Matricule « 45 876 » à Auschwitz

Léon Michaud : né en 1921 à Chalon-sur-Saône (Saône-et-Loire), où il habite ; ouvrier du bâtiment ; communiste ; arrêté le 1° février 1941 puis le 26 février 1942 ; interné à Compiègne ; déporté le 6 juillet 1942 à Auschwitz où il meurt. 

Léon, Charles, Joseph, Michaud, dit « le Miche », est né le 25 février 1921 à Chalon-sur-Saône (Saône-et-Loire), où il habite, 12, rue aux Prêtres, chez ses parents, au moment de son arrestation.
Il est le fils de Marie Monard, née en 1902 à Saint-Germain du Plain (Saône-et-Loire), et de Léon Michaud, né le 11 septembre 901 à Chalon-sur-Saône (décédé en 1979), maçon, dit « Le Miche », « une forte personnalité de la corporation », communiste, selon le témoignage de Georges Mazoyer (1990).
Léon a une sœur cadette, Andrée, née en 1932 à Chalon. Il est célibataire, lui aussi ouvrier du bâtiment, et membre des Jeunesses communistes.
Son père, de la classe 1921, est mobilisé le 1er septembre 1939 à la déclaration de guerre et démobilisé le 12 juillet 1940 dans le Lot. Léon Michaud, de la classe 1941, n’est pas mobilisable.

la Saône-et-Loire est coupée en deux par la ligne de démarcation

Le 14 juin 1940, les troupes de la Wehrmacht entrent dans Paris. La ville cesse d’être la capitale du pays et devient le siège du commandement militaire allemand en France. Après l’armistice du 22 juin 1940, la Saône-et-Loire est coupée en deux par la ligne de démarcation et fait passer sous contrôle allemand toute la partie industrielle du département. Le 10 juillet 1940 Pétain, investi des pleins pouvoirs par l’Assemblée nationale, s’octroie le lendemain le titre de « chef de l’Etat français ». Il lance la « Révolution nationale » en rupture avec nombre de principes républicains (confusion des pouvoirs législatifs et exécutifs ; rejet du multipartisme, suppression des syndicats et du droit de grève, antisémitisme d’état…).
Très tôt l’hostilité au gouvernement de Pétain et à l’occupant se manifeste en Saône-et-Loire par des distributions de tracts, graffitis, sabotages. De lourdes amendes sont appliquées aux villes où ces actes sont constatés.

Membre des Jeunesses communistes avant-guerre, Léon Michaud est vraisemblablement arrêté une première fois le 1er février 1941. Puis, le 26 février 1942, il est arrêté par les polices française et allemande, en même temps que son père et trois autres chalonnais qui feront partie du même convoi pour Auschwitz : Henri Goux  (45625), lucien Rosier (46069) et Léon Thibert. Cette arrestation s’inscrit en représailles après l’attentat de la rue de Bourgogne place du Théâtre à Dijon (attaque à la grenade par un groupe de l’O.S. – « organisation spéciale » du Parti communiste clandestin – d’une école réquisitionnée par l’armée allemande pour servir de Soldatenheim (foyer du soldat). Les milieux syndicaux et communistes sont visés. Trois autres châlonnais, arrêtés comme otages Juifs, seront déportés à Auschwitz dans le convoi du 5 juin 1942.

D’abord placés dans des lieux d’incarcération contrôlés par la police française, les quatre Chalonnais sont envoyés, à la demande
des autorités allemandes, au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré par la Wehrmacht (le Frontstalag 122) camp de détention des “ennemis actifs du Reich”.
Le père de Léon Michaud, arrêté en même temps que son fils ne sera libéré que plusieurs mois après.
Léon Michaud est remis aux autorités allemandes à leur demande. Celles-ci l’internent au camp allemand de Royallieu à Compiègne le 1er mars 1942, en vue de sa déportation comme otage.

Depuis ce camp, il va être déporté à destination d’Auschwitz. Pour comprendre la politique de l’Occupant qui mène à sa déportation, on lira les deux articles du site qui exposent les raisons des internements, des fusillades et de la déportation : La politique allemande des otages (août 1941-octobre 1942) et «une déportation d’otages».

Depuis le camp de Compiègne, Léon Michaud est déporté à Auschwitz dans le convoi du 6 juillet 1942

Cf Article du site : Les wagons de la Déportation. 

Dessin Frantz Reisz, 1946

Ce convoi est composé au départ de Compiègne, de 1175 hommes (1100 « otages communistes » – jeunes communistes, anciens responsables politiques et élus du Parti communiste, syndicalistes de la CGT et délégués du personnel d’avant-guerre, militants et syndicalistes clandestins, résistants – de cinquante  « otages juifs » et de quelques « droits communs »). Il faisait partie des mesures de terreur allemandes destinées à combattre, en France, les judéo-bolcheviks responsables, aux yeux de Hitler, des actions armées organisées par le parti communiste clandestin contre des officiers et des soldats de la Wehrmacht, à partir d’août 1941. Lire dans le site le récit des deux jours du transport : Compiègne-Auschwitz : 6-8 juillet 1942. Sur les 1175 otages partis de Compiègne le 6 juillet 1942, 1170 sont présents à l’arrivée du train en gare d’Auschwitz le 8 juillet 1942. Ces derniers sont enregistrés et photographiés au Stammlager d’Auschwitz (camp souche ou camp principal, dénommé en 1943 Auschwitz-I) entre les numéros « 45157 » et « 46326 », d’où le nom de « convoi des 45000 », sous lequel les déportés du camp désignaient ce convoi. Ce matricule – qu’il doit apprendre à dire en allemand et en polonais à toute demande des Kapos et des SS – sera désormais sa seule identité.
Lire dans le site : Le KL Auschwitz-Birkenau.
Léon Michaud est enregistré à son arrivée à Auschwitz le 8 juillet 1942 sous le numéro matricule « 45876« .
Sa photo d’immatriculation à Auschwitz n’a pas été retrouvée parmi celles que des membres de la Résistance intérieure du camp avaient camouflées pour les sauver de la destruction, ordonnée par les SS peu de temps avant l’évacuation d’Auschwitz.
Lire dans le site le récit de leur premier jour à Auschwitz : L’arrivée au camp principal, 8 juillet 1942. et 8 juillet 1942 : Tonte, désinfection, paquetage, « visite médicale ».
Après l’enregistrement, il passe la nuit au Block 13 (les 1170 déportés du convoi y sont entassés dans deux pièces). Le 9 juillet tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau, situé à 4 km du camp principal. Le 13 juillet il est interrogé sur sa profession. Les spécialistes dont les SS ont besoin pour leurs ateliers sont sélectionnés et vont retourner à Auschwitz I (approximativement la moitié du convoi. Les autres, restent à Birkenau, employés au terrassement et à la construction des Blocks.
Selon le fichier des ACVG (SHD / Caen 1993) il serait mort le 5 octobre 1942 à Auschwitz (date reprise par l’arrêté du 6 juillet 1995 portant apposition de la mention « Mort en déportation » sur les actes de décès.
Déclaré « Mort pour la France », Léon Michaud est homologué « Déporté politique » en 1958. La carte est attribuée à son père.

Sources

  • Listes – incomplètes – du convoi établies par la FNDIRP après la guerre (archives de la F.N.D.I.R.P).
  • Death Books from Auschwitz, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, 1995 (basé essentiellement sur les registres – incomplets – de l’état civil de la ville d’Auschwitz ayant enregistré, entre le 27 juillet 1941 et le 31 décembre 1943, le décès des détenus immatriculés).
  • Fichier national de la Division des archives des victimes des conflits contemporains (DAVCC), Ministère de la Défense, Caen octobre 1993.
  • Georges Mazoyer (président d’honneur de la FNDIRP Chalon sur Saône (1990) fait référence à une fiche remplie par le père de Léon Michaud après la Libération,
  • Registre matricule militaire de Léon Michaud, père.

Notice biographique rédigée par Claudine Cardon-Hamet en avril 2006, réinstallée en 2014, complétée en 2018 et  2021 ; Docteur en Histoire, auteur des ouvrages : « Triangles rouges à Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 », Editions Autrement, 2005 Paris et de «Mille otages pour Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 dit des « 45000 », éditions Graphein, Paris 1997 et 2000. Prière de mentionner ces références (auteur et coordonnées de ce site) en cas de reproduction ou d’utilisation totale ou partielle de cette notice.
Pour la compléter ou corriger, vous pouvez me faire un courriel à deportes.politiques.auschwitz@gmail.com 

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