Auguste Picard : né en 1896 à Marigny-Brizay (Vienne) ; domicilié à Saint Ustres, (Vienne) ; employé chemins de fer (P/O / SNCF) ; communiste ; arrêté le 23 juillet 1941, interné aux camps allemands de la Chauvinerie, puis de Compiègne ; déporté le 6 juillet 1942 à Auschwitz où il meurt le 2 septembre 1942.

Auguste Picard est né le 8 juillet 1896 au domicile de ses parents à Saint-Léger, lieu-dit de la commune de Marigny-Brizay (Vienne). Il habite à Saint Ustres, commune d’Ingrandes-sur-Vienne (Vienne) au moment de son arrestation.
Il est le fils de Marie, Alexandrine Couturier, 35 ans, le 22 mai 1865 à Dissay, sans profession et de Benjamin Picard, 43 ans, né le 23 mai 1857 à Jaulnay, cultivateur, son époux. Il a deux frères (Roger, né en 1889, et Henri, né en 1893)  et une sœur, Germaine, née en 1899). Lors du recensement de 1901, la famille Picard habite au Châtelet, autre lieu-dit de Marigny-Brizay.
Son registre matricule militaire indique qu’il habite Marigny-Brizay, où il travaille comme cultivateur. Il a le permis de conduite moto.
Il mesure 1m 68, a les cheveux châtains foncé, les yeux bleus, le front moyen, le nez rectiligne et le visage rond. Il a un niveau d’instruction « n°3 » pour l’armée (sait lire, écrire et compter, instruction primaire développée).
Conscrit de la classe 1916, Auguste Picard n’est pas mobilisé par anticipation en 1915, comme la plupart des jeunes gens de sa classe, depuis la déclaration de guerre, car il a été classé dans la « 5è partie de la liste de 1915″ et dans la première partie de celle de 1916. C’est donc le 6 septembre 1916 qu’Auguste Picard est incorporé au 169è régiment d’infanterie. Le 12 février 1917, il « passe » au 82è R.I. Le 11 août suivant, il est affecté au 147è R.I. de ligne de Sedan. Le mardi 2 octobre 1918 il est intoxiqué par les gaz de combat lors de la prise de Marvaux-Vieux (Ardennes). Il est évacué vers l’arrière le 3 octobre. Ses services « aux armées » (au front) sont comptabilisés du 2 mars 1917 au 3 octobre 1918.
Le 2 septembre 1919, il est « envoyé en congé illimité de démobilisation », « certificat de bonne conduite accordé » par le dépôt du 32è R.I. Il
« se retire » à Marigny-Brisay le 20 septembre 1919.

Auguste Picard épouse
Blanche, Marie Bussereau, le 25 septembre 1920 à Châtellerault (Vienne). Elle est garde-barrière, née le 4 janvier 1901 dans cette ville.
Le couple a six enfants :
Georges, né en 1920, Edgard, né en 1921, Henriette, née en 1923, Maurice, né en 1925, tous quatre à Beaumont (Vienne), Jacques  né en 1929 et Yves, né en 1933 tous deux à Ingrandes.
Auguste Picard est embauché comme cantonnier par la Compagnie des chemins de fer d’Orléans (Paris-Orléans /P.O.) le 11 octobre 1920.
En septembre 1927, il est affecté à la 23è section / 2è subdivision du P.O, à la gare de La Tricherie, commune de Beaumont (Vienne), où il habite.
Le 27 novembre 1930 il est nommé à la gare d’Ingrandes-sur-Vienne.
Trésorier de cellule, il est un des responsables du Parti communiste d’Ingrandes 

La gare d’Ingrandes-sur-Vienne © Wikipédia

Il est dégagé de toute obligation militaire le 4 août 1934 (comme père de 6 enfants vivants / article 58 loi du
31 mars 1922). La carte du combattant lui est accordée le 13 août 1934.
En 1936 la famille habite à Saint Ustres, commune d’Ingrandes-sur-Vienne, une petite maison de garde barrière, au n° 9 à la Barrière de Saint Ustre. Benjamin Picard, son père, vit avec eux.
Auguste Picard est alors sous-chef de canton à Ingrandes pour la SNCF. 

Soldats allemands à Châtellerault

Le 14 juin 1940, l’armée allemande entre par la Porte de la Villette dans Paris. Le 22 juin 1940, l’armistice est signé. 3000 Allemands occupent Châtellerault le 23 juin 1940. Le 10 juillet 1940 le maréchal Pétain, investi des pleins pouvoirs par l’Assemblée nationale, abolit la République et s’octroie le lendemain le titre de « chef de l’Etat français ». Il lance la « révolution nationale » en rupture avec nombre de principes républicains (confusion des pouvoirs législatifs et exécutifs ; rejet du multipartisme, suppression des syndicats et du droit de grève, antisémitisme d’état…). Dans le cadre de la réorganisation administrative opérée par Vichy le 19 avril 1941, Poitiers devient la capitale de la «région de Poitiers», qui comprend les départements de la Vienne, la Vendée, les Deux-Sèvres, la Charente et la Charente Maritime.

Au début de l’Occupation, il fait partie (avec Alphonse Rousseau et André Perrin) du groupe qui deviendra le « groupe Blanzat » des FTP de la Vienne.
Il sera homologué dans la Résistance à titre posthume à la date du 1er mars 1941.
Auguste Picard est arrêté le 23 juin 1941 à son domicile par des policiers français, dans le cadre de la grande rafle commencée le 22 juin, jour de l’attaque hitlérienne contre l’Union soviétique, sous le nom «d’Aktion Theoderich».

Lire dans le site l’article « L’Aktion Theoderich dans la Vienne », sur l’arrestation des 33 militants communistes et syndicalistes de la Vienne. Liste et récits des internements à Poitiers et à Compiègne. 
Comme ses camarades, il est conduit au camp allemand de la Chauvinerie-Poitiers, ettransféré le 11 juillet 1941 au camp allemand de Royallieu à Compiègne (le Frontstalag 122).
Depuis ce camp administré par la Wehrmacht, il va être déporté à destination d’Auschwitz.

Pour comprendre la politique de l’Occupant qui mène à sa déportation, on lira les deux articles du site qui exposent les raisons des internements, des fusillades et de la déportation : La politique allemande des otages (août 1941-octobre 1942) et «une déportation d’otages».

Depuis le camp de Compiègne, Auguste Picard est déporté à Auschwitz dans le convoi du 6 juillet 1942.

Cf Article du site : Les wagons de la Déportation. 

Ce convoi est composé au départ de Compiègne, de 1175 hommes (1100 « otages communistes » – jeunes communistes, anciens responsables politiques et élus du Parti communiste, syndicalistes de la CGT et délégués du personnel d’avant-guerre, militants et syndicalistes clandestins, résistants – de cinquante  « otages juifs » et de quelques « droits communs »). Il faisait partie des mesures de terreur allemandes destinées à combattre, en France, les judéo-bolcheviks responsables, aux yeux de Hitler, des actions armées organisées par le parti communiste clandestin contre des officiers et des soldats de la Wehrmacht, à partir d’août 1941.
Lire dans le site le récit des deux jours du transport : Compiègne-Auschwitz : 6-8 juillet 1942.
Sur les 1175 otages partis de Compiègne le 6 juillet 1942, 1170 sont présents à l’arrivée du train en gare d’Auschwitz le 8 juillet 1942. Ces derniers sont enregistrés et photographiés au Stammlager d’Auschwitz (camp souche ou camp principal, dénommé en 1943 Auschwitz-I) entre les numéros « 45157 » et « 46326 », d’où le nom de « convoi des 45000 », sous lequel les déportés du camp désignaient ce convoi. Ce matricule – qu’il doit apprendre à dire en allemand et en polonais à toute demande des Kapos et des SS – sera désormais sa seule identité.
Lire dans le site : Le KL Auschwitz-Birkenau.

On ignore son numéro d’immatriculation à son arrivée à Auschwitz le 8 juillet 1942. Le numéro « 45 982 ? » figurant dans mes deux premiers ouvrages sur le convoi du 6 juillet 1942 correspondait à ma tentative de reconstitution de la liste du convoi par matricules. Ce numéro, quoique plausible, ne saurait être considéré comme sûr en raison de l’existence des quatre listes alphabétiques successives que j’ai reconstituées, de la persistance de lacunes pour quatre noms, mais d’incertitudes sur plusieurs centaines de numéros matricules. Il ne figure plus dans mon ouvrage Triangles rouges à AuschwitzDe plus, la photo du déporté portant ce numéro matricule prise à Auschwitz lors de la séance d’immatriculation le 8 juillet 1942, n’a pas été retrouvée : aucune comparaison avec sa photo d’avant-guerre n’est possible.

Lire dans le site le récit de leur premier jour à Auschwitz : L’arrivée au camp principal, 8 juillet 1942. et 8 juillet 1942 : Tonte, désinfection, paquetage, « visite médicale ».
Après l’enregistrement, il passe la nuit au Block 13 (les 1170 déportés du convoi y sont entassés dans deux pièces). Le 9 juillet tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau (Brzezinka), situé à 4 km du camp principal. Le 13 juillet il est interrogé sur sa profession. Les spécialistes dont les SS ont besoin pour leurs ateliers sont sélectionnés et vont retourner à Auschwitz I (approximativement la moitié du convoi. Les autres, restent à Birkenau, employés au terrassement et à la construction des Blocks.

© Dessin de Franz Reisz, 1946

Auguste Picard meurt à Auschwitz-Birkenau le 2 septembre 1942 d’après son certificat de décès établi au camp pour le registre d’état civil de la municipalité d’Auschwitz (in Death Books from Auschwitz Tome 3 page 926). Sa fiche d’état civil établie en France à la Libération porte toujours la mention «décédé en 1942 (mois inconnu) à Auschwitz (Pologne)». Il est regrettable que le ministère n’ait pas corrigé cette date, à l’occasion de l’inscription de la mention « mort en déportation » sur son acte de décès (Journal officiel 14 décembre 1997). Ceci était pourtant rendu possible depuis la parution de l’ouvrage publié par les historiens polonais du Musée d’Auschwitz en 1995.
Lire dans le site Les dates de décès à Auschwitz.

Son nom est inscrit sur le monument aux morts, sur la place à côté du cimetière d’Ingrandes.

Sources

  • Recherches de Raymond Jamain, de l’ADIRP de la Vienne. Photo d’identité.
  • Témoignages de Maurice Rideau, 46056, (2 octobre 1971).
  • Raymond Montégut (novembre 1972).
  • Recherches de Michel Bloch, historien, professeur honoraire à l’université de Poitiers.
  • Lettre d’Emile Lecointre (23 février 1989) : souvenirs concernant 15 de ses camarades arrêtés avec lui le 23 juin 1941.
  • Death Books from Auschwitz, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, 1995 (basé essentiellement sur les registres – incomplets – de l’état civil de la ville d’Auschwitz ayant enregistré, entre le 27 juillet 1941 et le 31 décembre 1943, le décès des détenus immatriculés).
  • Fichier national du Bureau des archives des victimes des conflits contemporains (DAVCC), Ministère de la Défense, Caen. Fiche individuelle consultée en octobre 1993.
  • © Site Internet Mémorial-GenWeb
  • © Site www.mortsdanslescamps.com
  • © Site « VRID » Vienne Résistance, Internement, Déportation.
  • © Etat civil et Registres matricules militaires de la Vienne.
  • Recensement de 1936 à Ingrandes (Vienne).

Notice biographique rédigée à l’occasion de l’exposition organisée en octobre 2001 par l’AFMD de la Vienne à Châtellerault, complétée en 2011 et 2022 par Claudine Cardon-Hamet, docteur en Histoire, auteur des ouvrages : «Triangles rouges à Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942», Editions Autrement, 2005 Paris et de «Mille otages pour Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 dit des « 45000 », éditions Graphein, Paris 1997 et 2000 (épuisé). Prière de mentionner ces références (auteur et coordonnées de ce siteg) en cas de reproduction ou d’utilisation totale ou partielle de cette notice biographique. Pour compléter ou corriger cette notice, vous pouvez me faire un courriel à deportes.politiques.auschwitz@gmail.com .Pensez à indiquer les sources et éventuellement les documents dont vous disposez pour confirmer ces renseignements et illustrer cette biographie.

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