Matricule « 45 568 » à Auschwitz Rescapé
Georges Gallot : né en 1912 à Paris 11è ; domicilié à Montreuil (Seine / Seine-Saint-Denis) ; électricien à la STCRP ; communiste ; arrêté le 28 octobre 1940, puis le 28 avril 1942 ; interné au camp de Compiègne ; déporté le 6 juillet 1942 à Auschwitz, Gross-Rosen, Dora Mittelbau, Dora-Harzungen ; rescapé ; décédé le 12 janvier 1981.
Georges Gallot est né le 28 février 1912 à Paris 11è au domicile de sa mère, 2, rue Faidherbe.
Il habite au 41 ter, rue de l’Hermitage à Montreuil-sous-Bois (Seine, aujourd’hui Seine-St-Denis) au moment de son arrestation.
Il est le fils d’Eliza, Henriette Coconnier, 21 ans, née le 25 septembre 1890 à Paris 20è. Il est légitimé et reconnu par ses parents en 1918. Son père est Georges Gallot, 33 ans, né le 8 septembre 1879 à Paris, employé à la CPDE, époux d’Eliza, divorcé de Louisa Descamps en 1914.
Georges Gallot fils a 2 sœurs (Suzanne 1913-1999 et Marie Emelie, prénoms de sa grand-mère paternelle) et deux frères (Raymond 1919-1980 et Lucien).
Georges Gallot épouse Renée Oger le 5 novembre 1932. Elle est née le 11 mars 1912 à Cormeilles-en-Parisis (elle décède en 1961). Le couple a deux enfants (Huguette, née le 24 septembre 1934 et Guy, né en 1939).
Roger Gallot est électricien à la STCRP depuis 1937 (Société des Transports en commun de la Région parisienne).
Il est membre du Parti communiste.
Roger Gallot fait son service militaire en 1932 à Argentan.
Réserviste, il est mobilisé en 1939, au 104è Régiment d’infanterie. Il est décoré de la Croix de guerre avec étoile de bronze « pour avoir ramené son chef de section grièvement blessé« .
Le jeudi 13 juin 1940, la Wehrmacht occupe Aubervilliers. Le 14 juin 1940, les troupes de la Wehrmacht entrent dans Paris, vidée des deux tiers de sa population. La ville cesse d’être la capitale du pays et devient le siège du commandement militaire allemand en France. Les troupes allemandes occupent toute la banlieue parisienne les jours suivants. Le 22 juin, l’armistice est signé.
Le 10 juillet 1940 le maréchal Pétain, investi des pleins pouvoirs par l’Assemblée nationale, s’octroie le lendemain le titre de « chef de l’Etat français » et lance la « révolution nationale » en rupture avec nombre de principes républicains (confusion des pouvoirs législatifs et exécutifs ; rejet du multipartisme, suppression des syndicats et du droit de grève, antisémitisme d’état…).
Après sa démobilisation, il revient à Montreuil. Il est arrêté le 28 octobre 1940 par le commissaire Doty, de Montreuil, lors d’une rafle et trouvé en possession de tracts anti-allemands. Il affirme que les tracts trouvés dans sa poche lui ont été glissés à son insu. Gardé à vue, il ne subira aucune condamnation, et sera relâché au bout de deux jours.
Les informations recueillies par les RG ne sont en effet pas accablantes : » Auparavant, n’a jamais attiré l’attention du point de vue politique. Il parait animé de bons sentiments nationaux et on n’a pas connaissance qu’il ait manifesté de sentiments hostiles à l’égard de nos institutions. Au privé il jouit dans le voisinage de l’estime générale et on ne lui connait aucune relation suspecte. Il n’est pas noté aux sommiers« .
Mais figurant désormais sur les tablettes des RG, il est arrêté à nouveau le 28 avril 1942, à Vitry, à 5 heures 30 du matin, cette fois par les polices française et allemande.
Il s’agit d’une rafle de « plus de 500 hommes » organisée par l’occupant dans tout le département de la Seine, en répression de l’attentat de Paris du 20 avril 1942 : des coups de feu ont été tirés sur des soldats allemands à la station de métro Molitor. Cette rafle touche notamment un grand nombre de militants arrêtés une première fois par la police française pour activité communiste depuis l’interdiction du Parti communiste (26 septembre 1939) et libérés à l’expirations de leur peine. Parmi les militants arrêtés, 61 d’entre eux seront déportés à Auschwitz dans le convoi du 6 juillet 1942.
Depuis la Mairie du 20°, ils sont conduits à l’Ecole Militaire puis, en autobus, des Invalides à la Gare du Nord. Le soir même, il sont remis aux autorités allemandes à leur demande. Celles-ci les internent au camp allemand de Royallieu à Compiègne (le Frontstalag 122) en vue de leur déportation comme otages.
Depuis ce camp administré par la Wehrmacht, il va être déporté à destination d’Auschwitz. Pour comprendre la politique de l’Occupant qui mène à sa déportation, on lira les deux articles du site qui exposent les raisons des internements, des fusillades et de la déportation : La politique allemande des otages (août 1941-octobre 1942) et «une déportation d’otages».
Depuis le camp de Compiègne, Georges Gallot est déporté à Auschwitz dans le convoi du 6 juillet 1942.
Cf Article du site : Les wagons de la Déportation.
Ce convoi est composé au départ de Compiègne, de 1175 hommes (1100 « otages communistes » – jeunes communistes, anciens responsables politiques et élus du Parti communiste, syndicalistes de la CGT et délégués du personnel d’avant-guerre, militants et syndicalistes clandestins, résistants – de cinquante « otages juifs » et de quelques « droits communs »). Il faisait partie des mesures de terreur allemandes destinées à combattre, en France, les judéo-bolcheviks responsables, aux yeux de Hitler, des actions armées organisées par le parti communiste clandestin contre des officiers et des soldats de la Wehrmacht, à partir d’août 1941.
Lire dans le site le récit des deux jours du transport : Compiègne-Auschwitz : 6-8 juillet 1942.
Sur les 1175 otages partis de Compiègne le 6 juillet 1942, 1170 sont présents à l’arrivée du train en gare d’Auschwitz le 8 juillet 1942.
Ces derniers sont enregistrés et photographiés au Stammlager d’Auschwitz (camp souche ou camp principal, dénommé en 1943 Auschwitz-I) entre les numéros « 45 157 » et « 46 326 », d’où le nom de « convoi des 45 000 », sous lequel les déportés du camp désignaient ce convoi. Ce matricule – qu’il doit apprendre à dire en allemand et en polonais à toute demande des Kapos et des SS – sera désormais sa seule identité.
Lire dans le site : Le KL Auschwitz-Birkenau.
Il est enregistré à son arrivée à Auschwitz le 8 juillet 1942 sous le numéro matricule « 45 568 ». Ce matricule – qu’il doit apprendre à dire en allemand et en polonais – sera désormais sa seule identité pour ses gardiens.
Georges Gallot décrit le premier tué du convoi dès le lendemain de leur arrivée à Auschwitz. Le Kapo du Block 19 leur dit : « Vous allez voir comment on tue un homme« .
Son matricule sera tatoué sur son avant-bras gauche quelques mois plus tard. Sa photo d’immatriculation (1) à Auschwitz a été retrouvée parmi celles que des membres de la Résistance intérieure du camp avaient camouflées pour les sauver de la destruction, ordonnée par les SS peu de temps avant l’évacuation d’Auschwitz.
Lire dans le site le récit de leur premier jour à Auschwitz : L’arrivée au camp principal, 8 juillet 1942. et 8 juillet 1942 : Tonte, désinfection, paquetage, « visite médicale ». Après l’enregistrement, il passe la nuit au Block 13 (les 1170 déportés du convoi y sont entassés dans deux pièces). Le 9 juillet tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau (Brzezinka), situé à 4 km du camp principal. Le 13 juillet il est interrogé sur sa profession. Les spécialistes dont les SS ont besoin pour leurs ateliers sont sélectionnés et vont retourner à Auschwitz I (approximativement la moitié du convoi. Les autres, restent à Birkenau, employés au terrassement et à la construction des Blocks.
Roger Arnould, rescapé de Buchenwald, documentaliste à la FNDIRP, recueille un jour de 1973 son témoignage sur sa déportation à Auschwitz. Les larmes aux yeux, Gallot m’a dit : « Un jour, un camarade qui avait aussi faim que moi m’a donné la moitié de son pain. J’étais devenu un « musulman » complet. A peu près fou, j’ai voulu me jeter dans les barbelés. Ce même camarade m’en a empêché, il m’a retenu… Je ne l’oublierai jamais. Son nom : Roger Pélissou« .
En application d’une directive de la Gestapo datée du 21 juin 1943 accordant aux détenus des KL en provenance d’Europe occidentale la possibilité de correspondre avec leur famille et de recevoir des colis renfermant des vivres, Georges Gallot, comme les autres détenus politiques français d’Auschwitz (cent quarante « 45 000 » environ), reçoit en juillet 1943 l’autorisation d’échanger des lettres avec sa famille – rédigées en allemand et soumises à la censure – et de recevoir des colis contenant des aliments. Ce droit leur est signifié le 4 juillet 1943.
Entre le 14 août 1943 et le 12 décembre 1943, il est en quarantaine au Block 11 avec la quasi totalité des Français survivants.
Lire l’article du site « les 45000 au block 11.
Le 12 décembre 1943, à la suite de la visite du nouveau commandant du camp, Arthur Liebehenschel, et après quatre mois d’un régime qui leur a permis de retrouver quelques forces, les « 45000 sont, pour la plupart, renvoyés dans leurs Kommandos et Blocks d’origine.
Dès 1944, devant l'avancée des armées soviétiques, les SS commencent à ramener vers le centre de l’Allemagne les déportés des camps à l’Est du Reich, dont Auschwitz. Les premiers transferts de "45.000" ont lieu en février 1944 et ne concernent que six d’entre eux. Quatre-vingt-neuf autres "45 000" sont transférés au cours de l'été 1944, dans trois camps situés plus à l'Ouest - Flossenbürg, Sachsenhausen, Gross-Rosen - en trois groupes, composés initialement de trente "45 000" sur la base de leurs numéros matricules à Auschwitz. Une trentaine de "45 000" restent à Auschwitz jusqu'en janvier 1945. Lire dans le site : "les itinéraires suivis par les survivants".
En janvier 1945, il est transféré à Gross-Rosen avec douze autres « 45 000 ». En février 1945, avec quinze « 45 000 » il est transféré de Gross-Rosen à Dora-Mittelbau. Georges Gallot est affecté avec Robert Daune à Dora. Matricule 116 085, affecté à la Boelcke-Kaserne, puis au Kommando d’Harzungen chargé des travaux de terrassement du chantier B3. Le Kommando est évacué le 4 avril. Le 11 avril 1945, le camp de Dora est évacué. Il quitte ce camp « avec un groupe de 300 à 400 » où il est le seul « 45 000 », et, les SS ayant fui, il se retrouve « en un lieu inconnu ».
Libéré par l’armée américaine, il regagne la France par Maubeuge, le 9 mai 1945.
Il arrive à Paris le 11 mai 1945.
Georges Gallot a été homologué «Déporté politique». Son épouse avait écrit au maréchal Pétain (27 avril 1943) puis à De Brinon (9 juin 1943) pour obtenir de ses nouvelles.
Leur mariage est dissous par jugement de divorce le 17 ou 19 juillet 1951.
Georges Gallot épouse en secondes noces Raymonde, Renée Buet, le 20 février 1952. Elle est née 20 décembre 1911 à Nemours (Seine-et-Marne), où elle décèdera en 1989.
Georges Gallot meurt le 12 janvier 1981 à Moncourt-Fromonville (Seine-et-Marne).
Note 1 : 522 photos d’immatriculation des « 45.000 » à Auschwitz ont été retrouvées parmi celles que des membres de la Résistance intérieure du camp avaient camouflées pour les sauver de la destruction, ordonnée par les SS peu de temps avant l’évacuation du camp d’Auschwitz. A la Libération elles ont été conservées dans les archives du musée d’Etat d’Auschwitz. Des tirages de ces photos ont été remis par Kazimierz Smolen (ancien détenu dans les bureaux du camp d’Auschwitz, puis directeur du Musée d’Etat d’Auschwitz) à André Montagne, alors vice-président de l’Amicale d’Auschwitz, qui me les a confiés.
Sources
- Témoignages d’Auguste Monjauvis, Jean Marti, Roger Pélissou.
- Souvenirs confiés à Roger Arnould (1972-1973).
- Lettre et documents envoyés par sa veuve (juillet 1989).
- Mairie de Paris (XI°), 14 mars 1994.
- Archives en ligne de Paris 11°.
- Courriel avec photo couleur, envoi de son cousin germain, Robert Gallot.
Notice biographique rédigée à partir d’une notice succincte pour le 60è anniversaire du départ du convoi des « 45 000 », brochure répertoriant les “45 000” de Seine-Saint-Denis, éditée par la Ville de Montreuil et le Musée d’Histoire vivante, 2002, complétée en novembre 2007 (2014, 2019, 2020, 2022 et 2024) par Claudine Cardon-Hamet (docteur en Histoire, auteur des ouvrages : Mille otages pour Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 dit des « 45000 », éditions Graphein, Paris 1997 et 2000 (épuisé) et de Triangles rouges à Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 dit des « 45 000 », éditions Autrement, Paris 2005 dont je dispose encore de quelques exemplaires pour les familles). Prière de mentionner ces références (auteur et coordonnées de ce site) en cas de reproduction ou d’utilisation totale ou partielle de cette notice biographique.
Pour la compléter ou la corriger, vous pouvez me faire un courriel à deportes.politiques.auschwitz@gmail.com