André Cayzac avant guerre (DR © Maurice Cayzac)
André Cayzac le 8 juillet 1942 (DR)

Matricule « 45 344 » à Auschwitz

André Cayzac : né en 1899 à Paris 14ème ; domicilié à Paris 20ème; comédien, employé municipal ; communiste ; arrêté le 30 octobre 1941 ; interné aux camps de Rouillé et de Compiègne ; déporté le 6 juillet 1942 à Auschwitz, où il meurt le 25 août 1942.

André Cayzac (dit « Derna ») est né le 20 juillet 1899 au 123, boulevard du Palais Royal (maternité de Port-Royal) à Paris 14ème. André Cayzac habite 10, avenue de la Porte de Ménilmontant à Paris 20ème au moment de son arrestation. Il est le fils de Marie, Thérèse Mercadier, 26 ans, charbonnière et de Frédéric Cayzac, 32 ans, charbonnier son époux, domiciliés au 7, rue Gassendi.
Engagé volontaire en 1917, soldat de deuxième classe à l’Ecole d’aviation militaire d’Istres, il passe en conseil de guerre le 2 juin 1920 pour « outrage envers un supérieur à l’occasion du service – provocation de militaires à la désobéissance ».
Il est condamné à six mois de forteresse au fort Saint-Jean (Marseille).

L’Est Républicain, 10 mars 1923

Il épouse Marie, Léonie, Fernande Berthelot le 4 décembre 1923 à Cachan (Seine).
Quelques temps administrateur de tournées cinématographiques, il exerce différents emplois artistiques (comédien au théâtre Sarah Bernhard et au cinéma, présentateur de films).
Il adhère au Secours Rouge et au Parti communiste en 1927.
Avec la victoire du Bloc Ouvrier et Paysan aux élections municipales de 1928 et 1929, la nouvelle municipalité de Bagnolet (Seine / Seine-Saint Denis) recrute. André Cayzac est embauché comme « commis » à la Mairie Bagnoletaise.
Dans le livre de Simone et Auguste Gillot « un couple dans la Résistance » (1) Auguste Gillot mentionne qu’il avait milité avec lui dans les années 1930.
En 1938, il est domicilié au 10, avenue de Ménilmontant, avec Emilienne Sauvanaud.
Le 9 juin 1938 à Paris 20ème André Caysac épouse en secondes noces Emilienne Marcelle Sauvanaud. Elle est sténo-dactylo, née le 12 mai 1915 à Paris 14ème. Le couple aura un garçon, Maurice.
Mobilisé comme soldat de deuxième classe, il est fait prisonnier et interné au Frontstalag 154, à  Fourchambault (Nièvre)

Le 14 juin 1940, les troupes de la Wehrmacht entrent dans Paris, vidée des deux tiers de sa population. La ville cesse d’être la capitale du pays et devient le siège du commandement militaire allemand en France. Le 22 juin, l’armistice est signé. Le 10 juillet 1940 le maréchal Pétain, investi des pleins pouvoirs par l’Assemblée nationale, s’octroie le lendemain le titre de « chef de l’Etat français » et lance la « révolution nationale » en rupture avec nombre de principes républicains (confusion des pouvoirs législatifs et exécutifs ; rejet du multipartisme, suppression des syndicats et du droit de grève, antisémitisme d’état…).

Il est libéré du Frontstalag 154, le 22 juillet 1941, après avoir réussi à faire valoir sa qualité de fonctionnaire municipal.
Selon les souvenirs familiaux transmis à son fils Maurice, André Cayzac participe dès septembre 1940 à la reconstitution de la cellule « RIVP » (2).
Il assure alors des liaisons entre plusieurs « triangles » du Parti communiste clandestin sous le pseudonyme de Derna.
Il est en contact avec notamment Charles Désirat (chargé de la réorganisation du Secours populaire), Emmanuel Fleury (conseiller municipal du 20ème) et Henri Gorgue (conseiller municipal de Bagnolet, ancien brigadiste en Espagne).
Le 30 octobre 1941 André Cayzac est arrêté à la Mairie de Bagnolet, suite à un arrêté d’internement administratif du Préfet de la Seine, François Bard, en application de la Loi du 3 septembre 1940.

Rouillé : montage photo, liste des internés du 10 novembre 1940 (DR Pierre Cardon)

André Cayzac est maintenu jusqu’au 10 novembre 1941 au Dépôt de la préfecture de Paris, date à laquelle il est transféré au Centre de Séjour Surveillé de Rouillé (3) avec un groupe de 57 autres militants communistes parisiens.

Début mai 1942, les autorités allemandes adressent au commandant du camp de Rouillé une liste de 187 internés qui doivent être transférés au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Frontstallag 122). Le nom d’André Cayzac (n°47 de la liste) y figure. Le 22 mai 1942 c’est au sein d’un groupe de 168 internés qu’il est transféré au camp allemand de Compiègne. La plupart d’entre eux seront déportés à Auschwitz dans le convoi du 6 juillet 1942.
Depuis ce camp administré par la Wehrmacht, il va être déporté à destination d’Auschwitz. Pour comprendre la politique de l’Occupant qui mène à sa déportation, on lira les deux articles du site qui exposent les raisons des internements, des fusillades et de la déportation : La politique allemande des otages (août 1941-octobre 1942) et «une déportation d’otages».

Depuis le camp de Compiègne, André Cayzac est déporté à Auschwitz dans le convoi du 6 juillet 1942

Cf Article du site : Les wagons de la Déportation. 

Ce convoi est composé au départ de Compiègne, de 1175 hommes (1100 « otages communistes » – jeunes communistes, anciens responsables politiques et élus du Parti communiste, syndicalistes de la CGT et délégués du personnel d’avant-guerre, militants et syndicalistes clandestins, résistants – de cinquante  « otages juifs » et de quelques « droits communs »). Il faisait partie des mesures de terreur allemandes destinées à combattre, en France, les judéo-bolcheviks responsables, aux yeux de Hitler, des actions armées organisées par le parti communiste clandestin contre des officiers et des soldats de la Wehrmacht, à partir d’août 1941. Lire dans le site le récit des deux jours du transport : Compiègne-Auschwitz : 6-8 juillet 1942. Sur les 1175 otages partis de Compiègne le 6 juillet 1942, 1170 sont présents à l’arrivée du train en gare d’Auschwitz le 8 juillet 1942. Ces derniers sont enregistrés et photographiés au Stammlager d’Auschwitz (camp souche ou camp principal, dénommé en 1943 Auschwitz-I) entre les numéros « 45157 » et « 46326 », d’où le nom de « convoi des 45000 », sous lequel les déportés du camp désignaient ce convoi. Ce matricule – qu’il doit apprendre à dire en allemand et en polonais à toute demande des Kapos et des SS – sera désormais sa seule identité. Lire dans le site : Le KL Auschwitz-Birkenau.
Il est enregistré à son arrivée à Auschwitz le 8 juillet 1942 sous le numéro «45344» selon la liste par matricules du convoi établie en 1974 par les historiens polonais du Musée d’Etat d’Auschwitz.
Sa photo d’immatriculation (2) à Auschwitz a été retrouvée parmi celles que des membres de la Résistance intérieure du camp avaient camouflées pour les sauver de la destruction, ordonnée par les SS peu de temps avant l’évacuation d’Auschwitz. Lire dans le site le récit de leur premier jour à Auschwitz : L’arrivée au camp principal, 8 juillet 1942. et 8 juillet 1942 : Tonte, désinfection, paquetage, « visite médicale ».  Après l’enregistrement, il passe la nuit au Block 13 (les 1170 déportés du convoi y sont entassés dans deux pièces). Le 9 juillet tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau, situé à 4 km du camp principal. Le 13 juillet il est interrogé sur sa profession. Les spécialistes dont les SS ont besoin pour leurs ateliers sont sélectionnés et vont retourner à Auschwitz I (approximativement la moitié du convoi. Les autres, dont Maurice Cayzac sans spécialité « utile » aux SS, restent à Birkenau, employés au terrassement et à la construction des Blocks.

Maurice Cayzac meurt à Auschwitz le 25 août 1942 d’après le certificat de décès établi au camp d’Auschwitz (in Death Books from Auschwitz Tome 2 page 159.
Il est homologué comme « Déporté politique ». 
Une plaque, dans le hall de la Mairie de Bagnolet, rappelle sa mémoire.

Son fils, Maurice Cayzac a confié à l’Association « Mémoire vive »  de nombreux souvenirs, photos de famille et documents. On les retrouvera en cliquant sur ce lien Mémoire Vive – André Cayzac, dit “Derna” – 45344

  • Note 1 : « Un couple dans la Résistance », Editions Sociales 1975, page 256.
  • Note 2 : Société d’économie mixte locale, acteur majeur du logement social à Paris, la RIVP a pour vocation de gérer et de construire des logements sociaux.
  • Note 3 : Le camp d’internement administratif de Rouillé (Vienne) est ouvert le 6 septembre 1941, sous la dénomination de «centre de séjour surveillé», pour recevoir 150 internés politiques venant de la région parisienne, c’est-à-dire membres du Parti Communiste dissous et maintenus au camp d’Aincourt depuis le 5 octobre 1940. D’autres venant de prisons diverses et du camp des Tourelles. / In site de l’Amicale de Châteaubriant-Voves-Rouillé.
  • Note 4 : 522 photos d’immatriculation des « 45.000 » à Auschwitz ont été retrouvées parmi celles que des membres de la Résistance intérieure du camp avaient camouflées pour les sauver de la destruction, ordonnée par les SS peu de temps avant l’évacuation du camp d’Auschwitz. A la Libération elles ont été conservées dans les archives du musée d’Etat d’Auschwitz. Des tirages de ces photos ont été remis par Kazimierz Smolen (ancien détenu dans les bureaux du camp d’Auschwitz, puis directeur du Musée d’Etat d’Auschwitz) à André Montagne, alors vice-président de l’Amicale d’Auschwitz, qui me les a confiés.

Sources

  • Fichier national de la Division des Archives des Victimes des Conflits Contemporains (DAVCC ex BAVCC), Ministère de la Défense, Caen. Fiche individuelle consultée en octobre 1993. Dossier individuel consulté par Arnaud Boulligny (groupe histoire de la FMD, 30 janvier 2007).
  • Liste des militants communistes internés administrativement au CSS de Rouillé le 10 novembre 1941. @Archives de la police /C – 331 – 24.
  • Liste du 22 mai 1942, liste de détenus transférés du camp de Rouillé vers celui de Compiègne (@ Centre de Documentation Juive Contemporaine XLI-42).
  • Récits d’Eugène Kerbaul.
  • Liste (incomplète) par matricule du convoi du 6 juillet 1942 établie en 1974 par les historiens du Musée d’Etat d’Auschwitz-Birkenau (Bureau des archives des victimes des conflits contemporains (Ministère de la Défense, Caen) indiquant généralement la date de décès au camp.
  • Death Books from Auschwitz(registres des morts d’Auschwitz), Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, 1995 (basé essentiellement sur les registres (incomplets) des certificats de décès établis au camp d’Auschwitz ayant enregistré, entre le 27 juillet 1941 et le 31 décembre 1943, le décès des détenus immatriculés).
  • Auguste et Simone Gillot « Un couple dans la Résistance », éditions Sociales, Paris, 1975, p. 256.
  • © Photo et témoignage de son fils Maurice Cayzac (premiers courriels 2006).
  • Photo d’immatriculation à Auschwitz : Musée d’état Auschwitz-Birkenau / © collection André Montagne.
  • Plaque de rue, in ©  plaques commémoratives. Site désormais fermé.

Notice biographique mise à jour en 2010, 2013, 2019 et 2021 à partir d’une notice succincte rédigée en janvier 2001 pour l’exposition organisée par l’association « Mémoire Vive » à la mairie du 20ème arrondissement, par Claudine Cardon-Hamet (docteur en Histoire, auteur des ouvrages :Triangles rouges à Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 dit des « 45000 », éditions Autrement, Paris 2005) et de Mille otages pour Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 dit des « 45000 », éditions Graphein, Paris 1997 et 2000 (épuisé), qui reproduit ma thèse de doctorat (1995). Prière de mentionner ces références (auteur et coordonnées de ce site) en cas de reproduction ou d’utilisation totale ou partielle de cette notice.
Pour la compléter ou la corriger, vous pouvez me faire un courriel à deportes.politiques.auschwitz@gmail.com

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