Roger Legendre : né en 1902 à Tours (Indre-et-Loire) ; domicilié à Joué-lès-Tours (Indre-et-Loire); Cheminot ; communiste ; arrêté dans la nuit du 8 au 9 février 1942 comme otage communiste ; interné à Compiègne ; déporté le 6 juillet 1942 à Auschwitz, où il meurt le 27 septembre 1942
Roger Legendre est né le 26 juillet 1902 à Tours (Indre-et-Loire). Il habite à Joué-lès-Tours (Indre-et-Loire) au moment de son arrestation.
Il est le fils d’Augustine, Victoire Mirebaux, 25 ans, couturière, et de René, Désiré Emmanuel Legendre, 35 ans, menuisier, son époux. Ses parents habitent au 221, rue d’Entraigues à Tours.
Conscrit de la classe 1922, il est appelé au service militaire (Matricule 1545).
Le 12 juin 1926, alors domicilié à La Riche (Indre-et-Loire) il se marie à Tours avec Marcelle, Camille Landereau, papetière. Elle est née dans cette ville le 29 septembre 1899, et habite au 5, rue du champ de mars.
Roger Legendre est cheminot, chauffeur à la SNCF, rattaché au dépôt de Saint-Pierre-des-Corps (37).
Il est connu comme communiste à Joué-lès-Tours.
Entre le 10 et le 13 juin 1940, Tours est la capitale provisoire de la République. Le 14 juin 1940, l’armée allemande d’occupation entre dans Paris. La ville cesse alors d’être la capitale du pays et devient le siège du commandement militaire allemand en France. la moitié nord de la France et toute la façade ouest sont occupées. Une partie du centre de la Tours est totalement détruite par des obus incendiaires allemands les 20 et 22 juin. La Wehrmacht entre dans Tours le 21 juin 1940. Le 10 juillet 1940 Pétain, investi des pleins pouvoirs par l’Assemblée nationale, s’octroie le lendemain le titre de « chef de l’Etat français ». Il lance la « révolution nationale » en rupture avec nombre de principes républicains (confusion des pouvoirs législatifs et exécutifs ; rejet du multipartisme, suppression des syndicats et du droit de grève, antisémitisme d’état…). L’Indre-et-Loire fait partie des 13 départements dont le territoire est partagé par une « ligne de démarcation », en deux zones : une zone occupée par les Allemands et une zone « non occupée » dite libre, sous l’autorité du régime de Vichy. Dès juillet 1940, un commandement militaire est installé en Indre-et-Loire.
Actif durant l’occupation (tracts, inscriptions, sabotage de voies ferrées), Roger Legendre est arrêté dans la nuit du 9 au 10 février à son domicile par la police allemande, comme otage en représailles à la mort d’une sentinelle allemande, rue du Hallebardier à Tours.
Lire dans le site : 37- Indre et Loire L’attentat de la rue du Hallebardier à Tours (janvier1942)
50 otages sont désignés (40 Juifs et 10 communistes).
A Fontevraud, 6 communistes sont exécutés le 22 février en représailles.
A Tours, les otages communistes sont enfermés à la caserne du 501ème RCC au champ de Mars.
A la demande des autorité allemandes, ils sont transférés le 27 avril 1942 vers le camp allemand de Royallieu à Compiègne (le Frontstalag 122) en vue de leur déportation comme otages.
Depuis ce camp administré par la Wehrmacht, il va être déporté à destination d’Auschwitz. Pour comprendre la politique de l’Occupant qui mène à sa déportation, on lira les deux articles du site qui exposent les raisons des internements, des fusillades et de la déportation : La politique allemande des otages (août 1941-octobre 1942) et «une déportation d’otages».
Depuis le camp de Compiègne, Roger Legendre est déporté à Auschwitz dans le convoi du 6 juillet 1942.
Cf Article du site : Les wagons de la Déportation.
Ce convoi est composé au départ de Compiègne, de 1175 hommes (1100 « otages communistes » – jeunes communistes, anciens responsables politiques et élus du Parti communiste, syndicalistes de la CGT et délégués du personnel d’avant-guerre, militants et syndicalistes clandestins, résistants – de cinquante « otages juifs » et de quelques « droits communs »). Il faisait partie des mesures de terreur allemandes destinées à combattre, en France, les judéo-bolcheviks, responsables aux yeux de Hitler, des actions armées organisées par le Parti communiste clandestin contre des officiers et des soldats de la Wehrmacht, à partir d’août 1941.
Lire dans le site le récit des deux jours du transport : Compiègne-Auschwitz : 6-8 juillet 1942.
Sur les 1175 otages partis de Compiègne le 6 juillet 1942, 1170 sont présents à l’arrivée du train en gare d’Auschwitz le 8 juillet 1942. Ces derniers sont enregistrés et photographiés au Stammlager d’Auschwitz (camp souche ou camp principal, dénommé en 1943 Auschwitz-I) entre les numéros « 45 157 » et « 46 326 », d’où le nom de « convoi des 45 000 », sous lequel les déportés du camp désignaient ce convoi. Ce matricule – qu’il doit apprendre à dire en allemand et en polonais à toute demande des Kapos et des SS – sera désormais sa seule identité.
Lire dans le site : Le KL Auschwitz-Birkenau.
Son numéro d’immatriculation à Auschwitz n’est pas connu. Le numéro matricule «45 769 ?» figurant avec un point d’interrogation dans mes deux premiers ouvrages sur le convoi du 6 juillet 1942 (éditions de 1997 et 2000) correspondait à ma tentative de reconstitution de la liste du convoi par matricules. Ce numéro, quoique plausible, ne saurait être considéré comme sûr en raison de l’existence des quatre listes alphabétiques successives que j’ai partiellement reconstituées, de la persistance de lacunes pour quatre noms, mais d’incertitudes sur plusieurs centaines de numéros matricules. Il ne figure plus dans mon ouvrage Triangles rouges à Auschwitz.
Lire dans le site le récit de leur premier jour à Auschwitz : L’arrivée au camp principal, 8 juillet 1942. et 8 juillet 1942 : Tonte, désinfection, paquetage, « visite médicale ».
Après l’enregistrement, il passe la nuit au Block 13 (les 1170 déportés du convoi y sont entassés dans deux pièces). Le 9 juillet tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau (Brzezinka), situé à 4 km du camp principal. Le 13 juillet il est interrogé sur sa profession. Les spécialistes dont les SS ont besoin pour leurs ateliers sont sélectionnés et vont retourner à Auschwitz I (approximativement la moitié du convoi. Les autres, restent à Birkenau, employés au terrassement et à la construction des Blocks.
Aucun des documents sauvés de la destruction ordonnée par les SS peu de temps avant l’évacuation d’Auschwitz, ne nous permet de savoir dans quel camp il est affecté à cette date
Roger Legendre meurt à Auschwitz le 27 septembre 1942 d’après son certificat de décès établi au camp d’Auschwitz (in Death Books from Auschwitz Tome 2 page 705).
Lire dans le site : 80 % des « 45 000 » meurent dans les six premiers mois
Sa fiche d’état civil établie en France après la Libération porte toujours la mention «décédé en 1942 à Auschwitz». Lire dans le site : Les dates de décès à Auschwitz.
Dans la « Voix du Peuple » du 19 mai 1945 qui rend hommage aux 9 déportés d’Indre et Loire, Jean Mazein le père de Jacques Mazein signe un appel à « venger nos morts», où il dénonce l’indulgence à l’égard de Pétain, maréchal Félon, « qui doit être jugé par un tribunal du peuple et mourir comme un traître sous les balles d’un peloton d’exécution ».
En 1944, son épouse habitait à « La Gloriette » à Joué-lès-Tours.
La mémoire de Roger Legendre est honorée sur le site de la fédération du PCF de Touraine.
Son nom, inscrit sur le monument aux morts de la commune, est également honoré inscrit sur la stèle commémorative du square de la Résistance (aux Moriers, à l’angle de la rue des Martyrs et de l’Avenue du Général de Gaulle) – « A la mémoire des Jocondiens morts en déportation 1940-1945″ – « Résistants, politiques, juifs déportés au nom des lois de l’Allemagne nazie et de celles de la France de Vichy« .
La stèle a été dévoilée en mai 2011.
Sources
- Photocopie d’une photo de Roger Legendre envoyée par © Robert Guérineau en 1988 à Gabriel Lejard, qui me l’a transmise.
- Témoignage de Stanislaw Tamowski, rescapé (1980).
- Acte de naissance portant mention : Décédé à Auschwitz en ? 1942.
- Acte de mariage (1926)
- Journaux locaux 1942 et 1945 (sources Robert Guérineau).
- Enquêtes de Robert Guerineau (1980) et Jean-Claude Guillon (1980), (bibliothécaire retraité, membre de l’Institut CGT d’histoire sociale en région centre, collaborateur du Maitron),.
- Death Books from Auschwitz, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, 1995 (basé essentiellement sur les registres – incomplets – de l’état civil de la ville d’Auschwitz ayant enregistré, entre le 27 juillet 1941 et le 31 décembre 1943, le décès des détenus immatriculés).
- Division des archives des victimes conflits contemporains (DAVCC), Ministère de la Défense, Caen (dossier individuel).
Notice biographique rédigée en octobre 2010, complétée en 2017, 2021 et 2024, par Claudine Cardon-Hamet, docteur en Histoire, auteur des ouvrages : « Triangles rouges à Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942« Editions Autrement, 2005 Paris et de « Mille otages pour Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 dit des « 45000 » », éditions Graphein, Paris 1997 et 2000 (épuisé).
Prière de mentionner ces références (auteur et coordonnées de ce site) en cas de reproduction ou d’utilisation totale ou partielle de cette notice biographique.
Pour la compléter ou la corriger, vous pouvez me faire un courriel à deportes.politiques.auschwitz@gmail.com