Signature d’André Touret le jour de son mariage
André Touret : né en 1907 à Clichy ; domicilié à Esbly (Seine-et-Marne) ; employé du Gaz ; communiste ; arrêté le 20 octobre 1941; interné au camp de Compiègne ; déporté le 6 juillet 1942 à Auschwitz, où il meurt le 20 octobre 1942.

André Touret est né le 15 décembre 1907 à Clichy-la-Garenne (Seine / Hauts-de-Seine).
Il habite au 26, rue du Chemin de fer à Esbly (Seine-et-Marne) au moment de son arrestation.
Il est le fils d’Emelie Benoist, 21 ans, sans profession et de Louis Alphonse Touret, 27 ans (dont la mère habite Esbly), chauffeur, son époux, tous deux domiciliés au 15, rue Curton à Clichy.
La famille habite après sa naissance au 18, rue de Picardie à Paris 3è en 1910, puis en 1910 au 71, rue de Wattignies à Paris 12è.

L’usine à gaz d’Esbly

Le 15 septembre 1925 il est embauché à l’usine de Fusion des gaz à Esbly, comme encaisseur et releveur de compteurs.
Conscrit de la classe 1927, il obtient en Seine-et-Marne le Brevet de Préparation Militaire Elémentaire en septembre 1927, avec 370 points.
Il est appelé pour effectuer son service militaire au 106è Régiment d’infanterie à Châlons-sur-Marne. Mais il y est déclaré « réformé n° 2 » pour tuberculeuse osseuse.

Le 22 août 1931, à Torcy, André Touret épouse Lucienne Aussude,
née le 8 décembre 1907 à Torcy. Elle est employée, domiciliée au 28, rue de l’Orangerie à Torcy. Lui est employé et habite au 53, avenue Joffre à Esbly.
Le couple a deux enfants : Michelle née en 1932 à Torcy et Jean-Pierre né en 1940. Cependant sur la liste d’otages de 1941, André Touret est indiqué « geschieden » (divorcé), et 1 (enfant). Toutefois, ni sur son acte de naissance, ni sur celui de son épouse n’est indiquée une quelconque mention de divorce.

Le 14 juin, les troupes allemandes sont à Meaux ; le 15 juin à Brie-Comte-Robert et à Melun. Le dimanche 16 juin 1940, des éléments motorisés de la Werhmacht franchissent la Seine à Valvins sur un pont de bateaux. Ils traversent Avon avant d’entrer dans Fontainebleau, précédant le gros des troupes. .Le 14 juin, l’armée allemande était entrée par la Porte de la Villette dans Paris, vidée des deux tiers de sa population. La ville cessant d’être la capitale du pays et devenant le siège du commandement militaire allemand en France. Les troupes allemandes occupent toute la banlieue parisienne et les départements voisins les jours suivants.  Le 22 juin, l’armistice est signé. Le 10 juillet 1940 le maréchal Pétain, investi des pleins pouvoirs par l’Assemblée nationale, abolit la République et s’octroie le lendemain le titre de « chef de l’Etat français ». Il lance la « révolution nationale » en rupture avec nombre de principes républicains (confusion des pouvoirs législatifs et exécutifs ; rejet du multipartisme, suppression des syndicats et du droit de grève, antisémitisme d’état…).

Dès le début de l’Occupation, il est connu des services de Police qui ont transmis leurs informations au RSHA.
Le nom d’André Touret figure sur la liste d’otages préparée le 25 août 1941. Cette liste datée du 25 août 1941 émane du RSHA (Reichssicherheitshauptamt, « Office central de la sécurité du Reich », In document XLIV- 59-60, Saint Germain 24 décembre 1941). On y trouve la mention : « fonctionnaire communiste » (pour les allemands, le terme fonctionnaire désigne un membre influent, un cadre communiste, et pas nécessairement un militant appointé par le Parti).

André Touret est arrêté à Esbly le 20 octobre 1941,
avec 5 autres militants, dont Modeste Douchet, André Bichot, et Marcel Vincent qui seront comme lui déportés à Auschwitz. Leurs quatre noms figuraient sur la liste d’otages préparée le 25 août 1941 (In document XLIV- 59-60) Saint Germain 24 décembre 1941). Les renseignements généraux, dans une note blanche concernant le cheminot Bichot d’Esbly « note blanche » non signée, non datée) et rapportant son appartenance présumée au Parti fait état d’une liste conservée à la brigade de gendarmerie d’Esbly « communiquée d’ailleurs à monsieur le commissaire de police spécial à Melun, quelques jours avant les propositions d’internement. Il en a été de même pour les trois autres militants sur le compte desquels sont établis les mêmes rapports ».
De nombreux élus ou militants communistes du département sont ainsi arrêtés les 19 et 20 octobre. Parmi eux, 42 seront déportés à Auschwitz.
Lire dans le site : la rafle des communistes en Seine-et-Marne, octobre 1941.

Dans l’enquête des services de la préfecture faite en 1942 à la suite de la demande de libération effectuée par l’épouse d’André Bichot, des éléments du rapport concernent celui-ci « le prénommé (Bichot) était connu pour avoir des idées très avancées et avoir adhéré au parti communiste (…) il était noté comme tel sur la liste conservée à la Brigade de Gendarmerie d’Esbly, communiquée d’ailleurs à monsieur le commissaire de police spéciale à Melun avant les propositions d’internement. Il en a été de même pour les trois autres militants (dont André Touret) sur le compte desquels sont établis les présents rapports ».
André Touret et ses camarades d’Esbly sont transférés par car au camp de Royallieu à Compiègne (Frontstalag 122), le 20 octobre 1941. A Compiègne il reçoit le matricule 1790 et est affecté à la baraque A3.
Depuis ce camp administré par la Wehrmacht, il va être déporté à destination d’Auschwitz. Pour comprendre la politique de l’Occupant qui mène à sa déportation, on lira les deux articles du site qui exposent les raisons des internements, des fusillades et de la déportation : La politique allemande des otages (août 1941-octobre 1942) et «une déportation d’otages».

Depuis le camp de Compiègne André Touret est déporté à Auschwitz dans le convoi du 6 juillet 1942.

Cf Article du site : Les wagons de la Déportation. 

Ce convoi est composé au départ de Compiègne, de 1175 hommes (1100 « otages communistes » – jeunes communistes, anciens responsables politiques et élus du Parti communiste, syndicalistes de la CGT et délégués du personnel d’avant-guerre, militants et syndicalistes clandestins, résistants – de cinquante  « otages juifs » et de quelques « droits communs »). Il faisait partie des mesures de terreur allemandes destinées à combattre, en France, les judéo-bolcheviks responsables, aux yeux de Hitler, des actions armées organisées par le parti communiste clandestin contre des officiers et des soldats de la Wehrmacht, à partir d’août 1941.
Lire dans le site le récit des deux jours du transport : Compiègne-Auschwitz : 6-8 juillet 1942.
Sur les 1175 otages partis de Compiègne le 6 juillet 1942, 1170 sont présents à l’arrivée du train en gare d’Auschwitz le 8 juillet 1942.
Ces derniers sont enregistrés et photographiés au Stammlager d’Auschwitz (camp souche ou camp principal, dénommé en 1943 Auschwitz-I) entre les numéros « 45 157 » et « 46 326 », d’où le nom de « convoi des 45 000 », sous lequel les déportés du camp désignaient ce convoi. Ce matricule – qu’il doit apprendre à dire en allemand et en polonais à toute demande des Kapos et des SS – sera désormais sa seule identité.
Lire dans le site : Le KL Auschwitz-Birkenau.

Son numéro d’immatriculation à Auschwitz n’est pas connu. Le numéro « 46252 ? »  figurant dans mes deux premiers ouvrages sur le convoi du 6 juillet 1942 correspondait à ma tentative de reconstitution de la liste du convoi par matricules. Ce numéro, quoique plausible, ne saurait être considéré comme sûr en raison de l’existence des quatre listes alphabétiques successives que j’ai reconstituées, de la persistance de lacunes pour quatre noms, mais d’incertitudes sur plusieurs centaines de numéros matricules. Il ne figure plus dans mon ouvrage Triangles rouges à Auschwitz.

André Touret meurt à Auschwitz le 20 octobre 1942 d’après son certificat de décès établi au camp pour le registre d’état civil de la municipalité d’Auschwitz; in Death Books from Auschwitz, Tome 3, page 1253).

A l’état civil de Clichy, son acte de naissance porte une date de décès erronée : le 30 avril 1947 à Esbly ! Et l’acte de décès établi en France à la Libération porte toujours la mention « décédé le 1er août 1942, à Auschwitz (Allemagne)». Il est regrettable que le ministère n’ait pas corrigé cette date, à l’occasion de l’inscription de la mention « mort en déportation » sur son acte de décès (Journal officiel du 3 janvier 2001), ceci étant rendu possible depuis la parution de l’ouvrage publié par les historiens polonais du Musée d’Auschwitz en 1995.
Lire dans le site Les dates de décès à Auschwitz

Sources

  • Division des archives des Victimes des conflits contemporains (DAVCC), Ministère de la Défense, Caen (fiche individuelle consulté en 1992).
  • « La Résistance en Seine et Marne« , Claude Cherrier et René Roy, (Presses du Village).
  • Death Books from Auschwitz, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, 1995 (basé essentiellement sur les registres – incomplets – de l’état civil de la ville d’Auschwitz ayant enregistré, entre le 27 juillet 1941 et le 31 décembre 1943, le décès des détenus immatriculés).
  • Actes de naissance 1907 à Clichy et Torcy.
  • Acte de mariage à Torcy.
  • Recensement de 1936 à Esbly.
  • Archives départementales de Seine-et-Marne, Dammarie-les-Lys, cabinet du préfet.

Notice biographique installée en 2011, complétée en 2017 et 2022 par Claudine Cardon-Hamet (docteur en Histoire, auteur des ouvrages : Mille otages pour Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 dit des « 45000 », éditions Graphein, Paris 1997 et 2000 (épuisé) et de Triangles rouges à Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 dit des « 45000 », éditions Autrement, Paris 2005).  Prière de mentionner ces références (auteur et coordonnées de ce site) en cas de reproduction ou d’utilisation totale ou partielle de cette notice biographique.
Pour la compléter ou la corriger, vous pouvez me faire un courriel à deportes.politiques.auschwitz@gmail.com 

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