Matricule « 46 156 » à Auschwitz
Ernest Tréseux : né en 1906 à Rocquigny (Ardennes) ; domicilié à Sedan-Torcy (Ardennes) ; Cgt et communiste ; arrêté le 19 octobre 1941 ; interné à Compiègne ; déporté le 6 juillet 1942 à Auschwitz, où il meurt le 4 novembre 1942.
Ernest Tréseux est né le 9 juin 1906 à Rocquigny (Ardennes). Il habite Sedan-Torcy au moment de son arrestation.
Il est le fils de Léonie, Amanda Wattier, 25 ans (née le 25 juin 1881 à Brienne sur Aisne) et d’Emile, Ernest Tréseux, 26 ans (né le 31 mars 1880 à Rocquigny), manouvrier. Ses parents se sont mariés à Rethel le 1er février 1904. Il a deux oncles, aînés de son père (Emile Bernard et Cyprien Emile nés à Rocquigny en 1872 et 1879). Il a une sœur, Jeanne (1909-1910) et deux frères, Jean (1909-1989) et Darius (1911).
Ernest Tréseux épouse Simone, Georgette Raignier, le 10 février 1930 à Létanne (à 25 km de Sedan). Elle est née à Longwy (Meurthe-et-Moselle) le 25 février 1910 (elle est décédée à Sedan le 29 juillet 1996 à Sedan).
Le couple a six enfants – selon le questionnaire rempli par sa veuve (dont Jean-Claude né en 1932 à Létanne, Michel et Claude en 1936 et 1936 à Sedan).
Ernest Tréseux est manœuvre à l’usine de laminage Saint-Denis (Société Anonyme des Ateliers et Chantiers de la Loire Saint-Denis) à Givonne (à 5 km de Sedan).
Il est adhérent à la CGT et membre du Parti communiste (il est secrétaire de la cellule de l’usine). Il est plus que vraisemblable qu’il ait participé à la grève qui débute le 5 juin 1936 dans les fonderies et usines métallurgiques de Sedan (« l’arrêt de travail est pour ainsi dire complet, écrit le préfet le 26 juin« ).
Le 10 mai 1940 la Werhmacht envahit le Luxembourg et l’Ardenne belge. Les armées belges et françaises mènent des combats retardateurs jusqu’au 13 mai avant de repasser sur la rive ouest de la Meuse. Après la percée allemande à Sedan le 14 mai et une succession de reculs des armées britannique, française et belge.
Le 14 juin 1940 l’armée allemande d’occupation entre dans Paris, vidé des deux tiers de sa population. La ville cesse alors d’être la capitale du pays et devient le siège du commandement militaire allemand en France.
Le 10 juillet 1940 le maréchal Pétain, investi des pleins pouvoirs par l’Assemblée nationale, abolit la République et s’octroie le lendemain le titre de « chef de l’Etat français ». Il lance la « révolution nationale » en rupture avec nombre de principes républicains (confusion des pouvoirs législatifs et exécutifs ; rejet du multipartisme, suppression des syndicats et du droit de grève, antisémitisme d’état…).
Dès le début de l’Occupation allemande, le gouvernement de Vichy fait continuer de faire surveiller par la police et la gendarmerie les anciens élus ou militants communistes « notoires », et procède à des perquisitions et des arrestations. Vichy entend ainsi faire pression sur les militants communistes connus ou anciens élus pour faire cesser la propagande communiste clandestine.
Ernest Tréseux est arrêté le 19 octobre 1941 à son domicile par la police allemande pour avoir fait, selon sa veuve, des « distributions de tracts à travers l’usine« .
En ce mois d’octobre 1941, dans plusieurs départements, des « communistes notoires » sont arrêtés afin de constituer des réserves d’otages. Dans les Ardennes, Julien Ruchot, Clément Auburtin, Eugène Visse, Gaston Gillet, Jean De Bloedt, Jules Michel, et Julien Jurion (de Renwez, qui sera déporté à Auschwitz dans le même convoi) sont arrêtés les 19 ou 20 octobre. Ernest Tréseux est remis aux autorités allemandes à leur demande.
Celles-ci l’internent le 21 octobre 1941 au camp de Royallieu à Compiègne en vue de sa déportation comme otage. Il y porte le matricule « 1845 ».
Depuis ce camp administré par la Wehrmacht, il va être déporté à destination d’Auschwitz. Pour comprendre la politique de l’Occupant qui mène à sa déportation, on lira les deux articles du site qui exposent les raisons des internements, des fusillades et de la déportation : La politique allemande des otages (août 1941-octobre 1942) et «une déportation d’otages».
Depuis le camp de Compiègne, Ernest Tréseux est déporté à Auschwitz dans le convoi du 6 juillet 1942.
Cf Article du site : Les wagons de la Déportation.
Ce convoi est composé au départ de Compiègne, de 1175 hommes (1100 « otages communistes » – jeunes communistes, anciens responsables politiques et élus du Parti communiste, syndicalistes de la CGT et délégués du personnel d’avant-guerre, militants et syndicalistes clandestins, résistants – de cinquante « otages juifs » et de quelques « droits communs »). Il faisait partie des mesures de terreur allemandes destinées à combattre, en France, les judéo-bolcheviks, responsables aux yeux de Hitler, des actions armées organisées par le Parti communiste clandestin contre des officiers et des soldats de la Wehrmacht, à partir d’août 1941.
Lire dans le site le récit des deux jours du transport : Compiègne-Auschwitz : 6-8 juillet 1942.
Sur les 1175 otages partis de Compiègne le 6 juillet 1942, 1170 sont présents à l’arrivée du train en gare d’Auschwitz le 8 juillet 1942. Ces derniers sont enregistrés et photographiés au Stammlager d’Auschwitz (camp souche ou camp principal, dénommé en 1943 Auschwitz-I) entre les numéros « 45 157 » et « 46 326 », d’où le nom de « convoi des 45 000 », sous lequel les déportés du camp désignaient ce convoi. Ce matricule – qu’il doit apprendre à dire en allemand et en polonais à toute demande des Kapos et des SS – sera désormais sa seule identité.
Lire dans le site : Le KL Auschwitz-Birkenau.
Ernest Tréseux est enregistré à son arrivée à Auschwitz le 8 juillet 1942 sous le numéro «46 156» selon la liste par matricules du convoi établie en 1974 par les historiens polonais du Musée d’Etat d’Auschwitz et le site internet du Musée.
Sa photo d’immatriculation à Auschwitz n’a pas été retrouvée parmi celles que des membres de la Résistance intérieure du camp avaient camouflées pour les sauver de la destruction, ordonnée par les SS peu de temps avant l’évacuation d’Auschwitz.
Lire dans le site le récit de leur premier jour à Auschwitz : L’arrivée au camp principal, 8 juillet 1942. et 8 juillet 1942 : Tonte, désinfection, paquetage, « visite médicale ».
Après l’enregistrement, il passe la nuit au Block 13 (les 1170 déportés du convoi y sont entassés dans deux pièces). Le 9 juillet tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau (Brzezinka), situé à 4 km du camp principal. Le 13 juillet il est interrogé sur sa profession. Les spécialistes dont les SS ont besoin pour leurs ateliers sont sélectionnés et vont retourner à Auschwitz I (approximativement la moitié du convoi. Les autres, restent à Birkenau, employés au terrassement et à la construction des Blocks.
Aucun des documents sauvés de la destruction ordonnée par les SS peu de temps avant l’évacuation d’Auschwitz, ne nous permet de savoir dans quel camp il est affecté à cette date
Ernest Tréseux meurt à Auschwitz le 4 novembre 1942 d’après son certificat de décès établi au camp pour le registre d’état civil de la municipalité d’Auschwitz (in Death Books from Auschwitz Tome 3 page 1255).
Sa fiche d’état civil établie en France après la Libération portait la mention «décédé le 1er mars 1943 à Auschwitz (Pologne)». Une nouvelle mention, conforme au registre d’Auschwitz est apposée depuis le 20 mars 2006 : « Décédé le 4 novembre 1942, sur instructions du procureur de la République de Charleville-Mézières en date du 7 mars 2006 ».
Lire dans le site Les dates de décès à Auschwitz.
Une plaque commémorative honore sa mémoire.
Sources
- Questionnaire biographique (contribution à l’histoire de la déportation du convoi du 6 juillet 1942), envoyé aux mairies, associations et familles au début de mes recherches, a été remplie par sa veuve en 1990. Elle habitait à l’époque au 1, rue du Maréchal Foch à Floing-Sedan.
- Lettre (13 novembre 1989) de M. René Vise, conseiller régional. Son père, interné lui aussi à Compiègne avait bien connu Julien Jurion.
- Julien Ruchot (lettre à Roger Arnould du 3 février 1972) interné à Compiègne du 22 octobre 1941 au 25 août 1944 a témoigné le 3 février 1972 écrit avoir connu Ernest Tréseux arrêtés le même jour que lui et communique leurs numéros matricule à compègne. Julien Ruchot réussit à s’évader du train qui l’emmenait en Allemagne, dans la nuit du 25 au 26 août 1944 à Montdidier (Somme).
- Death Books from Auschwitz, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, 1995 (basé essentiellement sur les registres – incomplets – de l’état civil de la ville d’Auschwitz ayant enregistré, entre le 27 juillet 1941 et le 31 décembre 1943, le décès des détenus immatriculés).
- Etat civil des Ardennes.
- © Dessin de Franz Reisz, in « Témoignages sur Auschwitz »,
ouvrage édité par l’Amicale des déportés d’Auschwitz (1946).
Notice biographique rédigée en 2007, complétée en 2011, 2017, 2021 et 2024 par Claudine Cardon-Hamet, docteur en Histoire, auteur des ouvrages : « Triangles rouges à Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 » Editions Autrement, 2005 Paris et de « Mille otages pour Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 dit des « 45000 »« , éditions Graphein, Paris 1997 et 2000 (épuisé). Prière de mentionner ces références (auteur et coordonnées de ce site) en cas de reproduction ou d’utilisation totale ou partielle de cette notice biographique.
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