Matricule « 45 528 » à Auschwitz,  Rescapé

André Faudry le 8 juillet 1942 à Auschwitz
André Faudry en 1945 : il montre son matricule tatoué sur l’avant-bras gauche
André Faudry : né à Marspich (Moselle) en 1914 ; domicilié à Saint-Maur-des-Fossés (Seine) ; chauffagiste ; communiste ; arrêté le 27 juin 1941, interné à Compiègne ; déporté le 6 juillet 1942 à Auschwitz ; Rescapé, décédé le 14 septembre 1970.

André, Louis, Faudry est né à Marspich (Moselle) le 19 mai 1914. Il habite au 15, avenue Desgenettes à Saint-Maur-des-Fossés au moment de son arrestation (ancien département de la Seine, aujourd’hui Val-de-Marne) au moment de son arrestation.
Il est le fils de Marie-Hélène Kretshmer, née le 20 août 1890 à Aubervilliers, brassière et de Louis, Joseph Faudry, né à Paris en 1881, machiniste puis vernisseur, son époux. Il a un frère aîné, Albert, Marius, né le 10 juillet 1910 à Differdange (Grand duché du Luxembourg / la grand-mère maternelle, Marie Kretshmer est née à Grevenknopp, Grand duché du Luxembourg).
En 1931 André Faudry habite au 2 bis, avenue de la Gare à Saint-Maur, avec ses parents. Il est alors soudeur autogène. Son frère Albert, électricien, y habite en 1932 (listes électorales).
Puis André Faudry est  monteur en chauffage central (artisan-chauffagiste). En 1936, ses parents habitent toujours au 2 bis, avenue de la Gare.

André Faudry épouse Albertine,
Andrée Poullain, le 17 mars1934 à Saint-Maur. Elle est née Dessertine le 1er mai 1914 à Reims, légitimée par le mariage de sa mère avec Virgile Poullain (elle est décédée en 1999). Elle travaille comme bobineuse radio.
Le couple a deux enfants (Claude, né en 1934 et Christiane).
Ils habitent au 15, avenue Desgenettes à SaintMaur-des-Fossés après 1936.

Militant communiste, André Faudry est trésorier puis secrétaire de sa cellule à Saint Maur. Après l’interdiction du Parti communiste, en septembre 1939 et au début de l’occupation allemande, il poursuit son activité militante clandestinement, et diffuse des tracts.

Le 14 juin 1940, l’armée allemande d’occupation entre dans Paris. La ville cesse alors d’être la capitale du pays et devient le siège du commandement militaire allemand en France. L’armistice est signé le 22 juin.
Le 10 juillet 1940 le maréchal Pétain, investi des pleins pouvoirs par l’Assemblée nationale, abolit la République et s’octroie le lendemain le titre de « chef de l’Etat français ». Il lance la « révolution nationale » en rupture avec nombre de principes républicains (confusion des pouvoirs législatifs et exécutifs ; rejet du multipartisme, suppression des syndicats et du droit de grève, antisémitisme d’état…).

André Faudry est arrêté à son domicile le 27 juin 1941 par des policiers français, en même temps que son frère, lui aussi résidant à Saint-Maur. Le motif de cette arrestation porté sur son dossier individuel (au DAVCC à Caen) est « confection et distribution de journaux clandestins et collage d’affiches ». Son épouse pense qu’il a été dénoncé. Mais André Faudry est bien connu des Renseignements généraux qui surveillent particulièrement  les militants communistes.

Extrait de la liste des RG du 27 juin 1941, montage à partir du début de la liste

La liste des RG répertoriant les communistes internés administrativement le 27 juin
1941, mentionne pour André Faudry : «
Meneur particulièrement actif ». Soarrestation a lieu dans le cadre de la grande rafle commencée le 22 juin 1941, jour de l’attaque hitlérienne contre l’Union soviétique. Sous le nom «d’Aktion Theoderich», les Allemands arrêtent plus de mille communistes connus dans la zone occupée, avec l’aide de la police française. D’abord placés dans des lieux d’incarcération contrôlés par le régime de Vichy, ils sont envoyés, à partir du 27 juin 1941, au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré par la Wehrmacht et qui ce jour là devient un camp de détention des “ennemis actifs du Reich”.
Il est interné au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Frontstalag 122) où il reçoit le matricule n° 493.
Il figure sur la liste de recensement (décembre 1941) des communistes du camp de Compiègne nés entre 1912 et 1922 « aptes à être déportés à l’Est », en application de l’avis du 14 décembre 1941 du commandant militaire en France, Otto von Stülpnagel (archives du CDJC IV 198).

Depuis ce camp administré par la Wehrmacht, il va être déporté à destination d’Auschwitz. Pour comprendre la politique de l’Occupant qui mène à sa déportation, on lira les deux articles du site qui exposent les raisons des internements, des fusillades et de la déportation : La politique allemande des otages (août 1941-octobre 1942) et «une déportation d’otages».

Depuis le camp de Compiègne, André Faudry est déporté à Auschwitz dans le convoi du 6 juillet 1942.

Cf Article du site : Les wagons de la Déportation. 

Ce convoi est composé au départ de Compiègne, de 1175 hommes (1100 « otages communistes » – jeunes communistes, anciens responsables politiques et élus du Parti communiste, syndicalistes de la CGT et délégués du personnel d’avant-guerre, militants et syndicalistes clandestins, résistants – de cinquante  « otages juifs » et de quelques « droits communs »). Il faisait partie des mesures de terreur allemandes destinées à combattre, en France, les judéo-bolcheviks, responsables aux yeux de Hitler, des actions armées organisées par le Parti communiste clandestin contre des officiers et des soldats de la Wehrmacht, à partir d’août 1941.
Lire dans le site le récit des deux jours du transport : Compiègne-Auschwitz : 6-8 juillet 1942.
Sur les 1175 otages partis de Compiègne le 6 juillet 1942, 1170 sont présents à l’arrivée du train en gare d’Auschwitz le 8 juillet 1942. Ces derniers sont enregistrés et photographiés au Stammlager d’Auschwitz (camp souche ou camp principal, dénommé en 1943 Auschwitz-I) entre les numéros « 45 157 » et « 46 326 », d’où le nom de « convoi des 45 000 », sous lequel les déportés du camp désignaient ce convoi. Ce matricule – qu’il doit apprendre à dire en allemand et en polonais à toute demande des Kapos et des SS – sera désormais sa seule identité.

Il est enregistré à son arrivée à Auschwitz le 8 juillet 1942 sous le numéro « 45 528 ». 
Sa photo d’immatriculation à Auschwitz a été retrouvée parmi les 522 photos que des membres de la Résistance intérieure du camp avaient camouflées pour les sauver de la destruction, ordonnée par les SS peu de temps avant l’évacuation d’Auschwitz.

Lire dans le site le récit de leur premier jour à Auschwitz : L’arrivée au camp principal, 8 juillet 1942. et 8 juillet 1942 : Tonte, désinfection, paquetage, « visite médicale ».  Après l’enregistrement, il passe la nuit au Block 13 (les 1170 déportés du convoi y sont entassés dans deux pièces). Le 9 juillet tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau, situé à 4 km du camp principal. Le 13 juillet il est interrogé sur sa profession. Les spécialistes dont les SS ont besoin pour leurs ateliers sont sélectionnés et vont retourner à Auschwitz I (approximativement la moitié du convoi. Les autres, restent à Birkenau, employés au terrassement et à la construction des Blocks.
Il est un des membres du groupe français de Résistance au sein du Comité international créé par des communistes autrichiens.  

Le carnet de Roger Abada qui a marqué Faudry : Hôpital

Il est placé par le Comité comme aide infirmier au Revier de Birkenau, avant d’être transféré comme infirmier à Auschwitz I.

Ci-contre une page du carnet de Roger Abada, où celui-ci a noté dès sa libération les noms des « 45.000 » de ce groupe. « Faudry : hôpital« , peut-on y lire.

Comme la quasi-totalité des Français survivants, André Faudry est affecté au Block 11, du 14 août 1943 au 12 décembre 1943 (Lire l’article du site « les 45 000 au block 11). Pendant la quarantaine au Block 11, il peut écrire à sa femme.
A sa sortie du Block 11, il est à nouveau infirmier au Revier du Block 19. 

Maurice Cling, jeune Juif déporté de Drancy à l’âge de 15 ans, considère qu’il lui doit – avec d’autres – la vie, parce qu’il l’a pris comme aide au Revier.
Il raconte son arrivée au Block 19 en janvier 1944 et sa rencontre avec André Faudry «Le docteur Klotz m’annonce sans explication que je suis transféré au premier étage (…). André est un « 45 000 », un « Triangle rouge », c’est un homme jeune, sympathique, qui est le chef de la grande salle où j’entre maintenant, très intimidé. Pour moi qui n’ai connu jusqu’à présent aux postes de responsabilité que des Polonais ou des Allemand, c’est une découverte. D’ailleurs comment ne trouverai je pas sympathique le compatriote « politique » qui m’annonce que je suis recruté ici pour assurer diverses tâches de nettoyage, de distribution de la nourriture, etc… Mon rêve réalisé, tout simplement ! Je reçois une tenue rayée».

André Faudry demeure dans le camp jusqu’au bout, évitant l’évacuation en se cachant dans les soutes à charbon, en compagnie d’Eugène Garnier, lors du dernier transfert. René Besse – à qui il a proposé d’en faire autant : « reste avec moi René, on va se cacher dans les soutes à charbon. Les Russes seront bientôt là » – préfère partir. René Besse ne sera libéré que le 13 avril, après de terribles épreuves.

Pour sa part, André Faudry est libéré le 27 janvier 1945 par les armées soviétiques
Le camp est libéré par la 100è division de l’Armée Rouge commandée par le général Krasavine (60è armée du Front de Voronej), renommé « Premier front d’Ukraine » après la libération de l’Ukraine, le 27 janvier 1945. Les premiers soldats soviétique pénètrent dans le camp vers 15 heures à la suite de combats qui font 66 morts parmi eux.

André Faudry regagne
la France le 15 mai, vraisemblablement par Odessa comme Eugène Garnier et David Badache.
A son retour, il est domicilié au 41, rue Louis Dupré à SaintMaur-des-Fossés.
Toute sa vie, il souffrira de violents maux de tête, consécutifs aux coups à la tête reçus à Auschwitz.
Le titre de « Déporté politique » lui a été attribué et il a été homologué adjudant au titre de la Résistance Intérieure Française (Front national de lutte pour la libération et l’indépendance de la France). 

André Faudry en 1945

Il est homologué comme Résistant, au titre de la Résistance Intérieure Française (RIF) comme appartenant à l’un des cinq mouvements de Résistance (FFC, FFI, RIF, DIR, FFL).Cf. service historique de la Défense / Vincennes GR 16 P 217344. Son frère est homologué FFI et RIF / Vincennes, GR 16 P 217343.

André Faudry est l’un des membres fondateurs de l’Amicale d’Auschwitz, avec Eugène Garnier.
André Faudry est mort le 14 septembre 1970.

 Sources

  • Questionnaire biographique (contribution à l’histoire de la déportation du convoi du 6 juillet 1942), envoyé aux mairies, associations et familles au début de mes recherches, en 1987, rempli par sa veuve, aidée par André Montagne (novembre 1987).
  • « Un enfant à Auschwitz » Maurice Cling, pages 163-165. Editions de l’Atelier. Paris 2008.
  • Archives de Saint-Maur (Madame A. Thouvignon, archiviste) octobre 1988.
  • Fichier national de la Division des archives des victimes des conflits contemporains (DAVCC), Ministère de la Défense, Caen (fiche individuelle consultée en 1992).
  • Renseignements apportés par un courriel de sa fille, Madame Christiane Bocchini née Faudry (mars 2005).
  • Archives de la Préfecture de police de Paris. Renseignements généraux, Liste des militants communistes internés le 26 juin 1941.

Notice biographique rédigée en janvier 2001, mise en ligne en 2008, complétée en 2015, 2019, 2020, 2022 et 2024 par Claudine Cardon-Hamet, docteur en Histoire, auteur des ouvrages : «Triangles rouges à Auschwitz, le convoi politique du 6 juillet 1942 » Editions Autrement, 2005 Paris et de Mille otages pour Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 dit des «45000», éditions Graphein, Paris 1997 et 2000 (épuisé). Prière de mentionner ces références (auteur et coordonnées de ce site) en cas de reproduction ou d’utilisation totale ou partielle de cette notice biographique.
Pour la compléter ou la corriger, vous pouvez me faire un courriel à deportes.politiques.auschwitz@gmail.com 

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