Maxime Collet le 8 juillet 1942 à Auschwitz

Matricule « 45384 » à Auschwitz

Maxime Collet : né à Paris 14ème ; domicilié à Levallois-Perret (Seine) ; menuisier, puis taxi ; communiste ; arrêté le 27 juin 1941 ; interné au camp de Compiègne ; déporté le 6 juillet 1942 à Auschwitz où il meurt 1er février 1943.

Maxime Collet est né au 1 rue Carnot le 26 août 1909 à Paris (14ème).  Il habite au 11, rue Trézel à Levallois Perret (ancien département de la Seine / Hauts-de-Seine) au moment de son arrestation.
Il est le fils de Juliette Rigolet, 31 ans, sans profession et d’Alcindor, Sylvio Collet, 32 ans, employé de Chemin de fer, son époux.

En 1931, il s’inscrit sur les listes électorales de Levallois, où il est domicilié au 221, rue Marius Aufan. Il exerce la profession de menuisier en bâtiments.
Le 16 février 1933 se tient à Saint-Ouen un meeting de la CGTU auquel participent 150 travailleurs polonais venus en France avec un contrat de travail, qui se retrouvent au chômage, sans indemnités de licenciement.

Le Petit Parisien, avril 1933

A l’issue de la réunion, un groupe de manifestants se dirige vers les locaux du consulat de Pologne à Levallois-Perret : les uns, exigent leur rapatriement, les autres le paiement de leurs indemnités de chômage. Une bagarre survient avec le personnel du consulat, à l’issue de laquelle treize manifestants sont arrêtés, dont deux Français, Maxime Collet et Maurice Joyeux.
Le « Figaro » et le « Populaire », laissent entendre que Maxime Collet est un agent provocateur du Parti communiste, un « moscoutaire ». Il est défendu par Maître Antoine Hajje, qui est un des avocats qui plaide souvent pour la CGTU et le Parti communiste. Voir en annexe le compte rendu du Petit Parisien du 22  avril 1935.
A l’audience, Henry Raynaud, secrétaire le CGTU vient plaider le sort des travailleurs polonais. Maxime Collet est condamné par la 13èmeChambre correctionnelle à 2 mois de prison et 25 francs d’amende.  l’Avocat Antoine Hajje sera fusillé en 1941. Lire dans le blog : Trois avocats de « 45000 » sont fusillés le 20 septembre 1941.  Pour l’autre français arrêté, Maurice Joyeux, la manifestation avait eu lieu « pour protester contre la mort d’un ouvrier polonais dans un baraquement où des rats lui avaient mangé la moitié d’un bras » in notice biographique de Maurice Joyeux, dans le dictionnaire des anarchistes (Le Maitron). Il est condamné à 3 mois de prison. À sa sortie de prison, en mai, il adhère au Secours Rouge International, puis deviendra anarchiste. Il a écrit un livre dans le style de Jules Vallès, ayant pour socle ces événements, intitulé « Le Consulat Polonais » paru en 1957 (éd. Calmann-Lévy).
Maxime Collet est désormais surveillé par la police, en tant que « communiste » ayant été condamné pour des actes illégaux. Il fait l’objet de fiches policières comme cela a été le cas dans la plupart des communes de la Seine (lire à titre d’exemple dans le site : Le rôle de la police française (Rouen, Ivry et Vitry, BS1). Ces données sont reprises à l’occupation par la Brigade spéciale des RG (BS1) et transmisses à l’occupant.

Le 5 octobre 1935, il épouse à Levallois, Marcelle, Marguerite Vidal. Le couple aura un enfant.
Maxime Collet est menuisier (chauffeur de taxi d’après madame Faurie. C.f. note1).
Il est membre du Parti communiste.

Le vendredi 14 juin 1940, les troupes de la Wehrmacht entrent dans Paris, vidée des deux tiers de sa population. La ville cesse d’être la capitale du pays et devient le siège du commandement militaire allemand en France. Un premier  détachement  allemand  occupe  la mairie de Nanterre et l’état-major  s’y  installe. Le 22 juin, l’armistice est signé. Le 10 juillet 1940 le maréchal Pétain, investi des pleins pouvoirs par l’Assemblée nationale, s’octroie le lendemain le titre de « chef de l’Etat français » et lance la « révolution nationale » en rupture avec nombre de principes républicains (confusion des pouvoirs législatifs et exécutifs ; rejet du multipartisme, suppression des syndicats et du droit de grève, antisémitisme d’état…).

Maxime Collet est arrêté le 27 juin 1941. La liste des Renseignements généraux répertoriant les communistes internés administrativement le 27 juin 1941, mentionne pour Maxime Collet : « Meneur particulièrement actif ».

Cette arrestation a lieu dans le cadre de la grande rafle commencée le 22 juin 1941, jour de l’attaque hitlérienne contre l’Union soviétique. Sous le nom «d’Aktion Theoderich», les Allemands arrêtent plus de mille communistes dans la zone occupée, avec l’aide de la police française.

D’abord placés dans des lieux d’incarcération contrôlés par le régime de Vichy, ils sont envoyés, à partir du 27 juin 1941, au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré par la Wehrmacht et qui ce jour là devient un camp de détention des “ennemis actifs du Reich”.Depuis ce camp administré par la Wehrmacht, il va être déporté à destination d’Auschwitz. Pour comprendre la politique de l’Occupant qui mène à sa déportation, on lira les deux articles du site qui exposent les raisons des internements, des fusillades et de la déportation : La politique allemande des otages (août 1941-octobre 1942) et «une déportation d’otages».

Depuis le camp de Compiègne, Maxime Collet est déporté à Auschwitz dans le convoi du 6 juillet 1942.

Cf Article du site : Les wagons de la Déportation. 

Ce convoi est composé au départ de Compiègne, de 1175 hommes (1100 « otages communistes » – jeunes communistes, anciens responsables politiques et élus du Parti communiste, syndicalistes de la CGT et délégués du personnel d’avant-guerre, militants et syndicalistes clandestins, résistants – de cinquante  « otages juifs » et de quelques « droits communs »). Il faisait partie des mesures de terreur allemandes destinées à combattre, en France, les judéo-bolcheviks responsables, aux yeux de Hitler, des actions armées organisées par le parti communiste clandestin contre des officiers et des soldats de la Wehrmacht, à partir d’août 1941. Lire dans le site le récit des deux jours du transport : Compiègne-Auschwitz : 6-8 juillet 1942. Sur les 1175 otages partis de Compiègne le 6 juillet 1942, 1170 sont présents à l’arrivée du train en gare d’Auschwitz le 8 juillet 1942. Ces derniers sont enregistrés et photographiés au Stammlager d’Auschwitz (camp souche ou camp principal, dénommé en 1943 Auschwitz-I) entre les numéros « 45157 » et « 46326 », d’où le nom de « convoi des 45000 », sous lequel les déportés du camp désignaient ce convoi. Ce matricule – qu’il doit apprendre à dire en allemand et en polonais à toute demande des Kapos et des SS – sera désormais sa seule identité. Lire dans le site : Le KL Auschwitz-Birkenau.

Maxime Collet est enregistré à son arrivée à Auschwitz le 8 juillet 1942 sous le numéro « 45384 ».

Sa photo d’immatriculation (2) à Auschwitz a été retrouvée parmi celles que des membres de la Résistance intérieure du camp avaient camouflées pour les sauver de la destruction, ordonnée par les SS peu de temps avant l’évacuation d’Auschwitz.

Lire dans le site le récit de leur premier jour à Auschwitz : L’arrivée au camp principal, 8 juillet 1942. et 8 juillet 1942 : Tonte, désinfection, paquetage, « visite médicale ».  Après l’enregistrement, il passe la nuit au Block 13 (les 1170 déportés du convoi y sont entassés dans deux pièces). Le 9 juillet tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau, situé à 4 km du camp principal. Le 13 juillet il est interrogé sur sa profession. Les spécialistes dont les SS ont besoin pour leurs ateliers sont sélectionnés et vont retourner à Auschwitz I (approximativement la moitié du convoi. Les autres, restent à Birkenau, employés au terrassement et à la construction des Blocks. Compte tenu de sa profession de menuisier, il a vraisemblablement été ramené à Auschwitz I, affecté à l’atelier de menuiserie, ce qui explique son décès plus tardif que la majorité des « 45.000 ».

Maxime Collet meurt à Auschwitz le 1er février 1943 d’après les registres du camp.
Le titre de « Déporté politique » lui a été attribué. Maxime Collet est homologué (GR 16 P 137461) au titre de la Résistance intérieure française (RIF) comme appartenant à l’un des mouvements de Résistance .

Annexe : Le petit Parisien du 22 avril 1933.

  • La bagarre du consulat de Pologne en correctionnelle : Le 16 février dernier, le consulat de Pologne à Paris était assailli par une troupe de mécontents. Au cours de la matinée, à la suite d’un meeting, cent cinquante hommes environ, logés dans des baraquements, rue Chaptal, à Saint-Ouen, se rendirent au consulat rue Alphonse-de-Neuville, dans l’intention de réclamer, les uns leur rapatriement, et les autres une amélioration de leur ordinaire. Ils pénétrèrent dans le consulat dont ils refermèrent derrière eux la porte cochère. Puis ils demandèrent à être reçus par le consul. Ce dernier accepta de recevoir une délégation seulement. Aussitôt, une bagarre se produisit. Un gardien reçut à la tête un balai électrique projeté à toute volée, tandis qu’un huissier était blessé au bras d’un coup de
    couteau. Police-secours ayant été alertée des agents survinrent et trouvant porte close, durent escalader les murs environnants pour pénétrer dans l’immeuble par le côté jardin. Treize arrestations furent opérées, un peu au hasard : celle de deux Français, de dix Polonais et d’un heimatios (apatride), qui veut être citoyen de l’URSS.
    Les treize manifestants comparaissaient hier à la treizième chambre correctionnelle devant le président Mongin, qui interrogea l’un des Français d’abord, Maxime Collet, laissé en liberté provisoire. Collet se défend d’avoir été un meneur : Il ne sait d’ailleurs pas le polonais. Mais ses gestes n’ont-ils pu entraîner les manifestants ? Le second Français, Maurice Joyeux a été vu au
    moment où il enfonçait une porte. Il nie cependant cet acte de violence. Quant aux Polonais, ils nient également à peu près toute participation à l’affaire.
    Inculpés de violation de domicile, de bris de clôture, de violences, voire de coups. Ils assurent que les plus coupables n’ont pas été arrêtés et contestent les dépositions des témoins. Evidemment dira l’un d’eux : les témoins sont libres et nous sommes détenus. On croira toujours Ies témoins. Henri Reynaud, secrétaire de la CGTU expose à la barre la situation angoissante des chômeurs polonais… »
  • Note 1 : il y a cinq autres chauffeurs de taxi parmi les « 45000 » de Levallois, dont le mari de Madame Faurie. On sait également qu’après les grèves de 1938, plusieurs militants licenciés, se font embaucher à la G7 comme chauffeurs de taxi. Une solution qui perdurera. Le maire communiste de Levallois, Parfait Jans, ajusteur de métier, fut embauché comme taxi à la G7 après avoir été licencié dans les années 1960.
  • Note 2 : 524 photos d’immatriculation des « 45000 » à Auschwitz ont été retrouvées parmi celles que des membres de la Résistance intérieure du camp avaient camouflées pour les sauver de la destruction, ordonnée par les SS peu de temps avant l’évacuation du camp d’Auschwitz. A la Libération elles ont été conservées dans les archives du musée d’Auschwitz. Des tirages de ces photos ont été remis à André Montagne, alors vice-président de l’Amicale
    d’Auschwitz, qui me les a confiés. 

Sources

  • Témoignage de Mme Faurie, veuve de Paul Faurie (FNDIRP, 10 février 1987).
  • Archives municipales de Levallois-Perret.
  • Liste (incomplète) du convoi du 6 juillet 1942 établie en 1974 par les historiens du Musée d’Etat d’Auschwitz-Birkenau (archives des ACVG).
  • Death Books from Auschwitz, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, 1995 (basé essentiellement sur les registres – incomplets – de l’état civil de la ville d’Auschwitz ayant enregistré, entre le 27 juillet 1941 et le 31 décembre 1943, le décès des détenus immatriculés).
  • Fichier national de la Division des archives des victimes des conflits contemporains (DAVCC), Ministère de la Défense, Caen.
  • Archives de la Préfecture de police de Paris. Renseignements généraux, Liste des militants communistes internés le 26 juin 1941.

Notice biographique rédigée en novembre 2005 (complétée en 2016,  2019 et 2021) par Claudine Cardon-Hamet (docteur en Histoire, auteur des ouvrages : Mille otages pour Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 dit des « 45000 », éditions Graphein, Paris 1997 et 2000 (épuisé) et de Triangles rouges à Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 dit des « 45000 », éditions Autrement, Paris 2005) à l’occasion de l’exposition organisée par l’association « Mémoire vive » et la municipalité de Gennevilliers.  Prière de mentionner ces références (auteur et coordonnées de ce site) en cas de reproduction ou d’utilisation totale ou partielle de cette biographie. Pour compléter ou corriger cette notice biographique, vous pouvez me faire un courriel à deportes.politiques.auschwitz@gmail.com 

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