Samy, Michel Miaskovsky

Matricule « 46 301 » à Auschwitz

Samy Miaskovsky : né en 1896 à Constantinople (Turquie) ; réfugié à Saint-Jean-de-Monts (Vendée) ; expert-comptable ; arrêté comme otage Juif le 23 avril 1942 ; interné aux camps de Drancy et de Compiègne ; déporté le 6 juillet 1942 à Auschwitz, où il meurt le 19 juillet 1942.

Samy Miaskovsky est né le 20 mars 1896 à Constantinople (Istanbul, Turquie). Il est réfugié à Saint-Jean-de-Monts (Vendée) au moment de son arrestation.
Il est le fils de Rosa Eisenstein (selon son neveu Bernard et deux sites de généalogie, ou Bisenstein selon l’acte de mariage de Samy Miskovsky à Paris 16ème) et de Jacob Miaskovsky son époux.

Son père et sa mère, une sœur

Il est issu d’une importante fratrie (dont trois sont nés à Odessa (Russie / Ukraine) : Marko, né en 1893, Clara, née en 1895, Elieser né en 1898. Naissance de Samy, Michel en 1896 à Constantinople (Russie), de Sophie en 1903
(1), Ida en 1905 (2), Sonia, Miryam en 1907, Esther en 1909, Yoël, et Rivka née en 1911, elle aussi à Constantinople, et le cadet Jacque(s) né à Paris en 1913 (source My Héritage et Géni / Yuval Maoz). Il est vraisemblable qu’une partie de la famille soit donc venue s’installer à Paris  entre 1912 et 1913.
Samy Miaskovsky travaille pour la Deutsche Bank / CEO. Il est expert comptable. En 1934, il habite au 7, rue Charles Dickens à Paris 16ème.

Michel, Samy Miaskovsky

Le 28 avril 1934, à Paris  16ème, il épouse Simone de Pelliaux, secrétaire. Elle est née le 11 avril 1906 à Paris  6ème. Au moment de son mariage, elle habite chez son père, veuf, libraire, au 83 rue de La Boëtie Paris  8ème. Samy Miaskovsky est noté « sans profession » sur le registre de mariage. Ses parents sont décédés au moment du mariage.
Selon le Mémorial de la Shoah, ils habitent ensuite au 9, rue Baudin (depuis 1944 devenue rue Pierre Sémard, du nom du syndicaliste fusillé en 1942) à Paris 9ème).

Le 14 juin 1940, l’armée allemande entre par la Porte de la Villette dans Paris, vidée des deux tiers de sa population. La ville cessant d’être la capitale du pays et devenant le siège du commandement militaire allemand en France. Les troupes allemandes occupent toute la banlieue parisienne et les départements voisins les jours suivants.  Le 22 juin, l’armistice est signé. Le 10 juillet 1940 le maréchal Pétain, investi des pleins pouvoirs par l’Assemblée nationale, abolit la République et s’octroie le lendemain le titre de « chef de l’Etat français ». Il lance la « révolution nationale » en rupture avec nombre de principes républicains (confusion des pouvoirs législatifs et exécutifs ; rejet du multipartisme, suppression des syndicats et du droit de grève, antisémitisme d’état…).

Samy Miaskovsky est réfugié à Saint-Jean-de-Monts (Vendée), où il réside, villa Le Bleuet, boulevard du Midi.
Au début de l’Occupation, « il était tenu de se présenter quotidiennement en mairie, dans le cadre des lois raciales« , rapporte le maire de St-Jean-de Monts (courrier du 20 septembre 1992).

Samy Miaskovsky est arrêté à St-Jean-de-Monts le 23 avril 1942. D’après le témoignage de Benjamin Schatzman (3), il est dirigé sur le camp de Drancy. Puis il est interné le 29 avril 1942 au « camp Juif » du camp allemand de Royallieu à Compiègne (le Frontstalag 122), avec notamment l’avocat François Montel (4). Il y reçoit le matricule n° 3878. 

Ce transfert depuis Drancy à Compiègne correspond à un transfert de 784 Juifs de Drancy vers Compiègne, le 29 avril 1942. Ils sont internés dans le camp « C » le « camp des Juifs ». 751 d’entre eux sont déportés le 5 juin 1942 à Auschwitz. Les autres, comme Maurice Ferstla et Abraham Wajbrot, ou Samy Misakovsky seront déportés dans le convoi du 6 juillet 1942 avec les 27 otages juifs de Caen qui ont été transférés le 4 mai à Compiègne.
« Il fallait un chef de baraquement qui sache parler allemand, et ce fut un Juif d’origine russe, qui a eu l’occasion de résider en Autriche ou en Allemagne,
et qui habitait en France depuis une date pas ancienne qui fut nommé
» écrit Benjamin Schatzman (3). Samy Miaskovsky est désigné chef du bâtiment C 3 du camp des Juifs, ouvert le 12 décembre 1941 (pour un convoi qui arrive le 15). Benjamin Schatzman le décrit ainsi lors de ses notes du 2 mai 1942 : « Un homme doux et correct dont la société est agréable, car il parle plusieurs langues, tout en n’ayant eu qu’une instruction primaire ».
Chef de baraquement, Samy Miaskovsky est installé dans une petite chambre avec Mayer, qui remplit la fonction de secrétaire du chef de bloc C3, tandis que Benjamin Schatzman est dans la chambre voisine communicante, plus grande, avec deux autres internés, un violoniste et un ouvrier diamantaire. «La chambre, plus courte, ayant aussi sa fenêtre, et donnant sur un grand espace qui est mis à disposition des communistes (i.e. le camp des politiques), et exposée au soleil ».
Après une nuit passée dans l’ancien camp Russe au moment de la sélection du convoi d’otages juifs du 5 juin 1942 (le deuxième convoi vers Auschwitz), Samy Miaskovsky intègre une petite chambre du C6 avec François Montel (4).
Il est désigné comme chef de la baraque C3 du camp Juif. Il parle plusieurs langues.
Depuis ce camp administré par la Wehrmacht, il va être déporté à destination d’Auschwitz. Pour comprendre la politique de l’Occupant qui mène à sa déportation, on lira les deux articles du site qui exposent les raisons des internements, des fusillades et de la déportation : La politique allemande des otages (août 1941-octobre 1942) et «une déportation d’otages».

Lire l’article : Les déportés juifs du convoi du 6 juillet 1942 

Depuis le camp de Compiègne Samy Miaskovsky est déporté à Auschwitz dans le convoi du 6 juillet 1942.

Cf Article du site : Les wagons de la Déportation. 

Ce convoi est composé au départ de Compiègne, de 1175 hommes (1100 « otages communistes » – jeunes communistes, anciens responsables politiques et élus du Parti communiste, syndicalistes de la CGT et délégués du personnel d’avant-guerre, militants et syndicalistes clandestins, résistants – de cinquante  « otages juifs » et de quelques « droits communs »). Il faisait partie des mesures de terreur allemandes destinées à combattre, en France, les judéo-bolcheviks responsables, aux yeux de Hitler, des actions armées organisées par le parti communiste clandestin contre des officiers et des soldats de la Wehrmacht, à partir d’août 1941. Lire dans le site le récit des deux jours du transport : Compiègne-Auschwitz : 6-8 juillet 1942. Sur les 1175 otages partis de Compiègne le 6 juillet 1942, 1170 sont présents à l’arrivée du train en gare d’Auschwitz le 8 juillet 1942. Ces derniers sont enregistrés et photographiés au Stammlager d’Auschwitz (camp souche ou camp principal, dénommé en 1943 Auschwitz-I) entre les numéros « 45157 » et « 46326 », d’où le nom de « convoi des 45000 », sous lequel les déportés du camp désignaient ce convoi. Ce matricule – qu’il doit apprendre à dire en allemand et en polonais à toute demande des Kapos et des SS – sera désormais sa seule identité. Lire dans le site : Le KL Auschwitz-Birkenau.

Il est enregistré à son arrivée à Auschwitz le 8 juillet 1942 sous le numéro « 46 301 ».
Sa photo d’immatriculation à Auschwitz n’a pas été retrouvée parmi celles que des membres de la Résistance intérieure du camp avaient camouflées pour les sauver de la destruction, ordonnée par les SS peu de temps avant l’évacuation d’Auschwitz.
Lire dans le site le récit de leur premier jour à Auschwitz : L’arrivée au camp principal, 8 juillet 1942. et 8 juillet 1942 : Tonte, désinfection, paquetage, « visite médicale ».
Après l’enregistrement, au cours duquel il se déclare « fonctionnaire », il passe la nuit au Block 13 (les 1170 déportés du convoi y sont entassés dans deux pièces). Le 9 juillet tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau (Brzezinka), situé à 4 km du camp principal.
Le 13 juillet il est interrogé sur sa profession. Les spécialistes dont les SS ont besoin pour leurs ateliers sont sélectionnés et vont retourner à Auschwitz I (approximativement la moitié du convoi. Les autres, dont tous les déportés juifs du convoi, restent à Birkenau, employés au terrassement et à la construction des Blocks.

Samy Miaskovsky meurt à Auschwitz le 19 juillet 1942 d’après son certificat de décès établi au camp  d’Auschwitz (in Death Books from Auschwitz Tome 3 page 804).

Son nom est inscrit sur le Mur des noms du Mémorial de la Shoah : dalle n° 74, colonne n°
25, rangée n° 2.

 

2024 : un professeur d’histoire et géographie au collège Pays-de-Monts à Saint-Jean de Monts, monsieur Thierry Métier, m’informe que dans le cadre du Concours de la Résistance, ses élèves de 3ème ont intégré l’histoire de Samy Miaskovsky à leur projet. Une composante de celui-ci consiste en un hommage rendu à Samy Miaskovsky dans la rue qu’il habitait à Saint Jean de Monts. Les élèves ont déposé en mairie une demande pour réaliser sur place un pochoir afin de porter à la connaissance des passants l’existence et le destin de Samy Miaskovsky.

  • Sophie Miaskovsky décédée à Auschwitz

    Note 1Sophie, Sonia  Miaskovsky est née 14 décembre 1903 à Constantinople. Elle est secrétaire, traductrice. Elle habite avec sa sœur Ida au 27 rue Duroc à Paris 7ème. Elle est déportée à destination d’Auschwitz depuis le camp de Drancy par le Convoi n° 10 du 27 juillet 1942. Elle a le numéro 103 sur la liste allemande du convoi. Sa sœur a le numéro 102. Elle meurt le 28 juillet 1942 (date indiquée sur sa fiche à Yad Vashem).

Ida Miaskovsky  décédée à Auschwitz

Note 2 : Ida Miaskovsky est née 22 décembre 1905 à Constantinople. Enseignante ou éducatrice (teacher sur le document de Yad Vashem), elle habite avec sa sœur Sophie au 27 rue Duroc à Paris 7ème. Elle est déportée à destination d’Auschwitz depuis le camp de Drancy par le Convoi n° 10 du 27 juillet 1942. Elle a le numéro 102 sur la liste allemande du convoi. Sa sœur a le numéro 103. Elle meurt à Auschwitz le 28 septembre 1942  (fiche Yad Vashem 2010).

Note 3 : Benjamin Schatzman. Ses témoignages sont publiés dans le livre préfacé par : Journal d’un interné : Compiègne, Drancy, Pithiviers. 12 décembre 1941, 23 septembre 1942. Souvenirs et lettres. Collection Témoignages de la Shoah. Né à Toulcha, il est dentiste. Naturalisé français, il habite 8, rue de Miromesnil à Paris 8°. Il est déporté à Auschwitz le 23/09/1942, convoi n°36), où il meurt.

Note 4 : François Montel, in Journal de Compiègne et de Drancy. De François Montel et Georges Kohn / éditeurs « Les fils et filles des déportés juifs de France ». Né le 11/11/1900, de nationalité française d’origine, il est avocat à la cour. François Montel est arrêté le 23 août 1941. Il est le représentant des internés auprès des autorités du « camp Juif » de Drancy (Seine / Seine Saint-Denis), installé dans la « cité de la Muette » en construction et transformée en octobre 1939 en camp d’internement par le gouvernement Français. Les allemands y internent d’abord des prisonniers militaires français, puis grecs, yougoslaves et anglais. Du 20 au 24 août 1941, des rafles successives de Juifs parisiens conduisent à l’emprisonnement de 4 232 personnes au camp de Drancy. François Montel est destitué de sa représentation des internés par ordre de Dannecker, et transféré à Compiègne le 29 avril 1942. Il est ramené à Drancy et déporté à Auschwitz le 26 août 1942 (convoi n°24), où il meurt.

Sources

    • Mairie de St-Jean-de-Monts (août et septembre 1992).
    • Document Caisse de solidarité. Archives Charles Renaud.
    • Acte de décès daté du 12 décembre 1946.
  • Division des archives des conflits contemporains (DAVCC), Ministère de la Défense, Caen. Dossier N° 28074, juin 1992 et « Liste des décédés du convoi du convoi de Compiègne du 6/7/42 ». Ausch 1/19. 
  • Photos My Héritage et Géni / Yuval Maoz. Son neveu Bernard fait une déclaration à Yad Vashem en 2010, concernant Ida, Sophie et Samy.

Notice biographique rédigée en septembre 2010, complétée en 2018 et 2020, par Claudine Cardon-Hamet, docteur en Histoire, auteur des ouvrages : « Triangles rouges à Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 » Editions Autrement, 2005 Paris et de «Mille otages pour Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 dit des « 45000 », éditions Graphein, Paris 1997 et 2000 (épuisé). Prière de mentionner ces références (auteur et coordonnées de ce site) en cas de reproduction ou d’utilisation totale ou partielle de cette notice biographique.
Pour la compléter ou la corriger, vous pouvez me faire un courriel à deportes.politiques.auschwitz@gmail.com 

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