Cet article est rédigé à partir de plusieurs sources référencées en notes.

Dans la nuit du 30 avril au 1er mai 1942, quatre jeunes communistes (annexe 1) - Jean Roblin, Max Thenon, Guy Dartois et Jacques Guilbaud - distribuent un tract de la Fédération des jeunesses communistes du Cher à Romorantin-Lanthenay et collent des affiches faites à la main. Ils sont surpris par deux Feldgendarmen (policiers militaires rattachés à la Wehrmacht) en patrouille le long de la ligne de démarcation. Un des jeunes, chargé de la protection des afficheurs, ouvre le feu le premier. Un Feldgendarme est tué, l’autre grièvement blessé (notes 1, 2, 3 et sources).
Tract distribué dans la nuit du 30 avril au 1er mai 1942. Archives départementales du Loir-et-Cher (1375W59).

Jacques Guilbaud, un des quatre jeunes communistes impliqués dans la fusillade raconte (Jean Châtelain (1) a retrouvé l’un de ces jeunes communistes, Jacques Guilbaud, sans doute le seul survivant de cet événement, et l’a interviewé 60 ans après les faits, le 13 août 2002).

« Dans la soirée du 30 avril 1942, après le couvre-feu, 4 jeunes communistes se retrouvent près du lavoir municipal du Rantin, détruit depuis. Il s’agit de Guy Dartois, Jacques Guilbaud, Jean Roblin et Max Thenon. Ils sont décidés à distribuer des tracts et à coller des affiches appelant à la lutte contre l’occupant et le fascisme et à mobiliser «les jeunes catholiques, les jeunes protestants, les jeunes gaullistes, les jeunes communistes » pour « solidaires des alliés anglais, américains et soviétiques libérer la patrie et anéantir Hitler et ses valets ». Tapés sur stencil par la mère de Jacques Guilbaud, les tracts étaient tirés sans Ronéo, avec des moyens rudimentaires. Les affiches qui représentaient une carte de France étaient faites une par une et réalisées au dos des affiches à la gloire de Pétain, récupérées chez des commerçants. Après avoir couvert la zone voisine de l’usine Normant, les quatre jeunes gens remontent le mail des Tilleuls, passent le long de la halle, et arrivent rue des Limousins. Les tracts étaient glissés sous les portes ou sous les fenêtres. Après une première alerte, où, cachés dans la rue Pasteur, ils échappent à une patrouille allemande, ils arrivent au voisinage du 42 (ancienne maison de tolérance aujourd’hui démolie pour laisser passer le boulevard Lyautey). Un Feldgendarme à vélo, qu’ils n’avaient pas entendu arriver, saisit Jacques Guilbaud par le col. L’un des quatre jeunes, armé d’un revolver, n’hésita pas à faire feu et abattit l’Allemand. Les quatre hommes s’échappèrent dans toutes les directions. Celui qui était armé remonta la rue des Limousins et, arrivé au carrefour avec la rue Nationale (actuelle rue du 8 mai), fut rattrapé par un deuxième Feldgendarme qu’il abattit d’une balle dans le ventre. L’Allemand eut le temps de riposter et lui logea une balle dans le pied. Jacques Guilbaud s’échappa par les jardins jusqu’à la ligne du BA (S « Blanc Argent ») et remonta la ligne de chemin de fer jusqu’au pont de l’Erable. Il habitait rue des Capucins, au voisinage de l’hôpital où il avait travaillé (pompier de Paris alors, il était en permission). Avant de rejoindre son domicile, un officier allemand l’aperçut, mais ne chercha pas à le poursuivre. Jacques Guilbaud arriva à son pas de porte par la direction opposée à son départ, c’est ce qui devait le sauver. Le lendemain, un chien suivit la piste marquant son retour, passa devant chez lui, poursuivit sans s’arrêter, remontant la trace de son départ. Max Thenon perdit sa veste lors de l’affrontement. Cette veste fut exposée devant l’usine Normant pour que, si quelqu’un la reconnaissait, son propriétaire fut identifié. Le frère de Max Thenon, tuberculeux, cracha du sang durant cette nuit et le docteur Marteville fut appelé. On soupçonna un blessé par balle et la police se rendit au domicile de Max Thenon auquel on fit essayer la veste. Elle lui allait bien entendu, mais comme elle allait aussi aux enquêteurs, l’affaire en resta là. A la suite de cette nuit, des otages furent arrêtés (les listes étaient prêtes), la presse de l’époque fit état de 10 fusillés. Par la suite de nombreux communistes ou résistants furent arrêtés » (1).

Arrestations et fusillades

Kommandantur d’Orléans. Avis à la population 1er mai 1942. © Archives départementales du Loir-et-Cher,  (1375W59).

Romorantin est mis en état de siège. Dans un avis, signé à Orléans le 1er mai, le Feldkommandant  Brisken indique que les « auteurs, provenant certainement de cercles communistes, se sont enfuis« . Il ordonne du 1er au 15 mai, une série de mesures disciplinaires : renforcement du couvre-feu, interdiction de tous les divertissements, suspension des laissez-passer… Dans le même temps de vastes coups de filets sont opérés dans plusieurs départements de la région militaire (Cher, Loiret, Loir-et-Cher).
« Immédiatement, des militants ou sympathisants communistes sont arrêtés. Le commissaire de police adresse la liste des otages au préfet le 27 mai 1942 : Louis Bailly (rue des Jouannettes), Robert Belnave (route des Papillons), Moïse Bodin (La Perronnière), Victor Budin (Le Lierreux à Lanthenay), Angel Couprie (Grande rue), Gustave Crochet (La Ratière), Camille Dupuy (place du Vieux Marché), Jean Gougibus (Grande rue), Octave Hervault (rue de Beauvais), Yvon Millot (rue du Grenier à Sel), Daniel Pesson (La Roche), Isidore Petat (Faubourg de Blois), Edouard Roguet (rue du Progrès). Tous sont transférés à Orléans. Quatre d’entre eux sont vite relâchés : Louis Bailly, Camille Dupuy, Jean Gougibus et Yvon Millot, suite à l’intervention de conseillers municipaux si l’on en croit Marcel Boissière ». (2).
On estime à 70 le nombre des arrestations pour le Loir-et-Cher, une quarantaine de militants communistes connus arrêtés à Vierzon (Cher) et une trentaine à Bourges (Cher) (4).

Musée de la Résistance de Bourges

Plusieurs d’entre eux, internés à Compiègne seront déportés à Auschwitz. Cette affirmation est désormais confirmée par le document allemand ci-contre qui figure au Musée de la Résistance de Bourges, dont nous n’avons eu connaissance qu’en 2016. En réponse au Préfet de Bourges  « En réponse à votre lettre du 19 janvier (1943) nous vous faisons connaître que MM Perrin Marcel et Rivet Roger arrêtés à la suite de l’attentat de Romorantin, ont été conduits le 6.7.42 dans un camp situé en Allemagne » .
Dans un avis, signé à Orléans le 1er mai, le Feldkommandant  Brisken indique que les « auteurs, provenant certainement de cercles communistes, se sont enfuis » (…citation de l’affiche publiée ci-dessus) (3).
Le même jour, le Préfet du Loir-et-Cher, J.F. Bussière, publie de son côté un appel à la population. Il précise qu’il s’agit d’une « agression de la part d’individus surpris en flagrant délit de diffusion de tracts communistes » et poursuit :  » la population de Loir-et-Cher, qui a toujours observé l’attitude la plus courtoise à l’égard des membres de l’Armée Allemande réprouve de toutes ses forces, je le sais, et dans l’unanimité, de pareils actes de violence, qui ne sauraient avoir pour auteurs de véritables patriotes« . Il demande donc « instamment à toute la population de s’associer sans réserve aux recherches en cours » et avertit « qu’aucune défaillance ne sera permise en face d’agissements criminels si essentiellement contraires aux traditions de notre pays » (3).

Liste manuscrite établie par la Préfecture de police. © Archives départementales du Loir-et Cher, (1375W59).

Toujours le 2 mai, le préfet s’adresse à ses supérieurs pour leur signaler « que les services de police placés sous mes ordres ont été l’objet de manœuvres d’intimidation extrêmement violentes  de la part des Allemands« . Il insiste sur le cas du commissaire Leboutet « qui a réussi malgré la brutalité avec laquelle il lui était intimé de livrer des noms à gagner du temps et à n’établir qu’une liste de personnes déjà arrêtées par les autorités allemandes« . Le Préfet constate que ces méthodes sont une « violation flagrante » de l’accord entre autorités françaises et allemandes sur les compétences et le rôle respectif des deux polices. Il ajoute : « il s’agit de rien moins en effet que d’obtenir, sous couvert de coopération des deux polices, des listes d’otages, d’une façon déguisée  » (…) (3).
Le 5 mai, le préfet s’adresse à la délégation de Paris du ministère de l’intérieur qui siège, lui, à Vichy. Il rappelle qu’il a déjà fait plusieurs rapports depuis le 1er mai et envoyé des télégrammes. Mais surtout, il informe ses supérieurs qu’il a été « averti téléphoniquement aujourd’hui que six personnes de mon département avaient été fusillées ce matin  » (3).
Ces six jeunes otages communistes ont été fusillés par un peloton d’exécution allemand dès le 5 mai, et cinq autres le seront le 9 mai 1942 sur le terrain militaire des Groues (à cheval sur les communes d’Orléans et St Jean de la Ruelle) (1, 2, 3 et sources). (Voir en annexe 2 les notices biographiques sommaires des 11 fusillés). Plusieurs militants sont également fusillés dans le Cher (4).
Ces 6 jeunes n’avaient pas plus de 20 ans. Nés entre 1919 et 1922, ils avaient été condamnés par la Cour Spéciale d’Orléans, pour « infraction au décret portant dissolution des organisations communistes et distributions de tracts et journaux, dans sa séance du 20 septembre 1941« . Le préfet souligne par ailleurs que « l’enquête se poursuit très activement » mais qu’il a « peu d’espoir d’obtenir des résultats positifs étant donné la proximité de la ligne de démarcation par rapport au lieu de l’attentat « . Le 6 mai, Fernand de Brinon, le délégué général de Vichy dans les Territoires Occupés, l’informe qu’il est activement intervenu auprès des Allemands pour les mettre en garde sur  « l’émotion que provoquerait dans l’opinion les représailles envisagées » et donc « de bien vouloir  surseoir à toute nouvelle exécution » (3).
Le 7 mai, le Préfet envoie une lettre aux maires des communes concernées par ces arrestations (2 et 3) : « Je tiens à vous faire savoir que les personnes arrêtées dans votre commune à la suite du meurtre d’un sous-officier allemand à Romorantin, l’ont été sur l’initiative seule des autorités d’occupation« . Il précise que lui et le gouvernement « avec lequel (il) se tient téléphoniquement en communication […] multiplient les démarches auprès des autorités militaires allemandes  en vue d’aboutir à un résultat « .
Il faut dire que dans la population l’émotion est forte face aux arrestations, aux exécutions déjà intervenues et aux menaces d’autres représailles. D’autres arrestations vont suivre (2). Louis Marquet demeurant rue Scribe est dénoncé en mai 1942 comme sympathisant communiste par une lettre anonyme qui s’avère avoir été écrite par une de ses voisines. Gérard Thévenin (rue du Prêche) est arrêté à Blois par la Gestapo, Jacques Guilbaud est arrêté à Paris, ils seront tous deux déportés à Buchenwald. Roland Rousselet (rue des Fillettes) et Albert Boileau (Faubourg d’Orléans) sont arrêtés pour activité communiste le 21 août 1942. Selon le commissaire de police, « Rousselet aurait été formellement reconnu par le gendarme allemand blessé Ion de l’attentat du 1er mai comme étant l’un des distributeurs de tracts », cette indication est donnée « sous toute réserve ». A la suite de ses pressantes interventions, le préfet a reçu, le 11 juin 1942, l’assurance que les autorités allemandes «envisageaient la libération de la presque totalité des personnes arrêtées dans le Loir-et-Cher au lendemain de l’agression de Romorantin » (promesse faite par le docteur Kochling, Kriegsverwaltungsrat à Orléans et le Kommandeur Westphal, chef de la Sicherheitspolizei à Orléans) (2). Le 12 mai, le préfet intervient auprès du lieutenant-colonel, commandant la Feldkommandatur 589 à Orléans, car le délai donné aux autorités françaises va expirer, avec la menace de 20 autres exécutions et 50 personnes supplémentaires emprisonnées. Il souligne que « tous les moyens humainement possibles ont été mis en œuvre pour établir les culpabilités réelles, pour satisfaire à un esprit de justice commun aux Allemands et aux Français, pour éviter qu’un châtiment sans recours vienne frapper des personnes ne paraissant n’avoir aucun rapport avec le tragique incident « . Il insiste sur le fait que « le meurtre qui endeuille (son) département à un caractère accidentel » (3).
En effet, les enquêtes menées par les services de gendarmerie et de police qui ont interrogé des dizaines de personnes, ont vite conclu, comme le préfet en informe le cabinet du chef de gouvernement : « qu’il ne s’agissait pas d’un attentat mais de jeunes gens qui, surpris en flagrant délit de diffusion de tracts communistes avaient riposté par des coups de feu aux coups de feu tirés par les Feldgendarmes allemands » (3).
On a trouvé sur les lieux de « l’attentat » 4 pinceaux, un béret, un veston et des douilles de calibre 6,25. Ces jeunes, au nombre de 5 ou 6, n’ont pas été identifiés. Du moins, ce sera la position des autorités françaises.
Cette lettre nous apprend par ailleurs qu’il y avait eu en fait « dix personnes (qui) ont déjà été fusillées sans préavis » (dont les 6 pour le Loir-et-Cher). « En exécuter vingt autres, serait frapper d’un bien lourd tribut une population dont la parfaite correction vis-à-vis de l’armée d’occupation, dont la mesure et la courtoisie traditionnelles, dont l’incessante et courageuse énergie dans le pénible labeur quotidien, méritent, même à l’époque que nous vivons, une considération particulière » (3).

Le 6 juillet 1942, Moïse Bodin, Gustave Crochet, Octave Hervault, Daniel Pesson, Isidore Petat, Edouard Roguet, quittent le camp de Compiègne où ils sont détenus pour un camp en Allemagne « en vue de leur emploi comme travailleurs ». Leur transfert a été ordonné par le bureau central de Paris. Robert Belnave et Angel Couprie sont libérés à Compiègne (2).
Depuis le camp de Compiègne, les 6 premiers noms cités sont en fait déportés à destination d’Auschwitz. Pour comprendre la politique de l’Occupant qui mène à sa déportation, voir les deux articles du blog : La politique allemande des otages (août 1941-octobre1942)  et «une déportation d’otages».
Le préfet est très surpris d’apprendre ce transfert, il demande des explications aux autorités allemandes. Le 31 juillet 1942, il fait part de son mécontentement au ministre de l’intérieur : « II me semble difficile d’admettre que ces otages, dont l’arrestation n’a été due qu’au hasard, soient victimes à nouveau du manque de coordination existant entre deux services allemands. Une promesse a été faite. Une ordonnance de libération a été prise, la promesse doit être tenue et l’ordonnance exécutée. C’est pourquoi je vous demande de bien vouloir intervenir auprès des hautes autorités de police allemande, de la façon la plus pressante, pour que les personnes figurant sur la liste ci-jointe comme ayant été envoyées dans des camps de travail soient effectivement et définitivement libérées ».
Le 5 septembre 1942, les autorités allemandes viennent de faire savoir au Préfet que les otages arrêtés en mai seront libérés, une lettre du secrétaire général de la police à Paris en fait foi. Le 24 septembre 1942, le maire de Romorantin adresse une attestation affirmant, qu’à sa connaissance Moïse Bodin n’a jamais appartenu au Parti communiste, ce père de 5 enfants « jouit de la sympathie générale pour son travail et ses qualités de chef de famille ». Le 6 février 1943, le maire de Romorantin, à son tour, écrit au ministre de l’intérieur pour connaître le lieu de détention des otages. Malgré de nombreuses démarches auprès des Allemands, il lui a été impossible d’obtenir une réponse. Le 16 février 1943, le ministre lui fait savoir qu’il a demandé à la délégation générale du gouvernement d’effectuer une démarche auprès des autorités occupantes. Le 24 février 1943, le maire rend compte de ses démarches aux épouses des otages : «Encore dernièrement, j’ai fait une démarche pressante à Paris auprès du président de la Croix-Rouge française, une autre auprès du préfet délégué du ministère de l’intérieur dans les territoires occupés. Aucun résultat n’a encore été acquis ». Depuis le 16 juillet 1942, les familles sont sans nouvelles, elles avaient alors reçu un avis imprimé
provenant du Frontstalag 122 de Compiègne les avisant que les otages avaient été changés de camp (2).
Une lettre du Préfet aux maires, le 20 décembre 1943,  transmet la réponse « aux pressantes démarches auprès des autorités d’occupation« . Celles-ci informent le Préfet « que les otages de Romorantin ont été conduits dans un camp allemand où la correspondance entre détenus et leurs parents est interdite » 3).
Moise BodinVictor Budin,Gustave CrochetAndré FillouxJoseph FillouxMathieu FillouxOctave HervauxCamille ImpérialEdouard RoguetJean MatriscianoAlbert RobertIsidore PetatDaniel Pesson, et Céleste Serreau sont morts depuis de longs mois.

Annexe 1 : les 4 jeunes communistes

Jean Roblin, coll AM Romorantin

Jean Roblin, né le 17 mai 1921 à Romorantin, est ouvrier aux établissements Normant. Ex-secrétaire de la Jeunesse communiste de Romorantin, il fonde les FTP du Loir-et-Cher et participe à plusieurs actions armées contre les occupants. En septembre 1941, avec « Claude », interrégional de la « JC », Max Thenon et Guy Dartois, il fait dérailler un train de tanks à Langon. Après la fusillade de Romorantin, il se cache dans la ferme de Claude Auger. Le 2 avril 1943 il est arrêté par la police française à Millançay, ainsi que ce dernier. Il tente en vain de s’évader. Condamné à mort, il est fusillé le 8 octobre 1943 à Saint-Jean-de-la-Ruelle (d’après Le Maitron notice Julien Lucchini). « Arrêté chez, et avec, Claude Auger qui le cachait au Petit-Bois sur la route d’Orléans. Menottes aux mains, à Romorantin, il réussit à s’échapper en saisissant un vélo le long du trottoir. Il fut intercepté dans la Grande Rue par des commerçants. Il fut fusillé le 8 octobre 1943 au Fort des Groues près d’Orléans » Jean Châtelain (1).
Guy Dartois, né à Lanthenay le 22 janvier 1921. Sa notice biographique du Maitron indique « avait abattu avec Max Thenon deux Feldgendarmes à Romorantin en mai 1942 ». Commissaire militaire régional d’Indre-et-Loire. Arrêté le 5 avril 1943, il est déporté depuis Compiègne vers Buchenwald le 27 janvier 1944. Rescapé, il est libéré à Dora.
Max Thenon (pseudonyme Michel) est l’un des fondateurs du premier maquis FTPF du Cher (Le Maitron).  Arrêté, il s’est évadé en sautant d’un train après s’être réfugié chez Claude Auger. Il continua son activité résistante et survécut à la guerre. Jean Châtelain (1).
Jacques Guilbaud, né à Romorantin le 31 décembre 1920. « Il milita très jeune dans les Jeunesses Communistes de Romorantin dont il devint le responsable avant la guerre. Il vendait « l’Avant Garde » en compagnie de Roger Morand qui vendait « l’Humanité ». En juillet 1941, ses antécédents l’amenèrent à quitter Romorantin pour Paris où il s’engagea dans les pompiers. Il continua ses actions militantes et échappa à l’arrestation à diverses reprises, pour finalement être dénoncé, sous la torture, par un de ses camarades. Ce dernier avait abattu un policier venu arrêter une militante communiste qui, sur un marché de Bicêtre, exhortait à la Résistance. Il fut emprisonné en novembre 1942 et déporté le 14 mai 1944 à Buchenwald. Les Américains pénétrèrent dans le camp alors que les détenus l’avaient déjà libéré le 11 avril 1945. Jacques Guilbaud avait survécu » Jean Châtelain (1).

Annexe 2 : Les fusillés


Ce sont 11 otages communistes qui sont fusillés au champ de tir des Groues à Saint-Jean-de-la-Ruelle (Loiret), en représailles à « l’attentat ». Six sont fusillés le 5 mai 1942 (Marc Auger, Roger Leclerc, Maurice Lelièvre, Roger Morand, André Murzeau et Jacques Rivet). Le chiffre de six était incertain pour certains auteurs, mais il est confirmé par la dernière lettre de Roger Morand à son épouse le 5 mai et par le courrier du Préfet à la délégation de Paris du ministère de l’intérieur le 5 mai. Cinq autres sont fusillés le 9 mai (Bernard Amiot, Guy Cacault, Pierre Mandart, Roger Morand et Maurice Page).
Bernard Amiot : Né le 29 avril 1921 à Mont-Près-Chambord (Loir-et-Cher). Ouvrier métallurgiste, militant communiste. Il est arrêté le 4 août 1941 à Mont-près-Chambord par la police française pour propagande communiste clandestine et condamné à quatre ans de prison par la Section spéciale d’Orléans (Loiret). Il est fusillé le 9 mai 1942.
Marc Auger : Né le 8 mai 1922 à Saint-Romain-sur-Cher (Loir-et-Cher). Electricien ; Membre du Parti communiste clandestin. Arrêté le 11 août 1941 à Mignières par la police française pour « communisme et distribution de tracts ». Il est condamné le 20 septembre 1941 à cinq années de prison par la Section spéciale d’Orléans. Il est fusillé le 5 mai 1942.
Guy Cacault : Né le 15 mai 1919 à Blois (Loir-et-Cher). Maçon, militant communiste. Fils d’une ouvrière en chaussures, célibataire. Guy Cacault, résidant à Blois, fut arrêté, avec dix autres personnes, le 7 août 1941 à Blois par la police française pour « activité communiste ». Il est condamné à cinq années de prison par la Section spéciale d’Orléans (dépendant de Vichy). Il est fusillé le 9 mai 1942.
Roger Leclerc : Né le 14 avril 1920 à Vierzon (Cher), journalier de l’industrie métallurgiste à Vierzon ; militant communiste. Il est fusillé le 5 mai 1942.
Maurice Lelièvre, Né le 5 avril 1921 à Fourchambault (Nièvre), manœuvre dans l’industrie. Jeune communiste, membre du Front national, il transportait et distribuait des tracts édités par le Parti communiste. Arrêté le 14 avril 1942 à Vierzon (Cher) par la gendarmerie française. Il est fusillé le 5 mai 1942.
Pierre Mandart : Né le 5 novembre 1920 à Paris (6ème), mécanicien ajusteur. Membre du Parti communiste clandestin. Il est fusillé le 5 mai 1942.

Roger Morand. Coll AM Romorantin

Roger Morand : Né le 19 juin 1912 à Romorantin (Loir-et-Cher). Secrétaire des JC de Romorantin. Il s’était marié en 1936.« Le 30 mai 1941, Roger Morand, 28 ans, agent des lignes P.T.T., demeurant rue des Limousins, est arrêté suite à la découverte de tracts communistes sur la route
de Selles-sur-Cher à Romorantin. Incarcéré à Blois, Orléans et Poissy, Roger Morand tombe sous les balles d’un peloton d’exécution à Orléans le 5 mai 1942. Le journal « le Travailleur » d’août 1945 a publié la dernière lettre de Roger Morand à sa femme Paulette et ses enfants Marcel et Michelle : « Je vous envoie mes dernières nouvelles car ce matin je vais être fusillé en représailles des attentats commis à Romorantin sur la personne de deux soldats allemands. Hier, on est venu nous chercher à Poissy pour nous amener à Orléans, nous six jeunes du Loir-et-Cher
» (in SAHAS bulletin n° 177, page 79). Il est fusillé le 9 mai 1942.
André Murzeau : Né le 4 novembre 1919 à Saint-Dyé-sur-Loire (Loir-et-Cher). Couvreur ; jeune chrétien militant dans un réseau des Jeunesses communistes clandestines. Arrêté en juillet 1940. La Section spéciale d’Orléans le condamne le 20 septembre à trois ans de prison. Il est fusillé le 5 mai 1942. « Ce fut le début des exécutions massives d’otages. Ce fut aussi la période ou nos jeunes n’acceptèrent plus passivement les arrestations. Le stade de la propagande et des sabotages était désormais dépassé. Bien sur, nous savions que pour un Allemand tué, cinq des nôtres mourraient parmi les meilleurs. Mais nous savions aussi que nos camarades arrêtés avaient très peu de chance de revenir vivants, l’arrestation signifiant bien souvent la mort. André Murzeau était âgé de 22 ans, quand on vint le chercher dans son cachot à Poissy, pour le conduire au peloton d’exécution. Avant mourir il put écrire a sa maman, une lettre pleine de tendresse ».
Sa dernière lettre : Mardi 5 mai 1942. Ma chère maman, C’est avec beaucoup de peine pour toi que ce matin je vais être fusillé. Oui, en effet, hier, vers 3h30, les autorités allemandes venaient nous chercher à Poissy, Cacault, Morand, Mandard, Augé, Amiot et moi, ceci pour l’affaire de Romorantin. Enfin, bref, il est maintenant 5h30 et à 7h40, agenouillé devant 12 canons de mousquetons, je rendrai mon âme à Dieu, car je crois que je le mérite un peu, après les 9 mois de souffrances endurées en prison… Tu peux dire à mes amis que je meurs en vrai Français et en homme. Quant à celui qui m’a mis dedans, je ne peux en parler… Dommage quand même à 22 ans ! … Tous mes camarades présents ici sont forts aussi… Enfin, tout mon cœur est à toi, ma chère maman et garde-le avant qu’il ne soit haché par les balles des Mausers… Heureusement pour moi, j’ai été arrêté avant de me marier, cela fera une veuve de moins. Ton fils qui t’aime et qui meurt en Français ! Dédé. Vive la France libre ! Courage aux amis.
Maurice Page : Né le 19 juin 1912 à Saint-Firmin-sur-Loire (Loiret), arrêté le 1er novembre 1941 par les autorités allemandes. Il aurait chanté « L’Internationale » dans les rues, et était considéré comme communiste. Condamné à un an de prison le lendemain et interné à la prison d’Orléans (Loir-et-Cher). Il est fusillé le 9 mai 1942.

Jacques Rivet

Jacques Rivet, Né le 26 octobre 1921 à Montargis (Loiret), charbonnier, débitant de boissons. il était marié et père de trois enfants (AD18).  Militant communiste de Vierzon (Cher). Il est le neveu de Roger Rivet, déporté à Auschwitz. Voir dans la biographie de celui-ci une photo de famille. Il est fusillé le 5 mai 1942.
Georges Devin, né le 16 juillet 1901 à Courtempierre (Loiret), est lui aussi fusillé le 9 mai 1942 à Saint-Jean-de-la-Ruelle (Loiret). Cultivateur il a été arrêté sur dénonciation pour « détention illégale d’armes et de munitions » (on trouve chez lui un fusil de chasse et une carabine). Il ne semble pas qu’il ait appartenu à un réseau de la Résistance. Georges Devin est condamné à mort le 9 avril 1942.

  • Note 1 : Article de M. Jean Châtelain paru dans le bulletin 149 de la Société d’histoire et d’archéologie de la Sologne.
  • Note 2 : Article de Mme Hélène Leclert paru dans le bulletin 177 de la Société d’histoire et d’archéologie de la Sologne (pages 79 à 82).
  • Note 3 : Extraits d’un article de madame Thérèse Gallo-Villa, publié dans le n° 33 de février 2017 du Bulletin édité par « Les
    Amis du Musée et du Site de Tasciaca
     » (repris du blog privé « Tharva »).
  • Note 4 : Marcel Cherrier et Michel Pigenet citent : « Lelièvre, Rivet, Leclerc, puis Godard, Bidot, Bavouzet, Loth et Masse ». Les trois
    premiers natifs ou habitant le Cher sont bien fusillés le 5 mai 1942 en représailles à la fusillade de Romorantin, mais André Bavouzet, Marcel Bidot et Gabriel Godard, sont fusillés plus tard, le 21 septembre 1942 au Mont-Valérien en représailles à l’attentat du cinéma Rex (Quarante-six otages furent exécutés et incinérés. Journal de Franz Stock).

Autres sources

  • Yves Durand et Robert Vivier : « Libération des pays de la Loire », Hachette littérature. 1974) in SAHAS n° 147.
  • Enquête – transmise à la commission d’histoire de la FNDIRP – réalisée en 1977 par M. Georges Larcade, président de l’ADIRP du
    Loir-et-Cher auprès des familles de résistants et déportés.
  • Livre de Marcel Cherrier et Michel Pigenet « Combattants de la Liberté – la Résistance dans le Cher ».
  • Notices biographiques de fusillés publiés par Le Maitron (dictionnaire biographique du mouvement ouvrier et mouvement social.
  • Archives départementales du Loir-et-Cher. 1477 W 2.
  • Avis paru dans La Dépêche du Berry du 8 mai 1942, détaillant les mesures de répression suite à la fusillade.

Prière de mentionner ces références (auteurs et coordonnées de ce site : https://deportes-politiques-auschwitz.fr) en cas de reproduction ou d’utilisation totale ou partielle de cet article.   

Claudine Cardon-Hamet. Docteure en histoire, auteure des ouvrages « Triangles rouges à Auschwitz » et de « Mille otages pour Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 », et recherches de Pierre Cardon

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