Matricule « 45 559 » à Auschwitz
Robert Frétel : né en 1903 à Dijon (Côte d’Or) ; domicilié à Chevry-Cossigny (Seine-et-Marne) ; ouvrier agricole ; communiste ; arrêté le 8 octobre 1941 ; interné au camp de Compiègne ; déporté le 6 juillet 1942 à Auschwitz où il meurt le 19 septembre 1942.
Robert Frétel est né le 9 novembre 1903 à Dijon (Côte d’Or) sous le nom de Robert Morisot. Il habite à Chevry-Cossigny (Seine-et-Marne) au moment de son arrestation.
Sa mère, Antoinette Elizabeth Morizot, ouvrière de 17 ans le reconnaît le 23 novembre 1903.
Elle se marie le 16 septembre 1907 à Dijon avec Henri Paul Frétel, qui légitime la naissance de Robert.
Ribert Frétel a trois sœurs et un frère cadets (Suzanne Morizot née en 1904, Marie Morizot 1907-1922, Louise Frétel (1908-1987) et Albert Frétel (1909-1975).
En décembre 1907, ils habitent au 8, rue de la Goutte-d’Or à Dijon.
En 1911, Robert Frétel habite Dijon-Est, chez ses grands parents au 27, rue des Poussots.
Avant son service militaire, il est ouvrier agricole, puis il est boulanger à Montélimar où il est domicilié au moment de son mariage, mais résidant à Chevry-Cosigny. On sait par le registre matricule militaire de son père que celui-ci est domicilié à Montélimar depuis 1919.
Robert Frétel épouse Berthe Eugénie Marcou le 22 décembre 1922 à Chevry-Cossigny.
Manœuvre, elle est née dans le bourg le 12 mars 1900. Le couple a sept enfants : Alfred, né en 1921, Marcel, né en 1923, Rolande, née en 1925, André, né en 1931, Madeleine, née en 1933, tous à Chevry-Cossigny, Maurice né en 1936, Raymonde âgée de deux ans et demis au moment de l’arrestation de son père.
Conscrit de la classe 1923, Robert Frétel effectue son service militaire au 5è COA (Commis et Ouvriers militaires d’Administration) à Orléans (Loiret).
En 1926 la famille vient habiter au 19 rue des Fossés, à Chevry-Cossigny. En 1936, Robert Frétel et son fils Alfred sont manouvriers à la sucrerie Dufaÿ, dont le patron, Georges Dufaÿ est le maire de la commune depuis 1935.
Robert Fretel est secrétaire et trésorier de la cellule locale du Parti communiste. Le 14 juillet 1938, il est verbalisé et condamné à 1 franc d’amende pour avoir enfreint un arrêté interdisant le pavoisement de drapeaux autres que le drapeau tricolore lors de la fête nationale.
Le 14 juin, les troupes allemandes sont à Meaux ; le 15 juin à Brie-Comte-Robert et à Melun. Le dimanche 16 juin 1940, des éléments motorisés de la Werhmacht franchissent la Seine à Valvins sur un pont de bateaux. Ils traversent Avon avant d’entrer dans Fontainebleau, précédant le gros des troupes.
Le 14 juin, l’armée allemande était entrée par la Porte de la Villette dans Paris, vidée des deux tiers de sa population. La ville cessant d’être la capitale du pays et devenant le siège du commandement militaire allemand en France. Les troupes allemandes occupent toute la banlieue parisienne et les départements voisins les jours suivants. Le 22 juin, l’armistice est signé.
Le 10 juillet 1940 le maréchal Pétain, investi des pleins pouvoirs par l’Assemblée nationale, abolit la République et s’octroie le lendemain le titre de « chef de l’Etat français ». Il lance la « révolution nationale » en rupture avec nombre de principes républicains (confusion des pouvoirs législatifs et exécutifs ; rejet du multipartisme, suppression des syndicats et du droit de grève, antisémitisme d’état…).
A l’automne 1940, les services de police notent une recrudescence de la propagande communiste et surveillent les militants communistes d’avant guerre connus. Un rapport est transmis le 2 octobre 1940 au commissaire spécial de Melun qualifiant Robert Frétel : « n’a rien abandonné de ses idées et serait tout particulièrement prêt à reprendre, si elle n’est déjà reprise, une certaine activité ».
Robert Frétel est arrêté par la police française et la Feldgendarmerie le 8 octobre 1941 à Chevry-Cossigny pour « activités communistes ».
De nombreux élus ou militants communistes du département sont arrêtés dans la première semaine d’octobre et les 19 et 20 octobre. Parmi eux, 42 seront déportés à Auschwitz. Lire dans le site : la rafle des communistes en Seine-et-Marne, octobre 1941.
A la demande des autorités allemandes Robert Frétel est transféré au camp de Royallieu à Compiègne (le Frontstalag 122), le 20 octobre 1941.
Depuis ce camp administré par la Wehrmacht, il va être déporté à destination d’Auschwitz. Pour comprendre la politique de l’Occupant qui mène à sa déportation, on lira les deux articles du site qui exposent les raisons des internements, des fusillades et de la déportation : La politique allemande des otages (août 1941-octobre 1942) et «une déportation d’otages».
Depuis le camp de Compiègne, Robert Frétel est déporté à Auschwitz dans le convoi du 6 juillet 1942.
Cf Article du site : Les wagons de la Déportation.
Ce convoi est composé au départ de Compiègne, de 1175 hommes (1100 « otages communistes » – jeunes communistes, anciens responsables politiques et élus du Parti communiste, syndicalistes de la CGT et délégués du personnel d’avant-guerre, militants et syndicalistes clandestins, résistants – de cinquante « otages juifs » et de quelques « droits communs »). Il faisait partie des mesures de terreur allemandes destinées à combattre, en France, les judéo-bolcheviks responsables, aux yeux de Hitler, des actions armées organisées par le parti communiste clandestin contre des officiers et des soldats de la Wehrmacht, à partir d’août 1941.
Lire dans le site le récit des deux jours du transport : Compiègne-Auschwitz : 6-8 juillet 1942.
Sur les 1175 otages partis de Compiègne le 6 juillet 1942, 1170 sont présents à l’arrivée du train en gare d’Auschwitz le 8 juillet 1942. Ces derniers sont enregistrés et photographiés au Stammlager d’Auschwitz (camp souche ou camp principal, dénommé en 1943 Auschwitz-I) entre les numéros « 45157 » et « 46326 », d’où le nom de « convoi des 45000 », sous lequel les déportés du camp désignaient ce convoi. Ce matricule – qu’il doit apprendre à dire en allemand et en polonais à toute demande des Kapos et des SS – sera désormais sa seule identité.
Lire dans le site : Le KL Auschwitz-Birkenau.
Il est enregistré à son arrivée à Auschwitz le 8 juillet 1942 sous le numéro « 45 559 ».
Sa photo d’immatriculation (4) à Auschwitz a été retrouvée parmi celles que des membres de la Résistance intérieure du camp avaient camouflées pour les sauver de la destruction, ordonnée par les SS peu de temps avant l’évacuation d’Auschwitz.
Lire dans le site le récit de leur premier jour à Auschwitz : L’arrivée au camp principal, 8 juillet 1942. et 8 juillet 1942 : Tonte, désinfection, paquetage, « visite médicale ».
Après l’enregistrement, il passe la nuit au Block 13 (les 1170 déportés du convoi y sont entassés dans deux pièces). Le 9 juillet tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau, situé à 4 km du camp principal. Le 13 juillet il est interrogé sur sa profession. Les spécialistes dont les SS ont besoin pour leurs ateliers sont sélectionnés et vont retourner à Auschwitz I (approximativement la moitié du convoi. Les autres, restent à Birkenau, employés au terrassement et à la construction des Blocks. On ignore dans quel camp il est affecté à cette date.
Robert Frétel meurt à Auschwitz le 19 septembre1942 d’après son certificat de décès établi au camp pour le registre d’état civil de la municipalité d’Auschwitz, in Death Books from Auschwitz, Tome 2, page 311), dans les jours qui suivent une importante « sélection » des « inaptes au travail » destinés à être éliminés dans les chambres à gaz de Birkenau. Lire dans le blog Les dates de décès à Auschwitz.
Il a été déclaré « Mort pour la France« . Le titre de « Déporté politique » lui a été attribué.
Une rue porte son nom à Chevry-Cossigny
Sources
- Bureau des archives des Victimes des conflits contemporains (BAVCC), Ministère de la Défense, Caen (fiche individuelle consultée en juillet 1992).
- « La Résistance en Seine et Marne« , Claude Cherrier et René Roy, (Presses du Village).
- Death Books from Auschwitz, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, 1995 (basé essentiellement sur les registres – incomplets – de décès du camp d’Auschwitz ayant enregistré, entre le 27 juillet 1941 et le 31 décembre 1943, le décès des détenus immatriculés).
- Liste (incomplète) par matricules du convoi du 6 juillet 1942 établie en 1974 par les historiens du Musée d’Etat d’Auschwitz-Birkenau (Bureau des archives des victimes des conflits contemporains (Ministère de la Défense, Caen) indiquant généralement la date de décès au camp.
- Photo d’immatriculation à Auschwitz : Musée d’état Auschwitz-Birkenau / © collection André Montagne.
- © Dessin de Franz Reisz, in « Témoignages sur Auschwitz », ouvrage édité par l’Amicale des déportés d’Auschwitz
(1946). - Registre matricule de Henri, Paul Frétel.
- Recensements Dijon 1911, Chevry Cosigny 1936.
- Archives départementales de Seine-et-Marne, Dammarie-les-Lys, cabinet du préfet.
Notice biographique installée en novembre 2013, complétée en 2017 et 2022 par Claudine Cardon-Hamet (docteur en Histoire, auteur des ouvrages : Mille otages pour Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 dit des « 45000 », éditions Graphein, Paris 1997 et 2000 (épuisé) et de Triangles rouges à Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 dit des « 45000 », éditions Autrement, Paris 2005) . Prière de mentionner ces références (auteur et coordonnées de ce site) en cas de reproduction ou d’utilisation totale ou partielle de cette notice biographique.
Pour la compléter ou la corriger, vous pouvez me faire un courriel à deportes.politiques.auschwitz@gmail.com
nous avons comme amie une de ses filles – son arrière-petit-fils et nous connaissons son frère. Quelle souffrance.
Suis son petit-fils; cela marque et détermine une vie;
Robert FRETEL