1931, Gaston Besnard avec les membres du conseil d’administration de la cave coopérative

Matricule « 45 236 » à Auschwitz

En 1939 à Monts-près-Chambord Gaston Besnard est tout à fait à droite (casquette et cigarette)
Gaston Besnard : né en 1901 à Mont-près-Chambord (Loir-et-Cher), où il habite ; vigneron ; communiste ; arrêté le 22 juin 1941 ; interné à Compiègne ; déporté le 6 juillet 1942 à Auschwitz, où il meurt le 8 août 1942.

Gaston, Fernand Besnard est né le 12 avril 1901 à Mont-près-Chambord (Loir-et-Cher), où il habite.  Il est le fils d’Eugénie Leclerc et de Georges Besnard, son époux.
Son registre matricule militaire nous apprend qu’il mesure 1m 74, a les cheveux blond moyen et les yeux bleu foncé, le nez rectiligne, le visage ovale. Il possède un niveau d’instruction n° 3 (possède une instruction primaire développée). Il a une cicatrice de 14 mm sous l’œil droit.
Gaston Besnard est cultivateur au moment du Conseil de révision. Conscrit de la classe 1921, il est exempté par la commission de Réforme en 1921 et 1922 pour « faiblesse ». Cet avis prorogé en 1928, « exempté pour faiblesse irrémédiable », ne sera pas suivi par la commission de réforme de février 1940. Gaston Besnard est célibataire.

La cave coopérative à sa création

Petit vigneron – il ne possède qu’un hectare de vignes, comme son camarade de Parti Léon Sausse (1) – il est à l’initiative en 1931 de la création de la Cave coopérative de Mont-près-Chambord, avec son camarade.
Cette cave coopérative est une réussite et fonctionnait toujours en 2021.
Il adhère au Parti communiste en 1923, sous l’influence du bûcheron Emile Brinas, habitant à Mont-près-Chambord.
S’occupant aussi d’assurances agricoles, Gaston Besnard bénéficie d’une grande influence dans la région. Secrétaire de la cellule communiste de Mont, il anime plusieurs organisations à l’échelon local : « à l’époque du Front populaire, il se montra un militant actif du mouvement Amsterdam-Pleyel et contribua à la constitution de nombreux comités antifascistes à travers le département. Présenté aux élections cantonales d’octobre 1937 dans le canton d’Ouzouer-le-Marché, il obtint 258 voix, soit 17 % des suffrages exprimés » (Le Maîtron). Il est également membre des « Amis de l’URSS« , de « Paix et Liberté » et du « Secours rouge« .
Le Maire de Mont-près-Chambord le définit en 1990 comme : « une personne de caractère, d’un grand calme, d’une grande patience, très apprécié y compris de ses adversaires. Il s’intéressait beaucoup aux problèmes scientifiques et au modernisme. D’esprit très coopératif et d’idées avancées pour l’époque. D’une grande intelligence. Lisant beaucoup. Il a aidé à la coopération des viticulteurs à Mont-près-Chambord en contribuant à la création de la coopérative en 1931-1933« .
Gaston Besnard est déclaré « bon pour le service auxiliaire » par la commission de réforme militaire du 2 février 1940, considérant qu’il n’y a « pas de signes cliniques d’insuffisances musculaires ».

1939, agrandissement

Après la mobilisation générale du 3 septembre 1939, Gaston Besnard est mobilisé et affecté au Dépôt du Train auto n°8 à Dijon, où il arrive le 16 avril 1940. Il est rattaché à la Compagnie de « Dépôt guerre 13 », le 21 mars 1940.

1940 : La Wehrmacht défile à Blois

Le 14 juin 1940, la Wehrmacht défile à Paris, sur les Champs-Élysées. Les 15 et 16 juin 1940, bombardements allemands sur Montrichard, Blois et Vendôme. Le 22 juin, l’armistice est signé : la France est coupée en deux par la « ligne de démarcation » qui sépare la zone occupée de celle administrée par Vichy. Le 1er juillet, elle passe par le département du Loir-et-Cher en suivant le cours du Cher, de Châtres jusqu’à Chissay (à l’exception de Selles-sur-Cher qui demeure en zone occupée).Le 10 juillet 1940 Pétain, investi des pleins pouvoirs par l’Assemblée nationale, s’octroie le lendemain le titre de « chef de l’Etat français ».

Dès l’occupation, il devient « le dirigeant clandestin des premiers groupes d’action» (ANACR). «Diffusion de tracts contre le gouvernement Pétain-Laval et tracts anti-allemands« . Il se consacre à « l’éducation politique et économique de groupes de jeunes dès 1939 jusqu’à la date de son arrestation » (Michel Lhommédé).
Gaston Besnard est arrêté à son domicile le 22 juin 1941, par des policiers français et allemands, dans le cadre de la grande rafle commencée le 22 juin 1941, jour de l’attaque hitlérienne contre l’Union soviétique. Trois autres militants sont arrêtés le même jour et seront comme lui déportés à Auschwitz : Francis Gauthier, Clotaire Paumier,Roger Clément. Sous le nom «d’Aktion Theoderich», les Allemands arrêtent plus de mille communistes et syndicalistes dans la zone occupée, avec l’aide de la police française. D’abord placés dans des lieux d’incarcération contrôlés par le régime de Vichy (la Maison d’arrêt de Blois pour les Loir-et-Chérins arrêtés), certains sont envoyés sans jugement (au début juillet pour Fernand Besnard), au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré par la Wehrmacht et qui ce jour là devient un camp de détention des “ennemis actifs du Reich, le Frontstalag 122.
A Compiègne, il reçoit le numéro matricule « 1031 » – Bâtiment A5, chambre 9.
Depuis ce camp administré par la Wehrmacht, il va être déporté à destination d’Auschwitz. Pour comprendre la politique de l’Occupant qui mène à sa déportation, on lira les deux articles du site qui exposent les raisons des internements, des fusillades et de la déportation : La politique allemande des otages (août 1941-octobre 1942) et «une déportation d’otages».

Depuis le camp de Compiègne, Gaston Besnard est déporté à Auschwitz dans le convoi du 6 juillet 1942.

Cf l’article du site : Les wagons de la Déportation

Cf Article du site : Les wagons de la Déportation. 

Ce convoi est composé au départ de Compiègne, de 1175 hommes (1100 « otages communistes » – jeunes communistes, anciens responsables politiques et élus du Parti communiste, syndicalistes de la CGT et délégués du personnel d’avant-guerre, militants et syndicalistes clandestins, résistants – de cinquante  « otages juifs » et de quelques « droits communs »). Il faisait partie des mesures de terreur allemandes destinées à combattre, en France, les judéo-bolcheviks responsables, aux yeux de Hitler, des actions armées organisées par le parti communiste clandestin contre des officiers et des soldats de la Wehrmacht, à partir d’août 1941. Lire le récit des deux jours du transport : Compiègne-Auschwitz : 6-8 juillet 1942. Sur les 1175 otages partis de Compiègne le 6 juillet 1942, 1170 sont présents à l’arrivée du train en gare d’Auschwitz le 8 juillet 1942. Ces derniers sont enregistrés et photographiés au Stammlager d’Auschwitz (camp souche ou camp principal, dénommé en 1943 Auschwitz-I) entre les numéros « 45157 » et « 46326 », d’où le nom de « convoi des 45000 », sous lequel les déportés du camp désignaient ce convoi. Ce matricule – qu’il doit apprendre à dire en allemand et en polonais à toute demande des Kapos et des SS – sera désormais sa seule identité. Lire dans le blog : Le KL Aushwitz-Birkenau.

Il est enregistré à son arrivée à Auschwitz le 8 juillet 1942 sous le numéro « 
45236″.  Sa photo d’immatriculation à Auschwitz n’a pas été retrouvée parmi celles que des membres de la Résistance intérieure du camp avaient camouflées pour les sauver de la destruction, ordonnée par les SS peu de temps avant l’évacuation d’Auschwitz.
Lire le récit de leur premier jour à Auschwitz : L’arrivée au camp principal, 8 juillet 1942. et 8 juillet 1942 : Tonte, désinfection, paquetage, « visite médicale ».  Après l’enregistrement, il passe la nuit au Block 13 (les 1170 déportés du convoi y sont entassés dans deux pièces). Le 9 juillet tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau, situé à 4 km du camp principal. Le 13 juillet il est interrogé sur sa profession. Les spécialistes dont les SS ont besoin pour leurs ateliers sont sélectionnés et vont retourner à Auschwitz I (approximativement la moitié du convoi. Les autres, restent à Birkenau, employés au terrassement et à la construction des Blocks.

Dessin de Franz Reisz, 1946

Gaston Besnard meurt à Auschwitz le 8 août 1942 (date inscrite dans les registres du camp et transcrite à l’état civil de la municipalité d’Auschwitz ; in Death Books from Auschwitz, Tome 2, page 82).
Il a été déclaré « Mort pour la France« . Le titre de « déporté politique » lui a été attribué. Son nom est inscrit sur le livre d’or de la commune de Mont-près-Chambord (« Morts pour la France et Résistants». Son nom figure sur le monument « aux martyrs » de la ville.

  • Note 1 : En septembre 1940, contacté par Pierre Rebière, un responsable national du PCF,  Léon Sausse participa à la reconstitution clandestine du parti. Arrêté par les gendarmes en juillet 1941, il fut enfermé dans la prison de Blois, puis au camp d’Aurille-les-Ponceaux près de Tours d’où il fut libéré comme malade. Il participa aux activités de résistance communistes. Fin mai 1943, la police vint pour l’arrêter mais il réussit à s’échapper. Dès lors il vécut dans la clandestinité en Sologne et rejoignit enfin un groupe de maquis à Romorantin. Après la guerre, il assuma des responsabilités à la CGA et à la Ligue des vignerons. En 1953 et en 1965, Léon Sausse fut élu conseiller municipal de Mont-près-Chambord (Le Maitron, notice Didier Lemaire).

Sources

  • Questionnaire biographique (contribution à l’histoire de la déportation du convoi du 6 juillet 1942), envoyé aux mairies, associations et familles au début de mes recherches, en 1987, rempli par M. Michel Lhommédé, maire de Mont-près-Chambord en 1990.
  • Photo groupe in © « La Résistance dans le Loir-et-Cher « , Op. édité par l’ANACR en 1964.
  • Photo sépia, in cave des vignerons de Mont-près-Chambord.
  • M. Georges Larcade, président de l’ADIRP du Loir-et-Cher, interné à Compiègne.
  • Listes – incomplètes – du convoi établies par la FNDIRP après la guerre (archives de la F.N.D.I.R.P).
  • Death Books from Auschwitz, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, 1995 (basé essentiellement sur les registres – incomplets – de l’état civil de la ville d’Auschwitz ayant enregistré, entre le 27 juillet 1941 et le 31 décembre 1943, le décès des détenus immatriculés).
  • Bureau des archives de la Division ou pôle des victimes des conflits contemporains (DAVCC), Ministère de la Défense, Caen (fiche individuelle consultée en juillet 1992).
  • Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier français, Le Maitron, Claude Pennetier (dir), éditions de l’Atelier, CD-Rom.Tome 19, page 108.
  • Liste (incomplète) par matricule du convoi du 6 juillet 1942 établie en 1974 par les historiens du Musée d’Etat d’Auschwitz-Birkenau indiquant généralement la date de décès au camp.
  • © Site Site Internet Mémorial-GenWeb
  • © emilie.wine.n.co.over-blog.com/article-cave-cooperative-de-montpreschambord
  • © Sitewww.mortsdanslescamps.com
  • ©Dessin de Franz Reisz, in « Témoignages sur Auschwitz », ouvrage édité par l’Amicale des déportés d’Auschwitz (1946).
  • Registre matricule militaire © Archives en ligne du Loir et Cher.

Notice biographique rédigée en février 2011 (complétée en 2015, 2017 et 2021) par Claudine Cardon-Hamet, docteur en Histoire, auteur des ouvrages : « Triangles rouges à Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 » Editions Autrement, 2005 Paris et de « Mille otages pour Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 dit des « 45000 » », éditions Graphein, Paris 1997 et 2000 (épuisé). Prière de mentionner ces références (auteur et coordonnées de ce site) en cas de reproduction ou d’utilisation totale ou partielle de cette notice.
Pour la compléter ou la corriger, vous pouvez me faire un courriel à deportes.politiques.auschwitz@gmail.com

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