Matricule «46.209» à Auschwitz

Albert Watel : né en 1893 à Lille (Nord) ; domicilié à  l’Haÿ-les-Roses (Seine / Val-de-Marne) ; électricien à la CPDE ; 3ème adjoint communiste à  l’Haÿ ;  arrêté le 17 mars 1940, prison de la Santé, évacué en juin 1940, colonne de Cépoy, transféré comme « préventionnaire » au camp de Gurs ; non lieu le 1940 ; arrêté le 22 juin 1940 ; interné au camp de Compiègne ; déporté le 6 juillet 1942 à Auschwitz où il meurt le 26 août 1942.

Albert Watel est né le 29 novembre 1893 à Lille (Nord). Il habite au 11, rue de Vitry à l’Haÿ-les-Roses (aujourd’hui avenue du Général de Gaulle, Seine / Val-de-Marne) au moment de son arrestation.
Il est le fils de Marie Joséphine Danel, 34 ans et de Jules, Joseph Watel, 41 ans, mouleur, son époux. Ses parents, tous deux natifs d’Arras, habitent à sa naissance au 32, boulevard de l’Usine à Lille.
Son registre matricule militaire indique qu’il habite Lille au 140, rue du Long Pot au moment
du conseil de révision. Il mesure 1m 63, a les cheveux noirs et les yeux grisverdâtres, le front large et haut, le nez ordinaire et long, et le visage ovale plein. Il a un niveau d’instruction « n°3 » pour l’armée (sait lire, écrire et compter, instruction
primaire développée
). Il a le permis de conduire les motocyclettes.
Il effectue son service militaire à partir du 28 novembre 1913 au premier dépôt des équipages de la flotte à Cherbourg. Il obtient son brevet provisoire de deuxième classe électricien, le 1er janvier 1914. Lorsqu’est décrétée la mobilisation générale du 1er août 1914, il est mobilisé jusqu’à la fin de la guerre. Il fait partie des trois classes d’appelés qui resteront le plus longtemps sous les drapeaux (5 ans et 9 mois).
Il est mis en congé de démobilisation le 10 août 1919, « certificat de bonne conduite accordé », et se retire à Paris, rue Bobillot (13ème).
Le 26 décembre 1917, Albert Watel épouse Joséphine Dolodolero à Paris 13ème.
Le couple a six enfants (Albertine qui naît à Paris en 1919, Paul en 1920 (1), Jacqueline en 1925, Claudine en 1930 à L’Haÿ, Yvette et Pierre). Albert Watel est embauché comme électricien à partir du 18 août 1919.
Le 11 mai 1929, la famille Watel emménage 7, route de Vitry à l’Haÿ-les-Roses. En 1930, il s’inscrit sur les listes électorales de la ville.
En 1931, Albert Watel est classé « Affecté spécial » par le Préfet maritime, au titre de la CPDE (Compagnie parisienne de distribution d’électricité), 23 rue de Vienne à Paris (8ème) en qualité d’électricien de tableau (l’affecté spécial est mobilisé sur son poste de travail en cas de conflit). En 1931, il est au chômage selon le registre des recensements de l’Haÿ.

Lors des élections municipales du 12 mai 1935, il est élu avec la liste communiste dirigée par Raymond Baudin alors secrétaire permanent appointé du Secours rouge international (SRI)L’assemblée municipale désigna Raymond Baudin aux fonctions de maire (Le Maitron).
Albert Watel devient son 3ème adjoint.
En 1936, la famille a déménagé au 11, route de Vitry. Albert Watel est électricien à la CPDE (Compagnie Parisienne de Distribution d’Electricité). Il est membre du Parti communiste. Militant
syndical, il côtoie François Le Bihan à la CPDE (témoignage de Germaine Le Bihan). Ce dernier qui a le même âge que lui est membre de la Commission exécutive de la Fédération CGTU des Services publics et de l’Éclairage.
Albertine Watel est dactylo au Kremlin-Bicêtre et Paul Watel est apprenti à Paris.

Le Populaire, février 1940

Le conseil de préfecture de la Seine suspend le conseil municipal élu à l’automne 1939 et déchoit de leur mandat le 15 février 1940 les conseillers municipaux qui n’ont pas renié le Parti communiste (2), dont le maire et Albert Watel.
Son registre matricule militaire n’indique pas qu’Albert Watel ait été mobilisé à la déclaration de guerre en 1939. Si on sait que sa classe la 1913 l’est pendant une courte période, il n’a sans doute pas été mobilisé en 1939 :  père de 6 enfants il a été affecté à la dernière classe de mobilisation de la deuxième réserve, la classe1901. « ils attendent dans la dernière classe de la deuxième réserve le moment où leur classe d’incorporation est libérée de toute obligation militaire ».
Le maire Raymond Baudin (classe 1918) est mobilisé au parc des chantiers de Versailles (22ème section de COA, approvisionnement de la capitale (Le Maitron). Le Général Héring, gouverneur militaire de Paris, a engagé la lutte contre les « défaitistes de tous bords, et plus particulièrement, contre les communistes dont l’activité, fomentée par l’argent étranger, constitue un véritable danger pour la Défense Nationale ». Marcel Cambon,
commissaire de police de Gentilly s’illustre particulièrement dans cette lutte anticommuniste. Il fait surveiller les anciens élus et militants communistes de son secteur dont l’Haÿ-les-Roses.
A la suite de ces surveillances, l’ancien maire Raymond Baudin est arrêté le 6 mars 1940.  Revenu à son domicile le 17 mars 1940, il fut l’objet d’une étroite surveillance policière, car « peu après son retour, il a été soupçonné de tenir des réunions avec d’autres militants communistes, mais ce fait n’a pu
être confirmé
 »(Le Maitron citant les RG).

L’Est républicain du 18 mars 1940
L’Eclair du 19 mars 1940

Albert Watel est soumis à la même surveillance en mars 1940, comme plusieurs autres L’Haÿssiens.
Après la dissolution du Parti communiste (26 septembre 1939) et déchéance des élus communistes (janvier / février 1940), la répression à l’encontre des militant-e-s et ex-élus communistes soupçonné-e-s ou convaincu-e-s de poursuivre une activité clandestine est importante. Le gouvernement fait largement diffuser les arrestations de communistes dans la presse nationale : ci-contre dans l’Est Républicain du 18 mars 1940, l’annonce de 33 arrestations de militants et ex-élus communistes, la saisie de 2 tonnes de tracts imprimés
et de matériel de TSF. Le journal insiste lourdement sur « les opérations fructueuses conduites par le ministère de l’intérieur, sous l’impulsion énergique de son chef A. Sarrault ».
Le journal l’Eclair insiste sur la collaboration des brigades de la Sureté nationale de Paris (1ère), Orléans (5ème) et Dijon (11ème) dans une série d’arrestations dont l’enquête qui
les précèdent commence en Indre-et-Loire et à Saint-Nazaire, puis en région parisienne.
A la lecture des articles, il est clair toutefois que les militants de la région parisienne mentionnés, dont ceux de l’Haÿ-les-Roses, parmi lesquels Maurice Baudin et son épouse, Raymond Boudou et Albert Watel, n’ont pas de lien avec ceux de Loire inférieure ou Dijon… et que les titres des articles visent l’effet d’annonce, additionnant les arrestations qui se montent à 33 dans les trois régions.
Albert Watel est  arrêté une première fois dans ce cadre le 17 mars 1940 par la 1ère  brigade de police mobile du commissaire Delrieu. L’ancien maire de l’Haÿ les Roses, Maurice Baudin et son épouse, d’autres L’Haysiens dont Raymond Boudou, qui sera lui aussi déporté à Auschwitz le 6 juillet
1942, sont également arrêté à cette date.
Albert Watel fait l’objet d’un mandat de dépôt et il est écroué à la Santé pour « fabrication et distribution de tracts antinationaux ». Germaine Le Bihan dont le mari a été arrêté un mois plus tard, mentionne leur présence commune à la Santé. « Albert Watel fut transféré le 11 juin 1940 au camp de Gurs. Ayant bénéficié d’un non-lieu le 21 octobre suivant, il revint en région parisienne et reprit ses activités clandestines« . Le Maitron.
En juin 1940, 584 détenus « politiques » composent à près de 47 % les effectifs de la « prison militaire de Paris ». L’instruction d’Albert Watel et de ses camarades est diligentée par le tribunal militaire de Paris (commandant Vimard, juge d’instruction au 2ème tribunal militaire et juge Benoit-Stain).

L’évacuation de la Santé à Gurs

Mais la Prison militaire de Paris (les prisons de la Santé et du Cherche-Midi) est évacuée sous escorte armée entre le 10 et le 12juin 1940, sur ordre de Georges Mandel, ministre de l’Intérieur. Ils sont 1865 au départ de Paris. On lira en note le rapport du capitaine Kersaudy, commandant la prison militaire de Paris qui résume cette évacuation (3).
Le repli  a pour but de transférer les détenus « dangereux » de la « prison militaire de Paris » au camp
de Gurs (arrondissement d’Oloron) puis à Mauzac.
Albert Watel comme Raphaël Manello de Puteaux est évacué par autobus de la TCRP, le 11 juin 1940. A Orléans, les gardiens du convoi apprennent que la maison d’arrêt est bondée ; le convoi repart donc jusqu’au camp des Grouës, proche de la gare des Aubrais, où 825 prisonniers, dont Albert Watel, sont débarqués (4). Prisonniers et gardiens y resteront quatre jours, du 11 au 15 juin.

Le 14 juin 1940 les troupes de la Wehrmacht entrent dans Paris, vidée des deux tiers de sa population. La ville cesse d’être la capitale du pays et devient le siège du commandement militaire allemand en France. Les troupes allemandes occupent toute la banlieue parisienne et les départements voisins les jours suivants.  L’armistice est signé le 22 juin. Le 10 juillet 1940 le maréchal Pétain, investi des pleins pouvoirs par l’Assemblée nationale, abolit la République et s’octroie le lendemain le titre de « chef de l’Etat français ». Il lance la « Révolution nationale » en rupture avec nombre de principes républicains (confusion des pouvoirs législatifs et exécutifs ; rejet du multipartisme, suppression des syndicats et du droit de grève, antisémitisme d’état…).

Le séjour au camp des Grouës est marqué par les raids incessants de l’aviation allemande qui terrorisent détenus et gardiens. C’est pourquoi, le 15 juin, tout le monde repart. Mais cette fois, plus question d’autobus, le transfert se fera à pied et de nuit. Ils rejoignent le lendemain à Jouy-le-Potier des camions qui les conduisent à la base aérienne 127 d’Avord, près de Bourges. Ils y retrouvent un autre groupe d’Ile de France venu du camp de Cépoy, près de Montargis (Loiret). (…). Gardiens et détenus n’y restent que quelques heures, puis repartent en autobus jusqu’à Bordeaux, Mont-de-Marsan, Orthez et Gurs. Ils arrivent au camp en deux groupes, les 21 et 23 juin. Ils y resteront plusieurs mois, jusqu’au début de l’hiver (L’histoire du camp de Gurs, in©Amicale du camp de Gurs).

« L’ilôt B » à Gurs où est interné Albert Watel

Albert Watel est interné à « l’îlot B », composé d’une vingtaine de baraques, regroupant les « Politiques », avec une dizaine de l’Haÿsiens dont Raymond Baudin, et des militants politiques connus (Fernand Bélino, Charles Joineau, Léon Feix, Henri Martin, Léon Moussinac).
L’administration du camp de Gurs utilise le néologisme “préventionnaires” pour désigner les prisonniers comme Albert Watel en détention préventive (5). Albert Watel est jugé à Périgueux, lieu de repli des tribunaux militaires de Paris. Il est libéré à la suite d’un non-lieu, le 21 octobre 1940.

De retour en région parisienne, il reprend ses activités clandestines. Depuis son arrestation, Albert Watel n’a reçu aucun salaire de la CPDE, qui envisage sa mise à la retraite (son camarade François Le Bihan, lui, est radié). « Il est inscrit au Secours du chômage à L’Haÿ-les-Roses du 20 décembre au 12 mars 1941. A Cette date, il fait des travaux de jardinage pour les particuliers ». « Il est activement surveillé », tout comme son fils Paul, qui est brièvement arrêté au début décembre 1940, puis relaxé (source : Renseignements généraux).
Il est de nouveau arrêté le 22 juin 1941 par la police française. Cette arrestation s’inscrit dans le cadre d’une grande rafle concernant les milieux syndicaux et communistes. En effet, à partir du 22 juin 1941, jour de l’attaque hitlérienne contre l’Union soviétique, les Allemands arrêtent plus de mille communistes avec l’aide de la police française (nom de code de l’opération : «Aktion Theoderich»). D’abord amenés à l’Hôtel Matignon (un lieu
d’incarcération contrôlé par le régime de Vichy) ils sont envoyés au Fort de Romainville, où ils sont remis aux autorités allemandes. Ils passent la nuit
dans des casemates du fort transformées en cachots.

Et à partir du 27 juin ils sont transférés vers Compiègne, via la gare du Bourget dans des wagons gardés
par des hommes en armes. Ils sont internés au camp allemand (Frontstalag 122) de Royallieu à Compiègne (Oise), administré par la Wehrmacht, camp destiné à l’internement des «ennemis actifs du Reich», alors seul camp en France sous contrôle direct de l’armée allemande.
Le 26 juin 1941, le nouveau Préfet de police de Paris, François Bard, ordonne son internement administratif à Compiègne en application de la Loi du 3 septembre 1940 (7).

Lire dans ce site : La solidarité au camp allemand de Compiègne et Le « Comité » du camp des politiques à Compiègne .
Depuis ce camp administré par la Wehrmacht, il va être déporté à destination d’Auschwitz. Pour comprendre la politique de l’Occupant qui mène à sa déportation, on lira les deux articles du site qui exposent les raisons des internements, des fusillades et de la déportation : La politique allemande des otages (août 1941-octobre 1942) et «une déportation d’otages». Le 6 juillet, à six heures du matin, il est conduit sous escorte allemande à la gare de Compiègne avec ses camarades, puis entassé dans un des wagons de marchandises qui forment son convoi. Le train s’ébranle à 9 heures trente.
Après son évasion du camp de Compiègne, le 22 juin 1942, Georges Cogniot est hébergé quelques temps par l’épouse d’Albert Watel (Georges
Cogniot, Parti pris, p. 489). Voir en fin de notice. Lire dans le site:  22 juin 1942 : évasion de 19 internés et Avis de recherche des évadés du 22 juin 1942 par le tunnel du camp de Compiègne. 

Depuis le camp de Compiègne, Albert Watel est déporté à Auschwitz dans le convoi du 6 juillet 1942

Cf Article du site : Les wagons de la Déportation. 

Ce convoi est composé au départ de Compiègne, de 1175 hommes (1100 « otages communistes » – jeunes communistes, anciens responsables politiques et élus du Parti communiste, syndicalistes de la CGT et délégués du personnel d’avant-guerre, militants et syndicalistes clandestins, résistants – de cinquante  « otages juifs » et de quelques « droits communs »). Il faisait partie des mesures de terreur allemandes destinées à combattre, en France, les judéo-bolcheviks responsables, aux yeux de Hitler, des actions armées organisées par le parti communiste clandestin contre des officiers et des soldats de la Wehrmacht, à partir d’août 1941. Lire dans le site le récit des deux jours du transport : Compiègne-Auschwitz : 6-8 juillet 1942. Sur les 1175 otages partis de Compiègne le 6 juillet 1942, 1170 sont présents à l’arrivée du train en gare d’Auschwitz le 8 juillet 1942. Ces derniers sont enregistrés et photographiés au Stammlager d’Auschwitz (camp souche ou camp principal, dénommé en 1943 Auschwitz-I) entre les numéros « 45157 » et « 46326 », d’où le nom de « convoi des 45000 », sous lequel les déportés du camp désignaient ce convoi. Ce matricule – qu’il doit apprendre à dire en allemand et en polonais à toute demande des Kapos et des SS – sera désormais sa seule identité. Lire dans le site : Le KL Auschwitz-Birkenau.

Albert Watel est enregistré à son arrivée à Auschwitz le 8 juillet 1942 sous le numéro «46209» selon la liste par matricules du convoi établie en 1974 par les historiens polonais du Musée d’Etat d’Auschwitz.

Lire dans le site le récit de leur premier jour à Auschwitz : L’arrivée au camp principal, 8 juillet 1942. et 8 juillet 1942 : Tonte, désinfection, paquetage, « visite médicale ».  Après l’enregistrement, il passe la nuit au Block 13 (les 1170 déportés du convoi y sont entassés dans deux pièces). Le 9 juillet tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau (Brzezinka), situé à 4 km du camp principal. Le 13 juillet il est interrogé sur sa profession. Les spécialistes dont les SS ont besoin pour leurs ateliers sont sélectionnés et vont retourner à Auschwitz I (approximativement la moitié du convoi. Les autres, restent à Birkenau, employés au terrassement et à la construction des Blocks.

Dessin de Franz Reisz, 1946

Albert Watel meurt à Auschwitz le 26 août 1942 d’après le certificat de décès établi au camp d’Auschwitz (in Death Books from Auschwitz Tome 3 page 1304 et le site internet © Mémorial et Musée d’Etat d’Auschwitz-Birkenau) où il est mentionné avec son numéro matricule, ses dates, lieux de naissance et de décès, avec l’indication « glaubenslos » (athée).

Un arrêté ministériel du 28 janvier 2002 paru au Journal Officiel du 24 mars 2002 porte apposition de la mention «Mort en déportation» sur son acte de naissance et jugement déclaratif de décès et reprend la date portée sur le certificat de l’état civil d’Auschwitz (la date de décès a été modifiée sur l’acte de naissance). Lire dans le site l’article expliquant les différences de dates entre celle inscrite dans les «Death books» et celle portée sur l’acte décès de l’état civil français) Les dates de décès des « 45000 » à Auschwitz.

Albert Watel a été déclaré « Mort pour la France » et homologué comme « Déporté politique » en 1951.

Le pavillon d’Albert Watel, où Georges Cogniot fut hébergé après son évasion de Compiègne

Joséphine Watel et leur fille Albertine ont hébergé Georges Cogniot  fin juin 1942, après son
évasion du camp de Compiègne (Georges Cogniot, Parti pris, p. 489). Lire dans le site :  22
juin 1942 : 19 internés s’évadent du camp de Compiègne par un souterrain.
C’est chez elles qu’il reprend contact avec Laurent Casanova représentant la direction clandestine du Parti communiste.
Le 15 juin 1946, le Conseil municipal de L’Haÿ-les-Roses donne le nom d’Albert Watel à une rue de la commune, par laquelle on accède au parc départemental et à la Roseraie du Val-de-Marne.

  • Note 1Paul, Léon Watel, né le 20 octobre 1920 à Paris 13ème, domicilié chez ses parents au 11 rue de Vitry, était membre des Jeunesses communistes avant-guerre. Il est arrêté le 3 ou le 4 décembre 1940 par un inspecteur de la Brigade spéciale des Renseignements généraux et
    des policiers du commissariat de Gentilly, en même temps que 5 anciens membres des JC de l’Haÿ-les-Roses (Lucien G., Roger J. ainsi qu’
    Henri Bockel, Jean Paupy, Robert Prunier tous 3 déportés à Auschwitz avec Albert Watel).
  • Note 2 : Par arrêté du 23 février 1940 du Conseil de préfecture du département de la Seine et en application de la loi du 20 janvier 1939, tout élu communiste est « de plein droit » déchu de son mandat électif s’il n’en n’a pas démissionné ou s’il n’a pas dénoncé publiquement – avant le 26 octobre 1939 – son adhésion au Parti communiste et toute participation aux activités interdites par le décret du 26 septembre 1939, portant dissolution des organisations communistes.
  • Note 3 : “ En exécution d’un message téléphonique de la Région de Paris, la Prison Militaire de cette ville s’est repliée [au camp des Groües] avec son personnel et quelques détenus écroués depuis 2 jours, le 13 juin 1940 à 12 heures. Les autres détenus du Cherche-Midi et de la Santé avaient été transférés deux jours avant aux Camps des Groües [près d’Orléans] et de Cepoy [près de Montargis]. Le 15 juin 1940, à 19 h. 30, le camp des Groües a dû se replier en raison de l’évacuation de la ville d’Orléans. Il a fait route à pied jusqu’à Jouy-le-Potier où les détenus ont pris le camion pour se rendre au Camp d’Avord [près de Bourges]. Les quelques éléments du Camp de Cepoy (4) se sont incorporés avec les détenus du Camp des Groües. Arrivée au Camp d’Avord le 17 juin 1940 à 3 heures. Départ précipité sous menaces de bombardements du Camp d’Avord le même jour, à 11 h. 30, pour prendre la direction de Bordeaux. En arrivant à Bordeaux, ordre a été donné de continuer la route en direction du camp de Gurs (Basses-Pyrénées). Le détachement est arrivé à Gurs le 21 juin 1940, à 11 h. 30, et la Prison Militaire de Paris s’est installée à l’îlot B dans des baraques inconfortables (une vingtaine). Ce voyage du Camp des Groües à celui de Gurs a duré 5 jours. L’appel fait à l’arrivée à ce dernier camp, l’effectif des détenus est de 1.020 détenus [919 prévenus et 101 condamnés].
  • Note 4 : Dans son journal d’un prisonnier politique, l’écrivain communiste Léon Moussinac décrit son arrivée au camp des Grouës : « On
    distingue des sentinelles, des baraques, des barbelés, un détachement de soldats, baïonnette au canon, apparaît. (…) Des soldats nous serrent de près, la baïonnette basse ne cherchant qu’un prétexte pour nous piquer les cuisses ou nous donner des coups de crosse dans les reins. Ils ne cessent de nous injurier. – Salauds ! Fumiers… Sales Boches ! (…) Nous sommes pour ainsi dire jetés dans une baraque où nous distinguons à peine deux rangées de couchettes superposées. De la paille est disposée en tas au milieu du passage. Chacun se précipite. Il s’agit de se débrouiller
    . (…). À partir du 13 juin, le regroupement d’une partie des prisonniers de la Santé et du Cherche-Midi a lieu au camp des Grouës. « Le commandant de cette prison prend la direction de tout notre troupeau, qui reçoit la dénomination de “détachement des prisons de Paris” » précise Charles Lesca. Dès lors, le commandement est assuré par le capitaine Kersaudy. En raison de l’attaque déclenchée par l’aviation allemande sur la gare des Aubrais, le camp est évacué au soir du 15 juin. En colonne par trois, les prisonniers se dirigent, à pied, vers le sud, en direction de Bourges, avec pour objectif d’atteindre le camp d’aviation d’Avord (Cher). Orléans bombardé est en flammes. L’incendie rougeoie le ciel. Profitant de la confusion
    générale, un grand nombre de prisonniers s’évade (extraits de Jacky Tronel, « La prison militaire de Paris sur les routes de l’exode » in Arkeia n° 14).
  • Note 5 : Les détenus sont alors entraînés dans un exode qui va les conduire, à pied, jusqu’à Chatillon-sur-Loire. Ce repli tragique est marqué par l’exécution sommaire d’une quinzaine de prisonniers. Cet épisode est connu sous le nom de « colonne de Cépoy ». Les détenus arrivent au camp de Gurs le 21 juin (extraits de «Jacky Tronel, « La prison militaire de Paris sur les routes de l’exode » in Arkeia n° 14).
  • Note 6 : Il s’agit de détenus justiciables des tribunaux militaires. La plupart des « politiques » ont fait l’objet d’un mandat de dépôt avant d’être
    écroués à la prison militaire de Paris.
  • Note 7 : La loi du 3 septembre 1940 proroge le décret du 18 novembre 1939 et prévoit l’internement administratif sans jugement de « tous individus dangereux pour la défense nationale ou la sécurité publique« . Les premiers visés sont les communistes.

Sources

  • Archives de la Préfecture de police de Paris, Cartons occupation allemande, BA 2374.
  • Georges Cogniot, Parti pris.
  • Le Maitron, Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier français, Claude Pennetier (dir), éditions de l’Atelier. Edition informatique 2014, notice Claude Pennetier.
  • Fichier national de la Division des archives des victimes des conflits contemporains (DAVCC), Ministère de la Défense, Caen. Fiche individuelle consultée en décembre 1992.
  • Death Books from Auschwitz(registres des morts d’Auschwitz), Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, 1995 (basé essentiellement sur les registres (incomplets) des certificats de décès établis au camp d’Auschwitz ayant enregistré, entre le 27 juillet 1941 et
    le 31 décembre 1943, le décès des détenus immatriculés).
  • © Site InternetLegifrance.
  • © Google Maps.
  • © Dessin de Franz Reisz, in « Témoignages sur Auschwitz », ouvrage édité par l’Amicale des déportés d’Auschwitz (1946).
  • Registres matricules militaires du Nord.
  • Archives de la Préfecture de police de Paris, dossiers Brigade spéciale des Renseignements généraux, registres journaliers.
  • Elections, recensement de population (Paris et Val de Marne).

Notice biographique rédigée en 2003, installé en 2012 mise à jour en 2015, 2020 et 2022, par Claudine Cardon-Hamet, docteur en Histoire, auteur des ouvrages : «Triangles rouges à Auschwitz, le convoi politique du 6 juillet 1942 » Editions Autrement, 2005 Paris et de Mille otages pour Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 dit des «45000», éditions Graphein, Paris 1997 et 2000 (épuisé). Prière de mentionner ces références (auteur et coordonnées du site) en cas de reproduction ou d’utilisation totale ou partielle de cette notice biographique. Pour la compléter ou la corriger, vous pouvez me faire un courriel à deportes.politiques.auschwitz@gmail.com

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