Matricule « 45 650 » à Auschwitz
Louis Hamel : né en 1904 à Bricqueboscq (Manche) ; domicilié à Cherbourg (Manche) ; contremaitre ; communiste ; engagé dans les Brigades internationales en Espagne ; arrêté le 19 septembre 1941 ; interné à Compiègne ; déporté à Auschwitz le 6 juillet 1942, où il meurt.
Louis, Clément Hamel est né le 20 janvier 1904 à Bricqueboscq (Manche). Il habite rue Tour Carré à Cherbourg (Manche) au moment de son arrestation.
Reconnu par ses parents en avril 1904, il a deux frère, Léon (1908) et Louis Auguste (1912) et une sœur (1910). Il est célibataire et exerce la profession de contremaître.
Militant communiste, il est « CDH » (c’est à dire qu’il diffuse régulièrement l’Humanité et la presse communiste au sein d’un « Comité de Défense de l’Humanité »). Les « CDH » ont été créés à la fin des années 1920 à l’appel de Marcel Cachin en riposte à la tentative d’interdiction par le ministère Tardieu contre le journal « l’Humanité« .
Louis Hamel s’engage dans les Brigades Internationales pour lutter contre le franquisme en Espagne. Il est gravement blessé au bras gauche et en reste infime. Réformé, il est rapatrié le 26 octobre 1937.
Il est l’un des 32 brigadistes déportés à Auschwitz le 6 juillet 1942. Liste des « 45 000 » ayant combattu pour l’Espagne Républicaine (1936-1938).
Du 7 au 19 juin 1940 la Normandie est envahie par les chars de Rommel. Le 15e corps d’armée, commandé par le général Hotz investit Saint-Lô le 18 juin et Cherbourg le 19. Le 14 juin 1940, la Wehrmacht défile à Paris, sur les Champs-Élysées. La ville cesse alors d’être la capitale du pays et devient le siège du commandement militaire allemand en France.
La moitié nord de la France et toute la façade ouest sont occupées. Le 22 juin 1940, l’armistice est signé : la moitié nord de la France et toute la façade ouest sont occupées. Le pays est coupé en deux par la « ligne de démarcation » qui sépare la zone occupée et celle administrée par Vichy. Le 10 juillet 1940 Pétain, investi des pleins pouvoirs par l’Assemblée nationale, s’octroie le lendemain le titre de « chef de l’Etat français ». Il lance la « Révolution nationale » en rupture avec nombre de principes républicains (confusion des pouvoirs législatifs et exécutifs ; rejet du multipartisme, suppression des syndicats et du droit de grève, antisémitisme d’état…).
Dès le début de l’Occupation des tracts anti-allemands sont édités à l’initiative d’André Defrance, qui organise des groupes de patriotes sous l’égide du Parti communiste clandestin. Les autorités allemandes éditent un avis dès la fin juillet 1940 interdisant sous peine de sévères punitions « de se passer l’un à l’autre des objets de propagande anti-allemande, tracts, journaux… qui doivent immédiatement être remis à la Feldkommandantur ou a l’Ortskommandantur la plus proche ».
La police de Vichy surveille dès le débit de l’Occupation les syndicalistes, anciens élus, candidats ou militants communistes « notoires » et procède à des perquisitions et des arrestations.
Louis Hamel est arrêté le 9 septembre 1941 (source AD Manche, recherches de M. Olivier Jouault), en même temps qu’un autre ancien Brigadiste, Edmond Laisné), ou le 19 septembre 1941 (source DAVCC), comme Marcel Hodiesne (45865 d’Avranches), Léon Lecrées (45755 d’Equeurdreville), Auguste Marie (45823 d’Equeurdreville) et Charles Mauger (45864, d’Octeville).
Louis Hamel est interné à la prison de Saint-Lo.
Il est ensuite remis aux autorités allemandes à leur demande le 3 décembre 1941 et celles-ci l’internent au camp allemand de Royallieu à Compiègne (le Frontstalag 122) en vue de sa déportation comme otage. Depuis ce camp administré par la Wehrmacht, il va être déporté à destination d’Auschwitz. Pour comprendre la politique de l’Occupant qui mène à sa déportation, on lira les deux articles du site qui exposent les raisons des internements, des fusillades et de la déportation : La politique allemande des otages (août 1941-octobre 1942) et «une déportation d’otages».
Depuis le camp de Compiègne, Louis Hamel est déporté à Auschwitz dans le convoi du 6 juillet 1942.
Cf l’article du site : Les wagons de la Déportation.
Ce convoi est composé au départ de Compiègne, de 1175 hommes (1100 « otages communistes » – jeunes communistes, anciens responsables politiques et élus du Parti communiste, syndicalistes de la CGT et délégués du personnel d’avant-guerre, militants et syndicalistes clandestins, résistants – de cinquante « otages juifs » et de quelques « droits communs »). Il faisait partie des mesures de terreur allemandes destinées à combattre, en France, les judéo-bolcheviks, responsables aux yeux de Hitler, des actions armées organisées par le Parti communiste clandestin contre des officiers et des soldats de la Wehrmacht, à partir d’août 1941.
Lire dans le site le récit des deux jours du transport : Compiègne-Auschwitz : 6-8 juillet 1942.
Sur les 1175 otages partis de Compiègne le 6 juillet 1942, 1170 sont présents à l’arrivée du train en gare d’Auschwitz le 8 juillet 1942. Ces derniers sont enregistrés et photographiés au Stammlager d’Auschwitz (camp souche ou camp principal, dénommé en 1943 Auschwitz-I) entre les numéros « 45 157 » et « 46 326 », d’où le nom de « convoi des 45 000 », sous lequel les déportés du camp désignaient ce convoi. Ce matricule – qu’il doit apprendre à dire en allemand et en polonais à toute demande des Kapos et des SS – sera désormais sa seule identité.
Lire dans le site : Le KL Auschwitz-Birkenau.
Sa photo d’immatriculation (1) à Auschwitz a été retrouvée parmi celles que des membres de la Résistance intérieure du camp avaient camouflées pour les sauver de la destruction, ordonnée par les SS peu de temps avant l’évacuation d’Auschwitz.
Lire dans le site le récit de leur premier jour à Auschwitz : L’arrivée au camp principal, 8 juillet 1942. et 8 juillet 1942 : Tonte, désinfection, paquetage, « visite médicale ».
Après l’enregistrement, il passe la nuit au Block 13 (les 1170 déportés du convoi y sont entassés dans deux pièces). Le 9 juillet tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau (Brzezinka), situé à 4 km du camp principal. Le 13 juillet il est interrogé sur sa profession.
Les spécialistes dont les SS ont besoin pour leurs ateliers sont sélectionnés et vont retourner à Auschwitz I (approximativement la moitié du convoi. Les autres, restent à Birkenau, employés au terrassement et à la construction des Blocks. Aucun des documents sauvés de la destruction ordonnée par les SS peu de temps avant l’évacuation d’Auschwitz, ne nous permet de savoir dans quel camp il est affecté à cette date.
Aucun document des archives SS préservées de la destruction par la Résistance ne permet de connaître la date de son décès à Auschwitz, qui est néanmoins antérieure au 18 mars 1943. A cette date on connaît en effet les noms des survivants d’Auschwitz I et ceux des 24 survivants de Birkenau (sur environ 600 hommes), dont 17 reviennent à Auschwitz I et Louis Hamel n’est pas parmi eux.
- Note 1 : 522 photos d’immatriculation des « 45000 » à Auschwitz ont été retrouvées parmi celles que des membres de la Résistance intérieure du camp avaient camouflées pour les sauver de la destruction, ordonnée par les SS peu de temps avant l’évacuation du camp d’Auschwitz. A la Libération elles ont été conservées dans les archives du musée d’Auschwitz. Des tirages de ces photos ont été remis par Kazimierz Smolen (ancien détenu dans les bureaux du camp d’Auschwitz, puis directeur du Musée d’Auschwitz) à André Montagne, alors vice-président de l’Amicale d’Auschwitz, qui me les a confiés.
Sources
- Madame Marcelle Passicot, lettre du 23 janvier 2001. Louis Hamel était le parrain de son frère.
- Liste (incomplète) par matricule du convoi du 6 juillet 1942 établie en 1974 par les historiens du Musée d’Etat d’Auschwitz-Birkenau (Bureau des archives des victimes des conflits contemporains (Ministère de la Défense, Caen) indiquant généralement la date de décès au camp.
- Photo de Louis Hamel en uniforme : page 129 dans le livre « De Caen à Auschwitz« , ouvrage collectif réalisé par les professeurs et élèves du collège Paul Verlaine d’Evrecy, du lycée Malherbe de Caen et de l’association « Mémoire Vive ».
- Courriel de M. Olivier Jouault (2022) qui nous communique le contenu du document des archives départementales de la Manche (4M 41 / 3064) concernant ses dates d’arrestation et d’internement à Compiègne. Nos remerciements.
Notice biographique rédigée en avril 2001, complétée en 2017, 2021 et 2024, par Claudine Cardon-Hamet (docteur en Histoire, auteur des ouvrages : Mille otages pour Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 dit des « 45000 », éditions Graphein, Paris 1997 et 2000 et de Triangles rouges à Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 dit des « 45000 », éditions Autrement, Paris 2005), pour le livre « De Caen à Auschwitz » (Collège Paul Verlaine d’Evrecy, Lycée Malherbe de Caen et Association Mémoire vive) juin 2001, Ed. Cahiers du temps. Prière de mentionner ces références (auteur et coordonnées de ce site) en cas de reproduction ou d’utilisation totale ou partielle de cette notice biographique.
Pour la compléter ou la corriger, vous pouvez me faire un courriel à deportes.politiques.auschwitz@gmail.com
D’après un rapport conservé aux Archives départementales de la Manche (4M 41 / 3064) Louis Hamel a été arrêté par les autorités allemandes (G.F.P.) le 9 septembre (et non le 19) en même temps qu’Edmond Laisné, autre individu ayant combattu dans les Brigades Internationales. Toujours selon le même document , il est transféré à Compiègne le 3 décembre 1941.
Bonjour Monsieur. Je vous remercie de cette information. La date du 19 provient de son dossier au DAVCC à Caen.
Je vais donc mentionner votre source et celle du DAVCC (ce que je fais à chaque fois en cas de doute devant deux documents officiels contradictoires). Comme j’ai effectivement la date du 9 septembre pour Edmond Laisné, on peu penser que les autorités allemandes ont ciblé le même jour deux anciens brigadistes.
Bien cordialement
CCH