Le 8 juillet 1942 à Auschwitz Photo retouchée © Pierre Cardon

Matricule « 45 254 » à Auschwitz

Auguste Blaise : né en 1917 au Havre (Seine-Inférieure / Seine-Maritime), où il habite ; matelot, caréneur ;  militant CGT ; arrêté comme otage le 23 ou le 24 février 1942 ; interné au camp de Compiègne ; déporté le 6 juillet 1942 à Auschwitz où il meurt.

Auguste, Lionel, Marie Blaise est né le 8 décembre 1917 au Havre (Seine-Inférieure / Seine-Maritime), où il habite au 25, rue des Viviers.
Il est le fils de Zélie, Hélène, Eugénie, Victoire Madeline, 26 ans, sans profession et d’Émile Jules Blaise, 27 ans, journalier, domiciliés au 12, rue des Drapiers.
Il a un frère jumeau (puiné), Edmond Georges.
Il est matelot selon les listes électorales de 1939 (ou caréneur au chantier naval selon Louis Eudier).
Auguste Blaise est adhérent à la CGT, puis à la CGT clandestine après l’interdiction du Parti communiste..

Les troupes allemandes entrent dans Le Havre le jeudi 13 juin 1940, et transforment la ville et le port en base navale (on comptera jusqu’à 40.000 hommes de troupe). Après la capitulation et l’armistice du 22 juin, La Feldkommandantur 517 est installée à l’hôtel de ville de Rouen et des Kreiskommandanturen à Dieppe, Forges-les-Eaux, et Rouen. Une Kreiskommandantur est installée à L’Hôtel de ville du Havre. Le 10 juillet 1940 le maréchal Pétain, investi des pleins pouvoirs par l’Assemblée nationale, abolit la République et s’octroie le lendemain le titre de « chef de l’Etat français ». Il lance la « Révolution nationale » en rupture avec nombre de principes républicains (confusion des pouvoirs législatifs et exécutifs ; rejet du multipartisme, suppression des syndicats et du droit de grève, antisémitisme d’état…).
A partir de l’année 1941, les distributions de tracts et opérations de sabotage par la Résistance se multipliant, la répression s’intensifie à l’encontre des communistes et syndicalistes. Dès le 22 juillet 1941, le nouveau préfet régional, René Bouffet, réclame aux services de police spéciale de Rouen une liste de militants communistes.
Une liste de 159 noms lui est communiquée le 4 août 1941 avec la mention : « tous anciens dirigeants ou militants convaincus ayant fait une propagande active et soupçonnés de poursuivre leur activité clandestinement et par tous les moyens ». Ces listes, comportent la plupart du temps – outre l’état civil, l’adresse et le métier – d’éventuelles arrestations et condamnations antérieures. Elles seront communiquées à la Feldkommandantur 517, qui les utilisera au fur et à mesure des arrestations décidées pour la répression des actions de Résistance.

Militant connu des services de police pour ses activités syndicales, Auguste Blaise est arrêté comme otage le 23 ou le 24 février 1942, à la suite de l’attentat de la Place de l’Arsenal. «Le 23 février 1942 au Havre, un engin explosif est lancé par le groupe Léon Lioust (du nom du jeune métallo fusillé le 18 mai 1941) contre une colonne en route de la marine de guerre allemande, place de l’Arsenal (2ème canton). Le groupe est dirigé par le jeune instituteur Michel Muzart, André Duroméa et Jean Hascoet, jeunes ouvriers métallurgistes : deux marins sont tués». (Marie-Paule Hervieu). Suite à cet attentat 20 otages Juifs et communistes internés à Compiègne sont fusillés (30 noms sont publiés). Après l’attentat, les Allemands raflent au jugé des hommes dans les cafés place de l’Arsenal. 

Extrait du livre de Marie Paule Dhaille-Hervieu. « Communistes au Havre »

La rafle se poursuit le lendemain en direction des milieux communistes et syndicalistes. Vraisemblablement écroué à la prison de Rouen comme ses camarades, Auguste Blaise est remis aux autorités allemandes à leur demande. Celles-ci l’internent au camp allemand de Royallieu à Compiègne (le Frontstalag 122). 

Lire dans ce site : La solidarité au camp allemand de Compiègne et Le « Comité » du camp des politiques à Compiègne .
Depuis ce camp administré par la Wehrmacht, il va être déporté à destination d’Auschwitz. Pour comprendre la politique de l’Occupant qui mène à sa déportation, on lira les deux articles du site qui exposent les raisons des internements, des fusillades et de la déportation : La politique allemande des otages (août 1941-octobre 1942) et «une déportation d’otages». Le 6 juillet, à six heures du matin, il est conduit sous escorte allemande à la gare de Compiègne avec ses camarades, puis entassé dans un des wagons de marchandises qui forment son convoi. Le train s’ébranle à 9 heures trente.

Depuis le camp de Compiègne, Auguste Blaise est déporté à Auschwitz dans le convoi du 6 juillet 1942.

Cf Article du site : Les wagons de la Déportation. 

Ce convoi est composé au départ de Compiègne, de 1175 hommes (1100 « otages communistes » – jeunes communistes, anciens responsables politiques et élus du Parti communiste, syndicalistes de la CGT et délégués du personnel d’avant-guerre, militants et syndicalistes clandestins, résistants – de cinquante  « otages juifs » et de quelques « droits communs »). Il faisait partie des mesures de terreur allemandes destinées à combattre, en France, les judéo-bolcheviks responsables, aux yeux de Hitler, des actions armées organisées par le parti communiste clandestin contre des officiers et des soldats de la Wehrmacht, à partir d’août 1941.
Lire dans le site le récit des deux jours du transport : Compiègne-Auschwitz : 6-8 juillet 1942.
Sur les 1175 otages partis de Compiègne le 6 juillet 1942, 1170 sont présents à l’arrivée du train en gare d’Auschwitz le 8 juillet 1942. Ces derniers sont enregistrés et photographiés au Stammlager d’Auschwitz (camp souche ou camp principal, dénommé en 1943 Auschwitz-I) entre les numéros « 45157 » et « 46 326 », d’où le nom de « convoi des 45 000 », sous lequel les déportés du camp désignaient ce convoi. Ce matricule – qu’il doit apprendre à dire en allemand et en polonais à toute demande des Kapos et des SS – sera désormais sa seule identité.
Lire dans le site : Le KL Auschwitz-Birkenau.

Auguste Blaise, le 8 juillet 1942, photo allemande retouchée © Pierre Cardon

Il est enregistré à son arrivée à Auschwitz le 8 juillet 1942 sous le numéro matricule « 45 254 ».

Photo non retouchée

Sa photo d’immatriculation (1) à Auschwitz a été retrouvée parmi celles que des membres de la Résistance intérieure du camp avaient camouflées pour les sauver de la destruction, ordonnée par les SS peu de temps avant l’évacuation d’Auschwitz.

Lire dans le site le récit de leur premier jour à Auschwitz : L’arrivée au camp principal, 8 juillet 1942. et 8 juillet 1942 : Tonte, désinfection, paquetage, « visite médicale ».
Après l’enregistrement, il passe la nuit au Block 13 (les 1170 déportés du convoi y sont entassés dans deux pièces). Le 9 juillet tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau, situé à 4 km du camp principal. Le 13 juillet il est interrogé sur sa profession. Les spécialistes dont les SS ont besoin pour leurs ateliers sont sélectionnés et vont retourner à Auschwitz I (approximativement la moitié du convoi. Les autres, restent à Birkenau, employés au terrassement et à la construction des Blocks.
Lire dans le site, La journée-type d’un déporté d’Auschwitz

Dessin de Franz Reiz 1946

Aucun document des archives SS préservées de la destruction ne permet de connaître la date de son décès à Auschwitz. Le ministère des Anciens combattants a fixé fictivement celle-ci au 1erdécembre 1942 «mort du typhus» d’après le témoignage de rescapés.

© Thierry Prunier / Mémorial Genweb

Le nom d’Auguste Blaise est inscrit sur le monument commémoratif de la Résistance et de la Déportation du Havre «Le 29 avril 1990, l’urne contenant des cendres de nos héros et de nos martyrs morts en déportation a été transférée dans ce monument».

  • Note 1 : 522 photos d’immatriculation des « 45 000 » à Auschwitz ont été retrouvées parmi celles que des membres de la Résistance intérieure du camp avaient camouflées pour les sauver de la destruction, ordonnée par les SS peu de temps avant l’évacuation du camp d’Auschwitz. A la Libération elles ont été conservées dans les archives du musée d’Auschwitz. Des tirages de ces photos ont été remis à André Montagne, alors vice-président de l’Amicale d’Auschwitz, qui me les a confiés.

Sources

  • Etat civil du Havre
  • Liste de déportés de Seine-Maritime établies à son retour de déportation par Louis Eudier in «Notre combat de classe et de patriotes, 1934-1945» (annexes).
  • Documents fournis par Madame Sylvie Barot, conservateur des Archives du Havre (18 juin 1992).
  • Marie Paule Hervieu «Communistes au Havre, communistes du Havre» Thèse de doctorat. Institut d’Etudes Politiques de Paris.
  • Liste (incomplète) par matricule du convoi du 6 juillet 1942 établie en 1974 par les historiens du Musée d’Etat d’Auschwitz-Birkenau (Division des archives des victimes des conflits contemporains (DAVCC / Ministère de la Défense, Caen) indiquant généralement la date de décès au camp.
  • © Site Internet «Mémorial-GenWeb» Le Havre (relevé Jacky Vinière).

Notice biographique rédigée par Claudine Cardon-Hamet en 2000 pour l’exposition de Rouen de l’association « Mémoire Vive » consacrée aux déportés “45000” et “31000” de Seine-Maritime, complétée en 2006, 2012, 2017, 2018, 2022 et 2024. Docteur en Histoire, auteur des ouvrages : « Triangles rouges à Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 », Editions Autrement, 2005 Paris et de «Mille otages pour Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 dit des « 45000 », éditions Graphein, Paris 1997 et 2000. Prière de mentionner ces références (auteur et coordonnées de ce site) en cas de reproduction ou d’utilisation totale ou partielle de cette notice.
Pour la compléter ou la corriger, vous pouvez me faire un courriel à deportes.politiques.auschwitz@gmail.com

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *