Georges Delaunay : né en 1894 à Graville-Sainte-Honorine (Seine-Inférieure / Seine-Maritime); domicilié au Havre (Seine-Inférieure / Seine-Maritime) ; commis de bureau, représentant de commerce, cuisinier ; arrêté le 23 ou 24 février 1942 ; interné au camp de Compiègne ; déporté le 6 juillet 1942 à Auschwitz, où il meurt le 22 août 1942.

Georges, Jules Delaunay est né le 31 août 1894 à Graville-Sainte-Honorine, commune
rattachée au Havre en 1919 (Seine-Inférieure / Seine-Maritime). Il habite au 128, boulevard François 1er au Havre au moment de son arrestation (DAVCC) ou au 27, rue Dicquemare (attestation du maire du Havre le 30 décembre 1946 in Havrais-en-Résistance(s)).
Il est le fils d’Alice, Camille, Célina Feret, 29 ans, sans profession et de Georges, Jules Delaunay, 33 ans, charpentier.
Ses parents habitent au 257, rue de Normandie à Graville-Sainte-Honorine.
Le 17 août 1914, il est condamné par le tribunal du Havre à une peine de prison de 15 jours pour port d’armes prohibées.
Assez grand pour l’époque (1 m 71, il a les cheveux châtain et les yeux bleus. Il a un niveau d’éducation primaire développé (niveau 3).
Georges Delaunay, conscrit de la classe 1914 est incorporé le 1er septembre de la même année, après la déclaration de guerre.
Lors de son incorporation, il indique la profession de commis de bureau.
Il arrive au 151ème Régiment d’Infanterie le 13 septembre 1914. Après l’instruction, il est envoyé en renfort sur le Front le 20 février 1915. Rentré au dépôt en juin, il est reparti au Front et il est blessé le 30 juin 1915 par un éclat d’obus lors une contre offensive allemande dans l’Argonne, à Bagatelle. Comme tous les soldats de son régiment, il va alterner les montées en ligne et les évacuations avec retour au dépôt. Evacué le 16 septembre 1916, parti en renfort le 5 janvier 1917. Il est hospitalisé pour un ulcère à la jambe droite… Rentré en renfort le 17 octobre, il est évacué, malade, le 21 octobre 1917. Il remonte au Front le 26 décembre 1917. En permission le 13 mai 1918, il est évacué à l’hôpital du Tremblay, d’où il sort le 24 juin pour être transféré à l’hôpital militaire de Rouen le 26. Il est transféré au 129èmed’infanterie.
Georges Delaunay est démobilisé le 12 septembre 1919.
En 1920, il est domicilié au 58, rue Thiébaut et exerce la profession de représentant de commerce.
Georges Delaunay épouse Marthe, Hélène, Christiane Osmont (1) le 14 septembre 1920 au Havre. Elle a 20 ans, est née au Havre le 20 octobre 1899. Sans profession, elle est domiciliée au 73, rue Casimir Delavigne au Havre.
Georges Delaunay est veuf au moment de son arrestation, selon son acte de décès établi en 1956, et il vit avec madame Catelain Renée depuis au moins 1933 « mère de son fils né en 1934 » (in Havrais-en-Résistance(s).
A partir de mai 1929, le couple habite au Havre au 128, boulevard François 1er .
Georges Delaunay est condamné par le tribunal correctionnel du Havre à 15 francs d’amendes pour « coups », le 25 février 1931 (sans autre précision).
Il est « rappelé à l’activité militaire » par le décret de mobilisation générale du 1er septembre 1939. Il est mobilisé au 32ème dépôt d’Infanterie (31ème Ba, 7ème bataillon) où il arrive le 2 septembre. Puis, le 15 octobre 1939, il passe au dépôt de rattachement des compagnies de travailleurs militaires le 1eravril 1940, au dépôt 303 à Vernon.

Le Havre occupé, 1941 AJPN © D.r.

Les troupes allemandes entrent dans Le Havre le jeudi 13 juin 1940, et transforment la ville et le port en base navale (on comptera jusqu’à 40 000 hommes de troupe). Après la capitulation et l’armistice du 22 juin, La Feldkommandantur 517 est installée à l’hôtel de ville de Rouen et des Kreiskommandanturen à Dieppe, Forges-les-Eaux, et Rouen. Une Kreiskommandantur est installée à L’Hôtel de ville du Havre. Le 10 juillet 1940 le maréchal Pétain, investi des pleins pouvoirs par l’Assemblée nationale, abolit la République et s’octroie le lendemain le titre de « chef de l’Etat français ». Il lance la « révolution nationale » en rupture avec nombre de principes républicains (confusion des pouvoirs législatifs et exécutifs ; rejet du multipartisme, suppression des syndicats et du droit de grève, antisémitisme d’état…).

A partir de l’année 1941, les distributions de tracts et opérations de sabotage par la Résistance se multipliant, la répression s’intensifie à l’encontre des communistes et syndicalistes. Dès le 22 juillet 1941, le nouveau préfet régional, René Bouffet, réclame aux services de police spéciale de Rouen une liste de militants communistes. Une liste de 159 noms lui est communiquée le 4 août 1941 avec la mention : « tous anciens dirigeants ou militants convaincus ayant fait une propagande active et soupçonnés de poursuivre leur activité clandestinement et par tous les moyens ». Ces listes, comportent la plupart du temps – outre l’état civil, l’adresse et le métier – d’éventuelles arrestations et condamnations antérieures. Elles seront communiquées à la Feldkommandantur 517, qui les utilisera au fur et à mesure des arrestations décidées pour la répression des actions de Résistance.

Georges Delaunay est démobilisé le 20 septembre 1940 par le Centre de démobilisation du Havre.
Il « se retire » au 128, boulevard François 1er au Havre.
Georges Delaunay travaillerait alors comme cuisinier (d’après sa déclaration lors de l’immatriculation à Auschwitz le 8 juillet 1942, mais on ne peut pas exclure qu’il ait cherché alors à intégrer un « bon » Kommando).).

Georges Delaunay est arrêté le 13 février 1942 au Havre (archives in site « Havrais en Résistance(s) » / « demande de secours de compagne » de madame Catelain Renée, domiciliée 9, rue Bouchardon à Paris 10ème .
Il est arrêté pour ses activités politiques (selon le dossier De Brinon), ou pour sabotage selon son dossier AC 21 P (photo ci-contre).

Lire dans le  site Le Havre, sabotages et attentats : avril 1941/février 1942.
Après une incarcération à la caserne Hatry, Georges Delaunay est remis aux autorités d’occupation à leur demande. Celles-ci l’internent au camp allemand de Royallieu à Compiègne (le Frontstalag 122).

Lire dans ce site : La solidarité au camp allemand de Compiègne et Le « Comité » du camp des politiques à Compiègne .
Depuis ce camp administré par la Wehrmacht, il va être déporté à destination d’Auschwitz.
Pour comprendre la politique de l’Occupant qui mène à sa déportation, on lira les deux articles du site qui exposent les raisons des internements, des fusillades et de la déportation : La politique allemande des otages (août 1941-octobre 1942) et «une déportation d’otages».
Le 6 juillet, à six heures du matin, il est conduit sous escorte allemande à la gare de Compiègne avec ses camarades, puis entassé dans un des wagons de marchandises qui forment son convoi. Le train s’ébranle à 9 heures trente.

Depuis le camp de Compiègne, Georges Delaunay est déporté à Auschwitz dans le convoi du 6 juillet 1942.

Cf Article du site : Les wagons de la Déportation. 

Ce convoi est composé au départ de Compiègne, de 1175 hommes (1100 « otages communistes » – jeunes communistes, anciens responsables politiques et élus du Parti communiste, syndicalistes de la CGT et délégués du personnel d’avant-guerre, militants et syndicalistes clandestins, résistants – de cinquante  « otages juifs » et de quelques « droits communs »). Il faisait partie des mesures de terreur allemandes destinées à combattre, en France, les judéo-bolcheviks responsables, aux yeux de Hitler, des actions armées organisées par le parti communiste clandestin contre des officiers et des soldats de la Wehrmacht, à partir d’août 1941.
Lire dans le site le récit des deux jours du transport : Compiègne-Auschwitz : 6-8 juillet 1942.
Sur les 1175 otages partis de Compiègne le 6 juillet 1942, 1170 sont présents à l’arrivée du train en gare d’Auschwitz le 8 juillet 1942. Ces derniers sont enregistrés et photographiés au Stammlager d’Auschwitz (camp souche ou camp principal, dénommé en 1943 Auschwitz-I) entre les numéros « 45157 » et « 46326 », d’où le nom de « convoi des 45000 », sous lequel les déportés du camp désignaient ce convoi. Ce matricule – qu’il doit apprendre à dire en allemand et en polonais à toute demande des Kapos et des SS – sera désormais sa seule identité.
Lire dans le site : Le KL Auschwitz-Birkenau.

Son numéro d’immatriculation à son arrivée à Auschwitz le 8 juillet 1942 est inconnu. Le numéro « 45 439 ? » figurant dans mes deux premiers ouvrages sur le convoi du 6 juillet 1942 correspondait à ma tentative de reconstitution de la liste du convoi par matricules. Ce numéro, quoique plausible, ne saurait être considéré comme sûr en raison de l’existence des quatre listes alphabétiques successives que j’ai reconstituées, de la persistance de lacunes pour plus d’une dizaine de noms et d’incertitudes sur plusieurs centaines de numéros matricules. Il ne figure plus dans mon ouvrage Triangles rouges à Auschwitz.

Lire dans le site le récit de leur premier jour à Auschwitz : L’arrivée au camp principal, 8 juillet 1942. et 8 juillet 1942 : Tonte, désinfection, paquetage, « visite médicale ».  Après l’enregistrement, il passe la nuit au Block 13 (les 1170 déportés du convoi y sont entassés dans deux pièces). Le 9 juillet tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau (Brzezinka), situé à 4 km du camp principal. Le 13 juillet il est interrogé sur sa profession. Les spécialistes dont les SS ont besoin pour leurs ateliers sont sélectionnés et vont retourner à Auschwitz I (approximativement la moitié du convoi. Les autres, restent à Birkenau, employés au terrassement et à la construction des Blocks.
On ignore dans quel camp il est affecté à cette date.

Dessin de Franz Reisz, 1946

Georges Delaunay meurt à Auschwitz le 22 août 1942 d’après le certificat de décès établi au camp d’Auschwitz (in Death Books from Auschwitz Tome 2 page 218).

Il a été déclaré «Mort pour la France».
Le titre de «Déporté politique» lui a été attribué.
La mention «Mort en déportation» est apposée sur son acte de décès paru au Journal Officiel du 30 janvier 2008. Cet acte de décès porte toujours la date fictive du 30 novembre 1942 : il serait donc souhaitable que le ministère prenne désormais en compte par un nouvel arrêté la date portée sur son certificat de décès de l’état civil d’Auschwitz, accessible depuis 1995 (Death Books from Auschwitz, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau).

©Thierry Prunier / Mémorial Genweb

Son nom est honoré depuis 2016 sur le Monument commémoratif de la Résistance et de la Déportation, dans les jardins de l’Hôtel de ville du Havre : « Le 29 avril 1990, l’urne contenant des cendres de nos héros et de nos martyrs morts en déportation a été transférée dans ce monument » : en effet, lors de la préparation de l’exposition « Les visages des martyrs » réalisée en 2015 par l’Union des Syndicats CGT Le Havre, les recherches ont mis à jour un ensemble de dossiers de déportés, fusillés et massacrés non inscrits au monument « Résistance-Déportation-Souviens-toi » du Havre. Edouard Philippe, alors maire du Havre et député de Seine-Maritime, a accédé à la demande de la CGT que leurs noms soient inscrits au monument et honorés lors de la cérémonie organisée dans le cadre de la Journée Nationale d’Hommage aux Héros et Victimes de la Déportation, le 24 avril 2016. Parmi eux, neuf « 45 000 ».

  • Note 1 : Il est possible que son frère cadet soit Lucien Osmont, né en 1904, résistant, membre du comité de libération du Havre, élu Conseiller municipal puis adjoint au maire de 1959 à 1965.

Sources

  • Death Books from Auschwitz, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, 1995 (basé essentiellement sur les registres – incomplets – de l’état civil de la ville d’Auschwitz ayant enregistré, entre le 27 juillet 1941 et le 31 décembre 1943, le décès des détenus immatriculés).
  • Fichier national de la Division des archives des victimes des conflits contemporains (DAVCC), Ministère de la Défense, Caen. Fiche individuelle consultée en octobre 1993.
  • Certificat de décès établi au camp d’Auschwitz et destiné à l’état civil de la municipalité d’Auschwitz (DAVCC) relevé en avril 1992.
  • © Site Legifrance.gouv.fr
  • © Archives en ligne de Seine-Maritime. Etat civil et Registre matricule militaire.
  • © Dessin de Franz Reisz, in « Témoignages sur Auschwitz », ouvrage édité par l’Amicale des déportés d’Auschwitz (1946).
  • « Communistes au Havre » Histoire sociale, culturelle et politique, 1922-1983, par Marie Paule Dhaille-Hervieu. Publications de l’Université de Rouen et du Havre (11 janvier 2010). Thèse de doctorat.
  • Pièces administratives in site « Havrais en Résistance(s) ».

Notice biographique rédigée par Claudine Cardon-Hamet en 2000 pour l’exposition de Rouen de l’association « Mémoire Vive » consacrée aux déportés “45000” et “31000” de Seine-Maritime, complétée en 2006, 2012, 2017, 2018, 2022 et 2024. Docteur en Histoire, auteur des ouvrages : « Triangles rouges à Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 », Editions Autrement, 2005 Paris et de «Mille otages pour Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 dit des « 45000 », éditions Graphein, Paris 1997 et 2000. Prière de mentionner ces références (auteur et coordonnées de ce site) en cas de reproduction ou d’utilisation totale ou partielle de cette notice.
Pour la compléter ou la corriger, vous pouvez me faire un courriel à deportes.politiques.auschwitz@gmail.com

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