En 2023, découverte de photos d’immatriculation du camp de Compiègne

En octobre 2023, grâce à la parution de documents sur le site Facebook du "club Mémoires 52", nous avons découvert 36 photos de matricules "ZI-122-XXX", que nous avons transmis au Mémorial de Compiègne. Le directeur, M. Aurélien Gnat et son équipe ont depuis entrepris de nouvelles recherches en Haute-Marne.

Claudine Cardon-Hamet et Pierre Cardon  

Dans mes premières recherches sur le camp de Compiègne je me suis appuyée sur les travaux et recherches d’Olga Wormser selon laquelle des archives avaient été récupérées par des internés à la libération du camp le 15 août 1944. Ces archives avaient été versées à la direction des fichiers et statistiques du ministère des Prisonniers, Déportés et Réfugiés au mois d’octobre 1944, également à La croix rouge de Compiègne, ainsi qu’à quelques anciens internés.
« Quelques mois plus tard des cahiers d’importance diverses furent remis à la Croix Rouge de Compiègne (cahiers de coiffeurs, de bibliothèque, des cuisines),  et 40 cahiers d’écolier où les noms des détenus figurent en face de leur numéro d’ordre au fur et à mesure de leur entrée au camp. C’est grâce à ces cahiers que les services du Ministère des Anciens Combattants a pu reconstituer les listes des convois partis de Compiègne et est parvenu à établir une statistique précise du nombre de déportés passés par ce camp ». (CDJC / Mémorial de la Shoah. AJ/72/310.
En 1988, M. Monrencey, conseiller municipal de Compiègne qui à l’époque habitait en face du camp de Royallieu m’assurait qu’il avait constaté dès l’évacuation du camp par les Allemands qu’il n’y avait plus aucune archive, et qu’aucune ne figurait aux archives municipales. Les archives départementales m’assuraient également que ces archives avaient été détruites ou emportées par les SS.

FR3 Oise

Le directeur du Mémorial de l’internement et de la déportation de Compiègne a retrouvé en juillet 2024 une partie des archives du camp de Royallieu, oubliées dans le grenier de la Croix rouge locale. Parmi ces documents, deux listes de plus de 4 000 noms de déportés, dont celle du convoi de la mort, parti le 2 juillet 1944 pour Dachau.

 

Des photos d’internés de Compiègne avec leur numéro matricule 

36 communistes ou sympathisants Hauts-Marnais arrêtés comme otages le 22 juin 1941 et photographiés le 27 juin

Nous étions donc persuadés – comme l’équipe actuelle du Mémorial de Compiègne – qu’il ne subsistait pas de photos prises lors de l’enregistrement des premiers internés politiques administratifs le 27 juin 1941 à Compiègne, les SS ayant détruit ou emporté les archives.
C’est pourquoi nous avons pensé dans un premier temps que les photos publiées dans le Blog du Club Mémoires 52 (association de recherches historiques consacrées au département de la Haute-Marne, créée, en 1991, par Jean-Marie Chirol (1929-2002), avec comme seule référence la légende  « 36 communistes ou sympathisants Hauts-Marnais arrêtés comme otages le 22 juin 1941 et photographiés le 27 juin » émanaient du camp de Chaumont, lui aussi dénommé FT 122.

Léon Campion, matricule 616. Ce matricule figure sur la carte lettre qu’il envoie à son épouse

Mais en confrontant les matricules figurant sur ces photos avec les matricules de Compiègne dont nous avions connaissance par les listes allemandes, ou par des cartes-lettres envoyées par les détenus à leurs familles ou encore par la liste manuscrite de matricules collectés par par Georges Prévoteau auprès de ses camarades internés, nous sommes sûrs qu’il s’agit bien des mêmes numéros.
Auraient-ils pu alors être photographiés à Chaumont et garder le même matricule à Compiègne ? Cela nous a semblé impossible au vu de l’étalement des numéros (de 616 à 1114), et nous a confortés dans l’idée qu’il s’agissait bien de photos de Compiègne.
Les seules hypothèses qui nous semblent plausibles pour qu’elles aient été retrouvées par M. Jean-Marie Chirol, serait soit un retour en Haute-Marne des photos des Hauts-Marnais de Compiègne à la demande du camp de Chaumont ou de la Préfecture, soit qu’elles aient été récupérées au moment de la libération du camp par un Haut-marnais alors interné.

Six Hauts-Marnais figurant sur ces 36 photos de communistes ou sympathisants immatriculés et photographiés à Compiègne seront déportés à Auschwitz

La mention ZI signifie "Zivil interniert" (interné civil). Au moment des premiers internements de prisonniers politiques à Compiègne essentiellement des syndicalistes et / ou communistes - soit, à partir du 27 juin 1941 - le Frontstalag 140 qui comporte encore des prisonniers militaires français, américains et britanniques (KG, Kriegsgefangene), devient le Frontstalag 122, avec des camps séparés. Le 12 décembre 1941, s'y ajoute le camp des Juifs (743 juifs français considérés comme notables).

Les fiches de recherche des évadés de Compiègne (22 juin 1942)

En rédigeant – à partir des archives de la Préfecture de Police de Paris – un article pour le présent site concernant les 19 évadés de Compiègne depuis un tunnel creusé par des équipes d’internés le 22 juin 1942, nous avons constaté que les huit fiches de recherche éditées par la Police de Vichy que nous avons pu consulter, étaient presque toutes accompagnées d’une photo émanant du camp de Compiègne, soit intitulées « ZI 122 suivi du matricule » ou « 122 ZI suivi du matricule », soit « 122 et le matricule ».

Lire l’article du site : Avis de recherche des évadés du 22 juin 1942 par le tunnel du camp de Compiègne.

 

Le livre d’André Poirmeur

Dans son livre « Compiègne 1939-1945 » édité en 1968, André Poirmeur ne mentionne qu’une seule fois des photographies, mais en ces termes P. 169 « « un photographe était chargé du tirage des 54 000 photos d’identité et tenu d’opérer et de détruire les clichés en présence des nazis… » (André Poirmeur utilise le terme de « clichés ». Mais il s’agit en fait des négatifs de ces photos).

André Poirmeur publie également page 87, une planche photo de sept femmes dont le matricule (entre le « 19 659 » et « 20 907 ») est précédé du chiffre 122. Un homme figure également sur la planche-photo, sans numéro.

 

 

Prière de mentionner ces références (auteur et coordonnées de ce site) en cas de reproduction ou d’utilisation totale ou partielle de cet article. Pour le compléter ou y proposer des corrections, vous pouvez nous faire un courriel à deportes.politiques.auschwitz@gmail.com

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *