Jean Even © famille

Matricule « 45.524 » à Auschwitz

Jean Even le 8 juillet 1942 à Auschwitz
Jean Even : né en 1919 à Queven (Morbihan) ; domicilié à Gisors (Eure) ; typographe ; communiste ; arrêté le 23 octobre 1941 ; interné à Compiègne ; déporté le 6 juillet 1942 à Auschwitz, où il meurt 19 septembre 1942.

Jean, François, Marie Even est né le 22 août 1919 à Queven (Morbihan).  Il habite chez son père et sa belle-mère au 7, rue de Flavacourt à Gisors (Eure) au moment de son arrestation.
Il est le fils de Jeanne Hellou, 28 ans et de Jean, Louis Even, 28 ans, cultivateur, puis employé des Chemins de Fer.
Son père, cheminot (chef de train) est communiste. Il s’est remarié en 1925 à Férrières-en-Bray (Seine-Inférieure) avec Marthe, Germaine Perré, née le 16/09/1904 à Ménonval (Seine-Inférieure), avec laquelle il aura quatre enfants. René en 1926, Yves en 1928, Yvette en 1930, et Michel en 1933 (sur le site Géneanet on trouve mention de huit enfants). Au moment du mariage, son épouse était mère d’un garçon, André Perré, né en 1923.
En novembre 1928, la famille Even vient habiter rue de Flavecourt à Gisors.
En 1936, la famille Even (les parents et les 6 enfants) habite au 7, rue de Flavecourt, avec la belle-sœur de son père, Bernadette Perret (née en 1909 à Ménonval) et sa nièce Jacqueline Perret (née en 1928).
Jean Even travaille comme typographe à l’hebdomadaire « L’Avenir du Vexin » à Gisors, qui paraît jusqu’en 1939 (organe démocratique de la région (Eure, Oise, Seine-et-Oise, Seine-Inférieure).
Il est secrétaire des Jeunesses communistes de Gisors.
Conscrit de la dernière classe mobilisable, il est donc vraisemblablement mobilisé après la déclaration de guerre en 1939.

Du 5 au 10 juin 1940, les grandes villes de l’Eure sont bombardées par la Luftwaffe. Le 11 juin, les troupes de la Wehrmacht entrent dans Évreux. Le 15 juin tout le département de l’Eure est occupé. Le 14 juin 1940, l’armée allemande d’occupation entre dans Paris. La ville cesse alors d’être la capitale du pays et devient le siège du commandement militaire allemand en France. L’armistice est signé le 22 juin. Le 10 juillet 1940 le maréchal Pétain, investi des pleins pouvoirs par l’Assemblée nationale, s’octroie le lendemain le titre de « chef de l’Etat français ». Dès le début de l’Occupation allemande, la police de Vichy surveille les anciens élus, candidats ou militants communistes « notoires », procédé à des perquisitions et des arrestations. Vichy entend ainsi faire cesser la propagande communiste clandestine.

Après l’armistice, Jean Even ne retrouve pas de travail comme typographe et se fait alors embaucher comme «ouvrier d’usine» (selon la liste d’otage) à l’usine de la Société Carbone-Lorraine, dite “le Carbone”, devenue en 1945 Compagnie Industrielle des Piles Électriques (CIPEL) de Gisors.
Jean Even est arrêté le 23 octobre 1941 par la gendarmerie française. Il figure, avec Roger Gaudeau, un militant syndicaliste de l’Eure – arrêté le même jour et qui sera déporté comme lui à Auschwitz – sur une des listes d’otages (liste du 23 octobre 1941, CDJC XLIII-72).
Son demi-frère Yves âgé alors de 13 ans a raconté cette arrestation : « Nous habitions à la cité des Chemins de fer, à côté de la CIPEL, où il travaillait. C’est là qu’il a été arrêté (…) Nous avons su que les policiers se sont rendus à la direction de la CIPEL. Nous n’avons plus jamais eu de ses nouvelles, sauf peu de temps après sa valise et sa carte d’identité. »
Cette arrestation s’inscrit dans la rafle de militants communistes et syndicalistes qui concerne 6 département de la région militaire A (entre les 17 et 25 octobre 1941, plus d’une centaine, dont 66 d’entre eux seront déportés à Auschwitz), rafle qui fait suite à un ordre du Commandant de la région militaire A, daté du 14 octobre 1941, visant à l’arrestation de militants communistes (cet ordre est mentionné sur plusieurs fiches d’otages de «45.000»). La liste d’otages mentionne son arrestation et son incarcération à la prison d’Evreux. Jean Even est remis aux autorités allemandes à leur demande.
Celles-ci l’internent le 25 octobre 1941 au camp allemand de Royallieu à Compiègne (le Frontstalag 122). Il y reçoit le matricule « 2005 ».
Son nom figure sur la liste de recensement des jeunes communistes du camp de Compiègne «aptes à être déportés à l’Est», en application de l’avis du 14 décembre 1941 du commandant militaire en France, Otto von Stülpnagel (archives du CDJC). Depuis ce camp administré par la Wehrmacht, il va être déporté à destination d’Auschwitz. Pour comprendre la politique de l’Occupant qui mène à sa déportation, on lira les deux articles du site qui exposent les raisons des internements, des fusillades et de la déportation : La politique allemande des otages (août 1941-octobre 1942) et «une déportation d’otages».

Depuis le camp de Compiègne, JeanEven est déporté à Auschwitz dans le convoi du 6 juillet 1942.

Cf Article du site : Les wagons de la Déportation. 

Ce convoi est composé au départ de Compiègne, de 1175 hommes (1100 « otages communistes » – jeunes communistes, anciens responsables politiques et élus du Parti communiste, syndicalistes de la CGT et délégués du personnel d’avant-guerre, militants et syndicalistes clandestins, résistants – de cinquante trois « otages juifs » et de quelques « droits communs »). Il faisait partie des mesures de terreur allemandes destinées à combattre, en France, les judéo-bolcheviks responsables, aux yeux de Hitler, des actions armées organisées par le parti communiste clandestin contre des officiers et des soldats de la Wehrmacht, à partir d’août 1941. Lire dans le site le récit des deux jours du transport : Compiègne-Auschwitz : 6-8 juillet 1942. Sur les 1175 otages partis de Compiègne le 6 juillet 1942, 1170 sont présents à l’arrivée du train en gare d’Auschwitz le 8 juillet 1942. Ces derniers sont enregistrés et photographiés au Stammlager d’Auschwitz (camp souche ou camp principal, dénommé en 1943 Auschwitz-I) entre les numéros « 45157 » et « 46326 », d’où le nom de « convoi des 45000 », sous lequel les déportés du camp désignaient ce convoi. Ce matricule – qu’il doit apprendre à dire en allemand et en polonais à toute demande des Kapos et des SS – sera désormais sa seule identité. Lire dans le site : Le KL Auschwitz-Birkenau.

Certificat de décès signé par un médecin SS

Il est enregistré à son arrivée à Auschwitz le 8 juillet 1942 sous le numéro matricule 45524.

Jean Even meurt à Auschwitz le 19 septembre 1942 d’après le registre d’état civil de la municipalité d’Auschwitz (in Death Books from Auschwitz Tome 2 page 271) copie de l’acte de décès. Il a sans doute été gazé à la suite d’une vaste «sélection» interne des «inaptes au travail», opérée sans doute dans les blocks d’infirmerie, et non pas mort de l’infection d’un phlegmon comme indiqué sur l’acte de décès. En effet,148 autres «45000» ont été déclarés décédés à l’état civil d’Auschwitz les 18 et 19 septembre 1941, ainsi qu’un nombre important d’autres détenus du camp. L’arrêté ministériel du 30 juin 1989, paru au JO du 8 août 1989 a repris cette date.
Il a été déclaré « Mort pour la France« . Le titre de «Déporté politique» lui a été attribué.
A la Libération, une plaque au nom de Jean Even est apposée sur le mur de l’usine où il travaillait au moment de son arrestation.

A la fermeture de l’usine et à son démantèlement son demi-frère Yves la récupère et la dépose au cimetière.
En 1989, sous la mandature du maire communiste Marcel Larmanou, le Conseil municipal de Gisors donne le nom de Jean Even à une rue de la commune : elle est inaugurée le 29 mai. Elle est perpendiculaire au chemin de Flavacourt.
Son nom est également honoré sur le monument aux morts de la ville et sur la plaque commémorative aux morts de la guerre 1939-1945 en Mairie.

Sources

  • Témoignage de son demi-frère Yves Even. Article paru dans le magazine « A la une » de Gisors, N° 22 de juillet 1994.
  • Séance d’identification de 122 «45.000» le 30 avril 1948, par les rescapés du convoi, à partir des photos d’immatriculation de près de 500 de leurs camarades reçues de Pologne (Le Patriote Résistant N°20).
  • Death Books from Auschwitz, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, 1995 (basé essentiellement sur les registres – incomplets – de l’état civil de la ville d’Auschwitz ayant enregistré, entre le 27 juillet 1941 et le 31 décembre 1943, le décès des détenus immatriculés).
  • Fichier national de la Division des archives des victimes des conflits contemporains (DAVCC), Ministère de la Défense, Caen. Fiche individuelle consultée en 1992.
  • « Liste communiquée par M. Van de Laar, mission néerlandaise de Recherche à Paris le 29.6.1948« , établie à partir des déclarations de décès du camp d’Auschwitz. Liste V (N°31910), Liste S (N°104).
  • © Site Internet Mémorial-GenWeb
  • © Sitewww.mortsdanslescamps.com

Notice biographique rédigée en avril 2011 (complétée en 2021) par Claudine Cardon-Hamet, docteur en Histoire, auteur des ouvrages : « Triangles rouges à Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 », Editions Autrement, 2005 Paris et de «Mille otages pour Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 dit des « 45000 », éditions Graphein, Paris 1997 et 2000 (épuisé). Prière de mentionner ces références (auteur et coordonnées de ce blog) en cas de reproduction ou d’utilisation totale ou partielle de cette biographie.

Pour compléter ou corriger cette biographie, vous pouvez me faire un courriel à deportes.politiques.auschwitz@gmail.com 

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