La fiche d’otage de René Domenc, voir traduction plus bas.
René Domenc : né en 1905 à Maisoncelles-en-Gâtinais (Seine-et-Marne) ; domicilié à Fontainebleau (Seine-et-Marne) ; mécanicien ; communiste ; arrêté le 20 octobre 1941; interné au camp de Compiègne ; déporté le 6 juillet 1942 à Auschwitz, où il meurt le 18 septembre 1942.

René Domenc est né le 8 octobre 1905 à Maisoncelles-en-Gâtinais (Seine-et-Marne).
Il habite au 92, rue de France à Fontainebleau (Seine-et-Marne) au moment de son arrestation.
Il est le fils de Jeanne Viratelle et de Jean Domenc, son époux.
Il est mécanicien auto de formation.
Conscrit de la classe 1925, il effectue son service militaire au 3ème groupe « aéro ».
Le 6 octobre 1928 à Bougligny (commune limitrophe de Maisoncelles-en-Gâtinais), René Domenc épouse Marcelle Lucet, couturière, née le 2 août 1908 à Bougligny (Seine-et-Marne).

René Domenc est membre du Parti communiste depuis avril ou mai 1936, trésorier de la cellule de Fontainebleau en 1938/1939 (Cf fiche d’otage).
Avant guerre, il est mécanicien (contremaître) au garage Levy, 25, rue de France à Fontainebleau.

En janvier 1939 la direction générale de la Sûreté auprès du Ministère de l’intérieur sollicite les préfets pour connaître « l’organisation et l’activité de chacun des partis extrémistes » de leur département, dont les cellules du parti communiste. Dans le rapport du Préfet de Seine-et-Marne, qui est encore Hyacinthe Tomasini (nommé en 1935, remplacé de juin 1940 à novembre 1941 par Pierre Voizard), pour le Parti communiste, René Domenc est censé être secrétaire de la cellule n°1 de Fontainebleau-Nord (en fait il n’en est que le trésorier, cf sa fiche d’otage).
Après la dissolution du Parti communiste son domicile est perquisitionné (sans résultat) en septembre 1939 (Cf fiche d’otage).

1940 troupes allemandes au château de Fontainebleau

Le 14 juin 1940, les troupes allemandes sont à Meaux ; le 15 juin à Brie-Comte-Robert et à Melun. Le dimanche 16 juin 1940, des éléments motorisés de la Werhmacht franchissent la Seine à Valvins sur un pont de bateaux. Ils traversent Avon avant d’entrer dans Fontainebleau, précédant le gros des troupes.
Le 14 juin, l’armée allemande était entrée par la Porte de la Villette dans Paris, vidée des deux tiers de sa population. La ville cessant d’être la capitale du pays et devenant le siège du commandement militaire allemand en France. Les troupes allemandes occupent toute la banlieue parisienne et les départements voisins les jours suivants.  Le 22 juin, l’armistice est signé. Le 10 juillet 1940 le maréchal Pétain, investi des pleins pouvoirs par l’Assemblée nationale, abolit la République et s’octroie le lendemain le titre de « chef de l’Etat français ». Il lance la « révolution nationale » en rupture avec nombre de principes républicains (confusion des pouvoirs législatifs et exécutifs ; rejet du multipartisme, suppression des syndicats et du droit de grève, antisémitisme d’état…).

Au chômage en octobre 1940, René Domenc retrouve du travail travaille comme chauffeur mécanicien chez  le transporteur A. Dlachasse, 45 et 57, rue de France (rapport de police).

Le 8 juin 1940 une dénonciation parvient au commissaire de police de Fontainebleau qui la fait remonter au Préfet « Une information de source paraissant sérieuse fait connaître que : 1°) un nommé Domenc, résidant 92, rue de France rez-de-chaussée, et actuellement employé dans une usine à Paris, ou aux environs, serait un communiste très actif. La femme de Domenc est employée dans une maison de tissus et vend sur la place du marché près de la statue. Elle tient constamment des propos défaitistes. Domenc est également locataire d’un premier étage qui aurait été déménagé de nuit durant l’avance allemande sur Amiens. Quand la dame Domenc doit sortir, elle monte invariablement au grenier comme pour se rendre compte que tout va bien là-haut. Des renseignements complémentaires peuvent être recueillis près de Madame N., boulangère. D’autre part, pendant la guerre d’Espagne, Domenc avait comme mission de conduire volontaires et armes à la frontière espagnole. Une perquisition au domicile de cet individu semblerait indiquée » .
Le commissaire de police accompagne le rapport d’une note concernant René Domenc : « connu pour ses opinions communistes, dont il ne se cache pas, il n’a cependant jamais attiré l’attention de nos services par des propos défaitistes. Quant à sa femme, on ne fait sur son compte aucune remarque particulière. Ses opinions politiques seraient celles de son mari ». Le 21 octobre, le préfet répond : « Je n’envisage pas quant à présent de mesure administrative à l’encontre de l’intéressé. Mais vous voudrez bien toutefois lui adresser un sévère avertissement et l’informer qu’il sera tenu pour responsable de toute activité communiste à Fontainebleau » (source site « Mémoire Vive »).

Le nom de René Domenc figure sur la liste d’otages préparée le 25 août 1941 pour le RSHA (Reichssicherheitshauptamt, « Office central de la sécurité du Reich », In document XLIV- 59-60, Saint Germain 24 décembre 1941).

René Domenc est arrêté le 19 octobre 1941 à Bougligny, la commune de naissance de son épouse par des gendarmes de la brigade de Château-Landon à la demande de la Feldgendarmerie de cette ville, le même jour que Prudent Prel , le secrétaire de la cellule de Fontainebleau, qui sera comme lui déporté à Auschwitz.
De nombreux élus ou militants communistes du département sont arrêtés les 19 et 20 octobre. Parmi eux, 44 seront déportés à Auschwitz.

Traduction de la déclaration dactylographiée dans la fiche d’otage de René Domenc, «Kommunistischer Funktionär» (1) : « En mai ou avril 1936, je suis entré au Parti Communiste et en suis resté membre jusqu’à son interdiction en septembre 1939. Après la guerre, je ne me suis plus occupé de politique. Lorsque j’étais membre du PC dans les années 1938-1939, j’étais trésorier de la cellule de Fontainebleau. En septembre 1939 la police française a effectué une perquisition chez moi et n’a rien trouvé. Je ne suis pas encore inculpé, et je ne sais pas pourquoi j’ai été arrêté aujourd’hui. Je crois que c’est pour la simple raison que j’ai été autrefois membre du Parti communiste ».
Lire dans le site la rafle des communistes en Seine-et-Marne, octobre 1941.

René Domenc et Prudent Prel sont transférés par autocar au camp de Royallieu à Compiègne (le Frontstalag 122), le 19 octobre 1941.
Pour comprendre la politique de l’Occupant qui mène à leur déportation, lire dans le blog «une déportation d’otages».
Depuis ce camp administré par la Wehrmacht, il va être déporté à destination d’Auschwitz.
Pour comprendre la politique de l’Occupant qui mène à sa déportation, on lira les deux articles du site qui exposent les raisons des internements, des fusillades et de la déportation : La politique allemande des otages (août 1941-octobre 1942) et «une déportation d’otages».

Depuis le camp de Compiègne, René Domenc  est déporté à Auschwitz dans le convoi du 6 juillet 1942.

Cf Article du site : Les wagons de la Déportation. 

Ce convoi est composé au départ de Compiègne, de 1175 hommes (1100 « otages communistes » – jeunes communistes, anciens responsables politiques et élus du Parti communiste, syndicalistes de la CGT et délégués du personnel d’avant-guerre, militants et syndicalistes clandestins, résistants – de cinquante  « otages juifs » et de quelques « droits communs »). Il faisait partie des mesures de terreur allemandes destinées à combattre, en France, les judéo-bolcheviks responsables, aux yeux de Hitler, des actions armées organisées par le parti communiste clandestin contre des officiers et des soldats de la Wehrmacht, à partir d’août 1941.
Lire dans le site le récit des deux jours du transport : Compiègne-Auschwitz : 6-8 juillet 1942.
Sur les 1175 otages partis de Compiègne le 6 juillet 1942, 1170 sont présents à l’arrivée du train en gare d’Auschwitz le 8 juillet 1942.
Ces derniers sont enregistrés et photographiés au Stammlager d’Auschwitz (camp souche ou camp principal, dénommé en 1943 Auschwitz-I) entre les numéros « 45 157 » et « 46 326 », d’où le nom de « convoi des 45 000 », sous lequel les déportés du camp désignaient ce convoi. Ce matricule – qu’il doit apprendre à dire en allemand et en polonais à toute demande des Kapos et des SS – sera désormais sa seule identité.
Lire dans le site : Le KL Auschwitz-Birkenau.

Son numéro d’immatriculation à Auschwitz n’est pas connu. Le numéro « 45 478 ? » figurant dans mes deux premiers ouvrages sur le convoi du 6 juillet 1942 correspondait à ma tentative de reconstitution de la liste du convoi par matricules. Ce numéro, quoique plausible, ne saurait être considéré comme sûr en raison de l’existence des quatre listes alphabétiques successives que j’ai reconstituées, de la persistance de lacunes pour quatre noms, mais d’incertitudes sur plusieurs centaines de numéros matricules. Il ne figure plus dans mon ouvrage Triangles rouges à Auschwitz.

René Domenc meurt à Auschwitz le 18 septembre 1942 d’après son certificat de décès établi au camp pour le registre d’état civil de la municipalité d’Auschwitz,in Death Books from Auschwitz, Tome 2, page 232), dans les jours qui suivent une importante « sélection » des « inaptes au travail » destinés à être éliminés dans les chambres à gaz de Birkenau.

Sa fiche d’état civil établie en France à la Libération porte toujours la mention « décédé le 25 août 1942 à Auschwitz (Pologne)». Il est regrettable que le ministère n’ait pas corrigé cette date, à l’occasion de l’inscription de la mention « mort en déportation » sur son acte de décès (Journal officiel du 31 juillet 1988), ceci étant rendu possible depuis la parution de l’ouvrage publié par les historiens polonais du Musée d’Auschwitz en 1995.
Lire dans le site  Les dates de décès à Auschwitz.
Son nom figure sur le monument aux morts de Fontainebleau.
Sa veuve s’est remariée en 1955 avec Marceau Legrand.

Note 1 : «Kommunistischer Funktionär», littéralement « fonctionnaire communiste », ne signifie pas ici que René Domenc soit un militant professionnel ou « permanent » appointé par le Parti communiste, mais qu’il est un militant important, ayant une responsabilité dans l’organisation..

Sources

  • Bureau des archives des Victimes des conflits contemporains (BAVCC), Ministère de la Défense, Caen (fiche individuelle consulté en 1992).
  • -Site Internet mémorial « GenWeb».
  • « La Résistance en Seine et Marne« , Claude Cherrier et René Roy, (Presses du Village).
  • Death Books from Auschwitz, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, 1995 (basé essentiellement sur les registres – incomplets – de l’état civil de la ville d’Auschwitz ayant enregistré, entre le 27 juillet 1941 et le 31 décembre 1943, le décès des détenus immatriculés).

Notice biographique rédigée en janvier 2011 par Claudine Cardon-Hamet, docteur en Histoire, auteur des ouvrages : « Triangles rouges à Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 » Editions Autrement, 2005 Paris et de « Mille otages pour Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 dit des « 45000 » », éditions Graphein, Paris 1997 et 2000 (épuisé). Prière de mentionner ces références (auteur et coordonnées de ce blog) en cas de reproduction ou d’utilisation totale ou partielle de cette biographie. Pour compléter ou corriger cette notice, vous pouvez me faire un courriel à deportes.politiques.auschwitz@gmail.com 

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