Robert Moricci lors d’une quête pour le peuple espagnol montage (Collection Images Mémoire draveilloise).
Robert Moricci : né le 22 janvier 1922 à Paris 14è (Seine) ; domicilié à Draveil (Seine-et-Oise / Essonne) ; coupeur de bois, garçon de café ; membre des jeunesses communistes ; arrêté le 14 juillet 1941, condamné à 6 mois de prison purgés à Fresnes, au fort de Villeneuve Saint Georges, puis à la prison du Cherche-midi ; interné au camp de Compiègne ; déporté le 6 juillet 1942 à Auschwitz, où il meurt le 18 septembre 1942.

Robert Moricci est né le 22 janvier 1922 à Paris XIVè (Seine). Il habite au 48, rue Victor Hugo à Draveil (Seine-et-Oise / Essonne) au moment de son arrestation.
A Draveil, il est ami avec Maurice Le Berre (né en 1921), arrivé à 10 ans dans cette ville : «il jouait au SOI (1), venait le jeudi, le dimanche, aux colonies de vacances, et tous ces jeunes jouaient ensemble.
Il est coupeur de bois, garçon de café. On sait par sa fiche d’otage qu’il est marié, sans enfant.

C’est là que Le Berre a pris les premiers contacts qui se sont solidifiés au «Camp de la Paix», notamment avec Pierre Georges, le futur Colonel Fabien (…). D’autres gamins du SOI deviendront des résistants (…) Très vite, le terrain de Mainville est investi par de nombreux groupes SOI de toute la Région parisienne puis du monde entier. Il sera connu sous le nom de «Camp de la Paix». De fortes amitiés se nouent au Camp de la Paix dans les années d’avant-guerre. Elles allaient devenir décisives lorsqu’il a fallu former les premiers groupes de résistance, trouver des partenaires sûrs et solides» (Martine Garcin).

Robert Moricci est membre de la Fédération des Jeunesses communistes et participe aux activités de celle-ci. Il a 17 ans en 1939.

Le département de la Seine-et-Oise (une partie constituera l’Essonne le 1er  janvier 1968) est occupé malgré la résistance acharnée du 19e régiment de tirailleurs algériens sous les ordres du colonel Chartier, qui ne capitulera – faute de munitions – que le 16 juin 1940. Le 14 juin, l’armée allemande est entre par la Porte de la Villette dans Paris, vidée des deux tiers de sa population. La ville cesse d’être la capitale du pays et devient le siège du commandement militaire allemand en France.
Les troupes allemandes occupent toute la banlieue parisienne les jours suivants.  Le 22 juin, l’armistice est signé. Le 10 juillet 1940 le maréchal Pétain, investi des pleins pouvoirs par l’Assemblée nationale, abolit la République et s’octroie le lendemain le titre de « chef de l’Etat français ». Il lance la « révolution nationale » en rupture avec nombre de principes républicains (confusion des pouvoirs législatifs et exécutifs ; rejet du multipartisme, suppression des syndicats et du droit de grève, antisémitisme d’état…).

Robert Moricci est arrêté dans la nuit du 13 au 14 juillet 1941 par la Police française (Commissariat de Montgeron, préfecture de Versailles), « pour le compte de la Feldkommandantur 758« , pour une distribution de tracts du Front National préparant la manifestation du 14 juillet (avec Marcel Linard, André Rousseau et Pierre Bonnot).
Il est condamné le 21 juillet 1941 à 6 mois de prison par le tribunal de Saint Cloud pour propagande communiste (la fin de sa peine est fixée au 15 janvier 42, comme pour André Rousseau). Il est alors interné à Fresnes puis au Cherche-Midi (le 2 août 1941), et au fort de Villeneuve-St-Georges (André Rousseau y est également interné d’octobre à janvier 1942).

Robert Moricci figure sur une première liste d’otages XLV -29 (ci-contre) en date du 13 novembre 1941.
Son nom est ensuite inscrit sur une liste d’otages susceptibles d’être exécutés – XLV a2 / n°2 de la liste – (2) et à l’expiration de sa peine de prison, le 14 ou le 15 janvier 1942, il est donc remis aux autorités allemandes à leur demande.

Celles-ci l’internent au camp allemand de Royallieu à Compiègne (le Frontstalag 122).
Depuis ce camp administré par la Wehrmacht, il va être déporté à destination d’Auschwitz.
Pour comprendre la politique de l’Occupant qui mène à sa déportation, on lira les deux articles du site qui exposent les raisons des internements, des fusillades et de la déportation : La politique allemande des otages (août 1941-octobre 1942) et «une déportation d’otages».

 Depuis le camp de Compiègne, Robert Moricci est déporté à Auschwitz dans le convoi du 6 juillet 1942

Cf Article du site : Les wagons de la Déportation. 

Ce convoi est composé au départ de Compiègne, de 1175 hommes (1100 « otages communistes » – jeunes communistes, anciens responsables politiques et élus du Parti communiste, syndicalistes de la CGT et délégués du personnel d’avant-guerre, militants et syndicalistes clandestins, résistants – de cinquante  « otages juifs » et de quelques « droits communs »). Il faisait partie des mesures de terreur allemandes destinées à combattre, en France, les judéo-bolcheviks responsables, aux yeux de Hitler, des actions armées organisées par le parti communiste clandestin contre des officiers et des soldats de la Wehrmacht, à partir d’août 1941.
Lire dans le site le récit des deux jours du transport : Compiègne-Auschwitz : 6-8 juillet 1942.
Sur les 1175 otages partis de Compiègne le 6 juillet 1942, 1170 sont présents à l’arrivée du train en gare d’Auschwitz le 8 juillet 1942.
Ces derniers sont enregistrés et photographiés au Stammlager d’Auschwitz (camp souche ou camp principal, dénommé en 1943 Auschwitz-I) entre les numéros « 45 157 » et « 46 326 », d’où le nom de « convoi des 45 000 », sous lequel les déportés du camp désignaient ce convoi. Ce matricule – qu’il doit apprendre à dire en allemand et en polonais à toute demande des Kapos et des SS – sera désormais sa seule identité.
Lire dans le site : Le KL Auschwitz-Birkenau.

On ignore son numéro d’immatriculation à son arrivée à Auschwitz le 8 juillet 1942. Le numéro «45 897 ?» figurant dans mes deux premiers ouvrages sur le convoi du 6 juillet 1942 correspondait à une tentative de reconstitution de la liste du convoi par matricules. Cette reconstitution n’a pu aboutir en raison de l’existence de quatre listes alphabétiques successives, de la persistance de lacunes pour plus d’une dizaine de noms et d’incertitudes sur plusieurs centaines de numéros matricules. De plus, la photo de ce matricule est manquante. Il ne figure plus dans mon ouvrage «Triangles rouges à Auschwitz».

Lire dans le site le récit de leur premier jour à Auschwitz : L’arrivée au camp principal, 8 juillet 1942. et 8 juillet 1942 : Tonte, désinfection, paquetage, « visite médicale ».  Après l’enregistrement, il passe la nuit au Block 13 (les 1170 déportés du convoi y sont entassés dans deux pièces). Le 9 juillet tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau (Brzezinka), situé à 4 km du camp principal. Le 13 juillet il est interrogé sur sa profession. Les spécialistes dont les SS ont besoin pour leurs ateliers sont sélectionnés et vont retourner à Auschwitz I (approximativement la moitié du convoi. Les autres, restent à Birkenau, employés au terrassement et à la construction des Blocks.

Robert Moricci meurt à Auschwitz le 18 septembre 1942 d’après le registre d’état civil de la municipalité d’Auschwitz (in Death Books from Auschwitz Tome 3 page 829). Cent quarante huit «45000» ont été déclarés décédés à l’état civil d’Auschwitz les 18 et 19 septembre, ainsi qu’un nombre important de détenus d’autres nationalités : il est probable qu’ils sont tous morts gazés à la suite d’une vaste «sélection» interne des «inaptes au travail», opérée sans doute dans les blocks d’infirmerie. Les SS indiquaient des causes naturelles fictives sur les registres des infirmeries pour masquer ces assassinats collectifs : Pour Robert Moricci, comme pour d’autres, la mention portée est : «maladie du cœur, échec de circulation sanguine».

Robert Moricci a été homologué «Déporté Politique». La mention «Mort pour la France» est portée sur son acte de décès, ainsi que la mention «Mort en déportation» (JO du 14 décembre 1997).
Son nom est inscrit sur le monument aux morts du cimetière de Sénart (relevé Christian Dussaussoy).

  • Note 1: Secours Ouvrier International : «Le SOI est le premier groupe qui se soit occupé d’enfance à côté du curé de Draveil» (Roger Payen, in «SOI et Camp de la Paix de Mainville, pépinières de résistants», © «Caractère Draveillois».
  • Note 2 : «A l’automne 1941, un «Code des otages» rappelle et formule les règles devant gérer les fusillades et le choix des victimes. Cette période est l’occasion d’une nouvelle radicalisation de la politique répressive des autorités allemandes. Mais dès décembre 1941, alors qu’ Hitler juge insuffisant le nombre d’otages fusillés, le MBF demande également à Berlin d’y ajouter des déportations massives de représailles, considérées plus dissuasives» (S. Klarsfeld, 1979 ; C. Cardon-Hamet, 1997-2000 ; R. Delacor, 2000 ; A. Meyer, 2002 ; J-M. Berlière, F. Liaigre, 2004 ; G. Eismann, 2005). In Thomas Fontaine. © Chronologie : Répression et persécution en France occupée 1940-1944, juin 2010.Lire aussi dans ce blog :Une déportation de répression de la Résistance.

Sources

  • Liste d’otages XLV a2 (pages 156 et 157).
  • Attestation d’appartenance au Front National de lutte dès sa création (Munier, Liquidateur).
  • Death Books from Auschwitz, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, 1995 (basé essentiellement sur les registres – incomplets – de l’état civil de la ville d’Auschwitz ayant enregistré, entre le 27 juillet 1941 et le 31 décembre 1943, le décès des détenus immatriculés).
  • Bureau des archives des victimes des conflits contemporains (Archives de Caen du ministère de la Défense). « Liste communiquée par M. Van de Laar, mission néerlandaise de Recherche à Paris le 29.6.1948« , établie à partir des déclarations de décès du camp d’Auschwitz. Liste V n° 31516, liste S n°249.(«troubles cardiaques»
  • © Sitewww.mortsdanslescamps.com
  • © Site Mémorial Genweb
  •  © Site « Caractères draveillois, Résistance et création » http://draveil-resistance.com

Notice biographique rédigée en août 2011, complétée en 2018 et 2022 par Claudine Cardon-Hamet (docteur en Histoire, auteur des ouvrages : Mille otages pour Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 dit des « 45000 », éditions Graphein, Paris 1997 et 2000 (épuisé) et de Triangles rouges à Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 dit des « 45000 », éditions Autrement, Paris 2005) .  Prière de mentionner ces références (auteur et coordonnées de ce site) en cas de reproduction ou d’utilisation totale ou partielle de cette notice biographique.
Pour la compléter ou la corriger, vous pouvez me faire un courriel à deportes.politiques.auschwitz@gmail.com 

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