André Ridel : né en 1905 à Mézidon (Calvados), où il habite ; mécanicien auto ; arrêté comme otage communiste le 1er mai 1942 ; interné à Compiègne ; déporté le 6 juillet 1942 à Auschwitz où il meurt le 20 août 1942.

André Ridel est né le 27 mars 1905 à Mézidon (Calvados), où il habite au 6, rue Emile Zola au moment de son arrestation.
Il est le fils de Blanche, Amélie, Colombe, Carel, 34 ans « occupée au ménage » et d’Adolphe, Abélard Ridel, 42 ans, maître maçon.
Ses parents se sont mariés le 18 janvier 1893 à Olendon, Calvados. Il a une sœur, Madeleine, née en 1896 à Mézidon et aura une demi-sœur, Emilienne. A sa naissance, la famille habite au n° 90 rue du bourg à Mézidon.
Il semble avoir eu dans sa jeunesse quelques ennuis avec les autorités (notamment deux condamnations pour violences à agents).
Avant son mariage, il habite en 1930 au 25, rue d’Harcourt à Caen, puis il vient en région parisienne, à Versailles.

les signatures des jeunes mariés

André Ridel épouse le 15 février 1936 Madeleine, Georgette Duchène à Paris 14è. Elle est née le 24 juin 1917 à Pantin (Seine / 93).
L’adresse communiquée pour André Ridel est celle du 42, rue de la Santé à Paris 14è qui est celle du centre pénitentiaire de la Santé. Madeleine, 28 ans, sans profession, est domiciliée à Viroflay, 3, avenue de Versailles.
André Ridel est mécanicien auto. Il possède une voiture et vit à Paris, au 13, rue de Dantzig à Paris 15è avant son arrestation, mais il a du revenir en Normandie avec l’Occupation allemande.
« Il devait être communiste » selon sa demi-sœur, Emilienne Richer (leur mère, Marie Ridel, veuve, s’est remariée avec M. Carel).
Il semble néanmoins selon son dossier consulté au Val de Fontenay, qu’il ait été « interdit de séjour » à Paris pour délits de droit commun.

Le 14 juin 1940, l’armée allemande d’occupation entre dans Paris, vidé des deux tiers de sa population. La ville cesse alors d’être la capitale du pays et devient le siège du commandement militaire allemand en France. Toute la Basse Normandie est occupée le 19 juin. Les troupes de la Wehrmacht arrivant de Falaise occupent Caen le mardi 20 juin 1940. La Feldkommandantur 723 s’installe à l’hôtel Malherbe, place Foch.
Le 10 juillet 1940 le maréchal Pétain, investi des pleins pouvoirs par l’Assemblée nationale, abolit la République et s’octroie le lendemain le titre de « chef de l’Etat français ». Il lance la « révolution nationale » en rupture avec nombre de principes républicains (confusion des pouvoirs législatifs et exécutifs ; rejet du multipartisme, suppression des syndicats et du droit de grève, antisémitisme d’état…).
En août huit divisions d’infanterie allemande – qu’il faut nourrir et loger – cantonnent dans la région.

En décembre 1941, André Ridel, alors mécanicien à Mézidon, est condamné à 6 mois de prison pour un vol de bicyclette (Ouest-Eclair du 26 décembre 1941).
A sa sortie de prison, il est arrêté comme otage communiste chez sa mère, Mme Marie, dans la nuit du 1er au 2 mai 1942. 

Son arrestation a lieu en représailles au déraillement de deux trains de permissionnaires allemands à Airan-Moult-Argences (38 morts et 41 blessés parmi les permissionnaires de la Marine allemande à la suite des sabotages par la Résistance, les 16 et 30 avril 1942, de la voie ferrée Maastricht-Cherbourg où circulaient deux trains militaires allemands. Des dizaines d’arrestations sont effectuées à la demande des occupants.

24 otages sont fusillés le 30 avril à la caserne du 43è régiment d’artillerie de Caen occupé par la Werhmarcht. 28 communistes sont fusillés en deux groupes les 9 et 12 mai, au Mont Valérien et à Caen. Le 9 mai trois détenus de la maison centrale et des hommes condamnés le 1er mai pour « propagande gaulliste » sont passés par les armes à la caserne du 43è RI.
Le 14 mai, de nouveau 11 communistes sont fusillés à Caen.
Lire dans le site : Le double déraillement de Moult-Argences et les otages du Calvados (avril-mai 1942) et la note du Préfet de Police de Paris à propos des deux sabotages de Moult-Argences : Collaboration de la Police français (note du Préfet de police, François Bard).

Amené à la gendarmerie de Lisieux (14), André Ridel est remis aux autorités allemandes à leur demande.
Celles-ci l’internent au camp de Royallieu à Compiègne (le Frontstalag 122), le 4 mai, en vue de sa déportation comme otage.
Depuis ce camp administré par la Wehrmacht, il va être déporté à destination d’Auschwitz. Pour comprendre la politique de l’Occupant qui mène à sa déportation, on lira les deux articles du site qui exposent les raisons des internements, des fusillades et de la déportation : La politique allemande des otages (août 1941-octobre 1942) et «une déportation d’otages».

Depuis le camp de Compiègne, André Ridel est déporté à Auschwitz dans le convoi du 6 juillet 1942

Cf Article du site : Les wagons de la Déportation. 

Ce convoi est composé au départ de Compiègne, de 1175 hommes (1100 « otages communistes » – jeunes communistes, anciens responsables politiques et élus du Parti communiste, syndicalistes de la CGT et délégués du personnel d’avant-guerre, militants et syndicalistes clandestins, résistants – de cinquante « otages juifs » et de quelques « droits communs »). Il faisait partie des mesures de terreur allemandes destinées à combattre, en France, les judéo-bolcheviks, responsables aux yeux de Hitler, des actions armées organisées par le Parti communiste clandestin contre des officiers et des soldats de la Wehrmacht, à partir d’août 1941.
Lire dans le site le récit des deux jours du transport : Compiègne-Auschwitz : 6-8 juillet 1942.
Sur les 1175 otages partis de Compiègne le 6 juillet 1942, 1170 sont présents à l’arrivée du train en gare d’Auschwitz le 8 juillet 1942. Ces derniers sont enregistrés et photographiés au Stammlager d’Auschwitz (camp souche ou camp principal, dénommé en 1943 Auschwitz-I) entre les numéros « 45 157 » et « 46 326 », d’où le nom de « convoi des 45 000 », sous lequel les déportés du camp désignaient ce convoi. Ce matricule – qu’il doit apprendre à dire en allemand et en polonais à toute demande des Kapos et des SS – sera désormais sa seule identité.
Lire dans le site : Le KL Auschwitz-Birkenau.

Ils sont immatriculés le 8 juillet.  Le numéro d’immatriculation d’André Ridel à Auschwitz n’est pas certain, et le visage ci-dessous n’est peut-être pas le sien. Nous sommes en quête d’identification.

Ce numéro et ce visage sont peut-être ceux d’André Ridel ?

En effet, le numéro « 46 057 » figurant dans mes deux premiers ouvrages sur le convoi du 6 juillet 1942 correspondait à ma tentative de reconstitution de la liste du convoi par matricules. Ce numéro, quoique plausible, ne saurait être considéré comme sûr en raison de l’existence des quatre listes alphabétiques successives que j’ai partiellement reconstituées, de la persistance de lacunes pour quatre noms, mais d’incertitudes sur plusieurs centaines de numéros matricules. Il ne figure plus dans mon ouvrage Triangles rouges à Auschwitz.

Lire dans le site le récit de leur premier jour à Auschwitz : L’arrivée au camp principal, 8 juillet 1942. et 8 juillet 1942 : Tonte, désinfection, paquetage, « visite médicale ».
Après l’enregistrement, il passe la nuit au Block 13 (les 1170 déportés du convoi y sont entassés dans deux pièces). Le 9 juillet tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau (Brzezinka), situé à 4 km du camp principal. Le 13 juillet il est interrogé sur sa profession. Les spécialistes dont les SS ont besoin pour leurs ateliers sont sélectionnés et vont retourner à Auschwitz I (approximativement la moitié du convoi. Les autres, restent à Birkenau, employés au terrassement et à la construction des Blocks.
Aucun des documents sauvés de la destruction ordonnée par les SS peu de temps avant l’évacuation d’Auschwitz, ne nous permet de savoir dans quel camp il est affecté à cette date, mais on peut penser qu’il est ramené à Auschwitz I à l’atelier automobile compte tenu de son métier.

André Ridel meurt à Auschwitz le 20 août 1942, d’après le certificat de décès établi au camp d’Auschwitz (in Death Books from
Auschwitz
.
Lire dans le site : 80 % des « 45 000 » meurent dans les six premiers mois

Un arrêté ministériel (mention en date du 19mars 1948) porte apposition de la mention «Mort en déportation» sur ses actes et jugements déclaratifs de décès.
Mais cet acte porte la mention fictive « décédé le 15 septembre 1942 à Auschwitz (Pologne) ». Dans les années d’après-guerre, l’état civil français a fixé des dates de décès fictives (le 1er, 15 ou 30, 31 d’un mois estimé) à partir des témoignages de rescapés, afin de donner accès aux titres et pensions aux familles des déportés. Il serait souhaitable que le ministère prenne désormais en compte, par un nouvel arrêté, les archives du camp d’Auschwitz emportées par les Soviétiques en 1945, et qui sont accessibles depuis 1995 et consultables sur le site internet du
© Mémorial et Musée d’Etat d’Auschwitz-Birkenau
Voir l’article :
Les dates de décès des « 45000 » à Auschwitz.
Le titre de « Déporté politique » lui a été attribué.
André Montagne, un des 8 rescapés caennais et calvadosiens du convoi du 6 juillet 1942 à destination d’Auschwitz a rédigé de nombreux témoignages concernant la mort de ses 72 camarades à l’intention de leurs familles. Il se souvenait de beaucoup d’entre eux. Voici ce qu’il écrit d’ « André Ridel (46 057 ?) de Mézidon : arrêté pour d’obscures raisons, c’était un personnage truculent, sympathique, inoubliable. Décédé le 20 août 1942, âgé de 37 ans ».

Sources

  • Liste des « communistes arrêtés dans la nuit du 1er au 2 mai sur désignation de l’Autorité Allemande (Feldkommandantur 723) et remis à celle-ci le 3 mai 1942
  • Listes – incomplètes – du convoi établies par la FNDIRP après la guerre (archives de la F.N.D.I.R.P).
  • Lettres de ses sœurs à André Montagne (janvier -février. 1946).
  • Avis de décès (ACVG avril 1992).
  • ACVG, dossier au Val-de-Fontenay, novembre 1993.
  • Death Books from Auschwitz, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, 1995 (basé essentiellement sur les registres – incomplets – de l’état civil de la ville d’Auschwitz ayant enregistré, entre le 27 juillet 1941 et le 31 décembre 1943, le décès des détenus immatriculés).
  • Archives en ligne du Calvados.
  • Courriels de Mme Valérie Lecroq (juin 2015).

Notice biographique rédigée en janvier 2001 (complétée en 2015, 2017, 2020, 2021 et 2024) par Claudine Cardon-Hamet, docteur en Histoire, auteur des ouvrages : «Triangles rouges à Auschwitz, le convoi politique du 6 juillet 1942 » Editions Autrement, 2005 Paris et de Mille otages pour Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 dit des «45000», éditions Graphein, Paris 1997 et 2000 (épuisé), à l’occasion de l’exposition organisée par des enseignants et élèves du collège Paul Verlaine d’Evrecy, le lycée Malherbe de Caen et l’association « Mémoire Vive ». Prière de mentionner ces références (auteur et coordonnées de ce blog) en cas de reproduction ou d’utilisation totale ou partielle de cette notice biographique.
Pour la compléter ou la corriger, vous pouvez me faire un courriel à deportes.politiques.auschwitz@gmail.com

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