Marcel Gouilliard © Dominique Gouilliart
Marcel Gouilliard : né en 1903 à Quessy (Aisne) ; domicilié à Tergnier-Fargniers (Aisne) ; cheminot ; responsable Cgt et communiste ; arrêté le 30 mars 1941 comme otage ; interné à Châteaubriant, Voves, Compiègne ; déporté le 6 juillet 1942 à Auschwitz où il meurt le 7 octobre 1942.

Marcel Gouilliard, dit « Le boiteux » est né le 23 août 1903 à Quessy (Aisne).
Il habite au 4, rue Jules Ferry à Tergnier-Fargniers (Aisne) au moment de son arrestation. Marcel Gouilliard est le fils de Charlotte, Louise Niay, sans profession (elle est née le 3 décembre 1888 à Fargniers – Aisne, et y est décédée le 21 avril 1967) et de Zéphirin Gouilliard, employé aux Chemins de fer du Nord (il est né le 30 septembre 1874 à Mayot – Aisne). Ses parents se sont mariés le 28 avril 1899 à Hirson (Aisne).
Il a deux frères et une sœur : Arthur (1901-1955), Gérard (1907-1945) et Camille (1910-1985).
Leur père est mort le 16 mai 1918 à l’hôpital d’Abbeville des suites de ses blessures reçues au cours du bombardement de sa locomotive par un avion allemand : il était chauffeur de première classe, cinquième section de Chemins de fer de campagne, matricule 207, classe 1894. Il a été déclaré « Mort pour la France » et a reçu la Croix de guerre avec étoile de bronze à titre posthume.
Marcel Gouillard épouse Laure, Marie, Louise Frayard à Fargniers, le 27 mars 1927.
Cheminot, il est ajusteur aux ateliers SNCF de Tergnier (n° SNCF 44369). Il est l’un des dirigeants de la Fédération CGT des Cheminots, région Nord.
Marcel Gouilliard est également membre du Parti communiste : secrétaire de la cellule de Tergnier, « il a fondé la cellule communiste essentiellement parmi ses camarades de travail de l’atelier du chemin de fer » (Roger Debarre).

Dès le 14 mai 1940, de Montcornet à Hirson, de Crécy-sur-Serre à Wassigny, les chars allemands bousculent tout sur leur chemin, non sans combats héroïques d’unités françaises, avant de toucher le Vermandois, le Chaunois, les confins du Laonnois et du Soissonnais puis le Sud du département jusqu’au 13 juin. Les blindés allemands de Gudérian sont devant Laon le 15 mai 1940. La Nordost Linie ou ligne noire (également appelée ligne du Führer), qui passe au sud de Laon est créée le 7 juillet 1940 et fonctionne le 20 juillet. Les « zones réservées » ainsi délimitées sont destinés à devenir des zones de peuplement allemand. Le 14 juin 1940, l’armée allemande d’occupation entre dans Paris. L’armistice est signé le 22 juin. Le 10 juillet 1940 le maréchal Pétain, investi des pleins pouvoirs par l’Assemblée nationale, s’octroie le lendemain le titre de « chef de l’Etat français ».

En septembre 1940, trois anciens militants communistes de Tergnier Paul CailleMarcel Gouillard et Anselme Arsa (cheminot communiste, lieutenant-colonel FFI à la Libération) réorganisent le parti communiste clandestin en créant un triangle de direction. « Une grande part de l’activité déployée était dévolue à la diffusion de propagande communiste » (in LeMaitron, Frédéric Stévenot, in notice de Fernand Bouyssou).
Marcel Gouilliard est arrêté avec Paul Caille le 30 mars 1941 sur ordre de la préfecture de l’Aisne, par la police française « pour la police française » sur ordre de la préfecture de l’Aisne (daté du 28 mars 1941). 
Il est interné au camp de Choisel à Châteaubriant de mars 1941 au 7 mai 1942. Il y reçoit le matricule 396. Son camarade Paul Caille a le numéro « 395 ».

Bordereaux d’immatriculation au Camp de Choisel de Paul Caille et Marcel Gouillard

Le 7 mai 1942 il est transféré au camp de Voves (matricule 649).

Fiche d’otage de Marcel Gouillard

Le 2 juin, à la demande de la Feldkommandantur d’Orléans – après intervention de celle de Laon -, il est transféré à la prison de Chartres avec Edouard Bonnet et Paul Caille, cheminot comme lui. Son nom figurait sur une liste de communistes susceptibles d’être choisis comme otages, avec la mention «activiste communiste, fondateur de la cellule communiste de l’atelier des chemins de fer. En février 1941 on a trouvé des tracts communistes à son habitation» accompagnée de la mention «Chateaubriant».
Cette liste KF 602 qui émane de la préfecture de l’Aisne est transmise aux autorités allemandes le 19 mars 1942 (in document du CDJC – XLIV- 2).
Le 3 juin 1942, Marcel Gouilliard est interné au camp allemand de Royallieu à Compiègne (le Frontstalag 122), en vue de sa déportation comme otage.
Depuis ce camp administré par la Wehrmacht, il va être déporté à destination d’Auschwitz. Pour comprendre la politique de l’Occupant qui mène à sa déportation, on lira les deux articles du site qui exposent les raisons des internements, des fusillades et de la déportation : La politique allemande des otages (août 1941-octobre 1942) et «une déportation d’otages».

Depuis le camp de Compiègne, Marcel Gouillard est déporté à Auschwitz dans le convoi du 6 juillet 1942.

Cf Article du site : Les wagons de la Déportation.

Ce convoi est composé au départ de Compiègne, de 1175 hommes (1100 « otages communistes » – jeunes communistes, anciens responsables politiques et élus du Parti communiste, syndicalistes de la CGT et délégués du personnel d’avant-guerre, militants et syndicalistes clandestins, résistants – de cinquante trois « otages juifs » et de quelques « droits communs »). Il faisait partie des mesures de terreur allemandes destinées à combattre, en France, les judéo bolcheviks responsables, aux yeux de Hitler, des actions armées organisées par le parti communiste clandestin contre des officiers et des soldats de la Wehrmacht, à partir d’août 1941. Lire dans le site le récit des deux jours du transport : Compiègne-Auschwitz : 6-8 juillet 1942. Sur les 1175 otages partis de Compiègne le 6 juillet 1942, 1170 sont présents à l’arrivée du train en gare d’Auschwitz le 8 juillet 1942. Ces derniers sont enregistrés et photographiés au Stammlager d’Auschwitz (camp souche ou camp principal, dénommé en 1943 Auschwitz-I) entre les numéros « 45157 » et « 46326 », d’où le nom de « convoi des 45000 », sous lequel les déportés du camp désignaient ce convoi. Ce matricule – qu’il doit apprendre à dire en allemand et en polonais à toute demande des Kapos et des SS – sera désormais sa seule identité. Lire dans le site : Le KL Auschwitz-Birkenau.
Son numéro d’immatriculation à Auschwitz n’est pas connu. Le numéro «46240 ??» figurant dans mes deux premiers ouvrages sur le convoi du 6 juillet 1942 (éditions de 1997 et 2000) correspondait à une tentative de reconstitution de la liste du convoi par matricules, qui n’a pu aboutir en raison de l’existence de quatre listes alphabétiques successives, de la persistance de lacunes pour plus d’une dizaine de noms et d’incertitudes sur plusieurs centaines de numéros matricules.
Lire dans le site le récit de leur premier jour à Auschwitz : L’arrivée au camp principal, 8 juillet 1942. et 8 juillet 1942 : Tonte, désinfection, paquetage, « visite médicale ».  Après l’enregistrement, il passe la nuit au Block 13 (les 1170 déportés du convoi y sont entassés dans deux pièces). Le 9 juillet tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau, situé à 4 km du camp principal. Le 13 juillet il est interrogé sur sa profession. Les spécialistes dont les SS ont besoin pour leurs ateliers sont sélectionnés et vont retourner à Auschwitz I (approximativement la moitié du convoi. Les autres, restent à Birkenau, employés au terrassement et à la construction des Blocks.

Marcel Gouilliard meurt à Auschwitz le 7 octobre 1942, d’après son certificat de décès établi au camp (in Death Books from Auschwitz / Sterbebücher von Auschwitz / livre des morts), Tome 2, page 380).
Sa fiche d’état civil établie en France à la Libération porte toujours la mention «décédé le 20 octobre 1942 à Auschwitz (Pologne)». Il serait souhaitable que le ministère corrige cette date (ce qui est rendu possible depuis la parution de l’ouvrage publié par les historiens polonais du Musée d’Auschwitz en 1995). Lire dans le blog Les dates de décès à Auschwitz.
Le nom de Marcel Gouilliard est honoré sur la plaque commémorative SNCF et celle des ateliers SNCF.

Hirson mars 2015

Son nom a également été honoré lors de l’exposition et conférence à la galerie Gilbert Ardoin à Hirson, en mars 2015, à  l’initiative de Michel Briset, de l’Institut CGT d’histoire sociale de l’Aisne et de l’Association « Mémoire vive » des « 31000 » et « 45000 », à la mémoire des dix-neuf Axonais et de l’Hirsonnais Antoine Sué, tous déportés à Auschwitz-Birkenau. En présence de Fernand Devaux, rescapé (photo © blog de M. Jean-Jacques Thomas, maire de Hirson).

Sources

  • Témoignage de Roger Debarre (cassette audio avril 1972).
  • Archives du CDJC : Liste d’otages de l’Aisne. KF 602(XL-IV 2 )
  • Stéphane Fourmas, Le centre de séjour surveillé de Voves (Eure-et-Loir) janvier 1942 – mai 1944, mémoire de maîtrise, Paris-I (Panthéon-Sorbonne), 1998-1999.
  • Liste de Chateaubriant communiquée par Louis Oury, écrivain, chercheur ayant travaillé sur les archives de la Felkommandantur de Nantes et du camp de Châteaubriant. Correspondance d’avril 1991.
  • Bureau de la division des archives des victimes des conflits contemporains (DAVCC), Ministère de la Défense, Caen (fiche individuelle consultée en octobre 1993).
  • Listes – incomplètes – du convoi établies par la FNDIRP après la guerre (archives de la F.N.D.I.R.P).
  • Death Books from Auschwitz, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, 1995 (basé essentiellement sur les registres – incomplets – de l’état civil d’Auschwitz ayant enregistré, entre le 27 juillet 1941 et le 31 décembre 1943, le décès des détenus immatriculés).
  • © Site Site Internet Mémorial-GenWeb
  • Mel de Dominique Gouilliard (26 juin 2011) concernant l’orthographe du nom de Marcel Gouilliard, ainsi que des renseignements sur le père de celui-ci.
  • Photo de Marcel Gouilliard transmise par Dominique Gouilliart (18 Juillet 2011).
  • Recherches généalogiques, Pierre Cardon.

Notice biographique rédigée en janvier 2011, complétée en 2020 par Claudine Cardon-Hamet, docteur en Histoire, auteur des ouvrages : « Triangles rouges à Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 » Editions Autrement, 2005 Paris et de « Mille otages pour Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 dit des « 45000 »« , éditions Graphein, Paris 1997 et 2000 (épuisé). Prière de mentionner ces références (auteur et coordonnées de ce site) en cas de reproduction ou d’utilisation totale ou partielle de cette notice biographique. Pour la compléter ou la corriger, vous pouvez me faire un courriel à deportes.politiques.auschwitz@gmail.com 

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *