Matricule « 45 309 » à Auschwitz

Victor Budin : né en 1903 à Vierzon-Village (Cher) ; domicilié à Romorantin-Lanthenay (Loir-et-Cher) ; plâtrier ; arrêté le 1er mai 1942 comme otage communiste ; interné à Compiègne ; déporté le 6 juillet 1942 à Auschwitz, où il meurt le 18 août 1942.

Victor Budin est né le 25 septembre 1903, rue ou cours Donneaux à Vierzon-Village (Cher).
Il habite au lieu-dit Le Liérreux, un des 56 lieux-dits de Romorantin-Lanthenay (Loir-et-Cher) au moment de son arrestation.
Victor Budin est le fils naturel de Modeste, Céleste Budin, 36 ans, célibataire, journalière puis domestique.
Il est le cadet d’une fratrie de 4 enfants : Georgette (1887-1960), Alexandre (1889-1894) et Victoria (1902-1970).
Il est plâtrier, puis ouvrier agricole.
Selon la presse locale, il semble avoir eu quelques condamnations pour des délits liés au braconnage et violences à Vierzon et une interdiction de séjour dans le Cher. En 1931, il habite au Vilonniers, commune de Theillay (Loir-et-Cher).
En 1939 il est condamné par défaut pour « délit de chasse ».

la Wehrmacht défile à Blois

Le 14 juin 1940, la Wehrmacht défile à Paris, sur les Champs-Élysées. La ville cesse alors d’être la capitale du pays et devient le siège du commandement militaire allemand en France. la moitié nord de la France et toute la façade ouest sont occupées. Les 15 et 16 juin 1940, bombardements allemands sur Montrichard, Blois et Vendôme. Les troupes allemandes entrent dans Romorantin le 19 juin 1940.
Le 22 juin, l’armistice est signé : la moitié nord de la France et toute la façade ouest sont occupées. Le pays est coupé en deux par la « ligne de démarcation » qui sépare la zone occupée et celle administrée par Vichy. Le 1er juillet, elle passe par le département du Loir-et-Cher en suivant le cours du Cher, de Châtres jusqu’à Chissay (à l’exception de Selles-sur-Cher qui demeure en zone occupée). Le 10 juillet 1940 Pétain, investi des pleins pouvoirs par l’Assemblée nationale, s’octroie le lendemain le titre de « chef de l’Etat français ». Il lance la « révolution nationale » en rupture avec nombre de principes républicains (confusion des pouvoirs législatifs et exécutifs ; rejet du multipartisme, suppression des syndicats et du droit de grève, antisémitisme d’état…). Les Romorantinais subissent de plein fouet la sévérité de l’appareil répressif d’Occupation (Hélène Leclert in forum 3945, © « Romorantin une ville à l’heure allemande« .

Victor Budin est arrêté à Romorantin le 1er mai 1942. Cette arrestation s’inscrit dans la rafle des 1er et 2 mai 1942 qui concerne 140 communistes ou présumés tels (dont certains avaient déjà été arrêtés lui en 1940 ou 1941) dans 3 départements (Cher, Loir-et-Cher, Loiret). Ce qui signifie qu’il est considéré par la Préfecture du Cher comme un ex-militant ou sympathisant communiste, ou syndicaliste connu de ses services.
Lire l’article : Romorantin le 1er mai 1942 : un Feldgendarme est tué, un autre blessé. Arrestations, exécutions et déportations.
13 romorantinais sont arrêtés. Six d’entre eux seront déportés à Auschwitz : Moïse Bodin,  Victor Budin, Gustave Crochet, Octave Hervaux, Edouard Roguet, Daniel Pesson.

Les autorités allemandes internent Victor Budin et ses camarades au camp allemand de Royallieu à Compiègne (le Frontstalag 122), probablement le 9 mai 1942, en vue de leur déportation comme otage.
Depuis ce camp administré par la Wehrmacht, il va être déporté à destination d’Auschwitz. Pour comprendre la politique de l’Occupant qui mène à sa déportation, on lira les deux articles du site qui exposent les raisons des internements, des fusillades et de la déportation : La politique allemande des otages (août 1941-octobre 1942) et «une déportation d’otages».

Depuis le camp de Compiègne, Victor Budin est déporté à Auschwitz dans le convoi du 6 juillet 1942

Cf l’article du site : Les wagons de la Déportation. 

Ce convoi est composé au départ de Compiègne, de 1175 hommes (1100 « otages communistes » – jeunes communistes, anciens responsables politiques et élus du Parti communiste, syndicalistes de la CGT et délégués du personnel d’avant-guerre, militants et syndicalistes clandestins, résistants – de cinquante « otages juifs » et de quelques « droits communs »). Il faisait partie des mesures de terreur allemandes destinées à combattre, en France, les judéo-bolcheviks, responsables aux yeux de Hitler, des actions armées organisées par le Parti communiste clandestin contre des officiers et des soldats de la Wehrmacht, à partir d’août 1941.
Lire dans le site le récit des deux jours du transport : Compiègne-Auschwitz : 6-8 juillet 1942.
Sur les 1175 otages partis de Compiègne le 6 juillet 1942, 1170 sont présents à l’arrivée du train en gare d’Auschwitz le 8 juillet 1942. Ces derniers sont enregistrés et photographiés au Stammlager d’Auschwitz (camp souche ou camp principal, dénommé en 1943 Auschwitz-I) entre les numéros « 45 157 » et « 46 326 », d’où le nom de « convoi des 45 000 », sous lequel les déportés du camp désignaient ce convoi. Ce matricule – qu’il doit apprendre à dire en allemand et en polonais à toute demande des Kapos et des SS – sera désormais sa seule identité.
Lire dans le site : Le KL Auschwitz-Birkenau.

Il est enregistré à son arrivée à Auschwitz le 8 juillet 1942 sous le numéro « 45 309 ».

Sa photo d’immatriculation à Auschwitz n’a pas été retrouvée parmi celles que des membres de la Résistance intérieure du camp avaient camouflées pour les sauver de la destruction, ordonnée par les SS peu de temps avant l’évacuation d’Auschwitz.

Lire dans le site le récit de leur premier jour à Auschwitz : L’arrivée au camp principal, 8 juillet 1942. et 8 juillet 1942 : Tonte, désinfection, paquetage, « visite médicale ».
Après l’enregistrement, il passe la nuit au Block 13 (les 1170 déportés du convoi y sont entassés dans deux pièces). Le 9 juillet tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau (Brzezinka), situé à 4 km du camp principal. Le 13 juillet il est interrogé sur sa profession. Les spécialistes dont les SS ont besoin pour leurs ateliers sont sélectionnés et vont retourner à Auschwitz I (approximativement la moitié du convoi. Les autres, restent à Birkenau, employés au terrassement et à la construction des Blocks.
Aucun des documents sauvés de la destruction ordonnée par les SS peu de temps avant l’évacuation d’Auschwitz, ne nous permet de savoir dans quel camp il est affecté à cette date

Victor Budin meurt à Auschwitz le 18 août 1942 (date inscrite dans les registres du camp et transcrite à l’état civil d’Auschwitz ; in Death Books from Auschwitz, Tome 2, page 145, et liste officielle n°3 du Ministère de la Défense).
Lire dans le site : 80 % des « 45 000 » meurent dans les six premiers mois
Lire également :  Les dates de décès à Auschwitz.

Selon les images publiées sur le site bénévole Mémorial Genweb, son nom ne semble pas avoir été inscrit sur le monument commémoratif de Romorantin, contrairement à celui de ses cinq camarades romorantinais déportés avec lui (confirmation par M. Julien Charbonnier).
M. Julien Charbonnier, descendant de la famille Budin, a engagé des démarches auprès de l’ONACVG afin que la mention « mort pour la France » soit portée sur son acte de décès.
Sa demande a été enregistrée en septembre 2018 sous le n° 12941.

Sources

  • Mairie de Romorantin. Communications de Mme Valin (fiches de dénombrement des Internés et Déportés, service des Statistiques) et de Mme Vally, archiviste (1990).
  • Etat civil de Vierzon.
  • « La Résistance dans le Loir-et-Cher « , Op. édité par l’ANACR en 1964.
  • Liste établie en 1977 par le président de l’ADIRP du Loir et Cher, Georges Larcade, et communiquée à la commission d’histoire de la FNDIRP.
  • Death Books from Auschwitz, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, 1995 (basé essentiellement sur les registres – incomplets – de l’état civil de la ville d’Auschwitz ayant enregistré, entre le 27 juillet 1941 et le 31 décembre 1943, le décès des détenus immatriculés).
  • Bureau de la division pu pôle des archives des victimes des conflits contemporains (DAVCC), Ministère de la Défense, Caen (fiche individuelle consultée en février 1992).
  • Liste (incomplète) par matricule du convoi du 6 juillet 1942 établie en 1974 par les historiens du Musée d’Etat d’Auschwitz-Birkenau indiquant généralement la date de décès au camp (Bureau des archives des victimes des conflits contemporains (BAVCC), Ministère de la Défense, Caen).
  • © Site www.mortsdanslescamps.com
  • Archives en ligne du Cher, état civil de Vierzon Village

Notice biographique rédigée en février 2011, complétée en 2017, 2018, 2021 et 2024, par Claudine Cardon-Hamet, docteur en Histoire, auteur des ouvrages : « Triangles rouges à Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 » Editions Autrement, 2005 Paris et de « Mille otages pour Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 dit des « 45000 » », éditions Graphein, Paris 1997 et 2000 (épuisé). Prière de mentionner ces références (auteur et coordonnées de ce site) en cas de reproduction ou d’utilisation totale ou partielle de cette notice biographique.
Pour la compléter ou la corriger, vous pouvez me faire un courriel à deportes.politiques.auschwitz@gmail.com

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