Emile Isidor : né en 1907 à Le Torquesne (Calvados) ; domicilié  à Caen (Calvados) ; agent des lignes PTT ; communiste ; arrêté le 1er mai 1942 comme otage communiste ; interné à Compiègne ; déporté le 6 juillet 1942 à Auschwitz ; décédé à Auschwitz-Birkenau le le 25 août 1942. 

Emile, Gustave, Léon Isidor est né au domicile de ses parents le 30 juin 1907 à Le Torquesne (Calvados) non loin de Lisieux.
Il habite au 15, rue Saint-Sauveur à Caen (Calvados) au moment de son arrestation.
Il est le fils de Marie, Célestine Masson, 35 ans, journalière et de Gustave, Léon, Emile, Isidor, 35 ans, journalier, son époux.
Il a une sœur aînée, Eugénie, née au Torquesne le 17 mai 1905, et un cadet, Alphonse, né au Torquesne le 21 décembre 1910.
Leur mère décède le 3 décembre 1911. Leur père se remarie l’année suivante.
Emile épouse Raymonde, Marie, Fernande Harand le 16 janvier 1931 à Caen.  Elle est âgée de 18 ans, sans profession, née à Caen, le 23 juillet 1912. Ils habitent tous deux au 64, rue d’Auge à Caen.
Le couple a une fille, Liliane, Henriette, Louise, née le 24 novembre 1932 à Caen, âgée de 10 ans au moment de l’arrestation de son père (elle est décédée en 2009).
Emile Isidor est agent des lignes aux PTT. Il  est membre du Parti communiste.
En 1936, ils n’habitent plus au 64 rue d’Auge et pas encore rue Saint-Sauveur.
1939 : le couple Isidor-Harand divorce à la demande d’Emile (jugement du tribunal du 29 juin 1939 prononcé au bénéfice du mari).

Le 14 juin 1940, l’armée allemande d’occupation entre dans Paris, vidé des deux tiers de sa population. La ville cesse alors d’être la capitale du pays et devient le siège du commandement militaire allemand en France. Toute la Basse Normandie est occupée le 19 juin. Les troupes de la Wehrmacht arrivant de Falaise occupent Caen le mardi 20 juin 1940. La Feldkommandantur 723 s’installe à l’hôtel Malherbe, place Foch. En août huit divisions d’infanterie allemande – qu’il faut nourrir et loger – cantonnent dans la région. L’heure allemande remplace l’heure française.  Dès le début de l’Occupation allemande, la police de Vichy a continué de surveiller les anciens élus ou militants communistes « notoires », et procède à des perquisitions et des arrestations. Vichy entend ainsi faire pression sur les militants communistes connus ou anciens élus pour faire cesser la propagande communiste clandestine.
Dans le Calvados, une équipe de sabotage composée de postiers est mise sur pied par Gaston Baratte, militant syndicaliste et communiste (1). Émile Isidor, en fait partie avec Guéroult, Robert Castel,  Désiré Lemière, et Arsène Trévelé (In Beaucoudray).

Emile Isidor est arrêté à son domicile par un inspecteur de police, accompagné d’agents et de Feldgendarmen le 1er mai 1942, comme otage communiste.

Liste de militants arrêtés dans la nuit du 1er au 2 mai 1942 (© montage P. Cardon)

Il figure en effet sur la liste de 120 otages « communistes et Juifs » établie par les autorités allemandes. en représailles au déraillement de deux trains de permissionnaires allemands à Airan-Moult-Argences (38 morts et 41 blessés parmi les permissionnaires de la Marine allemande à la suite des sabotages par la Résistance, les 16 et 30 avril 1942, de la voie ferrée Maastricht-Cherbourg où circulaient deux trains militaires allemands. Des dizaines d’arrestations sont effectuées à la demande des occupants.
24 otages sont fusillés le 30 avril à la caserne du 43ème régiment d’artillerie de Caen occupé par la Werhmarcht.
28 communistes sont fusillés en deux groupes les 9 et 12 mai, au Mont Valérien et à Caen. Le 9 mai trois détenus de la maison centrale et des hommes condamnés le 1er mai pour « propagande gaulliste » sont passés par les armes à la caserne du 43ème RI.
Le 14 mai, 11 nouveaux communistes sont fusillés à Caen.
Lire dans le site : Le double déraillement de Moult-Argences et les otages du Calvados (avril-mai 1942) et la note du Préfet de Police de Paris à propos des deux sabotages de Moult-Argences : Collaboration de la Police français (note du Préfet de police, François Bard

Il est emmené de nuit à la Maison centrale de la Maladrerie de Caen (dite également prison de Beaulieu), entassé avec d’autres militants communistes caennais arrêtés le même jour, au sous-sol dans des cellules exiguës.
A la demande des autorités allemandes (la Feldkommandantur 723), Emile Isidor et ses camarades sont conduits en autocars le 3 mai au «Petit lycée» de Caen occupé par la police allemande, où sont regroupés les otages du Calvados. On leur annonce qu’ils seront fusillés. Par la suite, un sous-officier allemand apprend aux détenus qu’ils ne seront pas fusillés, mais déportés.  Après interrogatoire, ils sont transportés le 4 mai 1942 en cars et camions à la gare de marchandises de Caen. Le train démarre vers 22 h 30 pour le camp allemand de Royallieu à Compiègne le Frontstalag 122 (témoignage d’André Montagne).

Emile Isidor y est interné le lendemain soir en vue de sa déportation comme otage. Il est gardé à la maison d’arrêt de Caen, puis il est remis aux autorités allemandes à leur demande. Celles-ci l’internent au camp de Royallieu à Compiègne, le 4 mai, en vue de sa déportation comme otage. Depuis ce camp administré par la Wehrmacht, il va être déporté à destination d’Auschwitz. Pour comprendre la politique de l’Occupant qui mène à sa déportation, on lira les deux articles du site qui exposent les raisons des internements, des fusillades et de la déportation : La politique allemande des otages (août 1941-octobre 1942) et «une déportation d’otages».

Depuis le camp de Compiègne, Emile Isidor est déporté à Auschwitz dans le convoi du 6 juillet 1942

Cf Article du site : Les wagons de la Déportation. 

Ce convoi est composé au départ de Compiègne, de 1175 hommes (1100 « otages communistes » – jeunes communistes, anciens responsables politiques et élus du Parti communiste, syndicalistes de la CGT et délégués du personnel d’avant-guerre, militants et syndicalistes clandestins, résistants – de cinquante trois « otages juifs » et de quelques « droits communs »). Il faisait partie des mesures de terreur allemandes destinées à combattre, en France, les judéo-bolcheviks responsables, aux yeux de Hitler, des actions armées organisées par le parti communiste clandestin contre des officiers et des soldats de la Wehrmacht, à partir d’août 1941. Lire dans le site le récit des deux jours du transport : Compiègne-Auschwitz : 6-8 juillet 1942. Sur les 1175 otages partis de Compiègne le 6 juillet 1942, 1170 sont présents à l’arrivée du train en gare d’Auschwitz le 8 juillet 1942. Ces derniers sont enregistrés et photographiés au Stammlager d’Auschwitz (camp souche ou camp principal, dénommé en 1943 Auschwitz-I) entre les numéros « 45157 » et « 46326 », d’où le nom de « convoi des 45000 », sous lequel les déportés du camp désignaient ce convoi. Ce matricule – qu’il doit apprendre à dire en allemand et en polonais à toute demande des Kapos et des SS – sera désormais sa seule identité. Lire dans le site : Le KL Auschwitz-Birkenau.

Son numéro d’immatriculation à Auschwitz n’est pas connu. Le numéro « 45679 ? » figurant dans mes deux premiers ouvrages sur le convoi du 6 juillet 1942 (éditions de 1997 et 2000) et signalé comme incertain correspond à une tentative de reconstitution de la liste du convoi par matricules, qui n’a pu aboutir en raison de l’existence de quatre listes alphabétiques successives, de la persistance de lacunes pour plus d’une dizaine de noms et d’incertitudes sur plusieurs centaines de numéros matricules. Il est donc hasardeux de maintenir ce numéro en l’absence de nouvelles preuves.
Lire dans le site le récit de leur premier jour à Auschwitz : L’arrivée au camp principal, 8 juillet 1942. et 8 juillet 1942 : Tonte, désinfection, paquetage, « visite médicale ».  Après l’enregistrement, il passe la nuit au Block 13 (les 1170 déportés du convoi y sont entassés dans deux pièces). Le 9 juillet tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau, situé à 4 km du camp principal. Le 13 juillet il est interrogé sur sa profession. Les spécialistes dont les SS ont besoin pour leurs ateliers sont sélectionnés et vont retourner à Auschwitz I (approximativement la moitié du convoi. Les autres, restent à Birkenau, employés au terrassement et à la construction des Blocks.
Emile Isidor meurt à Birkenau le 25 août 1942 d’après les registres du camp.
Il a été homologué comme Résistant, au titre des Forces françaises combattantes (FFC) : elles sont constituées des agents des
réseaux de renseignement, d’action et d’évasion. Cf. service historique de la Défense, Vincennes GR 16 P 302113. Une plaque commémorative a été apposée le 26 août 1987 à la demande de  David Badache et André Montagne, deux des huit rescapés calvadosiens du convoi. Le nom d’Emile Isidor est inscrit sur la stèle à la mémoire des caennais et calvadosiens arrêtés en mai 1942. Située esplanade Louvel, elle a été apposée à l’initiative de l’association « Mémoire Vive », de la municipalité de Caen et de
l’atelier patrimoine du collège d’Evrecy. Elle est honorée chaque année.

  • Note 1 : Gaston Baratte, arrêté lui aussi le 1er mai 1942, est remis en liberté dans les jours suivants en raison de son âge (il a 56 ans).  Il devient secrétaire général de l’Union départementale clandestine CGT. Il est tué par un bombardement près de Trun (Orne) en 1944.

Sources

  • Fiche FNDIRP N° 5469 remplie pour sa fille (elle a 13 ans en 1945).
  • Death Books from Auschwitz, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, 1995 (basé essentiellement sur les registres – incomplets – de l’état civil de la ville d’Auschwitz ayant enregistré, entre le 27 juillet 1941 et le 31 décembre 1943, le décès des détenus immatriculés).
  • Fichier national du Bureau des archives des victimes des conflits contemporains (BAVCC), Ministère de la Défense, Caen.
  • Liste de militants arrêtés dans la nuit du 1er au 2 mai 1942 (montage photo à partir des listes originales © Pierre Cardon).
  • Site internet Beaucoudray. free.fr, sans références.
  • Recherches généalogiques (acte de naissance, mariage, divorce, recensement 1931 et 1936, articles de presse, publication du mariage) effectuées par Pierre Cardon.

Notice biographique rédigée en janvier 2001 (complétée en 2016, 2017 et 2021) par Claudine Cardon-Hamet, docteur en Histoire, auteur des ouvrages : «Triangles rouges à Auschwitz, le convoi politique du 6 juillet 1942 » Editions Autrement, 2005 Paris et de Mille otages pour Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 dit des «45000», éditions Graphein, Paris 1997 et 2000 (épuisé), à l’occasion de l’exposition organisée par des enseignants et élèves du collège Paul Verlaine d’Evrecy, le lycée Malherbe de Caen et l’association « Mémoire Vive ». Prière de mentionner ces références (auteur et coordonnées de ce site) en cas de reproduction ou d’utilisation totale ou partielle de cette notice biographique. Pour la compléter ou la corriger, vous pouvez me faire un courriel à deportes.politiques.auschwitz@gmail.com

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