Maurice Hayot à Auschwitz

Matricule « 45 655 » à Auschwitz

Maurice Hayot : né en 1901 à Dissey-sous-Courcillon (Sarthe) ; domicilié à Chambray-lès-Tours (Indre-et-Loire) ; forgeron ; communiste : arrêté le 10 février 1942 comme otage communiste ; interné à Compiègne ; déporté le 6 juillet 1942 à Auschwitz, où il meurt le 20 mai 1943.

Maurice Hayot est né le 14 juillet 1901 à Dissey-sous-Courcillon (Sarthe).
Il habite à Chambray-lès-Tours (Indre-et-Loire) au moment de son arrestation.
Il est le fils de Marie, Charlotte Cuvier, couturière et de Louis, François Hayot, forgeron, son époux.
Son registre matricule militaire indique qu’il habite l’Ile-Bouchard (Indre-et-Loire) et qu’il est forgeron au moment du conseil de révision. Ses parents habitent alors au 6, rue des Casernes à Tours.
Il mesure 1m 70, et il a un niveau d’instruction « n°3 » pour l’armée (sait lire, écrire et compter, instruction primaire développée). Conscrit de la classe 1921, il est incorporé le 5 avril de cette année au 2è dépôt des équipages de la Flotte à Brest. Il est « en mer » pendant 13 mois et 12 jours et « à terre » 10 mois et 1 jour. Il est libéré du service militaire le 27 avril 1923 au 3è dépôt des équipages de la Flotte à Lorient, « certificat de bonne conduite accordé » et placé dans la Réserve de la Marine.
Le 11 janvier 1924, il habite au 11, rue Lavoisier à Tours.

Le 6 février 1932, à Ciron
(Vienne), il épouse Yvonne, Désirée, Suzanne Cotinat, employée municipale. Elle est née dans cette commune le 10 juin 1906.
Le couple a trois enfants (Claude, né le 23 décembre 1932, Guy, né le 6 avril 1937 et Jacqueline, née le 14
juin 1940). La famille Hayot habite au 54, rue Jeanne d’Arc à Sainte-Radegonde-en-Touraine (devenue un quartier de Tours). Le frère d’Yvonne Hatoy, Larcel Catinat habite au n° 52 avec son épouse Reine et leurs trois filles.
Le 25 juillet 1936, la famille vient habiter « à la Madeleine » à Chambray-lès-Tours.
Chaudronnier, Maurice Hayot est chef forgeron aux établissements Biemont à La Riche dans les faubourgs de Tours (spécialisés en chaudronnerie lourde).

La poudrerie nationale à Monts

En février 1938, la famille a déménagé à Monts : Maurice Hayot travaille alors à la Poudrerie nationale du Ripault, implantée à Monts près de Tours, limitrophe de Chambray.
En mars 1939, il est classé « affecté spécial » par l’armée en tant qu’employé à la Poudrerie. Il est mobilisé sur son poste de travail pendant la durée de la guerre.

Entre le 10 et le 13 juin 1940, Tours est la capitale provisoire de la République.
Le 14 juin 1940, l’armée allemande d’occupation entre dans Paris. La ville cesse alors d’être la capitale du pays et devient le siège du commandement militaire allemand en France. Une partie du centre de la Tours est totalement détruite par des obus incendiaires allemands les 20 et 22 juin. La Wehrmacht entre dans Tours le 21 juin 1940. Le 10 juillet 1940 Pétain, investi des pleins pouvoirs par l’Assemblée nationale, s’octroie le lendemain le titre de « chef de l’Etat français ». Il lance la « révolution nationale » en rupture avec nombre de principes républicains (confusion des pouvoirs législatifs et exécutifs ; rejet du multipartisme, suppression des syndicats et du droit de grève, antisémitisme d’état…). L’Indre-et-Loire fait partie des 13 départements dont le territoire est partagé par une « ligne de démarcation », en deux zones : une zone occupée par les Allemands et une zone « non occupée » dite libre, sous l’autorité du régime de Vichy. Dès juillet 1940, un commandement militaire est installé en Indre-et-Loire.

Maurice Hayot travaille à la Poudrerie jusqu’en 1940 (son épouse écrit : «mon mari a demandé un congé illimité, car il refusait de travailler pour les Allemands».
Ils habitent alors au lieu-dit La petite Gignardière à Chambray-lès-Tours.
Militant communiste, il agit au sein du Parti clandestin : tracts, inscriptions, sabotage de voies ferrées.

Maurice Hayot est arrêté dans la nuit du 9 au 10 février 1942
à son domicile par la police allemande, en représailles à la mort d’une sentinelle allemande, rue du Hallebardier à Tours.
Lire dans le site :   37- Indre et Loire L’attentat de la rue du Hallebardier à Tours  (janvier1942)

50 otages sont désignés (40 Juifs et 10 communistes). A Fontevraud, le 22 février, 6 communistes sont exécutés en représailles.
A Tours, les otages communistes sont enfermés à la caserne du 501ème RCC au champ de Mars. Ils sont dirigés le 17 ou le 18 avril 1942 vers le camp allemand de Royallieu à Compiègne (le Frontstalag 122) en vue de leur déportation comme otages.
Depuis ce camp administré par la Wehrmacht, il va être déporté à destination d’Auschwitz. Pour comprendre la politique de l’Occupant qui mène à sa déportation, on lira les deux articles du site qui exposent les raisons des internements, des fusillades et de la déportation : La politique allemande des otages (août 1941-octobre 1942) et «une déportation d’otages».

Depuis le camp de Compiègne, Maurice Hayot est déporté à Auschwitz dans le convoi du 6 juillet 1942.

Cf Article du site : Les wagons de la Déportation. 

Ce convoi est composé au départ de Compiègne, de 1175 hommes (1100 « otages communistes » – jeunes communistes, anciens responsables politiques et élus du Parti communiste, syndicalistes de la CGT et délégués du personnel d’avant-guerre, militants et syndicalistes clandestins, résistants – de cinquante « otages juifs » et de quelques « droits communs »). Il faisait partie des mesures de terreur allemandes destinées à combattre, en France, les judéo-bolcheviks, responsables aux yeux de Hitler, des actions armées organisées par le Parti communiste clandestin contre des officiers et des soldats de la Wehrmacht, à partir d’août 1941.
Lire dans le site le récit des deux jours du transport : Compiègne-Auschwitz : 6-8 juillet 1942.
Sur les 1175 otages partis de Compiègne le 6 juillet 1942, 1170 sont présents à l’arrivée du train en gare d’Auschwitz le 8 juillet 1942. Ces derniers sont enregistrés et photographiés au Stammlager d’Auschwitz (camp souche ou camp principal, dénommé en 1943 Auschwitz-I) entre les numéros « 45 157 » et « 46 326 », d’où le nom de « convoi des 45 000 », sous lequel les déportés du camp désignaient ce convoi. Ce matricule – qu’il doit apprendre à dire en allemand et en polonais à toute demande des Kapos et des SS – sera désormais sa seule identité.
Lire dans le site : Le KL Auschwitz-Birkenau.

Maurice Hayot le 8 juillet 1942

Il est enregistré à son arrivée à Auschwitz le 8 juillet 1942 sous le numéro « 45 655 ».

Sa photo d’immatriculation (1) à Auschwitz a été retrouvée parmi celles que des membres de la Résistance intérieure du camp avaient camouflées pour les sauver de la destruction, ordonnée par les SS peu de temps avant l’évacuation d’Auschwitz.

Lire dans le site le récit de leur premier jour à Auschwitz : L’arrivée au camp principal, 8 juillet 1942. et 8 juillet 1942 : Tonte, désinfection, paquetage, « visite médicale ».
Après l’enregistrement, il passe la nuit au Block 13 (les 1170 déportés du convoi y sont entassés dans deux pièces). Le 9 juillet tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau (Brzezinka), situé à 4 km du camp principal. Le 13 juillet il est interrogé sur sa profession.
Les spécialistes dont les SS ont besoin pour leurs ateliers sont sélectionnés et vont retourner à Auschwitz I (approximativement la moitié du convoi. Les autres, restent à Birkenau, employés au terrassement et à la construction des Blocks.

Aucun des documents sauvés de la destruction ordonnée par les SS peu de temps avant l’évacuation d’Auschwitz, ne nous permet de savoir de façon certaine dans quel camp il est affecté à cette date. Mais compte tenu de son métier de forgeron, il a vraisemblablement été affecté au Kommando de la Forge à Auschwitz I (ce qui expliquerait une date de décès plus tardive que celle des autres « 45 000 »).

Maurice Hayot meurt à Auschwitz le 20 mai 1943 selon la liste (incomplète) par matricule du convoi du 6 juillet 1942 établie en 1974 par les historiens du Musée d’Etat d’Auschwitz-Birkenau indiquant la date de décès au camp. Son état civil que n’a pas corrigé l’arrêté du 6 mai 1994 publié au J.O. du 21 juin 1994 portant apposition de la mention « mort en déportation » porte toujours une date erronée « décédé le 26 avril 1943 à Auschwitz (Pologne) ».

la « Voix du Peuple » du 19 mai 1945

Il a été déclaré « Mort pour la France ». Il est homologué au titre de la résistance intérieure française.
Dans la « Voix du Peuple » du 19 mai 1945 qui rend hommage aux 9 déportés d’Indre et Loire, Jean Mazein le père de Jacques Mazein signe un appel à « venger nos morts», où il dénonce l’indulgence à l’égard de Pétain, maréchal Félon, « qui doit être jugé par un tribunal du peuple et mourir comme un traître sous les balles d’un peloton d’exécution ».
Le site internet du PCF de Touraine honore sa mémoire.

  • Note 1 : 522 photos d’immatriculation des « 45 000 » à Auschwitz ont été retrouvées parmi celles que des membres de la Résistance intérieure du camp avaient camouflées pour les sauver de la destruction, ordonnée par les SS peu de temps avant l’évacuation du camp d’Auschwitz. A la Libération elles ont été conservées dans les archives du musée d’Etat d’Auschwitz-Birkenau. Des tirages de ces photos ont été remis par Kazimierz Smolen (ancien détenu dans les bureaux du camp d’Auschwitz, puis devenu après-guerre directeur du Musée d’Etat d’Auschwitz-Birkenau) à André Montagne, alors vice-président de l’Amicale d’Auschwitz, qui me les a confiés.

Sources

  • Journaux locaux 1942 et 1945 (sources Robert Guérineau).
  • Enquêtes de Robert Guerineau (1980) et Jean-Claude Guillon, (bibliothécaire retraité,
    membre de l’Institut CGT d’histoire sociale en région centre, collaborateur du
    Maitron), fils de Jean Guillon, membre du « triangle » de direction du PC pour l’Indre-et-Loire, condamné à mort par contumace, arrêté sous un faux nom et déporté à Mauthausen. Rescapé, il fut député en 1945.
  • « L’Indre et Loire sous l’occupation allemande » de Robert Vivier (Inspecteur d’Académie en 1942, Préfet à la Libération, correspondant du comité d’Histoire de la IIème guerre mondiale), liste des otages juifs.
  • Courriers de Roger Prévost, (déporté résistant, ancien de Sachsenhausen, de l’ADIRP d’Indre-et-Loire (1981 et 1991, 1993) – Journaux locaux 1942 et 1945 (sources Robert Guérineau).
  • Acte de naissance portant mention « Mort pour la France ».
  • Lettre de sa veuve Madame Yvonne Hayot (1981).
  • Listes – incomplètes – du convoi établies par la FNDIRP après la guerre (archives de la F.N.D.I.R.P).
  • Fichier national de la Division des Archives des Victimes des Conflits Contemporains (DAVCC), Ministère de la Défense, Caen (dossier individuel consulté en juillet 1992).
  • Liste (incomplète) par matricule du convoi du 6 juillet 1942 établie en 1974 par les historiens du Musée d’Etat d’Auschwitz-Birkenau (Bureau des archives des victimes des conflits contemporains (Ministère de la Défense, Caen) indiquant généralement la date de décès au camp.
  • AD de la Vienne, acte de naissance de son épouse.
  • Registres matricules militaires.

Notice biographique rédigée en 2010 (complétée en 2016, 2021 et 2024) par Claudine Cardon-Hamet, docteur en Histoire, auteur des ouvrages : « Triangles rouges à Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 », Editions Autrement, 2005 Paris et de «Mille otages pour Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 dit des « 45000 », éditions Graphein, Paris 1997 et 2000 (épuisé). Prière de mentionner ces références (auteur et coordonnées de ce site) en cas de reproduction ou d’utilisation totale ou partielle de cette notice.
Pour la compléter ou la corriger, vous pouvez me faire un courriel à deportes.politiques.auschwitz@gmail.com  

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