Pierre Marin : né en 1902 à Paris 6ème ; domicilié à Paris 14ème ; dessinateur, sculpteur ; communiste ; arrêté le 5 février 1941, condamné à 6 mois de prison (Santé, Fresne, Poissy) ; interné aux camps de Rouillé et de Compiègne ; déporté le 6 juillet 1942 à Auschwitz, où il meurt.
Pierre Marin est né le 16 février 1902 à Paris (6ème). Il est le fils de Léontine Marin, 30 ans, née le 15 avril 1871 à Villers les pots (Côte d’or), sans profession, domiciliée au 76, rue de Rennes, dans cet arrondissement. Au moment de son arrestation, Pierre Marin habite au 117, rue Didot à Paris (14ème).
En 1923, il est inscrit sur les listes électorales du 14ème arrondissement. Il effectue alors son service militaire.
Il est dessinateur en au moment de son mariage (sculpteur au moment de son arrestation).
Il se marie à Sèvres (Seine) le 28 mars 1925 avec Yvonne, Marie, Ernestine Pennetier. Elle a 19 ans, employée, elle est née le 12 juillet 1905 à Paris (14ème). Elle habite Villa des Acacias à Sèvres.
En 1926, Pierre marin vit avec sa mère au 117, rue Didot. Au recensement de 1926, en face du nom de son épouse est indiqué : absente. La profession de Pierre Marin mentionnée est « dessinateur ».
En 1936 Pierre Marin n’habite plus au 117, rue Didot. Il vit en fait chez son amie Berthe, au 1, ou 2, rue Ledion, Paris 14ème. Pierre Marin est vraisemblablement mobilisé à la déclaration de guerre de 1939.
Le 14 juin 1940, les troupes de la Wehrmacht entrent dans Paris, vidée des deux tiers de sa population. La ville cesse d’être la capitale du pays et devient le siège du commandement militaire allemand en France. Le 22 juin, l’armistice est signé. Le 10 juillet 1940 le maréchal Pétain, investi des pleins pouvoirs par l’Assemblée nationale, s’octroie le lendemain le titre de « chef de l’Etat français » et lance la « révolution nationale » en rupture avec nombre de principes républicains (confusion des pouvoirs législatifs et exécutifs ; rejet du multipartisme, suppression des syndicats et du droit de grève, antisémitisme d’état…).
Ancien membre du Parti communiste, connu des Renseignements généraux, Pierre Marin est arrêté le 5 février 1941 pour distribution de tracts communistes. Inculpé par le commissaire du 14ème arrondissement d’infraction aux articles 1 et 3 du décret du 26 septembre 1939 (dissolution du Parti communiste et propagande notoire des doctrines de la IIIème internationale), il est mis à la disposition du procureur.
Il est emprisonné à la Santé le 6 février, puis à Fresnes le 12 avril 1941 pour y purger les 6 mois de prison qui lui ont été infligés.
Fin mai 1941, il est transféré à la Maison centrale de Poissy où il reste incarcéré jusqu’à la fin novembre 1941. En effet, à la fin de sa peine d’emprisonnement, il n’est pas libéré, et il est interné administrativement (1) sur décision du Préfet de police de Paris le 8 juillet et « gardé dans cet établissement en attendant qu’une place soit disponible à Aincourt ».
En fait le 28 novembre 1941, c’est avec 7 autres détenus de Poissy qu’il est transféré – non pas à Aincourt – mais au Camp de Séjour Surveillé de Rouillé (2) qui vient d’ouvrir en septembre. Les 7 autres co-détenus de Poissy sont Deschamps Georges ainsi que François Dallet, Alfred Chapat, Albert Faugeron, Raymond Langlois, Marcel Nouvian et Eugène Thédé qui seront déportés avec lui à Auschwitz.
Début mai 1942, les autorités allemandes adressent au commandant du Camp de Rouillé une liste de 187 internés qui doivent être transférés au camp allemand de Compiègne (le Frontstallag 122). Le nom de Pierre Marin (n° 121de la liste) y figure et c’est au sein d’un groupe de 168 internés (3) qu’il arrive à Compiègne le 22 mai 1942.
Depuis ce camp administré par la Wehrmacht, il va être déporté à destination d’Auschwitz. Pour comprendre la politique de l’Occupant qui mène à sa déportation, on lira les deux articles du site qui exposent les raisons des internements, des fusillades et de la déportation : La politique allemande des otages (août 1941-octobre 1942) et «une déportation d’otages».
Depuis le camp de Compiègne, Pierre Marin est déporté à Auschwitz dans le convoi du 6 juillet 1942.
Cf Article du site : Les wagons de la Déportation.
Ce convoi est composé au départ de Compiègne, de 1175 hommes (1100 « otages communistes » – jeunes communistes, anciens responsables politiques et élus du Parti communiste, syndicalistes de la CGT et délégués du personnel d’avant-guerre, militants et syndicalistes clandestins, résistants – de cinquante « otages juifs » et de quelques « droits communs »). Il faisait partie des mesures de terreur allemandes destinées à combattre, en France, les judéo-bolcheviks responsables, aux yeux de Hitler, des actions armées organisées par le parti communiste clandestin contre des officiers et des soldats de la Wehrmacht, à partir d’août 1941. Lire dans le site le récit des deux jours du transport : Compiègne-Auschwitz : 6-8 juillet 1942. Sur les 1175 otages partis de Compiègne le 6 juillet 1942, 1170 sont présents à l’arrivée du train en gare d’Auschwitz le 8 juillet 1942. Ces derniers sont enregistrés et photographiés au Stammlager d’Auschwitz (camp souche ou camp principal, dénommé en 1943 Auschwitz-I) entre les numéros « 45157 » et « 46326 », d’où le nom de « convoi des 45000 », sous lequel les déportés du camp désignaient ce convoi. Ce matricule – qu’il doit apprendre à dire en allemand et en polonais à toute demande des Kapos et des SS – sera désormais sa seule identité. Lire dans le site : Le KL Auschwitz-Birkenau.
Son numéro d’immatriculation lors de son arrivée à Auschwitz le 8 juillet 1942 est inconnu. Le numéro « 45833 ? » figurant dans mes deux premiers ouvrages sur le convoi du 6 juillet 1942 correspondait à ma tentative de reconstitution de la liste du convoi par matricules. Ce numéro, quoique plausible, ne saurait être considéré comme sûr en raison de l’existence des quatre listes alphabétiques successives que j’ai reconstituées, de la persistance de lacunes pour plus d’une dizaine de noms et d’incertitudes sur plusieurs centaines de numéros matricules. Il ne figure plus dans mon ouvrage Triangles rouges à Auschwitz.
Lire dans le site le récit de leur premier jour à Auschwitz : L’arrivée au camp principal, 8 juillet 1942. et 8 juillet 1942 : Tonte, désinfection, paquetage, « visite médicale ». Après l’enregistrement, il passe la nuit au Block 13 (les 1170 déportés du convoi y sont entassés dans deux pièces). Le 9 juillet tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau (Brzezinka), situé à 4 km du camp principal. Le 13 juillet il est interrogé sur sa profession. Les spécialistes dont les SS ont besoin pour leurs ateliers sont sélectionnés et vont retourner à Auschwitz I (approximativement la moitié du convoi. Les autres, restent à Birkenau, employés au terrassement et à la construction des Blocks.
Aucun des documents sauvés de la destruction ordonnée par les SS peu de temps avant l’évacuation d’Auschwitz, ne nous permet de savoir dans quel camp il est affecté à cette date (quoique sa profession – non utile aux SS- laisse à penser qu’il a été affecté à Birkenau), ni sa date de décès à Auschwitz.
- Note 1 :A partir du 11 juillet 1940, le nouveau régime de Vichy (l’Etat Français) s’acharne sur ceux qui appartiennent à l’« Anti-France » (les Juifs, les étrangers, les communistes, les Francs-maçons etc..) et va promulguer des textes de loi facilitant leur « internement administratif » sur simple décision du préfet (la loi du 3 septembre 1940 proroge le décret du 18 novembre 1939 et prévoit l’internement administratif sans jugement de « tous individus dangereux pour la défense nationale ou la sécurité publique ». Les premiers visés sont les communistes). La police arrête les militants bien connus de ses services (anciens élus et responsables syndicaux) et utilise des fiches de renseignements élaborées avant-guerre sur les agissements des militants communistes et syndicalistes – on le sait notamment grâce aux études réalisées par le Musée de la Résistance à partir des documents des commissariats d’Ivry et de Vitry – (lire Le rôle de la police française Ivry et Vitry, BS1).
- Note 2 : Le camp d’internement administratif de Rouillé (Vienne) est ouvert le 6 septembre 1941, sous la dénomination de «centre de séjour surveillé», pour recevoir 150 internés politiques venant de la région parisienne, c’est-à-dire membres du Parti Communiste dissous et maintenus au camp d’Aincourt depuis le 5 octobre 1940. D’autres venant de prisons diverses et du camp des Tourelles. / In site de l’Amicale de Châteaubriant-Voves-Rouillé.
- Note 3 : Dix-neuf internés de la liste de 187 noms sont manquants le 22 mai. Cinq d’entre eux ont été fusillés (Pierre Dejardin, René François, Bernard Grimbaum, Isidore Pertier, Maurice Weldzland). Trois se sont évadés (Albert Belli, Emilien Cateau et Henri Dupont). Les autres ont été soit libérés, soit transférés dans d’autres camps ou étaient hospitalisés.
Sources
- Fichier national de la Division des archives des victimes des conflits contemporains (DAVCC), Ministère de la Défense, Caen. Fiche individuelle consultée en octobre 1993 au Val de Fontenay et en juillet 2002 à Caen.
- Archives du CDJC (XLI-42).
- Témoignage d’André Deslandes.
- Archives de la Préfecture de police de Paris, Cartons occupation allemande, BA 2374.
- Revue d’Histoire du 14èmearrondissement de Paris, n° 29 (1984-85.
- © Musée d’Auschwitz Birkenau. L’entrée du camp d’Auschwitz 1.
- © Google Maps.
Notice biographique mise à jour en 2010, 2013, 2019 et 2021 à partir d’une notice succincte rédigée en janvier 2001 pour l’exposition organisée par l’association « Mémoire Vive » à la mairie du 20ème arrondissement, par Claudine Cardon-Hamet (docteur en Histoire, auteur des ouvrages :Triangles rouges à Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 dit des « 45000 », éditions Autrement, Paris 2005) et de Mille otages pour Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 dit des « 45000 », éditions Graphein, Paris 1997 et 2000 (épuisé), qui reproduit ma thèse de doctorat (1995). Prière de mentionner ces références (auteur et coordonnées de ce site) en cas de reproduction ou d’utilisation totale ou partielle de cette notice.
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