Matricule « 45 666 » à Auschwitz
Adolphe Honorine ; né le 23 septembre 1915 à Chartres où il habite ; typographe à l'imprimerie Durand ; présumé communiste ; il est arrêté à Chartres le 26 mars 1942 ; Interné au camp de Compiègne ; déporté à Auschwitz, où il meurt le 14 août 1942.
Adolphe Honorine est né le 23 septembre 1915 à Chartres au domicile de ses parents, 19, rue de la Corroierie. Il habite chez ses parents à Chartres (Eure-et-Loir / 28) au 5, rue de la Porte Guillaume au moment de son arrestation.
Il est typographe à l’imprimerie Durand, « imprimeur de la Préfecture & de la Municipalité ».
Il est le fils de Thérèse, Eugénie Buffétrille, 29 ans, sans profession, née le 23 juillet 1886 à Theuville (28) et d’Adolphe, Xavier, Charles, Louis Honorine, 31 ans, mouleur, né le 16 mars 1844 à Chartres, son époux.
Ses parents se sont mariés le 4 mars 1907, à Chartres.
Sportif, il est inscrit très jeune à la Société de gymnastique « l’Avenir de la Beauce » (une médaille d’argent en 1927), club fondé en 1884 (et toujours en activité en 2021).
Il y côtoie, Germain Houard, plus âgé de 6 ans, qui sera déporté avec lui à Auschwitz.
Conscrit de la classe 1935, il effectue un service militaire d’un ou deux ans (la loi du 15 mars 1935 prolonge la durée du service qui était d’un an depuis 1928, et nous n’avons pas accès à son registre matricule militaire).
En 1936, il est domicilié chez ses parents au 5, rue de la Porte Guillaume à Chartres et exerce le métier de typographe chez Durand, « imprimeur de la Préfecture & de la Municipalité ». Son père est alors mouleur à la Grande-Fonderie et sa mère est blanchisseuse. Adolphe Honorine s’inscrit sur les listes électorales en 1937. Conscrit de la classe 1935, il est certainement mobilisé après la déclaration de guerre en 1939.
Les 14 et 15 juin de violents bombardements allemands ravagent Montrichard, Vendôme et Voves. A Chartres, le 17 juin 1940 au soir, les troupes françaises laissent la place à la Werhmacht qui occupent la ville. De violents combats ont lieu le long du Cher jusqu’à l’armistice.
Le 22 juin, l’armistice est signé. Le 10 juillet 1940 le maréchal Pétain, investi des pleins pouvoirs par l’Assemblée nationale, s’octroie le lendemain le titre de « chef de l’Etat français » et lance la « révolution nationale » en rupture avec nombre de principes républicains (confusion des pouvoirs législatifs et exécutifs ; rejet du multipartisme, suppression des syndicats et du droit de grève, antisémitisme d’état…).
Le 25 juin la « ligne de démarcation » passe par la vallée du Cher.
Selon l’ARMREL (Association de Recherche pour la Mémoire de la Résistance en Eure-et-Loir), Adolphe Honorine appartient à un groupe de Résistance (qui rejoindra à leur création les FTPF de Chartres).
Adolphe Honorine est arrêté à Chartres le 26 mars 1942 (le motif figurant sur sa fiche individuelle au Fichier national du DAVCC indique «otage»). Il est remis aux autorités allemandes à leur demande. Celles-ci l’internent au camp allemand de Royallieu à Compiègne (le Frontstalag 122), en vue de sa déportation comme otage.
Pour comprendre le mécanisme qui mène à leur déportation, lire dans le site « une déportation d’otages ».
Depuis le camp de Compiègne, Adolphe Honorine est déporté à Auschwitz dans le convoi du 6 juillet 1942.
Cf Article du site : Les wagons de la Déportation.
Ce convoi est composé au départ de Compiègne, de 1175 hommes (1100 « otages communistes » – jeunes communistes, anciens responsables politiques et élus du Parti communiste, syndicalistes de la CGT et délégués du personnel d’avant-guerre, militants et syndicalistes clandestins, résistants – de cinquante « otages juifs » et de quelques « droits communs »). Il faisait partie des mesures de terreur allemandes destinées à combattre, en France, les judéo-bolcheviks, responsables aux yeux de Hitler, des actions armées organisées par le Parti communiste clandestin contre des officiers et des soldats de la Wehrmacht, à partir d’août 1941.
Lire dans le site le récit des deux jours du transport : Compiègne-Auschwitz : 6-8 juillet 1942.
Sur les 1175 otages partis de Compiègne le 6 juillet 1942, 1170 sont présents à l’arrivée du train en gare d’Auschwitz le 8 juillet 1942. Ces derniers sont enregistrés et photographiés au Stammlager d’Auschwitz (camp souche ou camp principal, dénommé en 1943 Auschwitz-I) entre les numéros « 45 157 » et « 46 326 », d’où le nom de « convoi des 45 000 », sous lequel les déportés du camp désignaient ce convoi. Ce matricule – qu’il doit apprendre à dire en allemand et en polonais à toute demande des Kapos et des SS – sera désormais sa seule identité.
Lire dans le site : Le KL Auschwitz-Birkenau.
Adolphe Honorine est enregistré à son arrivée à Auschwitz le 8 juillet 1942 sous le numéro matricule « 45 666 ». Ce matricule – qu’il doit apprendre à dire en allemand et en polonais à toute demande des Kapos et des SS – sera désormais sa seule identité. Lire dans le site : Le KL Auschwitz-Birkenau.
Après l’enregistrement, il passe la nuit au Block 13 (les 1170 déportés du convoi y sont entassés dans deux pièces). Le 9 juillet tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau (Brzezinka), situé à 4 km du camp principal. Le 13 juillet il est interrogé sur sa profession. Les spécialistes dont les SS ont besoin pour leurs ateliers sont sélectionnés et vont retourner à Auschwitz I (approximativement la moitié du convoi. Les autres, restent à Birkenau, employés au terrassement et à la construction des Blocks.
Adolphe Honorine meurt à Auschwitz le 14 août 1942 d’après son certificat de décès établi au camp pour le registre d’état civil de la municipalité d’Auschwitz (in Death Books from Auschwitz, tome 2, page 464).
Sa fiche d’état civil établie en France à la Libération porte toujours la mention «décédé le 15 août 1942 à Auschwitz (Pologne)». Il serait souhaitable que le ministère corrige ces dates fictives qui furent apposées dans les années d’après guerre sur les état civils, afin de donner accès aux titres et pensions aux familles des déportés.
Cette démarche est rendue possible depuis la parution de l’ouvrage « Death Books from Auschwitz » publié par les historiens polonais du Musée d’Auschwitz en 1995.
Lire dans le site Les dates de décès à Auschwitz.
La plaque (ci-contre) qui lui rendait hommage au cimetière Saint-Chéron à Chartres a disparu (source ARMREL).
Sources
- Fichier national de la Division des archives des victimes des conflits contemporains (BAVCC), Ministère de la Défense, Caen. Fiche individuelle consultée en octobre 1993.
- Listes – incomplètes – du convoi établies par la FNDIRP après la guerre (archives de la F.N.D.I.R.P).
- Death Books from Auschwitz, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, 1995 (basé essentiellement sur les registres – incomplets – de l’état civil de la ville d’Auschwitz ayant enregistré, entre le 27 juillet 1941 et le 31 décembre 1943, le décès des détenus immatriculés).
- Liste (incomplète) par matricule du convoi du 6 juillet 1942 établie en 1974 par les historiens du Musée d’Etat d’Auschwitz-Birkenau (DAVCC / Ministère de la Défense, Caen) indiquant généralement la date de décès au camp.
- Photo de la plaque in site de l’Association de Recherche pour la Mémoire de la Résistance en Eure-et-Loir.
- Etat civil, listes électorales 1937 Chartres nord, recensement 1936, recherches Pierre Cardon.
Notice biographique rédigée en décembre 2010, complétée en 2021 et 2024 par Claudine Cardon-Hamet, docteur en Histoire, auteur des ouvrages : « Triangles rouges à Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 », Editions Autrement, 2005 Paris et de «Mille otages pour Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 dit des « 45000 », éditions Graphein, Paris 1997 et 2000 (épuisé). Prière de mentionner ces références (auteur et coordonnées de ce blog) en cas de reproduction ou d’utilisation totale ou partielle de cette notice biographique.
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