Marcel Couillon : né en mai 1905 à Orléans (Loiret) ; domicilié à Orléans au moment de son arrestation ; tourneur sur métaux, conducteur de poids lourds, puis employé aux PTT à Orléans ; militant communiste ; fait prisonnier en 1940, libéré le 23 août 1941 ; arrêté le 18 octobre 1941; interné à Compiègne ; déporté et mort à Auschwitz, le premier septembre 1942. 

Marcel Couillon est né le 14 mai 1905 à Orléans (Loiret).
Il habite au 179 Faubourg Saint-Vincent à Orléans au moment de son arrestation.
Il est le fils de Jeanne, Aline Magloire, 28 ans et d’Albert, Ernest Couillon, 32 ans, né à Orléans en 1875, typographe, son époux. Son père mobilisé en 1914, décède le 5 décembre 1917, à son domicile d’une tuberculose pulmonaire aggravée contractée aux armées (il est déclaré “Mort pour la France” en 1951). Marcel Couillon est déclaré pupille de la Nation en 1920.
Sa mère travaille alors comme lingère.
D’abord tourneur sur métaux, Marcel Couillon devient conducteur de poids lourds, employé aux PTT à Orléans.
Le 14 mai 1925, Marcel Couillon est appelé au service militaire. Il rejoint le 5è  Bataillon d’ouvrier d’artillerie. Le 21 novembre 1925, il est nommé brigadier. Le 29 octobre 1926, il est renvoyé dans ses foyers, « certificat de bonne conduite » accordé, et « se retire » au domicile de sa mère au 25, rue de l’Empereur.

Mariage le 6 août 1927

Marcel Couillon épouse Marie Lerouge le 6 août 1927, à Orléans. Elle est née le 26 novembre 1904 à Saint-Léonard de Noblat (87) et travaille comme employée de bureau.

En 1928, Marcel Couillon est embauché comme tourneur à l’usine des Établissements Chicoineau et Herrenschmidt, une tannerie (chaussures).

Début octobre 1928, le couple habite au 181, rue du Faubourg-Saint-Vincent à Orléans.
Le 19 mars 1929 à Orléans, naissance de leur fille, Micheline Jeanne.
En mars 1930, la petite habite au 38, boulevard Lamartine.
Au début de l’année 1930, Marcel Couillon postule à un emploi d‘ouvrier de main-d’œuvre aux Postes, Téléphone et Télégraphe (PTT) où il est embauché. Il est alors « agent des lignes du service souterrain ».
En juillet 1934, la famille revient habiter au 181, rue du Faubourg-Saint-Vincent (n° 179ter au cadastre).

Marcel Couillon est connu des services de police comme militant actif du Parti communiste, secrétaire d’une cellule. Marie-Thérèse, son épouse, est secrétaire dactylographe pour le Parti communiste à la Maison du Peuple,  5, rue du Réservoir.
À partir de la fin 1937 et jusqu’au moment de son arrestation, Marcel Couillon est domicilié au 187 bis, rue du Faubourg-Saint-Vincent.

A la mobilisation générale du 2 septembre 1939, Marcel Couillon est maintenu comme “affecté spécial” sur son poste de travail, considéré comme utile à la Défense nationale.
Le 28 septembre 1939, une perquisition de police à son domicile révèle d’anciens documents et des cartes d’adhérents du Parti communiste (dissous deux jours plus tôt), ainsi que d’un revolver d’ordonnance de 9 mm. Quelques jours après, la préfecture le signale à son employeur.
Et très logiquement, le 7 mars 1940, Marcel Couillon est « rayé de l’affectation spéciale […] par mesure disciplinaire » (à la demande du Préfet du Loiret) et il est affecté au dépôt d’artillerie n° 38 à Montargis, puis à la 101è batterie hippomobile.
Le 15 juin 1940, il est fait prisonnier aux environs de Paris, et interné au Stalag VIII-C, adjacent au tristement célèbre Stalag Luft III près de Sagan en Allemagne, (aujourd’hui Zagan en Pologne).

Orléans après les bombardements allemands de juin 1940

Le 14 juin 1940, la Wehrmacht défile à Paris, sur les Champs-Élysées. La ville cesse alors d’être la capitale du pays et devient le siège du commandement militaire allemand en France. Le 16 juin Orléans est occupé après de violents bombardements. La moitié nord de la France et toute la façade ouest sont occupées. Le 22 juin 1940, l’armistice est signé : la moitié nord de la France et toute la façade ouest sont occupées. Le pays est coupé en deux par la « ligne de démarcation » qui sépare la zone occupée et celle administrée par Vichy. Le 10 juillet 1940 Pétain, investi des pleins pouvoirs par l’Assemblée nationale, s’octroie le lendemain le titre de « chef de l’Etat français ». Il lance la « Révolution nationale » en rupture avec nombre de principes républicains (confusion des pouvoirs législatifs et exécutifs ; rejet du multipartisme, suppression des syndicats et du droit de grève, antisémitisme d’état…).

 

Marcel Couillon est libéré du Stalag VIII C le 24 avril 1941, vraisemblablement à la suite de libérations d’employés des PTT. Il est démobilisé le 23 août. A son retour, son épouse Marie est malade et leur enfant est « en traitement ».
En « congé de captivité », il, conserve le statut de prisonniers de guerre et à ce titre, il doit régulièrement se faire enregistrer auprès de la Kommandantur la plus proche de son domicile. Marcel Couillon retrouve rapidement son emploi aux PTT.

Témoignage de Marie Couillon (dossier d’homologation)

Selon son épouse, Marcel Couillon reprend contact avec le Parti communiste clandestin dès son retour de captivité en août 1941 : « il fut affecté à la distribution de la littérature patriotique entre les groupes illégaux d’Orléans. C’est au cours de cette activité qu’il fut repéré et finalement arrêté ».

Le samedi 18 octobre 1941 dans la soirée, Marcel Couillon est arrêté à son domicile par la par la police française et la  Feldgendarmerie et conduit à la prison militaire du 14, rue Eugène-Vignat à Orléans [2], réquisitionnée par l’armée d’occupation, et dans laquelle sont rassemblés – enfermés à plusieurs par cellule – 41 hommes arrêtés ce jour-là et la veille, en même temps que 8 communistes orléanais (7 d’entre eux seront déportés  à Auschwitz : Marcel BoubouCyprien DepardieuRobert DuboisHenri FerchaudRaymond GaudryJoseph LhorensAndré Lioret ).

Marcel Couillon est conduit à la prison de la rue Eugène Vignat, à Orléans. II est remis aux autorités allemandes à leur demande.

Celles-ci l’internent au camp allemand de Royallieu à Compiègne (le Frontstalag 122).
A Compiègne, il reçoit le matricule n° matricule « 1956 ». Depuis ce camp, il va être déporté à destination d’Auschwitz.
Pour comprendre la politique de l’Occupant qui mène à sa déportation, voir les deux articles : La politique allemande des otages (août 1941-octobre 1942)  et «une déportation d’otages».

Raymond Gaudry signale sa présence dans son wagon le 6 juillet 1942 dans une lettre lancée depuis le wagon qui les emmène à Auschwitz.

Depuis le camp de Compiègne, Marcel Couillon est déporté à Auschwitz dans le convoi du 6 juillet 1942A six heures du matin, ce 6 juillet, il est conduit sous escorte allemande à la gare de Compiègne avec ses camarades, puis entassé comme eux dans un des wagons de marchandises qui forment son convoi. « Les soldats comptent les hommes par cinquante et les poussent vers les wagons. (…). Les déportés se retrouvent à quarante-cinq, cinquante, soixante ou plus, dans les wagons de marchandises qui, pour avoir servi au transport des troupes, portent encore l’inscription : 40 hommes – 8 chevaux en long. Des wagons sales, au plancher recouvert par deux à trois centimètres de poussière de ciment ou de terre, avec, pour seule ouverture, une petite lucarne grillagée ou bardée de barbelés, près de laquelle les plus souples réussissent à se glisser. Au centre, un gros bidon ayant contenu du carbure dont l’odeur déjà les incommode ». In « Triangles rouges à Auschwitz » prologue, p.11).
Le train s’ébranle à 9 heures trente.

Cf Article du site : Les wagons de la Déportation. 

Ce convoi est composé au départ de Compiègne, de 1175 hommes (1100 « otages communistes » – jeunes communistes, anciens responsables politiques et élus du Parti communiste, syndicalistes de la CGT et délégués du personnel d’avant-guerre, militants et syndicalistes clandestins, résistants – de cinquante « otages juifs » et de quelques « droits communs »). Il faisait partie des mesures de terreur allemandes destinées à combattre, en France, les judéo-bolcheviks, responsables aux yeux de Hitler, des actions armées organisées par le Parti communiste clandestin contre des officiers et des soldats de la Wehrmacht, à partir d’août 1941.
Lire dans le site le récit des deux jours du transport : Compiègne-Auschwitz : 6-8 juillet 1942.
Sur les 1175 otages partis de Compiègne le 6 juillet 1942, 1170 sont présents à l’arrivée du train en gare d’Auschwitz le 8 juillet 1942. Ces derniers sont enregistrés et photographiés au Stammlager d’Auschwitz (camp souche ou camp principal, dénommé en 1943 Auschwitz-I) entre les numéros « 45 157 » et « 46 326 », d’où le nom de « convoi des 45 000 », sous lequel les déportés du camp désignaient ce convoi. Ce matricule – qu’il doit apprendre à dire en allemand et en polonais à toute demande des Kapos et des SS – sera désormais sa seule identité.
Lire dans le site : Le KL Auschwitz-Birkenau.

On ignore son numéro d’illatriculation attribué le 8 juillet à son arrivée à Auschwitz.
Le numéro « 46 231 ? » figurant dans mes deux premiers ouvrages sur le convoi du 6 juillet 1942 (éditions de 1997 et 2000) et signalé comme incertain correspond à une tentative de reconstitution de la liste du convoi par matricules. Ce numéro, quoique plausible, ne saurait être considéré comme sûr en raison de l’existence de quatre listes alphabétiques successives, de la persistance de lacunes pour plus d’une dizaine de noms et d’incertitudes sur plusieurs centaines de numéros matricules.
Seule la reconnaissance, par un membre de sa famille ou ami de la photo d’immatriculation publiée au début de cette notice biographique pourrait désormais en fournir la preuve.

Lire dans le site le récit de leur premier jour à Auschwitz : L’arrivée au camp principal, 8 juillet 1942. et 8 juillet 1942 : Tonte, désinfection, paquetage, « visite médicale ».
Après l’enregistrement, il passe la nuit au Block 13 (les 1170 déportés du convoi y sont entassés dans deux pièces). Le 9 juillet tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau, situé à 4 km du camp principal. Le 13 juillet il est interrogé sur sa profession. Les spécialistes dont les SS ont besoin pour leurs ateliers sont sélectionnés et vont retourner à Auschwitz I (approximativement la moitié du convoi. Les autres, restent à Birkenau, employés au terrassement et à la construction des Blocks.
Antoine Vannin, de Valleroy, a témoigné avoir été avec lui à Birkenau, jusqu’au 13 juillet 1942. Il n’apprend son décès qu’en décembre 1942.

Marcel Couillon meurt le premier septembre 1942
d’après son certificat de décès établi au camp pour le registre d’état civil de la municipalité d’Auschwitz (in Death Books from Auschwitz Tome 2 page 286).
Sa fiche d’état civil établie en France après la Libération porte toujours la mention «décédé le 15 octobre 1942 à Auschwitz (Pologne)». Il serait souhaitable que le ministère corrige ces dates fictives qui furent apposées dans les années d’après guerre sur les états civils, afin de donner accès aux titres et pensions aux familles des déportés. Cette démarche est rendue possible depuis la parution de l’ouvrage « Death Books from Auschwitz » publié par les historiens polonais du Musée d’Auschwitz en 1995.
Lire dans le site
Les dates de décès à Auschwitz.

Marcel Couillon est déclaré « Mort pour la France » en 1948 et homologué comme « Déporté politique ».
Il est homologué comme « soldat de deuxième classe » au titre de la Résistance Intérieure Française, en tant que membre du «Front national pour la liberté et l’indépendance de la France» (décret du 9 septembre 1947).

Une plaque a son nom et celui de Marcel Lerouge (dont on lira la biographie sur le site de l’AERI et dans le Maitron) été apposée au 179 bis, rue du Faubourg Saint-Vincent à Orléans (le nom de Marcel Couillon a été mal orthographié). Marcel Lerouge rejoint le groupe Chanzy d’Orléans, rattaché aux FTP. En décembre 1943, il est nommé adjudant FTP. Il participe à de nombreuses liaisons, à des diffusions de tracts ainsi qu’à plusieurs opérations de sabotage. La fille de Marcel Couillon rendra visite en prison avant son exécution à Marcel Lerouge, en compagnie du frère de Marcel Lerouge. 

Sources

  • « Ceux du groupe Chanzy« . André Chène (Librairie Nouvelle, Orléans 1964, brochure éditée par la Fédération du Loiret du Parti communiste.
  • Bureau des archives des conflits contemporains (DAVCC), SHD, Ministère de la Défense, Caen (dossier individuel). Avril 1992.
  • Death Books from Auschwitz, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, 1995 (basé essentiellement sur les registres – incomplets – de l’état civil de la ville d’Auschwitz ayant enregistré, entre le 27 juillet 1941 et le 31 décembre 1943, le décès des détenus immatriculés).
  • Archives en ligne d’Orléans.
  • Remerciements à l’Association pour des Etudes sur la Résistance intérieure. © Département AERI de la Fondation de la Résistance, qui a publié ma notice de 2012 complétée par Fabrice Bourrée à partir du dossier d’homologation de Marcel Couillon, service historique de la Défense, 16 P 146 147.
  • Photo de la plaque ©  Fabrice Bourrée.
  • Recensements du Loiret.
  • Registres matricules militaire d’Albert et Marcel Couillon.

Notice biographique rédigée en novembre 2007, par Claudine Cardon-Hamet (complétée 2015, 2018, 2019, 2024 et 2025 avec Pierre Cardon). Claudine Cardon-Hamet est docteur en Histoire, auteure des ouvrages : « Triangles rouges à Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 » Editions Autrement, 2005 Paris et de «Mille otages pour Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 dit des « 45 000 », éditions Graphein, Paris 1997 et 2000. Prière de mentionner ces références (auteur et coordonnées de ce site) en cas de reproduction ou d’utilisation totale ou partielle de cette notice.
Pour la compléter ou la corriger, vous pouvez me faire un courriel à deportes.politiques.auschwitz @ gmail.com 

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