019, 2023 et 2024, par Claudine Cardon-Hamet, docteur en Histoire, auteur des ouvrages : « Triangles rouges à Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 » Editions Autrement, 2005 Paris et de «Mille otages pour Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 dit des « 45000 », éditions Graphein, Paris 1997 et 2000. Prière de mentionner ces références (auteur et coordonnées de ce site) en cas de reproduction ou d’utilisation totale ou partielle de cette notice biographique.
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