Matricule « 45 964 » à Auschwitz
Henri Pernot : né en 1902 à Couillet, commune de Charleroi (Belgique) ; domicilié à Epinay-sur-Seine (Seine) ; bourrelier, puis gazier, chauffeur de chaudière ; cégétiste et communiste ; arrêté le 3 septembre 1941 ; interné à la prison du Cherche Midi, aux Tourrelles, au Fort de Romainville, puis camp de Compiègne ; déporté le 6 juillet 1942 à Auschwitz où il meurt.
Henri Pernot est né le 15 avril 1902 à Couillet, commune de Charleroi (Belgique). Il est français par option de filiation.
Il habite au 58, chemin du halage à Epinay-sur-Seine (Seine / Seine-Saint-Denis) au moment de son arrestation.
Il est le fils de Marie Joseph Berger (née en 1873) et de Joseph Eugène Pernot (1874-1920), bonnetier.
Il a un frère cadet Gaston, Eugène, né en 1903.
Il épouse Marie Laz, le 13 novembre 1920 à Saint-Denis (Seine / Seine-Saint-Denis). Née le 3 septembre 1904 à Laz (Finistère), elle est la fille de Joseph Laz et de Corentine Henaff. Le jeune couple a deux enfants : Georges, Henri, qui naît le 21 juillet 1921 (décédé en 1974), et Henri, qui naît le 20 septembre 1924 (décédé en 1986), tous deux sont nés à Paris 14è. Il ont également eu une fille, Ginette, née en 1927, qui est décèdée un an après.
Bourrelier de profession, Henri Pernot travaille en 1926 comme chauffeur de chaudière à l’usine à gaz de Gennevilliers (Seine / Hauts-de-Seine), appartenant à la Société ECFM (En 1904, la société d’Eclairage, Chauffage et Force Motrice installe une centrale gazière à Gennevilliers pour assurer la distribution du gaz dans la banlieue de Paris. Avec d’énormes installations, elle est vite la plus puissante d’Europe et emploie, à ses débuts, 2000 ouvriers.
Un autre militant communiste d’Epinay, Stanislas Villiers y travaille également et sera déporté dans le même convoi que lui.
Il est adhérent à « La Jeunesse Sportive Ouvrière d’Épinay », qui deviendra après guerre « La Jeunesse Sportive d’Épinay-sur-Seine » et fusionnera en 1965 avec le CSME (Club Sportif Multisection d’Epinay-sur-Seine). Lire dans le site : 60 déportés sportifs, joueurs, animateurs et dirigeants de clubs avant-guerre.
Marie Pernot est infirmière aux « Enfants assistés » ou « Pupilles de l’Etat »
Henri Pernot est adhérent à la CGT et membre du Parti communiste, rayon de Saint-Ouen de la région Paris-Nord du Parti communiste (fiche de police). Ce que savait André Clipet « il est membre du Parti communiste Français » et c’est certainement la cause de son arrestation, ce que confirme son épouse (sur sa fiche au DAVCC).
Le 14 juin 1940, l’armée allemande entre par la Porte de la Villette dans Paris, vidée des deux tiers de sa population, le 14 juin. La ville cesse d’être la capitale du pays et devient le siège du commandement militaire allemand en France. Les troupes allemandes défilent sur les Champs-Élysées. Elles ont occupé une partie de la banlieue-est la veille, puis la totalité les jours suivants. Le 22 juin, l’armistice est signé. Le 10 juillet 1940 le maréchal Pétain, investi des pleins pouvoirs par l’Assemblée nationale, s’octroie le lendemain le titre de « chef de l’Etat français » et lance la « révolution nationale » en rupture avec nombre de principes républicains (confusion des pouvoirs législatifs et exécutifs ; rejet du multipartisme, suppression des syndicats et du droit de grève, antisémitisme d’état…).
Henri Pernot est arrêté le 3 septembre 1941 par des militaires allemands à son domicile. Il est écroué à la prison du Cherche-Midi. Puis à la caserne des Tourelles et ensuite au Fort de Romainville (matricule 363), le 10 octobre 1941.
Le 30 octobre 1941, il est remis aux autorités allemandes à leur demande, qui le transfèrent au camp allemand de Royallieu à Compiègne (le Fronstalag 122). Ce même jour 15 militants communistes originaires de Seine Inférieure sont également transférés au Fronstalag 122 depuis Rouen.
A Compiègne, il reçoit le matricule « 2112 ». Il participe aux actions collectives organisées par la Résistance du camp pour maintenir le moral des internés et venir en aide aux plus démunis. Sur la vie au camp de Royallieu lire dans ce site La solidarité au camp allemand de Compiègne. et Le « Comité » du camp des politiques à Compiègne et 22 juin 1942 : évasion de 19 internés
Depuis ce camp administré par la Wehrmacht, il va être déporté à destination d’Auschwitz. Pour comprendre la politique de l’Occupant qui mène à sa déportation, on lira les deux articles du site qui exposent les raisons des internements, des fusillades et de la déportation : La politique allemande des otages (août 1941-octobre 1942) et «une déportation d’otages».
Depuis le camp de Compiègne, Henri Pernot est déporté à Auschwitz dans le convoi du 6 juillet 1942.
Cf Article du site : Les wagons de la Déportation.
Ce convoi est composé au départ de Compiègne, de 1175 hommes (1100 « otages communistes » – jeunes communistes, anciens responsables politiques et élus du Parti communiste, syndicalistes de la CGT et délégués du personnel d’avant-guerre, militants et syndicalistes clandestins, résistants – de cinquante « otages juifs » et de quelques « droits communs »). Il faisait partie des mesures de terreur allemandes destinées à combattre, en France, les judéo-bolcheviks responsables, aux yeux de Hitler, des actions armées organisées par le parti communiste clandestin contre des officiers et des soldats de la Wehrmacht, à partir d’août 1941. Lire dans le site le récit des deux jours du transport : Compiègne-Auschwitz : 6-8 juillet 1942.
Sur les 1175 otages partis de Compiègne le 6 juillet 1942, 1170 sont présents à l’arrivée du train en gare d’Auschwitz le 8 juillet 1942.
Ces derniers sont enregistrés et photographiés au Stammlager d’Auschwitz (camp souche ou camp principal, dénommé en 1943 Auschwitz-I) entre les numéros « 45 157 » et « 46 326 », d’où le nom de « convoi des 45 000 », sous lequel les déportés du camp désignaient ce convoi. Ce matricule – qu’il doit apprendre à dire en allemand et en polonais à toute demande des Kapos et des SS – sera désormais sa seule identité.
Lire dans le site : Le KL Auschwitz-Birkenau.
Henri Pernot est enregistré à son arrivée à Auschwitz le 8 juillet 1942 sous le numéro «45 964» selon la liste par matricules du convoi établie en 1974 par les historiens polonais du Musée d’Etat d’Auschwitz (et © Musée d’Auschwitz-Birkenau). Ce matricule – qu’il doit apprendre à dire en allemand et en polonais – sera désormais sa seule identité pour ses gardiens.
Sa photo d’immatriculation à Auschwitz n’a pas été retrouvée parmi celles que des membres de la Résistance intérieure du camp avaient camouflées pour les sauver de la destruction, ordonnée par les SS peu de temps avant l’évacuation d’Auschwitz.
Lire dans le site le récit de leur premier jour à Auschwitz : L’arrivée au camp principal, 8 juillet 1942. et 8 juillet 1942 : Tonte, désinfection, paquetage, « visite médicale ».
Après l’enregistrement, il passe la nuit au Block 13 (les 1170 déportés du convoi y sont entassés dans deux pièces). Le 9 juillet tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau (Brzezinka), situé à 4 km du camp principal. Le 13 juillet il est interrogé sur sa profession. Les spécialistes dont les SS ont besoin pour leurs ateliers sont sélectionnés et vont retourner à Auschwitz I (approximativement la moitié du convoi. Les autres, restent à Birkenau, employés au terrassement et à la construction des Blocks.
Aucun des documents sauvés de la destruction ordonnée par les SS peu de temps avant l’évacuation d’Auschwitz, ne nous permet de savoir dans quel camp il est affecté à cette date, ni sa date de décès.
Le 19 septembre 1946, le ministère des Anciens combattants a fixé fictivement celle-ci au 1er décembre 1942 à Auschwitz à partir du témoignage d’un rescapé, Henri Charlier. Un arrêté ministériel du 3 janvier 1997 paru au Journal Officiel du 7 mars 1997 porte apposition de la mention «Mort en déportation» sur ses actes et jugements déclaratifs et reprend la date fictive du 1er décembre 1942 à Auschwitz.
Henri Pernot a été déclaré « Mort pour la France » le 16 décembre 1947 et homologué « Déporté politique » le 4 mai 1954. La carte de Déporté Politique a été délivrée à Henri Pernot, domicilié à Clichy (Seine), son fils (précision apportée par son arrière petite-fille).
Son nom est inscrit sur le monument aux « Morts pour la France 1939-1945 » de la commune d’Epinay, square du 11 novembre 1918.
Selon André Clipet, sa femme se présenta aux élections municipales d’après-guerre sur une liste gaulliste.
5 autres spinassiens ont été déportés à Auschwitz dans le même convoi : René Dufour, Fernand Godefroy, Ernest Gourichon, Maurice Sigogne, Stanislas Villiers
Sources
- Fichier national de la Division des archives des victimes des conflits contemporains (DAVCC), Ministère de la Défense, Caen.
Fiche individuelle consultée en octobre 1992. - André Clipet (1904-1999), militant communiste d’Epinay, membre du Comité local de Libération a connu les 6 déportés d’Epinay et a rédigé des notes manuscrites pour chacun d’eux, transmises le 21 janvier 1988 à André Montagne par Mme Ghislaine Villiers, fille de Stanislas Villiers, un des 6 déportés. Spinassiens. André Clipet est également l’auteur d’un ouvrage, Épinay-sur-Seine, son histoire, impr. Boudin, Paris, 1970.
- Liste des déportés d’Epinay (mairie, 29 février 1945).
- Liste (incomplète) par matricule du convoi du 6 juillet 1942 établie en 1974 par les historiens du Musée d’Etat d’Auschwitz-Birkenau (Bureau des archives des victimes des conflits contemporains (Ministère de la Défense, Caen) indiquant généralement la date de décès au camp.
- Archives de la Préfecture de police de Paris, dossier individuel de Henri Pernot (c.36472).
- © Dessin de Franz Reisz, in « Témoignages sur Auschwitz », ouvrage édité par l’Amicale des déportés d’Auschwitz (1946).
- Archives en ligne de Couillet (Charleroi-Hainaut).
- Mail de son arrière petite fille, Catherine Pernot.
Notice biographique rédigée à partir d’une notice succincte pour le 60è anniversaire du départ du convoi des « 45 000 », brochure répertoriant les “45 000” de Seine-Saint-Denis, éditée par la Ville de Montreuil et le Musée d’Histoire vivante, 2002, complétée en novembre 2007 (2014, 2019, 2020, 2022 et 2024) par Claudine Cardon-Hamet (docteur en Histoire, auteur des ouvrages : Mille otages pour Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 dit des « 45000 », éditions Graphein, Paris 1997 et 2000 (épuisé) et de Triangles rouges à Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 dit des « 45 000 », éditions Autrement, Paris 2005). Prière de mentionner ces références (auteur et coordonnées de ce site) en cas de reproduction ou d’utilisation totale ou partielle de cette notice biographique.
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