Pierre Delaunay : né en 1912 ; domicilié à Paris ; arrêté pour délit de droit commun ; interné au camp de Compiègne ; déporté le 6 juillet 1942 à Auschwitz où il meurt.
Pierre Delaunay est né le 13 février 1912 (1).
Il est domicilié à Paris au moment de son arrestation.
Selon Aimé Oboeuf, un rescapé qui l’a connu à Auschwitz, Pierre Delaunay a été arrêté pour délit de droit commun : « il était patron d’une maison de tolérance ».
Le 14 juin 1940, les troupes de la Wehrmacht entrent dans Paris, vidée des deux tiers de sa population. La ville cesse d’être la capitale du pays et devient le siège du commandement militaire allemand en France. Le 22 juin, l’armistice est signé.
Le 10 juillet 1940 le maréchal Pétain, investi des pleins pouvoirs par l’Assemblée nationale, s’octroie le lendemain le titre de « chef de l’Etat français » et lance la « révolution nationale » en rupture avec nombre de principes républicains (confusion des pouvoirs législatifs et exécutifs ; rejet du multipartisme, suppression des syndicats et du droit de grève, antisémitisme d’état…).
Considéré comme otage « asocial » par les Allemands et « indésirable » par la police française (2), Pierre Delaunay est interné au camp allemand de Royallieu à Compiègne (le Frontstalag 122). La majorité des « otages asociaux » du convoi (treize), y arrivent le 6 mai 1942, venant du camp des Tourelles. Un autre le 6 juin. On peut penser que Pierre Delaunay y arrive également ce dernier mois.
Depuis ce camp administré par la Wehrmacht, il va être déporté à destination d’Auschwitz. Pour comprendre la politique de l’Occupant qui mène à sa déportation, on lira les deux articles du site qui exposent les raisons des internements, des fusillades et de la déportation : La politique allemande des otages (août 1941-octobre 1942) et «une déportation d’otages».
Depuis le camp de Compiègne, Pierre Delaunay est déporté à Auschwitz dans le convoi du 6 juillet 1942.
Cf Article du site : Les wagons de la Déportation.
Ce convoi est composé au départ de Compiègne, de 1175 hommes (1100 « otages communistes » – jeunes communistes, anciens responsables politiques et élus du Parti communiste, syndicalistes de la CGT et délégués du personnel d’avant-guerre, militants et syndicalistes clandestins, résistants – de cinquante « otages juifs » et de quelques « droits communs »). Il faisait partie des mesures de terreur allemandes destinées à combattre, en France, les judéo-bolcheviks, responsables aux yeux de Hitler, des actions armées organisées par le Parti communiste clandestin contre des officiers et des soldats de la Wehrmacht, à partir d’août 1941.
Lire dans le site le récit des deux jours du transport : Compiègne-Auschwitz : 6-8 juillet 1942.
Sur les 1175 otages partis de Compiègne le 6 juillet 1942, 1170 sont présents à l’arrivée du train en gare d’Auschwitz le 8 juillet 1942. Ces derniers sont enregistrés et photographiés au Stammlager d’Auschwitz (camp souche ou camp principal, dénommé en 1943 Auschwitz-I) entre les numéros « 45 157 » et « 46 326 », d’où le nom de « convoi des 45 000 », sous lequel les déportés du camp désignaient ce convoi. Ce matricule – qu’il doit apprendre à dire en allemand et en polonais à toute demande des Kapos et des SS – sera désormais sa seule identité.
Lire dans le site : Le KL Auschwitz-Birkenau.
Son numéro d’immatriculation lors de son arrivée à Auschwitz le 8 juillet 1942 est inconnu. Le numéro « 45439 ? » figurant dans mes deux premiers ouvrages sur le convoi du 6 juillet 1942 correspondait à ma tentative de reconstitution de la liste du convoi par matricules. Ce numéro, quoique plausible, ne saurait être considéré comme sûr en raison de l’existence des quatre listes alphabétiques successives que j’ai partiellement reconstituées, de la persistance de lacunes pour quatre noms, mais d’incertitudes sur plusieurs centaines de numéros matricules. Il ne figure plus dans mon ouvrage Triangles rouges à Auschwitz.
Lire dans le site le récit de leur premier jour à Auschwitz : L’arrivée au camp principal, 8 juillet 1942. et 8 juillet 1942 : Tonte, désinfection, paquetage, « visite médicale ».
Après l’enregistrement, il passe la nuit au Block 13 (les 1170 déportés du convoi y sont entassés dans deux pièces). Le 9 juillet tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau (Brzezinka), situé à 4 km du camp principal. Le 13 juillet il est interrogé sur sa profession. Les spécialistes dont les SS ont besoin pour leurs ateliers sont sélectionnés et vont retourner à Auschwitz I (approximativement la moitié du convoi. Les autres, restent à Birkenau, employés au terrassement et à la construction des Blocks.
Aucun des documents sauvés de la destruction ordonnée par les SS peu de temps avant l’évacuation d’Auschwitz, ne nous permet de savoir dans quel camp il est affecté à cette date.
On ignore également la date du décès de Pierre Delaunay, qui est néanmoins antérieure au mois d’août 1943, date à laquelle on connaît le nom des très rares survivants.
Son nom ne figure pas au Fichier national des déplacés de la Seconde guerre mondiale (archives des ACVG), mais sur une liste de déportés du convoi (archives de la FNDIRP).
- Note 1 : Il n’est pas né à Paris (vérification à partir des tables décennales des 20 arrondissements).
- Note 2 : « Indésirables » : des militants communistes (dont plusieurs anciens des Brigades Internationales) et des « droits communs ». La plupart des « droits communs » déportés dans le convoi du 6 juillet 42 sont apparentés familialement ou proches des milieux communistes.
Source
- Témoignage cité d’Aimé Oboeuf.
- Recherches au Fichier national de la Division des Archives des Victimes des Conflits Contemporains (DAVCC ex BAVCC), Ministère de la Défense, Caen. Fiche individuelle consultée en octobre 1993.
- Listes – incomplètes – du convoi établies par la FNDIRP après la guerre (archives de la F.N.D.I.R.P).
- © Dessin de Franz Reisz, in « Témoignages sur Auschwitz », ouvrage édité par l’Amicale des déportés d’Auschwitz (1946).
Notice biographique par Claudine Cardon-Hamet, mise à jour en 2010, 2013, 2019, 2021 et 2025 avec Pierre Cardon, réalisée à partir d’une notice succincte rédigée en janvier 2001 pour l’exposition organisée par l’association « Mémoire Vive » à la mairie du 20è arrondissement de Paris. Claudine Cardon-Hamet est docteur en Histoire, autrice des ouvrages : Triangles rouges à Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 dit des « 45 000 », éditions Autrement, Paris 2005) et de Mille otages pour Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 dit des « 45 000 », éditions Graphein, Paris 1997 et 2000 (épuisé), qui reproduit sa thèse de doctorat (1995). Prière de mentionner ces références (autrice et coordonnées de ce site) en cas de reproduction ou d’utilisation totale ou partielle de cette notice.Pour la compléter ou la corriger, vous pouvez nous faire un courriel à deportes.politiques.auschwitz@gmail.com