La Voix Populaire de Clichy, Mars 1941. Le nom de 3 internés de Clichy, dont Pierre Lecomte y est mentionné
Pierre Lecomte : né en 1906 à Moyenmoutier (Vosges) ; domicilié à Clichy-la-Garenne (Seine) ; monteur, cimentier ;  communiste ; arrêté le 25 octobre 1940, condamné à 6 mois de prison (Poissy) ; interné aux camps d’Aincourt, Voves et de Compiègne ; déporté le 6 juillet 1942 à Auschwitz où il meurt.

Pierre Lecomte est né le 28 mars 1906 à Moyenmoutier (Vosges).
Il habite au 1, rue Henri Poincaré à Clichy-la-Garenne (Seine / Hauts-de-Seine) au moment de son arrestation.
Il est le fils de Jeanne Mathieu, tisserande, et de Charles Félix Lecomte, manœuvre.
Ses parents habitent au 4, place du marché à Moyenmoutier.

Le 21 mai 1932,
à Nanterre (Seine / Hauts-de-Seine), à 26 ans, Pierre Lecomte épouse Caroline Pierré, sans profession (37 ans, née à Moyenmoutier le 28 janvier 1895 – divorcée de Fernand Maillard,  elle décédée en 1975 à Saint-Dié).
Le couple habite alors Nanterre au 2, avenue Clémenceau.
Par les listes électorales, on sait qu’il habite Clichy en 1937. Pierre Lecomte exerce la profession de monteur (au camp de Voves, en 1942, il est déclaré comme cimentier, profession qu’il exerce en 1937).

Le 14 juin 1940, les troupes de la Wehrmacht entrent dans Paris, vidée des deux tiers de sa population. La ville cesse d’être la capitale du pays et devient le siège du commandement militaire allemand en France. Toute la banlieue parisienne est occupée les jours suivants. Un premier détachement allemand occupe la mairie de Nanterre et l’état-major s’y installe.
Le 22 juin, l’armistice est signé. Le 10 juillet 1940 le maréchal Pétain, investi des pleins pouvoirs par l’Assemblée nationale, s’octroie le lendemain le titre de « chef de l’Etat français » et lance la « révolution nationale » en rupture avec nombre de principes républicains (confusion des pouvoirs législatifs et exécutifs ; rejet du multipartisme, suppression des syndicats et du droit de grève, antisémitisme d’état…).

Pierre Lecomte est arrêté le 25 octobre 1940 à Clichy par la police française pour « propagande et détention de tracts communistes ». Il est condamné le 28 octobre 1940 par la 12è chambre du Tribunal Correctionnel de la Seine à 6 mois de prison pour infraction au décret du 26 septembre 1939. Il effectue sa peine d’emprisonnement à la Maison centrale de Poissy.

En mars 1941, la Voix Populaire » de Clichy, feuille clandestine ronéotée recto verso, dénonce son arrestation ainsi que celles Constant Launay et  Joseph Tortora (CF montage photo au début de la notice).

Le camp d’Aincourt

A la date d’expiration normale de sa peine de prison, le Préfet le fait interner administrativement le 19 avril 1941 – en application du décret du 18 novembre 1939 – au camp de « Séjour surveillé » d’Aincourt, dans le département de la Seine-et-Oise (aujourd’hui dans le Val-d’Oise), ouvert spécialement, en octobre 1940, pour y enfermer les communistes arrêtés dans la région parisienne par le gouvernement de Vichy. Lire dans le site Le camp d’Aincourt

Le camp de Voves

Pierre Lecomte est ensuite transféré au camp de Voves.
Lire dans le site  :
Le camp de Voves.
Dans deux courriers en date des 6 et 9 mai 1942, le chef de la Verwaltungsgruppe de la Feldkommandantur
d’Orléans envoie au Préfet de Chartres deux listes d’internés communistes du camp de Voves à transférer au camp d’internement de Compiègne à la demande du commandement militaire en France. Pierre Lecomte figure sur la première liste.
Sur les deux listes d’un total de cent neuf internés, 87 d’entre eux seront déportés à Auschwitz.
Le directeur du camp a fait supprimer toutes les permissions de visite « afin d’éviter que les familles assistent au prélèvement des 81 communistes pris en charge par l’armée d’occupation ». La prise en charge par les gendarmes allemands s’est effectuée le 10 mai 1942 à 10 h 30 à la gare de Voves. Il poursuit : « Cette ponction a produit chez les internés présents un gros effet moral, ces derniers ne cachent pas que tôt ou tard ce sera leur tour. Toutefois il est à remarquer qu’ils conservent une énergie et une conviction extraordinaire en ce sens que demain la victoire sera pour eux ». Il indique que « ceux qui restèrent se mirent à chanter la «Marseillaise» et la reprirent à trois reprises ». Le directeur du camp a fait supprimer auparavant toutes les permissions de visite « afin d’éviter que les familles assistent au prélèvement des 81 communistes pris en charge par l’armée d’occupation ».

Pierre Lecomte est interné au camp allemand de Royallieu (Frontstalag 122) à Compiègne, le 10 mai 1942, en vue de sa déportation comme otage.
Depuis ce camp administré par la Wehrmacht, il va être déporté à destination d’Auschwitz. Pour comprendre la politique de l’Occupant qui mène à sa déportation, on lira les deux articles du site qui exposent les raisons des internements, des fusillades et de la déportation : La politique allemande des otages (août 1941-octobre 1942) et «une déportation d’otages».

Depuis le camp de Compiègne, Pierre Lecomte est déporté à Auschwitz dans le convoi du 6 juillet 1942.

Cf Article du site : Les wagons de la Déportation. 

Ce convoi est composé au départ de Compiègne, de 1175 hommes (1100 « otages communistes »  jeunes communistes, anciens responsables politiques et élus du Parti communiste, syndicalistes de la CGT et délégués du personnel d’avant-guerre, militants et syndicalistes clandestins, résistants – de cinquante  « otages juifs » et de quelques « droits communs »). Il faisait partie des mesures de terreur allemandes destinées à combattre, en France, les judéo-bolcheviks responsables, aux yeux de Hitler, des actions armées organisées par le parti communiste clandestin contre des officiers et des soldats de la Wehrmacht, à partir d’août 1941.
Lire dans le site le récit des deux jours du transport : 
Compiègne-Auschwitz : 6-8 juillet 1942.
Sur les 1175 otages partis de Compiègne le 6 juillet 1942, 1170 sont présents à l’arrivée du train en gare d’Auschwitz le 8 juillet 1942.
Ces derniers sont enregistrés et photographiés au 
Stammlager d’Auschwitz (camp souche ou camp principal, dénommé en 1943 Auschwitz-I) entre les numéros « 45 157 » et « 46 326 », d’où le nom de « convoi des 45 000 », sous lequel les déportés du camp désignaient ce convoi. Ce matricule – qu’il doit apprendre à dire en allemand et en polonais à toute demande des Kapos et des SS – sera désormais sa seule identité.
Lire dans le site :
Le KL Auschwitz-Birkenau.

Entrée du camp d’Auschwitz

Son numéro d’immatriculation à Auschwitz n’est pas connu.
Lire dans le site le récit de leur premier jour à Auschwitz : L’arrivée au camp principal, 8 juillet 1942. et 8 juillet 1942 : Tonte, désinfection, paquetage, « visite médicale ».
Après l’enregistrement, il passe la nuit au Block 13 (les 1170 déportés du convoi y sont entassés dans deux pièces). Le 9 juillet tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau, situé à 4 km du camp principal. Le 13 juillet il est interrogé sur sa profession. Les spécialistes dont les SS ont besoin pour leurs ateliers sont sélectionnés et vont retourner à Auschwitz I (approximativement la moitié du convoi. Les autres, restent à Birkenau, employés au terrassement et à la construction des Blocks.

On ignore la date de décès de Pierre Lecomte à Auschwitz. Dans les années d’après-guerre, l’état civil français a fixé la date de son décès au 15 août 1942, vraisemblablement sur la base d’une déclaration de René Petitjean, un des rescapés de Clichy.
Son nom est inscrit sur le monument aux morts, place de la République (aujourd’hui place François Mitterrand) à Clichy.

Sources

  • Bureau des archives des victimes des conflits contemporains (DAVCC) Archives de Caen du ministère de la Défense).
  • Journal officiel 23 mars 1994 page 4416
  • Archives de Clichy (92).
  • Archives de Nanterre, registre des mariages.
  • Archives de la Préfecture de police. Fiche individuelle Poissy-Aincourt BA 2374.
  • Camp d’Aincourt. Photo in «Aincourt, le camp oublié» de Roger Colombier paru aux éditions Le Temps des Cerises.
  • Camp de Voves

Notice biographique (complétée en 2016, 2019 et 2021), réalisée initialement pour l’exposition sur les «45 000» de Gennevilliers 2005, par Claudine Cardon-Hamet, docteur en Histoire, auteur des ouvrages : Mille otages pour Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 dit des « 45000 », éditions Graphein, Paris 1997 et 2000 (épuisé) et de Triangles rouges à Auschwitz, le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, Paris 2005. Prière de mentionner les références (auteur et coordonnées du blog) en cas de reproduction ou d’utilisation totale ou partielle de cette notice biographique. Pour la compléter ou la corriger, vous pouvez me faire un courriel à deportes.politiques.auschwitz@gmail.com 

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *