Janvier 1940, pendant une permission à Saint-Pol de Léon

Léon Lecomte : né en 1912 à Saint-Ouen l'Aumône (Seine-et-Oise) ; il est domicilié à Paris 19ème ; commis au ministère des finances ; communiste ; arrêté le 19 septembre 1940 ; condamné à un an de prison :écroué à la Santé, Fresnes, Poissy ; libéré ; arrêté de nouveau à la mi-novembre novembre 1941 ; interné au camp de Compiègne ; déporté le 6 juillet 1942 à Auschwitz, où il meurt le 21 octobre 1942.

Léon Lecomte surnommé « le percepteur » à Compiègne, est né le 23 avril 1912 à Saint-Ouen l’Aumône (Val-d’Oise).
Il est domicilié au 32, rue de Joinville à Paris 19ème au moment de son arrestation.
Il est le fils de Reine, Gabrielle Mathieu et de Louis, Henri Lecomte, son époux.
Il travaille comme commis principal au Ministère des finances, rue de Rivoli à Paris (il y était entré très jeune, comme « classeur »).
Léon Lecomte est membre du Parti communiste.
Sportif, pratiquant l’athlétisme dans un club FSGT du 19ème, il est champion du 3000 mètres selon Georges Dudal.
En 1934, Léon Leconte est domicilié à Eaubonne (Seine-et-Oise) allée Pointiat.
Le 1er septembre 1934 à la mairie du 19ème, il épouse Raymonde, Renée Ségalen, née le 16 février 1913 dans cet arrondissement. Elle est employée de bureau, domiciliée au 11, rue de Joinville. La mère de Léon Leconte est décédée.
En 1936, le couple habite l’appartement n° 377 au 32, rue de Joinville à Paris 19ème.  Léon Lecomte est mobilisé fin 1939.

Le 14 juin 1940, les troupes de la Wehrmacht entrent dans Paris, vidée des deux tiers de sa population. La ville cesse d’être la capitale du pays et devient le siège du commandement militaire allemand en France. Le 22 juin, l’armistice est signé. Le 10 juillet 1940 le maréchal Pétain, investi des pleins pouvoirs par l’Assemblée nationale, s’octroie le lendemain le titre de « chef de l’Etat français » et lance la « révolution nationale » en rupture avec nombre de principes républicains (confusion des pouvoirs législatifs et exécutifs ; rejet du multipartisme, suppression des syndicats et du droit de grève, antisémitisme d’état…).

Après sa démobilisation, il reprend clandestinement son activité militante. Léon Lecomte est arrêté une première fois le 19 septembre 1940 alors qu’il collait des «papillons» dans une rue du quartier. Dans une lettre adressée à André Tollet le 21 novembre 1972 afin d’avoir des confirmations concernant Léon Lecomte surnommé « le Percepteur » à Compiègne, Roger Arnould lui citait un témoignage anonyme reçu à la FNDIRP le 14 juin 1972, témoignage accompagné d’une photo (reproduite en tête de cette notice), dont il pensait qu’il pouvait provenir de sa veuve, remariée en 1952. Il m’a également raconté cette arrestation, enregistrée sur cassette et il en a fait un article pittoresque qui paraît dans le « Patriote Résistant » n° 511 de mai 1982.
Lire dans le site le  récit : L’arrestation mouvementée de Léon Lecomte

« Concernant le convoi des « 45000 » d’Auschwitz, tu m’avais parlé un jour d’un nommé Lecomte, percepteur. Je viens de recevoir un témoignage anonyme, avec une petite photo, qui semble correspondre ; il s’agit de Lecomte Léon, de Paris Aise, Il était fonctionnaire du ministère des finances (on ne dit pas percepteur) arrêté deux fois fin 1940 ou début 41 ; un an de prison, revient chez lui (rue de Joinville 19ème) mais on vient le reprendre et il se retrouve à Compiègne. Il avait 30 ans. Le témoin anonyme (je suppose sa veuve remariée) donne la relation suivante de sa première arrestation : « …sur sa première arrestation. Il collait des affiches dans une rue du 19ème arrondissement, pris sur le fait par des agents du 19ème, il s’échappe et champion dans la course les distance facilement, mais les agents sifflent continuellement en le poursuivant. Il franchit le 10ème arrondissement où les autres agents (du 10ème) parvinrent à l’arrêter en lui lançant une pèlerine sur la tête. Il est emmené dans un commissariat du 10ème. Là devant lui, c’est la bagarre entre les agents du 19ème et du 10ème pour savoir qui aura la prime (de 20 F je crois) pour son arrestation !… C’était fin 1940« . Roger Arnould (1972), lettre à André Tollet.

Léon Lecomte est emprisonné à la Santé, puis à Fresnes le 27 octobre 1940. Le 30 décembre 1940, il est transféré à la centrale de Poissy. Accusé d’activité communiste, et en application du décret du 26 septembre 1939, il est condamné à  un an d’emprisonnement.
Il est libéré à l’expiration de sa peine en août 1941. 

Arrêté à nouveau à la mi-novembre novembre 1941, il est interné sans jugement au camp allemand de Royallieu à Compiègne (le Frontstalag 122) en vue de sa déportation comme otage.
Depuis ce camp administré par la Wehrmacht, il va être déporté à destination d’Auschwitz. Pour comprendre la politique de l’Occupant qui mène à sa déportation, on lira les deux articles du site qui exposent les raisons des internements, des fusillades et de la déportation : La politique allemande des otages (août 1941-octobre 1942) et «une déportation d’otages».  A Compiègne, ses camarades le surnomment «le percepteur».

Depuis le camp de Compiègne, Léon Leconte est déporté à Auschwitz dans le convoi du 6 juillet 1942.

Cf Article du site : Les wagons de la Déportation. 

Ce convoi est composé au départ de Compiègne, de 1175 hommes (1100 « otages communistes » – jeunes communistes, anciens responsables politiques et élus du Parti communiste, syndicalistes de la CGT et délégués du personnel d’avant-guerre, militants et syndicalistes clandestins, résistants – de cinquante  « otages juifs » et de quelques « droits communs »). Il faisait partie des mesures de terreur allemandes destinées à combattre, en France, les judéo-bolcheviks responsables, aux yeux de Hitler, des actions armées organisées par le parti communiste clandestin contre des officiers et des soldats de la Wehrmacht, à partir d’août 1941. Lire dans le site le récit des deux jours du transport : Compiègne-Auschwitz : 6-8 juillet 1942. Sur les 1175 otages partis de Compiègne le 6 juillet 1942, 1170 sont présents à l’arrivée du train en gare d’Auschwitz le 8 juillet 1942. Ces derniers sont enregistrés et photographiés au Stammlager d’Auschwitz (camp souche ou camp principal, dénommé en 1943 Auschwitz-I) entre les numéros « 45157 » et « 46326 », d’où le nom de « convoi des 45000 », sous lequel les déportés du camp désignaient ce convoi. Ce matricule – qu’il doit apprendre à dire en allemand et en polonais à toute demande des Kapos et des SS – sera désormais sa seule identité.
Lire dans le site : Le KL Auschwitz-Birkenau.

Les barbelés du camp principal; Photo Claudine Cardon-Hamet

Son numéro d’immatriculation à son arrivée à Auschwitz le 8 juillet 1942 est inconnu. Le numéro « 45751 ? » figurant dans mes deux premiers ouvrages sur le convoi du 6 juillet 1942 correspondait à ma tentative de reconstitution de la liste du convoi par matricules. Ce numéro, quoique plausible, ne saurait être considéré comme sûr en raison de l’existence des quatre listes alphabétiques successives que j’ai reconstituées, de la persistance de lacunes pour plus d’une dizaine de noms et d’incertitudes sur plusieurs centaines de numéros matricules. Il ne figure plus dans mon ouvrage Triangles rouges à Auschwitz.

Lire dans le site le récit de leur premier jour à Auschwitz : L’arrivée au camp principal, 8 juillet 1942. et 8 juillet 1942 : Tonte, désinfection, paquetage, « visite médicale ».  Après l’enregistrement, il passe la nuit au Block 13 (les 1170 déportés du convoi y sont entassés dans deux pièces). Le 9 juillet tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau (Brzezinka), situé à 4 km du camp principal. Le 13 juillet il est interrogé sur sa profession. Les spécialistes dont les SS ont besoin pour leurs ateliers sont sélectionnés et vont retourner camp principal (approximativement la moitié du convoi. Les autres, restent à Birkenau, employés au terrassement et à la construction des Blocks.

Léon Lecomte meurt à Auschwitz le 21 octobre 1942 d’après le certificat de décès établi au camp d’Auschwitz et destiné à l’état civil de
la municipalité d’Auschwitz (in Death Books from Auschwitz (Tome 2 page 702).
Il est déclaré «Mort pour la France» le 30 septembre 1948.
Son nom est inscrit sur la plaque située dans la cour du ministère des Finances au 139, rue de Bercy : «Le Ministère des Finances à ses agents morts pour la France».
Sa veuve s’est remarié en 1952 avec  Marc Maldent. Elle est décédée en 2002.

Sources

  • Death Books from Auschwitz, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, 1995 (basé essentiellement sur les registres (incomplets) des certificats de décès destinés à l’état civil de la ville d’Auschwitz ayant enregistré, entre le 27 juillet 1941 et le 31 décembre 1943, le décès des détenus immatriculés).
  • Fiche d’état civil.
  • Notes de Roger Arnould (1972), lettre à André Tollet, article dans le « Patriote résistant » n° 511 de mai 1982
  • Souvenirs de Georges Dudal.
  • Témoignage adressé à la FNDIRP en 1972, qui le décrit «grand (1,80 m), sportif très bon camarade, qui nous avait raconté son arrestation».
  • Fichier national des déplacés de la Seconde guerre mondiale (archives des ACVG).

Notice biographique mise à jour en 2010, 2013, 2019 et 2021 à partir d’une notice succincte rédigée en janvier 2001 pour l’exposition organisée par l’association « Mémoire Vive » à la mairie du 20ème arrondissement, par Claudine Cardon-Hamet (docteur en Histoire, auteur des ouvrages :Triangles rouges à Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 dit des « 45000 », éditions Autrement, Paris 2005) et de Mille otages pour Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 dit des « 45000 », éditions Graphein, Paris 1997 et 2000 (épuisé), qui reproduit ma thèse de doctorat (1995). Prière de mentionner ces références (auteur et coordonnées de ce site) en cas de reproduction ou d’utilisation totale ou partielle de cette notice.
Pour la compléter ou la corriger, vous pouvez me faire un courriel à deportes.politiques.auschwitz@gmail.com 

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *