André Pradelles © dossier au DAVCC. D.R.
A Auschwitz le 8 juillet 1942

Matricule « 46 011 » à Auschwitz

André Pradelles : né en 1920 à Albi (Tarn) ; domicilié à Paris (12ème) ; jeune communiste ; arrêté le 24 janvier 1941 ; arrêté le 1er novembre 1941 ; interné aux camps de Rouillé et de Compiègne ; déporté le 6 juillet 1942 à Auschwitz où il meurt. 

André Pradelles est né le 1er novembre 1920 au 47, rue de Cramaux, à Albi (Tarn). Il habite au 44, boulevard de Picpus
à Paris (12ème) au moment de son arrestation. Il vient y habiter après 1936. C’est également l’adresse de Madame Guilbert, qu’il donne à l’administration pénitentiaire pour sa correspondance.
Il est le fils d’Ernestine Enjalbert, 19 ans, sans profession et de René, Clément Pradelles, 30 ans, manœuvre, son époux.
Il est tourneur et mesure 1m 65 (fiche des ACVG).

Le 14 juin 1940, les troupes de la Wehrmacht entrent dans Paris, vidée des deux tiers de sa population. La ville cesse d’être la capitale du pays et devient le siège du commandement militaire allemand en France. Le 22 juin, l’armistice est signé. Le 10 juillet 1940 le maréchal Pétain, investi des pleins pouvoirs par l’Assemblée nationale, s’octroie le lendemain le titre de « chef de l’Etat français » et lance la « révolution nationale » en rupture avec nombre de principes républicains (confusion des pouvoirs législatifs et exécutifs ; rejet du multipartisme, suppression des syndicats et du droit de grève, antisémitisme d’état…).

André Pradelles est arrêté le 1er novembre 1941 par la police française pendant un rassemblement d’une quinzaine de membres des Jeunesses communistes clandestines devant la tombe de Paul Vaillant-Couturier, au cimetière du Père Lachaise, manifestation placée « sous le signe
de l’antifascisme, commémorant la mort d’Henri Barbusse au cimetière du Père-Lachaise
».
En même temps que lui sont arrêtés Gaston Vergne et Henri Migdal (c’est pour eux deux la deuxième arrestation).
Le 2 novembre 1941, François Bard, préfet de Paris décide de « l’internement  administratif » d’André Pradelles, en application de la Loi du 3 septembre 1940 (1). après 3 jours passés au Dépôt de la Préfecture de police, il est  transféré au camp de « Séjour surveillé » de Rouillé (2) le 5 novembre avec un groupe de 57 autres militants communistes parisiens.

Liste du Camp de Rouillé (montage P. Cardon)

Début mai 1942, les autorités allemandes adressent au commandant du camp de Rouillé une liste de 187 internés qui doivent être transférés au camp allemand de Compiègne (le Frontstallag 122).
Le nom d’André Pradelles (n° 150 de la liste) y figure et c’est au sein d’un groupe de 168 internés (3) qu’il arrive au camp allemand de Royallieu à Compiègne (le Frontstalag 122) le 22 mai 1942. La
plupart d’entre eux seront déportés à Auschwitz dans le convoi du 6 juillet 1942.
A Compiègne, André Pradelles reçoit le matricule n° « 5936 ». Il est affecté au bâtiment A7 avec Fernand Blanchard, membre des JC du 11ème.
Depuis ce camp administré par la Wehrmacht, il va être déporté à destination d’Auschwitz. Pour comprendre la politique de l’Occupant qui mène à sa déportation, on lira les deux articles du site qui exposent les raisons des internements, des fusillades et de la déportation : La politique allemande des otages (août 1941-octobre 1942) et «une déportation d’otages».

Depuis le camp de Compiègne, André Pradelles est déporté à Auschwitz dans le convoi du 6 juillet 1942.

Cf Article du site : Les wagons de la Déportation. 

Ce convoi est composé au départ de Compiègne, de 1175 hommes (1100 « otages communistes » – jeunes communistes, anciens responsables politiques et élus du Parti communiste, syndicalistes de la CGT et délégués du personnel d’avant-guerre, militants et syndicalistes clandestins, résistants – de cinquante  « otages juifs » et de quelques « droits communs »). Il faisait partie des mesures de terreur allemandes destinées à combattre, en France, les judéo-bolcheviks responsables, aux yeux de Hitler, des actions armées organisées par le parti communiste clandestin contre des officiers et des soldats de la Wehrmacht, à partir d’août 1941. Lire dans le site le récit des deux jours du transport : Compiègne-Auschwitz : 6-8 juillet 1942. Sur les 1175 otages partis de Compiègne le 6 juillet 1942, 1170 sont présents à l’arrivée du train en gare d’Auschwitz le 8 juillet 1942. Ces derniers sont enregistrés et photographiés au Stammlager d’Auschwitz (camp souche ou camp principal, dénommé en 1943 Auschwitz-I) entre les numéros « 45157 » et « 46326 », d’où le nom de « convoi des 45000 », sous lequel les déportés du camp désignaient ce convoi. Ce matricule – qu’il doit apprendre à dire en allemand et en polonais à toute demande des Kapos et des SS – sera désormais sa seule identité. Lire dans le site : Le KL Auschwitz-Birkenau

On ignorait son numéro d’immatriculation à son arrivée à Auschwitz le 8 juillet 1942 et le numéro «46011» inscrit dans mes trois ouvrages sur le convoi du 6 juillet 1942 (éditions de 1997 et 2000) correspondait à une tentative de reconstitution de la liste du convoi par matricules. Ce numéro a pu être validé en comparaison avec une photo d’avant guerre figurant dans son dossier au DAVCC.
Le déporté portant le matricule « 46 011 » photographié le 8 juillet 1942 est sans conteste André Pradelles (4).
Lire dans le site le récit de leur premier jour à Auschwitz : L’arrivée au camp principal, 8 juillet 1942. et 8 juillet 1942 : Tonte, désinfection, paquetage, « visite médicale ».  Après l’enregistrement, il passe la nuit au Block 13 (les 1170 déportés du convoi y sont entassés dans deux pièces). Le 9 juillet tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau, situé à 4 km du camp principal. Le 13 juillet il est interrogé sur sa profession. Les spécialistes dont les SS ont besoin pour leurs ateliers sont sélectionnés et vont retourner à Auschwitz I (approximativement la moitié du convoi. Les autres, restent à Birkenau, employés au terrassement et à la construction des Blocks.

Aucun des documents sauvés de la destruction ordonnée par les SS peu de temps avant l’évacuation d’Auschwitz, ne nous permet de savoir dans quel camp André Pradelles est affecté à cette date, ni sa date de décès.

Le 44, boulevard de Picpus

Une plaque à sa mémoire a été apposée sur le 44, boulevard de Picpus.

Un arrêté ministériel du 3 novembre 1997 paru au Journal Officiel du 27 janvier 1998 porte apposition de la mention «Mort en déportation» sur les actes et jugements déclaratifs de décès d’André Pradelles. Le témoignage de compagnons de déportation a incité le Ministère à inscrire une date probable de décès « mort le 30 septembre 1942 à Auschwitz ».

Le 3 juin 1946, la section du Parti communiste du 17ème arrondissement émet un certificat pour sa famille afin d’obtenir son homologation comme « Déporté politique » : « a participé dès juillet 1940 à la lutte contre l’occupant« .

  • Note 1 : La loi du 3 septembre 1940 proroge le décret du 18 novembre 1939 et prévoit l’internement de « tous individus dangereux pour la défense nationale ou la sécurité publique« . Les premiers visés sont les communistes.
  • Note 2 : Le camp d’internement administratif de Rouillé (Vienne) est ouvert le 6 septembre 1941, sous la dénomination de «centre de séjour surveillé», pour recevoir 150 internés politiques venant de la région parisienne, c’est-à-dire membres du Parti Communiste dissous et maintenus au camp d’Aincourt depuis le 5 octobre 1940. D’autres venant de prisons diverses et du camp des Tourelles. / In site de l’Amicale de Châteaubriant-Voves-Rouillé.
  • Note 3 : Dix-neuf internés de la liste de 187 noms sont manquants le 22 mai. Cinq d’entre eux ont été fusillés (Pierre Dejardin, René François,
    Bernard Grimbaum, Isidore Pertier, Maurice Weldzland). Trois se sont évadés (Albert Belli, Emilien Cateau et Henri Dupont). Les autres ont été soit
    libérés, soit transférés dans d’autres camps ou étaient hospitalisés.
  • Note 4 : 522 photos d’immatriculation des « 45000 » à Auschwitz ont été retrouvées. A la Libération elles ont été conservées dans les archives du musée d’Auschwitz. Des tirages de ces photos ont été remis à André Montagne, alors vice-président de l’Amicale d’Auschwitz, qui me les a confiés.

Sources

  • Fichier national de la Division des archives des victimes des conflits contemporains (DAVCC), Ministère de la Défense, Caen (ex ACVG). Fiche individuelle consultée en octobre 1993.
  • Listes Rouillé : Archives de la Préfecture de police de Paris, Cartons occupation allemande, BA 2374.
  • Listes Rouillé © Mémorial de la Shoah, Centre de documentation juive contemporaine (CDJC). Paris IVème.
  • Listede noms de camarades du camp de Compiègne, collectés avant le départ du convoi et transmis à sa famille par Georges Prévoteau
    de Paris XVIIIème, mort à Auschwitz le 19 septembre 1942.
  • Listes Rouillé : Archives de la Préfecture de police de Paris, Cartons occupation allemande, BA 2374.
  • Listes départ du 22 mai 1942, Rouillé © Mémorial de la Shoah, Centre de documentation juive contemporaine (CDJC). Paris IVème.
  • Photo d’immatriculation à Auschwitz : Musée d’état Auschwitz-Birkenau / © collection André Montagne.
  • Archives en ligne de Paris. Recensement du boulevard de Picpus, 1936.
  • Plaque Paris © Département AERI de la Fondation de la Résistance

Notice biographique mise à jour en 2010, 2013, 2019 et 2021 à partir d’une notice succincte rédigée en janvier 2001 pour l’exposition organisée par l’association « Mémoire Vive » à la mairie du 20ème arrondissement, par Claudine Cardon-Hamet (docteur en Histoire, auteur des ouvrages :Triangles rouges à Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 dit des « 45000 », éditions Autrement, Paris 2005) et de Mille otages pour Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 dit des « 45000 », éditions Graphein, Paris 1997 et 2000 (épuisé), qui reproduit ma thèse de doctorat (1995). Prière de mentionner ces références (auteur et coordonnées de ce site) en cas de reproduction ou d’utilisation totale ou partielle de cette notice. Pour la compléter ou la corriger, vous pouvez me faire un courriel à deportes.politiques.auschwitz@gmail.com 

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