René Maquenhen, "45.826" rescapé, affecté dans un kommando surnommé écrit-il «kommando de la mort» par les déportés d’Auschwitz, témoigne d’une scène révoltante qu'il décrit longuement...
«Je dois révéler un fait parmi tant d’autres, dans ce terrible commando. Un jour, un des SS qui nous gardaient, assis sur une motte de terre, le fusil braqué sur nous et son chien couché à ses pieds, prit à partie un Juif. Il avait tout l’air d’un tigre qui guettait sa proie, la figure remplie de cicatrices et le regard bestial : – « Que faisais-tu dans le civil? » – Je suis tailleur – Tu roulais en auto sans doute ? Et tu avais la bonne vie ? Eh bien, lui dit le bourreau, tu es fait pour travailler et tu dois aller plus vite. (…) Le Juif reprit sa brouette. Cinq minutes après, le SS le rappelait et lui dit : – Si tu ne vas pas plus vite, je vais te choisir une mort lente qui te donnera le temps de réfléchir avant d’être transformé en fumée ». Le Juif reprit son travail, après avoir reçu un coup de pied dans le ventre. Un instant plus tard, on vit le SS debout en train de hurler.
Il commanda à son chien d’aller mordre les mollets du pauvre homme. Et comme le chien ne partait pas assez vite, pris de colère, il lança un formidable coup de pied dans le ventre du chien. Celui-ci se mit à tourner autour de son maître en hurlant de douleur et vomit sa soupe du matin. Le SS appela le Juif en criant : – « Bande de misérables, si mon chien crève, je vous tuerai tous et toi, tu vas me le payer. Si tu veux vivre, tu vas commencer par lécher ce que le chien a laissé aller ». Harcelé de coups de poing et de pieds, le Juif se décida à lécher la vomissure du chien. Le SS en prit un plaisir manifeste, puis lui dit : « Maintenant, tu es libre, tu vas t’en aller ». Le Juif est parti mais à cent mètres du kommando, il y avait une rangée de miradors. En voyant s’éloigner un déporté, des gardes tirèrent et c’est à la sixième ou septième balle qu’il fut atteint. Il baigna dans son sang tout le reste de l’après-midi et le soir, il fut ramené au camp. Il n’était pas mort. Il fut ramassé, encore vivant, avec les morts de la journée pour passer au four crématoire ».
Au bout d’un mois passé dans ce Kommando, René Maquenhen est persuadé qu’il n’y survivra pas. Il prend alors le risque de changer, sans nouvelle affectation de l’administration du camp, de Kommando et de Block.
Source
- Cahier de souvenirs de René Maquenhen, que m’a confié sa fille, madame Renée Grosjean (4 novembre 1987).
- Photo : un SS lance ses chiens sur un déporté Juif. In Mémorial de la Shoah.
Quel acharnement, quelle cruauté.
Quelle barbarie.
Encore une fois, l’indicible, l’inimaginable.
Tout ceci s’est passé, et beaucoup (complices), ont fermé les yeux.
Révoltant et répugnant.
Beurk.
A vomir.