Haï-King Wang : né en 1900 à Pi-Yuan, Ho Nan (Chine) ; domicilié à Paris 6ème ; étudiant ; arrêté le 28 février 1942 comme otage ; interné à Compiègne ; déporté le 6 juillet 1942 à Auschwitz où il meurt le 2 novembre 1942.
Haï-King Wang est né le 8 août 1900 à Pi-Yuan, Ho Nan (Chine). Haï-King Wang habite au 22, rue Saint Sulpice dans le 6ème arrondissement de Paris au moment de son arrestation.
Sa mère Houang Wang et son mari Si Fan Wang, habitent en 1942 la ville de Che-Kia-Tchouang
(Shiazhuang) (1).
Haï-King Wang est étudiant à l’Institut des Hautes-études chinoises (vitrine culturelle créée et largement financée par la jeune République de Chine en 1927 sous l’égide de la Sorbonne). Le logement de Haï-King Wang est proche de la Sorbonne.
D’après le DAVCC, il est un militant antifasciste connu des services des Renseignements Généraux. Comme beaucoup de chinois, il semble être venu en France avec le mouvement Travail-Études (2).
Il est surveillé par la Sureté française en raison d’« agissements suspects ».
Il est en effet secrétaire du « Cercle d’études chinois ». Le 11 avril 1937, il préside la réunion tenue pour le « Salut national chinois », quelque trois mois avant l’invasion japonaise de juillet.
Il participe aux réunions de l’association française « Les Amis du peuple chinois », (« groupement à tendance communiste », selon les Renseignements généraux), dont le siège est au 1, rue de Clichy (elle est dissoute fin 1939, dans le cadre de la dissolution des organisations communistes). Le 12 juillet 1938, il accompagne son compatriote Chu Hsueh Fan, délégué des syndicats chinois auprès du BIT (Bureau international du Travail), lors de la réception de ce dernier au siège de L’Humanité.
Militant antifasciste, Wang Hiai King est mentionné dans l’ouvrage de Denis Péchanski sur les carnets de Marcel Cachin : Carnets, tome IV, p. 36 : « Le Comité (international de lutte contre le fascisme et la guerre) fut à l’origine d’une grande « conférence internationale pour la défense de la démocratie et de la personne humaine ». Plus de 800 délégués se retrouvèrent ainsi à Paris, les 13 et 14 mai, dont Julien Benda, Aragon, Prenant, Paul-Boncour, Nehru, Guglielmo Ferrero ou Marius Moutet. Il s’agissait alors, comme pour le RUP (Rassemblement Universel pour la Paix), d’en appeler à un accord entre « les grandes puissances démocratiques : Angleterre, France, Etats-Unis, URSS ». Cachin présida la 4ème commission débattant de « l’aide efficace aux peuples victimes d’agression », assisté de Le Munster Latinis et d’Isabel Brown ; orateurs : Isabel Brown, Madeleine Braun, Wang Hiai King et Yu Tchen-Pong (fonds Cachin de la Bibliothèque marxiste de Paris [BMP], boîte 18, dossier 2).
Le 14 juin 1940, les troupes de la Wehrmacht entrent dans Paris, vidée des deux tiers de sa population. La ville cesse d’être la capitale du pays et devient le siège du commandement militaire allemand en France. Le 22 juin, l’armistice est signé. Le 10 juillet 1940 le maréchal Pétain, investi des pleins pouvoirs par l’Assemblée nationale, s’octroie le lendemain le titre de « chef de l’Etat français » et lance la « révolution nationale » en rupture avec nombre de principes républicains (confusion des pouvoirs législatifs et exécutifs ; rejet du multipartisme, suppression des syndicats et du droit de grève, antisémitisme d’état…)
Pendant l’Occupation, Haï-King Wang est surveillé par la police (la troisième section de la Brigade Spéciale des Renseignements généraux croise renseignements et actions dans la surveillance des étrangers).
Haï-King Wang est arrêté le 28 avril 1942, très vraisemblablement comme otage communiste, lors d’une rafle concernant tout le département de la Seine et visant des militants du Parti communiste clandestin ou considérés comme tels.
Lire dans le site La politique allemande des otages (août 1941-octobre 1942).
Suivant cette politique des otages, les autorités d’occupation ordonnent l’exécution d’otages déjà internés et le 28 juin, arrêtent 387 militants (avec le concours de la police parisienne), dont la plupart avaient déjà été arrêtés une première fois par la police française pour « activité communiste » depuis l’interdiction du Parti communiste (le 26 septembre 1939) et libérés à l’expiration de leur peine. Les autres sont connus ou suspectés par les services de Police. Il s’agit de représailles ordonnées à la suite d’une série d’attentats à Paris (le 20 avril un soldat allemand de première classe est abattu au métro Molitor, deux soldats allemands dans un autobus parisien, le 22 avril un militaire allemand est blessé à Malakoff). Lire le témoignage de Claude Souef : La rafle des communistes du 28 avril 1942 à Paris. Les hommes arrêtés sont rapidement conduits au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (le Frontstalag 122).
Haï-King Wang est interné le jour même au camp allemand de Compiègne (Frontstalag 122) où il reçoit le matricule n° « 3942 ». Depuis ce camp administré par la Wehrmacht, il va être déporté à destination d’Auschwitz. Pour comprendre la politique de l’Occupant qui mène à sa déportation, on lira les deux articles du site qui exposent les raisons des internements, des fusillades et de la déportation : La politique allemande des otages (août 1941-octobre 1942) et «une déportation d’otages».
Depuis le camp de Compiègne, Haï-King Wang est déporté à Auschwitz dans le convoi du 6
juillet 1942 dit des « 45000 »
Cf l’article du site : Les wagons de la Déportation
Ce convoi est composé au départ de Compiègne, de 1175 hommes (1100 « otages communistes » – jeunes communistes, anciens responsables politiques et élus du Parti communiste, syndicalistes de la CGT et délégués du personnel d’avant-guerre, militants et syndicalistes clandestins, résistants – de cinquante « otages juifs » et de quelques « droits communs »). Il faisait partie des mesures de terreur allemandes destinées à combattre, en France, les judéo-bolcheviks responsables, aux yeux de Hitler, des actions armées organisées par le parti communiste clandestin contre des officiers et des soldats de la Wehrmacht, à partir d’août 1941. Lire dans le site le récit des deux jours du transport : Compiègne-Auschwitz : 6-8 juillet 1942. Sur les 1175 otages partis de Compiègne le 6 juillet 1942, 1170 sont présents à l’arrivée du train en gare d’Auschwitz le 8 juillet 1942. Ces derniers sont enregistrés et photographiés au Stammlager d’Auschwitz (camp souche ou camp principal, dénommé en 1943 Auschwitz-I) entre les numéros « 45157 » et « 46326 », d’où le nom de « convoi des 45000 », sous lequel les déportés du camp désignaient ce convoi. Ce matricule – qu’il doit apprendre à dire en allemand et en polonais à toute demande des Kapos et des SS – sera désormais sa seule identité. Lire dans le site : Le KL Auschwitz-Birkenau.
Son numéro d’immatriculation lors de son arrivée à Auschwitz le 8 juillet 1942 est inconnu. Lire dans le site le récit du premier jour à Auschwitz : L’arrivée au camp principal, 8 juillet 1942. et 8 juillet 1942 : Tonte, désinfection, paquetage, « visite médicale ».
Le numéro « 46205 ? » figurant dans mes deux premiers ouvrages sur le convoi du 6 juillet 1942 correspondait à une tentative de reconstitution de la
liste du convoi par matricules. Ce numéro, quoique plausible, ne saurait être considéré comme sûr en raison de l’existence de quatre listes alphabétiques successives, de la persistance de lacunes pour plus d’une dizaine de noms et d’incertitudes sur plusieurs centaines de numéros matricules. Il ne figure plus dans mon ouvrage Triangles rouges à Auschwitz.
Haï-King Wang meurt à Auschwitz le 2 novembre 1942 d’après le certificat de décès établi au camp d’Auschwitz (in Death Books from Auschwitz Tome 3 page 1299 et le site internet © Mémorial et Musée d’Etat d’Auschwitz-Birkenau) où il est mentionné avec ses dates et lieux de naissance et de décès, et avec l’indication « Boudhiste ».
Les causes de sa mort sont indiquées sous le terme Akuter Magendarmkatarrh (gastro entérite aigüe) L’historienne
polonaise Héléna Kubica explique comment les médecins du camp signaient en blanc des piles de certificats de décès avec «l’historique médicale et les causes fictives du décès de déportés tués par injection létale de phénol ou dans les chambres à gaz». D’après les témoignages des rescapés du convoi, leurs camarades malades sont gazés à la suite de « sélections interne
des inaptes au travail », opérées dans les blocks d’infirmerie. Lire dans le site : Des causes de décès fictives.
- Note 1 : Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, Office for Information about Former Prisoners.
- Note 2 : De futures grandes figures chinoises – comme Deng Xioping – arrivent en France par son truchement.
Sources
- Fichier national de la Division des archives des victimes des conflits contemporains (DAVCC), Ministère de la Défense, Caen. Fiche individuelle consultée en octobre 1993.
- Denis Peschanski © La confrontation radicale Résistants communistes parisiens vs Brigades spéciales.
- Fédération nationale d’entraide.
- Death Books from Auschwitz(registres des morts d’Auschwitz), Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, 1995 (basé essentiellement sur les registres (incomplets) des certificats de décès établis au camp d’Auschwitz ayant enregistré, entre le 27 juillet 1941 et le 31 décembre 1943, le décès des détenus immatriculés).
- Livre des déportés ayant reçu des médicaments à l’infirmerie de Birkenau, kommando d’Auschwitz, Registre des décédés(n° d’ordre, date, matricule, chambre, nom, nature du médicament) du 1.11.1942 au 15.07.1943.
- © Dessin de Franz Reisz, in « Témoignages sur Auschwitz », ouvrage édité par l’Amicale des déportés d’Auschwitz (1946).
Notice biographique mise à jour en 2013 et 2019 à partir de la notice rédigée en 2002 par Claudine Cardon-Hamet pour l’exposition de Paris de l’association «Mémoire vive». Claudine Cardon-Hamet, docteur en Histoire, auteur des ouvrages : «Triangles rouges à Auschwitz, le convoi politique du 6 juillet 1942 » Editions Autrement, 2005 Paris et de Mille otages pour Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 dit des «45000», éditions Graphein, Paris 1997 et 2000 (épuisé). Prière de mentionner ces références (auteur et coordonnées de ce site) en cas de reproduction ou d’utilisation totale ou partielle de cette notice biographique.
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