Matricule « 46 243 » Rescapé
Georges Guinchan : né en 1920 à Paris 11è : domicilié à Montreuil (Seine) ; peintre, ouvrier chez Renault ; communiste ; arrêté le 10 novembre 1940 : interné à Fresnes, Rouillé, Compiègne ; déporté le 6 juillet 1942 à Auschwitz ; rescapé ; après guerre traducteur-interprète, ingénieur ; décédé le 30 juillet 2006.
Georges Guinchan est né le 9 décembre 1920 à Paris 11è.
Il habite 17, rue Douy à Montreuil, en Seine-Saint-Denis (1) au moment de son arrestation.
Il est le fils d’Henriette Blanchard, née en 1896 à Buenos Aires (Argentine) et d’André Guinchan, peintre en bâtiments, né en 1896 également à Buenos Ayres. Au moment de sa naissance, ses parents habitent à Rosny-sous-Bois, au 1, rue des Quinconces, au moins jusqu’en 1926. Un autre déporté du convoi du 6 juillet 1946, Eugène Omphalius, né en 1921, habitait au 17, de la même rue. Ils ont donc vraisemblablement fréquenté la même école communale.
Sa famille compte plusieurs militants communistes.
Son père adhère au Parti communiste et à la CGTU (Confédération générale du travail unitaire) au milieu des années 1920. L’un de ses oncles maternels s’engage dans les Brigades internationales en Espagne pour défendre la République espagnole contre la rébellion du général Franco que soutiennent Hitler et Mussolini.
À 15 ans, Georges Guinchan adhère aux Jeunesses communistes.
Il travaille d’abord à Rosny-sous-Bois avec son père comme peintre en lettres pour la réalisation d’affiches peintes sur toile annonçant les films programmés dans les salles de cinéma.
Il est alors ami avec le jeune René Beaulieu, également membre des Jeunesses communistes.
Du 28 février au 12 juin 1940, il est embauché comme ajusteur aux usines Renault pour la fabrication de moteurs d’avions. Quelques jours après ses débuts, il apprend qu’il est mobilisé, mais il est maintenu à son poste de travail en tant qu’ « affecté spécial ».
Le 14 juin 1940, l’armée allemande occupe Drancy et Gagny et entre par la Porte de la Villette dans Paris, vidée des deux tiers de sa population. La ville cesse d’être la capitale du pays et devient le siège du commandement militaire allemand en France. Les troupes allemandes occupent toute la banlieue parisienne les jours suivants. Le 22 juin, l’armistice est signé. Le 10 juillet 1940 le maréchal Pétain, investi des pleins pouvoirs par l’Assemblée nationale, s’octroie le lendemain le titre de « chef de l’Etat français » et lance la « révolution nationale » en rupture avec nombre de principes républicains (confusion des pouvoirs législatifs et exécutifs ; rejet du multipartisme, suppression des syndicats et du droit de grève, antisémitisme d’état…).
Après l’exode, il reprend contact avec ses camarades des Jeunesses communistes de Montreuil, distribue des tracts contre le régime de Vichy, colle des affichettes célébrant le 23ème anniversaire de la Révolution d’octobre.
En octobre 1940, il participe à une manifestation devant la mairie de Montreuil, réclamant le rétablissement de la municipalité à direction communiste destituée en février 1940 (2). Les Allemands interviennent et font évacuer la place de la Mairie sous la menace de deux mitrailleuses.
Le 10 novembre 1940, Georges Guinchan est arrêté à Montreuil en même temps que 7 autres membres des Jeunesses communistes clandestines, par trois inspecteurs de la Brigade spéciale des Renseignements généraux (lire dans le site La Brigade Spéciale des Renseignements généraux) appuyés par des agents du commissariat de Montreuil.
Cette opération avait été demandée par le commissariat de Montreuil comme en témoigne le registre journalier de la BS.
Sur les 8 noms portés sur le registre figurent notamment celui de Roger Tessier (46 253, mort à Auschwitz le 18 mars 1943) et de Robert Aubert (déporté à Dachau – rescapé).
Georges Guinchan est emmené au Dépôt du Palais de justice de Paris le 10 novembre 1940. Il est inculpé « d’infraction aux articles 1 et 3 du décret du 26 septembre 1939 interdisant le Parti communiste et de propagande notoire des doctrines de la IIIè internationale ». En attente de jugement, il est incarcéré à la Maison d’arrêt de la Santé, dans le quartier des droits communs, comme Roger Tessier. Il occupe son temps à apprendre l’allemand.
Georges Guinchan, Roger Tessier, et 13 autres co-inculpés (procès des JC de Montreuil) passent en jugement devant la 15è chambre des mineurs du tribunal correctionnel de la Seine, le 5 avril 1941 d’après le rôle du greffe (le 7 février selon Georges Guinchan).
Roger Tessier et Georges Guinchan sont condamnés à 18 mois de prison et sont emprisonné à Fresnes (Val de Marne). Ils font appel de la sentence.
Le 9 juin 1941, la cour d’Appel de Paris réduit sa peine à 15 mois.
Le 17 octobre 1941, à sa levée d’écrou, il n’est pas libéré, mais interné administrativement dans le camp français de Rouillé (Vienne).
Lire dans le site : le-camp-de-Rouillé
Le 18 mars 1942, il est remis – à leur demande – aux autorités d’occupation qui le transfèrent avec 12 autres jeunes communistes (3) au camp de détention allemande de Royallieu à Compiègne (Oise), le Frontstalag 122, où il est enregistré sous le numéro matricule « 3802 ». Il est interné au bâtiment A2.
Le 21 avril 1942, son nom est inscrit par les services préfectoraux de la Seine sur une liste de trente otages « fusillables », en représailles du sabotage de deux trains militaires (dem SF-Zug 906 und dem Gegenzug SF 806) dans le Calvados (parmi ces noms eux on trouve ceux d’André Tollet, René Perrottet, Pierre Bourneix, Jean Berthout).
Lire dans le site : Le double déraillement de Moult-Argences et les otages du Calvados (avril-mai 1942) et la note du Préfet de Police de Paris à propos du sabotage de Moult-Argences : Collaboration de la Police français (note du Préfet de police, François Bard).
Depuis ce camp administré par la Wehrmacht, il va être déporté à destination d’Auschwitz. Pour comprendre la politique de l’Occupant qui mène à sa déportation, on lira les deux articles du site qui exposent les raisons des internements, des fusillades et de la déportation : La politique allemande des otages (août 1941-octobre 1942) et «une déportation d’otages».
Le 6 juillet, à six heures du matin, les otages sont conduits sous escorte allemande à la gare de Compiègne et entassés dans des wagons de marchandises. Le train s’ébranle à 9 heures trente.
Depuis le camp de Compiègne, Georges Guinchan est déporté à Auschwitz dans le convoi du 6 juillet 1942.
Cf Article du site : Les wagons de la Déportation.
Ce convoi est composé au départ de Compiègne, de 1175 hommes (1100 « otages communistes » – jeunes communistes, anciens responsables politiques et élus du Parti communiste, syndicalistes de la CGT et délégués du personnel d’avant-guerre, militants et syndicalistes clandestins, résistants – de cinquante « otages juifs » et de quelques « droits communs »). Il faisait partie des mesures de terreur allemandes destinées à combattre, en France, les judéo-bolcheviks responsables, aux yeux de Hitler, des actions armées organisées par le parti communiste clandestin contre des officiers et des soldats de la Wehrmacht, à partir d’août 1941.
Lire dans le site le récit des deux jours du transport : Compiègne-Auschwitz : 6-8 juillet 1942.
Sur les 1175 otages partis de Compiègne le 6 juillet 1942, 1170 sont présents à l’arrivée du train en gare d’Auschwitz le 8 juillet 1942.
Ces derniers sont enregistrés et photographiés au Stammlager d’Auschwitz (camp souche ou camp principal, dénommé en 1943 Auschwitz-I) entre les numéros « 45 157 » et « 46 326 », d’où le nom de « convoi des 45 000 », sous lequel les déportés du camp désignaient ce convoi. Ce matricule – qu’il doit apprendre à dire en allemand et en polonais à toute demande des Kapos et des SS – sera désormais sa seule identité.
Lire dans le site : Le KL Auschwitz-Birkenau.
Georges Guinchan est enregistré à son arrivée à Auschwitz le 8 juillet 1942 sous le numéro « 46 243 » au camp central.
Ce matricule sera tatoué sur son avant-bras gauche quelques mois plus tard. Il doit apprendre à le dire en allemand et en polonais. Ce sera sera désormais sa seule identité pour ses gardiens.
Attendant son tour, Georges Guichan aperçoit Armand Schkolnic, un jeune communiste et ancien compagnon de chambrée de Rouillé, déporté comme otage juif le 5 juin 1942, qui lui apprend que la plupart des hommes de son convoi sont déjà morts.
Le lendemain, tous les “45 000” sont conduits à pied à Birkenau, camp annexe situé à 4 km du camp central.
Dans ce camp, par une chaleur torride, Georges Guichan doit transporter des briques pour les maçons qui commencent la construction du futur Krematorium II (un bâtiment combinant chambre à gaz et fours crématoires).
Le 13 juillet – après cinq jours passés par l’ensemble des “45 000” à Birkenau, camp annexe d’Auschwitz, Georges Guichan est dans la moitié des membres du convoi ramenée au camp central après l’appel du soir.
Là, il est assigné au Block 15 et affecté successivement à plusieurs Kommandos de travail : il est d’abord couvreur – subissant toutes les intempéries – puis dans un Kommando où il peint des skis en blanc pour la campagne de Russie, puis peintre en lettres.
Il accède à cet atelier par l’entremise d’un Polonais qui parle allemand, Ryszard Matuszewski, arrivé en juin 1940 dans le premier convoi de déportés pour Auschwitz (matricule n° 60). Avec lui, Georges Guinchan apprend le polonais. Pris en charge par les membres de son Kommando, il reçoit d’eux un remède efficace (une décoction d’écorces) quand il est atteint de dysenterie.
Au Block 15, il fait partie d’un petit groupe d’amis constitué de jeunes communistes de son convoi.
L’un d’eux, Robert Lambotte, est en contact depuis septembre 1942 avec Hermann Langbein, un des dirigeants du Comité international de résistance fondé en août 1942 par des détenus communistes autrichiens et allemands.
Hermann Langbein est le secrétaire du médecin-chef SS d’Auschwitz, Eduard Wirths.
Il demande à Robert Lambotte de lui présenter deux jeunes Français qu’il recommanderait pour être infirmiers au Block des maladies contagieuses du Revier.
C’est ainsi que Georges Guinchan et André Montagne se retrouvent chargés, à partir de mars 1943, de veiller sur les malades français (juifs et politiques) et, dans la mesure de leurs faibles moyens, de leur éviter d’être sélectionnés et gazés comme “inaptes au travail”.
Ils sont assurés du soutien de l’infirmier et résistant autrichien Franz Danimann.
Lorsque Joseph Cyrankiewicz, un des dirigeants du groupe de résistance de la gauche polonaise, entre comme malade au Revier (salle des malades de la malaria), Georges Guinchan et un autre français, Charles Gelbart (28.621), sont de ceux qui veillent sur sa vie et sur sa sécurité. Mais ces fonctions ne sont pas sans conséquences sur sa propre santé : il est à son tour atteint de tuberculose. À peine remis, ses amis le font sortir du Revier pour qu’il échappe à une sélection.
Il reçoit, le 4 juillet 1943, l’autorisation d’annoncer à sa famille – en allemand et sous la censure – qu’ils peuvent correspondre et qu’il a le droit de recevoir des colis contenant de la nourriture. Cette mesure touche tous les détenus politiques français d’Auschwitz – essentiellement les survivants du convoi du 6 juillet 1942 (environ 140 « 45000 », regroupés dans leur quasi-totalité au camp central en mars 1943) et du convoi de 230 femmes déportées à Birkenau le 24 janvier 1943 (59 « 31 000 » survivantes) (4).
Grâce au travail de recherche de M. Antony Gard professeur au Collège de médecine à Mobile (USA), qui prépare un livre sur les lettres de déportés d’Auschwitz, dont une des lettres de Georges Guinchan adressée à sa mère depuis le Block 11, nous pouvons en livrer le contenu, soumis à la censure de la gestapo du camp.
Voici la transcription en allemand de sa lettre : Auschwitz, den 17. 10. 1943 Meine liebe kleine Mutti. Bisher habe ich von Dir wenige Briefe erhalten und das setzt mich in Erstaunen. Du kannst Dich [Dir] nicht vorstellen, mit welcher Ungeduld ich erwarte deine Briefe. Du mußt mir viel öfter schreiben. Meinerseits schreibe ich an Dich so oft wie möglich. Ich hoffe daß Ihr alle gesund seid, trotz diese[r] schweren Zeiten.
Ich lebe immer in der Erwartung einer Ver- änderung aber bis jetzt nichts neues. Der erste Schnee ist schon gefallen, bald werden wir im Winter sein. Deswegen kannst du mir wieder Pakete absenden. Der Inhalt des letzten Paketes war gut ausgewählt. Etwas Tabak würde mir [mich] freuen. Setze [Lege] mir besonders Fett, Butter hinein. Durch das Rote Kreuz kannst Du mir Lebensmittelpakete schicken lassen, du brauchst nur meinen Brief vorzuzeigen. Antworte mir sofort gibt mir Nachrichten über der [die] Familie. Was machen Wie leben meine Tanten Germaina, Suzanne, Renée, mein Onkel Daniel, Roger und meine lieben Basen ohne meine Grossmutter [zu] vergessen. In deinem Brief sagst Du mir gar nichts von meinem Vater. Weiß er wo ich bin? Erkundige Ihm, denn ich darf nur an deine Anschrift schreiben. Vergiss nicht die Lichtbilder die Du mir versprochen hattest. Ja, meine liebe Mutti noch paar Tage und schon drei Jahre daß wir getrennt sind. Wir müssen noch uns gedulden. Sage an die Familie viele Sache[n] von mir, daß ich oft an Euch alle denke. Leider muss ich Dich schon verlassen. Ich küsse Dich u. die ganze Familie sehr herzlichst. Dein Sohn. Guinchan G……
Traduction : Auschwitz, le 17 octobre 1943 : Ma chère petite maman. Jusqu’à présent, j’ai reçu peu de lettres de votre part et cela m’étonne. Tu ne peux pas imaginer l’impatience avec laquelle je suis en attente de tes lettres. Tu dois m’écrire beaucoup plus souvent. Pour ma part, je t’écris le plus souvent possible. J’espère que vous êtes tous en bonne santé malgré ces moments difficiles. Je vis toujours dans l’attente d’un changement, mais rien de nouveau pour l’instant. La première neige est déjà tombée, bientôt nous serons en hiver. C’est pourquoi vous pouvez à nouveau m’envoyer des colis. Le contenu du dernier paquet a été bien choisi. Un peu de tabac me ferait plaisir. Mettez surtout de la graisse, du beurre dedans. Vous pouvez me faire envoyer des colis alimentaires par l’intermédiaire de la Croix-Rouge, (pour l’adresse) si vous en avez besoin, il faut juste montrer ma lettre. Réponds moi tout de suite pour me donner des nouvelles de la famille. Comment vivent mes tantes Germaine, Suzanne, Renée, mes tantes et Oncle Daniel, Roger et mes chers cousins et sans oublier grand-mère. Dans ta lettre, tu ne me dis rien sur mon père. Sait-il où je suis ? Renseignes toi, car je n’ai le droit d’écrire qu’à ton adresse. N’oublies pas les photographies que tu m’as promis. Oui, ma chère maman, encore quelques jours et déjà trois ans que nous sommes séparés. Il faut encore être patient. Dis à la famille beaucoup de choses sur moi que je pense souvent à vous tous. Malheureusement, je dois te quitter. Je t’embrasse très fort ainsi que toute la famille. Ton fils. Guinchan Georges
Quelques mois plus tard, il rejoint les détenus politiques français de sexe masculin rassemblés au premier étage du Block 11 du camp central, la prison du camp d’Auschwitz, depuis le 14 août pour une « quarantaine » dont on ignore les véritables raisons.
Lire l’article du site « les 45000 au block 11.
Les Français sont exemptés de travail et d’appel extérieur, mais témoins des exécutions massives de résistants, d’otages polonais et tchèques et de détenus du camp dans la cour fermée séparant le Block 10 et le block 11. Le 12 décembre 1943, à la suite d’une visite du nouveau commandant du camp, Arthur Liebehenschel, et après quatre mois d’un relatif repos qui leur a permis retrouver quelques forces, ils sont renvoyés dans leurs Blocks et leurs Kommandos précédents.
Au printemps 1944, Georges Guinchan contracte le typhus. Une fois rétabli, en juin, il est placé – grâce à l’influence de Hermann Langbein – secrétaire du SS médecin chef du camp – comme secrétaire du SS responsable de l’infirmerie au camp des travailleurs civils (Gemeinschaftlager).
Là, il est un des relais pour la transmission de messages entre la Résistance intérieure et la Résistance polonaise agissant à l’extérieur du camp, dans la région montagneuse des Beskides, le long de la frontière tchécoslovaque.
A la fin de l’été 1944, Georges Guinchan est parmi les trente-six “45000” qui restent à Auschwitz, alors que les autres sont transférés vers d’autres camps.
Fin septembre 1944, la Résistance le fait affecter – avec André Montagne qui parle aussi allemand – comme secrétaire Blockschreiber dans un Block occupé par des détenus allemands du Reich.
Dès 1944, devant l'avancée des armées soviétiques, les SS commencent à ramener vers le centre de l’Allemagne les déportés des camps à l’Est du Reich, dont Auschwitz. Les premiers transferts de "45.000" ont lieu en février 1944 et ne concernent que 6 d’entre eux. 89 autres "45.000" sont transférés au cours de l'été 1944, dans trois camps situés plus à l'Ouest - Flossenbürg, Sachsenhausen, Gross-Rosen - en trois groupes, composés initialement de trente "45 000" sur la base de leurs numéros matricules à Auschwitz. Une trentaine de "45.000" restent à Auschwitz jusqu'en janvier 1945. Il y eut également quelques cas particuliers. Lire dans le site : Les 45000 pris dans le chaos des évacuations (janvier-mai 1945) et Itinéraires des survivants du convoi à partir d'Auschwitz (1944-1945)
Le 18 janvier 1945, Georges Guinchan fait partie des vingt “45 000” incorporés dans les colonnes de détenus évacuées vers Mauthausen où il est immatriculé sous le numéro « 165 615 » ou « 117 795 » ; c’est ce dernier numéro qu’il nous a indiqué, les deux numéros figurant sur sa fiche..
Le 28 ou 29 janvier, il est parmi les douze « 45 000 » affectés au Kommando de Melk « .. Le 15 ou 17 avril, ce groupe est évacué en marche forcée vers Ebensee, province de Salzbourg, où des usines souterraines sont en cours d’aménagement.
Le 5 mai 1945, redoutant d’être exterminés, les détenus refusent de se rendre dans les tunnels dont les entrées ont été minées par les SS. Les troupes américaines atteignent le camp le lendemain.
Avec ses compagnons, Georges Guinchan fait partie des derniers “45 000” à être libérés. Il demeure sur place une semaine comme infirmier avant de rentrer en France.
Très gravement tuberculeux, sa réintégration est entrecoupée pendant six ans de séjours dans des hôpitaux et des sanatoriums, en Suisse, en Allemagne et en France.
En 1945 il est domicilié au 22, rue Rambuteau à Paris 3è, puis en 1949 au 17, rue de Trétaigne à Paris 18è.
De 1950 à 1958, il habite Butte de la Reine à Palaiseau 1949 .
Le 25 mai 1950, il épouse à Fribourg-en-Brisgau (Freiburg-im-Brisgau) Allemagne, Edith, Marlène Haller. Le couple divorce le 20 mars 1962.
En 1962 il est traducteur interprète. En 1966, il est ingénieur.
Il épouse en deuxièmes noces Rosemarie, Paula, Franziska Veselski le 29 septembre 1962 à Palaiseau (Seine-et-Oise / Essonne).
En 1962 le couple vient habiter au 6, rue de la Pie Voleuse à Palaiseau.
Le couple a trois enfants : Georges Frédéric né en 1962, Birgit, Caroline, Corinne, née en 1966 et Yann Bertrand Maurice né en 1969.
En 1997, à la retraite de Georges, le couple s’installe au 6, rue Rochette, Les Hôpitaux-Neufs (Doubs).
Georges Guinchan a été homologué dans un premier temps comme “Déporté politique” puis vers la fin de sa vie comme « Déporté résistant».
Il est resté en rapports suivis avec Hermann Langbein et Franz Danimann, qui ont tous deux signé des attestations témoignant de son activité au sein de leur groupe de Résistance à Auschwitz.
Il s’est engagé dans diverses activités associatives et culturelles, comme la philatélie (à partir de lettres et cartes, il a illustré son internement et la Déportation : notamment avec 48 pages de timbres et cartes à l’exposition philatélique et cartographique de Grenoble « la Résistance et la Déportation » les 27 et 28 avril 1985.
Nous l’avons rencontré, mon mari et moi, chez lui, aux Hôpitaux-neufs (Doubs) dans les années 1990, dans le cadre de la préparation de ma thèse.
Il a été un témoin inlassable de la déportation, en particulier en direction de la jeunesse : en 2005 et en 2006, deux mois avant sa mort, Georges Guinchan recevait chez lui un groupe d’élèves du L.P. Toussaint Louverture de Pontarlier avec leur professeur d’Histoire, M. Christian Defrasne.
Deux émouvants DVD ont été réalisés au cours de ces rencontres-témoignages.
Il s’est également adonné à la peinture de son cher Jura (madame Rose Marie Guinchan a eu la gentillesse de m’offrir une de ses œuvres au printemps 2014) Cf. en fin de la notice.
Georges Guinchan est mort le 30 juillet 2006. Il a été fait chevalier de la Légion d’Honneur en 2004, a reçu la Croix de Guerre, la Croix de la Déportation et la Croix de la Résistance.
- Note 1. Jusqu’à la loi du 10 juillet 1964, cette commune faisait partie du département de la Seine, qui inclut Paris et de nombreuses villes de la “petite couronne”, dont la “ceinture rouge” des municipalités communistes (transfert administratif effectif en janvier 1968).
- Note 2. Par arrêté du 23 février 1940 du Conseil de préfecture du département de la Seine et en application de la loi du 20 janvier 1939, tout élu communiste est « de plein droit » déchu de son mandat électif s’il n’en n’a pas démissionné ou s’il n’a pas dénoncé publiquement – avant le 26 octobre 1939 – son adhésion au Parti communiste et toute participation aux activités interdites par le décret du 26 septembre 1939, portant dissolution des organisations communistes.
- Note 3. Il s’agit de Marcel Algret, Maurice Alexis, Henri André, Jean Bach, Roger Dejameau, Louis Faure, René Faure, Georges Guinchan, Faustin Jouy, Henri Migdal, Marcel Nouvian, Roger Tessier : sont tous déportés à Auschwitz. André Giraudon, de Bourges, est fusillé à Compiègne le 10 mai 1942.
- Note 4 : Cette autorisation trouve son origine dans une directive de la Gestapo datée du 21 juin 1943 s’appliquant à tous les aux détenus des camps de concentration en provenance d’Europe occidentale.
Une aquarelle de Georges Guinchan, que m’a offerte son épouse, en souvenir de son mari.
Sources
- Quatre photos noir et blanc transmises en juillet 2010 par son fils Frédéric. En 1946 et 1947 au sanatorium, les deux autres (buste) été 1940 et septembre-octobre 1940, peu de temps avant son arrestation.
- Reproduction de son billet de sortie de Fresnes (collection philatélique de Georges Guinchan).
- Georges Guinchan, « Aide–toi, le ciel t’aidera » .
Biographie d’un déporté. Brochure à compte d’auteur, Les Hôpitaux neufs. Janvier 2000.
- Entretiens de Georges Guinchan avec Claudine Cardon-Hamet à son domicile des Hôpitaux-Neufs en 2001. Il a fait partie des 6 rescapés avec lesquels j’ai eu des contacts suivis.
- Soixantième anniversaire du départ du convoi des « 45 000 », brochure répertoriant les “45 000” de Seine-Saint-Denis, éditée par la Ville de Montreuil et le Musée d’Histoire vivante, 2002, pages 22 et 23 (biographie rédigée par Claudine Cardon-Hamet).
- Deux DVD réalisés en 2005 et 2006 par les élèves du L.P. Toussaint Louverture de Pontarlier, avec le concours de leur professeur d’Histoire, M. Christian Defrasne (août 2010).
- Archives départementales de la Vienne (Rouillé).
- Archives de la Préfecture de police de Paris, dossiers Brigade spéciale des Renseignements généraux, registres journaliers.
- Lettre d’Auschwitz : aimable autorisation de M. Antony Gard professeur au Collège de médecine à Mobile (USA) qui prépare un livre sur les lettres de déportés d’Auschwitz (août 2021)
- Cartes de Mauthausen, in site d’Arolsen.
Notice biographique rédigée à partir d’une notice succincte pour le 60è anniversaire du départ du convoi des « 45 000 », brochure répertoriant les “45 000” de Seine-Saint-Denis, éditée par la Ville de Montreuil et le Musée d’Histoire vivante, 2002, complétée en novembre 2007 (2014, 2019, 2020, 2022 et 2024) par Claudine Cardon-Hamet (docteur en Histoire, auteur des ouvrages : Mille otages pour Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 dit des « 45000 », éditions Graphein, Paris 1997 et 2000 (épuisé) et de Triangles rouges à Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 dit des « 45 000 », éditions Autrement, Paris 2005 (dont je dispose encore de quelques exemplaires pour les familles). Prière de mentionner ces références (auteur et coordonnées de ce site) en cas de reproduction ou d’utilisation totale ou partielle de cette notice biographique.
Pour la compléter ou la corriger, vous pouvez me faire un courriel à deportes.politiques.auschwitz@gmail.com