Matricule « 46 285 » à Auschwitz

Albert Janos : né en 1894 à Ananiev (Russie) ; domicilié à Bordeaux (Gironde) ; cuisinier ; arrêté le 7 septembre 1941 ; interné à Drancy, puis à Compiègne ; déporté le 6 juillet 1942 à Auschwitz, où il meurt le 10 août 1942.

Albert Janos est né 8 janvier 1894 à Ananiev (alors en Russie) ou Ananiv, aujourd’hui en Ukraine.  Il est domicilié à Bordeaux (Gironde) au moment de son arrestation (le nom de la rue est illisible sur la fiche de la Division des archives des victimes des conflits contemporains), au 2, rue (illisible, peut être 2 rue des Trois-Conils).

Il est marié à Suzanne Scheir,
qui habite au 8, rue Palouzié à Saint-Ouen (Seine / Seine-Saint-Denis) à la Libération (1).
Selon sa déclaration lors de son immatriculation à Auschwitz, Albert Janos exerce le métier de cuisinier.

En mai et juin 1940 Bordeaux subit des bombardements quotidiens. Il y a plus d’un million de réfugiés en Gironde. Le 22 juin, l’armistice est signé : la moitié nord de la France et toute la façade ouest sont occupées. Bordeaux est déclarée ville ouverte par le maréchal Pétain. Le 27 juin les premiers détachements allemands traversent la ville. Le 28, le général Von Faber du Faur installe
l’administration allemande dans les grands hôtels du centre-ville et la Feldkommandantur à la cité universitaire.
La ligne de démarcation coupe le département en deux.
Le 10 juillet 1940 le maréchal Pétain, investi des pleins pouvoirs par l’Assemblée nationale, abolit la République et s’octroie le lendemain le titre de « chef de l’Etat français ». Il lance la « Révolution nationale » en rupture avec nombre de principes républicains (confusion des pouvoirs législatifs et exécutifs ; rejet du multipartisme, suppression des syndicats et du droit de grève, antisémitisme d’état…).

Albert Janos est arrêté comme otage juif le 7 septembre (ou le 7 novembre) 1941 à Bordeaux (les deux dates existent sur ses fiches au DAVCC).

Le camp de Drancy

Il est interné au camp de Drancy (photo ci-contre) ouvert le 20 août 1941, puis il est transféré au camp allemand de Compiègne le 29 mars ou le 29 avril 1942 (la date inscrite sur sa fiche au BAVCC est celle du 29 mars, mais elle semble avoir été l’objet d’une correction).
Or un transfert de 784 Juifs a lieu de Drancy vers le camp allemand de Compiègne le 29 avril ; 751 d’entre eux sont déportés le 5 juin 1942 à Auschwitz, et quelques autres, dont Albert Janos, dans le convoi du 6 juillet 1942).

Lire l’article : Les déportés juifs du convoi du 6 juillet 1942 

Depuis ce camp administré par la Wehrmacht, il va être déporté à destination d’Auschwitz. Pour comprendre la politique de l’Occupant qui mène à sa déportation, on lira les deux articles du site qui exposent les raisons des internements, des fusillades et de la déportation : La politique allemande des otages (août 1941-octobre 1942) et «une déportation d’otages».

Depuis le camp de Compiègne, Albert Janos est déporté à Auschwitz dans le convoi du 6 juillet 1942.

Cf Article du site : Les wagons de la Déportation. 

Ce convoi est composé au départ de Compiègne, de 1175 hommes (1100 « otages communistes » – jeunes communistes, anciens responsables politiques et élus du Parti communiste, syndicalistes de la CGT et délégués du personnel d’avant-guerre, militants et syndicalistes clandestins, résistants – de cinquante « otages juifs » et de quelques « droits communs »). Il faisait partie des mesures de terreur allemandes destinées à combattre, en France, les judéo-bolcheviks, responsables aux yeux de Hitler, des actions armées organisées par le Parti communiste clandestin contre des officiers et des soldats de la Wehrmacht, à partir d’août 1941.
Lire dans le site le récit des deux jours du transport : Compiègne-Auschwitz : 6-8 juillet 1942.
Sur les 1175 otages partis de Compiègne le 6 juillet 1942, 1170 sont présents à l’arrivée du train en gare d’Auschwitz le 8 juillet 1942. Ces derniers sont enregistrés et photographiés au Stammlager d’Auschwitz (camp souche ou camp principal, dénommé en 1943 Auschwitz-I) entre les numéros « 45 157 » et « 46 326 », d’où le nom de « convoi des 45 000 », sous lequel les déportés du camp désignaient ce convoi. Ce matricule – qu’il doit apprendre à dire en allemand et en polonais à toute demande des Kapos et des SS – sera désormais sa seule identité.
Lire dans le site : Le KL Auschwitz-Birkenau.

Il est enregistré à son arrivée à Auschwitz le 8 juillet 1942 sous le numéro matricule «46 285» selon la liste par matricules du
convoi établie en 1974 par les historiens polonais du Musée d’Etat d’Auschwitz.
Ce numéro matricule fait partie de la liste des otages juifs du convoi (la 3è des 4 listes alphabétiques composant le convoi).

Lire dans le site le récit de leur premier jour à Auschwitz : L’arrivée au camp principal, 8 juillet 1942. et 8 juillet 1942 : Tonte, désinfection, paquetage, « visite médicale ».
Après l’enregistrement, il passe la nuit au Block 13 (les 1170 déportés du convoi y sont entassés dans deux pièces). Le 9 juillet tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau (Brzezinka), situé à 4 km du camp principal. Le 13 juillet il est interrogé sur sa profession. Les spécialistes dont les SS ont besoin pour leurs ateliers sont sélectionnés et vont retourner à Auschwitz I (approximativement la moitié du convoi. Les autres, dont les 53 Juifs du convoi, restent à Birkenau, employés au terrassement dans les marais et à la construction des Blocks.

Albert Janos meurt à Auschwitz le 10 août 1942 d’après le certificat de décès établi au camp d’Auschwitz et destiné à l’état civil de la municipalité d’Auschwitz (in Death Books from Auschwitz Tome 2 page 502).

Lire dans le site les articles :  Les déportés juifs du convoi du 6 juillet 1942 et Les Juifs rapidement décimés après leur arrivée à Auschwitz.

Un certificat d’internement à Drancy est établi le 5 mars 1945. Albert Janos est
déclaré «Mort pour la France» le 19 mars 1946.
Il est reconnu comme déporté en 1946, mais on ne trouve pas trace de demande d’homologation comme «Déporté politique ou Déporté résistant» 8 ans plus tard. Son nom est inscrit sur le Mur des noms au Mémorial de la Shoah, dalle n° 50, colonne n° 17, rangée n° 2.

  • Note 1 : En 1936, le couple n’habite pas au 8, rue Palouzié à St-Ouen (Seine / Seine-Saint- Denis) – recensement de 1936, vol. 4 p 15 / 244). Après la guerre, sa femme y est domiciliée. À Saint-Ouen, son nom est inscrit sur la stèle érigée en « Hommage aux résistants, femmes, hommes, déportés à Auschwitz-Birkenau ».

Sources

  • Décédés du convoi de Compiègne en date du 6/7/1942. Classeur Ausch. 1/19, liste N°3 (Bureau des archives des
    victimes des conflits contemporains (Ministère de la Défense, Caen).
  • Serge Klarsfeld, (Centre de Documentation Juive Contemporaine. Le Mémorial de la Déportation des Juifs de France, édité par Beate et Serge Klarsfeld.
  • Photo de Drancy : Bundesarchiv, Bild 183-B10919, Frankreich, Internierungslager.
  • Death Books from Auschwitz, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, 1995 (basé essentiellement sur les registres (incomplets) des certificats de décès destinés à l’état civil de la ville d’Auschwitz ayant enregistré, entre le 27 juillet 1941 et le 31 décembre 1943,
    le décès des détenus immatriculés).
  • Fichier national du de la Division des archives des victimes des conflits contemporains (DAVCC), Ministère de la
    Défense, Caen. Fiche individuelle consultée en octobre 1993.
  • Liste (incomplète) par matricule du convoi du 6 juillet 1942 établie en 1974 par les historiens du Musée d’Etat d’Auschwitz-Birkenau (Bureau des archives des victimes des conflits contemporains (Ministère de la Défense, Caen) indiquant généralement la date de décès au camp.
  • © Photo de la porte d’entrée du camp d’Auschwitz : Musée d’Auschwitz-Birkenau.
  • © Site Internet «Mémorial-GenWeb».

Notice biographique rédigée en 2003 (installée en 2012 complétée en 2016, 2021 et 2024) par Claudine Cardon-Hamet, docteur en Histoire, auteur des ouvrages : « Triangles rouges à Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 », Editions Autrement, 2005 Paris et de «Mille otages pour Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 dit des « 45000 », éditions Graphein, Paris 1997 et 2000 (épuisé). Prière de mentionner ces références (auteur et coordonnées de ce site) en cas de reproduction ou d’utilisation totale ou partielle de cette notice.
Pour la compléter ou la corriger, vous pouvez me faire un courriel à deportes.politiques.auschwitz@gmail.com 

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