André Godebout, 8 juillet 1942 à Auschwitz

Matricule « 45 611 » à Auschwitz

André Godebout : né en 1910 à Déville-lès-Rouen (Seine-Inférieure / Seine-Maritime) ; domicilié  à Notre-Dame-de-Bondeville (Seine-Maritime) ; ouvrier métallurgiste ; militant communiste et CGT ; arrêté comme otage le 21 octobre 1941 ;  écroué à Rouen ; interné au camp de Compiègne ; déporté le 6 juillet 1942 à Auschwitz où il meurt.

André Godebout est né le 3 août 1910 à Déville-lès-Rouen (Seine-Inférieure/Seine-Maritime).
Il habite à Notre-Dame-de-Bondeville (Seine-Inférieure / Seine-Maritime) au moment de son arrestation.
Avant 1921, il est domicilié chez ses parents Côte ou Route du Mont-aux-Malades à Déville (on n’en  trouve pas mention aux recensements de 1921, 1926 et 1936).
Il est marié avec Renée Barbé, née en 1910 à Darnétal (Seine-Inférieure). Le couple a une fille, Micheline, née en 1931 et un garçon, Pierre, né en 1933.
André Godebout est ouvrier métallurgiste, membre du Parti communiste et adhérent à la CGT.

Les troupes allemandes entrent dans Rouen le dimanche 9 juin 1940. Après la capitulation et l’armistice du 22 juin, La Feldkommandantur 517 est installée à l’hôtel de ville de Rouen et des Kreiskommandanturen à Dieppe, Forges-les-Eaux, Le Havre et Rouen. Le 10 juillet 1940 le maréchal Pétain, investi des pleins pouvoirs par l’Assemblée nationale, abolit la République et s’octroie le lendemain le titre de « chef de l’Etat français ». Il lance la « révolution nationale » en rupture avec nombre de principes républicains (confusion des pouvoirs législatifs et exécutifs ; rejet du multipartisme, suppression des syndicats et du droit de grève, antisémitisme d’état…).
Dès le 31 août 1940 les Allemands arrêtent des otages au Trait et à Duclair à la suite de sabotages de
lignes téléphoniques. A partir de janvier 1941, les distributions de tracts et opérations de sabotage par la Résistance se multipliant, la répression
s’intensifie à l’encontre des communistes et syndicalistes.Dès le 22 juillet 1941, le nouveau préfet régional, René Bouffet, réclame aux services de police spéciale de Rouen une liste de militants communistes. Une liste de 159 noms lui est communiquée le 4 août 1941 avec la mention : « tous anciens dirigeants ou militants convaincus ayant fait une propagande active et soupçonnés de poursuivre leur activité clandestinement et par tous les moyens ». Ces listes, comportent la plupart du temps – outre l’état civil, l’adresse et le métier – d’éventuelles arrestations et condamnations antérieures. Elles seront communiquées à la Feldkommandantur 517, qui les utilisera au fur et à mesure des arrestations décidées pour la répression des actions de Résistance.

André Godebout est arrêté à son domicile en pleine nuit, le 21 octobre 1941, par des policiers français.
Son arrestation est ordonnée par les autorités allemandes en représailles au sabotage (le 19 octobre) de la voie ferrée entre Rouen et Le Havre (tunnel de Pavilly). Lire dans ce site Le « brûlot » de Rouen.
Une centaine de militants communistes ou présumés tels de Seine-Inférieure sont ainsi raflés entre le 21 et 23 octobre. Écroués pour la majorité d’entre eux à la caserne Hatry de Rouen, tous les hommes appréhendés sont remis aux autorités allemandes à leur demande, qui les transfèrent au camp allemand de Royallieu à Compiègne (le Frontstalag 122) entre le 25 et le 30 octobre 1941.
La moitié d’entre eux d’entre eux seront déportés à Auschwitz.

Depuis ce camp administré par la Wehrmacht, il va être déporté à destination d’Auschwitz. Pour comprendre la politique de l’Occupant qui mène à sa déportation, on lira les deux articles du site qui exposent les raisons des internements, des fusillades et de la déportation : La politique allemande des otages (août 1941-octobre 1942) et «une déportation d’otages».
Lire également dans ce site : La solidarité au camp allemand de Compiègne et Le « Comité » du camp des politiques à Compiègne .
Le 6 juillet 1942, à six heures du matin, il est conduit sous escorte allemande à la gare de Compiègne avec ses camarades, puis entassé dans un des wagons de marchandises qui forment son convoi. Le train s’ébranle à 9 heures trente.

Depuis le camp de Compiègne, André Godebout est déporté à Auschwitz dans le convoi du 6 juillet 1942. 

Cf Article du site : Les wagons de la Déportation. 

Ce convoi est composé au départ de Compiègne, de 1175 hommes (1100 « otages communistes » – jeunes communistes, anciens responsables politiques et élus du Parti communiste, syndicalistes de la CGT et délégués du personnel d’avant-guerre, militants et syndicalistes clandestins, résistants – de cinquante  « otages juifs » et de quelques « droits communs »). Il faisait partie des mesures de terreur allemandes destinées à combattre, en France, les judéo-bolcheviks responsables, aux yeux de Hitler, des actions armées organisées par le parti communiste clandestin contre des officiers et des soldats de la Wehrmacht, à partir d’août 1941.
Lire dans le site le récit des deux jours du transport : Compiègne-Auschwitz : 6-8 juillet 1942.
Sur les 1175 otages partis de Compiègne le 6 juillet 1942, 1170 sont présents à l’arrivée du train en gare d’Auschwitz le 8 juillet 1942. Ces derniers sont enregistrés et photographiés au Stammlager d’Auschwitz (camp souche ou camp principal, dénommé en 1943 Auschwitz-I) entre les numéros « 45157 » et « 46326 », d’où le nom de « convoi des 45000 », sous lequel les déportés du camp désignaient ce convoi. Ce matricule – qu’il doit apprendre à dire en allemand et en polonais à toute demande des Kapos et des SS – sera désormais sa seule identité.
Lire dans le site : Le KL Auschwitz-Birkenau.

Il est immatriculé le 8 juillet 1942

Il est enregistré à son arrivée à Auschwitz le 8 juillet 1942 sous le numéro «45 611» (sa photographie d’immatriculation à Auschwitz a été identifiée par des rescapés). Elle a été retrouvée(1) parmi celles que des
membres de la Résistance intérieure du camp avaient camouflées pour les sauver de la destruction, ordonnée par les SS peu de temps avant l’évacuation d’Auschwitz.

Lire dans le site le récit de leur premier jour à Auschwitz : L’arrivée au camp principal, 8 juillet 1942. et 8 juillet 1942 : Tonte, désinfection, paquetage, « visite médicale ».
Après l’enregistrement, il passe la nuit au Block 13 (les 1170 déportés du convoi y sont entassés dans deux pièces). Le 9 juillet tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau, situé à 4 km du camp principal. Le 13 juillet il est interrogé sur sa profession. Les spécialistes dont les SS ont besoin pour leurs ateliers sont sélectionnés et vont retourner à Auschwitz I (approximativement la moitié du convoi. Les autres, restent à Birkenau, employés au terrassement et à la construction des Blocks.
Lire dans le site, La journée-type d’un déporté d’Auschwitz

Les barbelés d’Auschwitz I © Claudine Cardon- Hamet

On ignore la date exacte de son décès à Auschwitz. L’état civil français l’a déclaré décédé le 15 novembre 1942, sur la base de témoignages de camarades rescapés.
André Godebout est homologué «Déporté politique» en 1955.

Monument aux morts

Un arrêté ministériel du 13 septembre 1993 publié au J.O n° 248 du 24 octobre 1993 porte apposition de la mention Mort en déportation sur son acte de décès.
Il est classé par erreur comme « militaire », par le service de la Direction des patrimoines, de la mémoire et des archives (AC 21 P 193603). Il est néanmoins mentionné «Mort en déportation à Auschwitz».

Son nom est inscrit sur le monument aux morts de la commune, route de Dieppe. Il y est honoré avec trois autres déportés de son convoi : Lucien Bellet, Léopold Duparc et René Maillard.

Mémorial PCF Rouen © Thierry Prunier / Mémorial Genweb

Son nom est également honoré sur le monument installé dans la cour de la fédération du PCF de Seine Maritime (33, place Général de Gaulle, Rouen) : avec ce poème de Paul Éluard (Enterrar y callar) qui accompagne les noms de 218 martyrs « Frères, nous tenons à vous. Nous voulons éterniser cette aurore qui partage votre tombe blanche et noire, l’ESPOIR et le Désespoir ».

  • Note 1 : 522 photos d’immatriculation des « 45.000 » à Auschwitz ont été retrouvées parmi celles que des membres de la Résistance intérieure du camp avaient camouflées pour les sauver de la destruction, ordonnée par les SS peu de temps avant l’évacuation du camp d’Auschwitz. A la Libération elles ont été conservées dans les archives du musée d’Etat d’Auschwitz. Des tirages de ces photos ont été remis par Kazimierz Smolen (ancien détenu dans les bureaux du camp d’Auschwitz, puis directeur du Musée d’Etat d’Auschwitz) à André Montagne, alors vice-président de l’Amicale d’Auschwitz, qui me les a confiés.

Sources

  • Listes de déportés de Seine-Maritime établies à leur retour de déportation par Louis Jouvin et par Louis Eudier in «Notre combat de classe et de patriotes, 1934-1945» (annexes p.10-18).
  • Brochure « 30 ans de luttes » p.60, éditée parla Fédération du Parti communiste de Seine Maritime, 1964.
  • Liste de militants de la CGT fusillés ou déportés pour leur action dans la Résistance établie par la CGT de Seine-Maritime, page 6.
  • Sa photographie d’immatriculation à Auschwitz a été identifiée par des rescapés, lors de la réunion organisée par l’Amicale d’Auschwitz le 10 avril 1948 (bulletin « Après Auschwitz« , n°20 de mars-avril 1948)
  • Fichier national du Bureau de la Division des archives des victimes des conflits contemporains (DAVCC), Ministère de la Défense, Caen. Fiche
    individuelle consultée en octobre 1993.
  • © Site Internet «Mémorial-GenWeb».
  • Courriel de sa petite fille, Madame Sandrine Godebout (octobre 2015).

Notice biographique rédigée par Claudine Cardon-Hamet en 2000 pour l’exposition de Rouen de l’association « Mémoire Vive » consacrée aux déportés “45000” et “31000” de Seine-Maritime, complétée en 2006, 2012, 2017, 2018 et 2022. Docteur en Histoire, auteur des ouvrages : « Triangles rouges à Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 », Editions Autrement, 2005 Paris et de «Mille otages pour Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 dit des « 45000 », éditions Graphein, Paris 1997 et 2000. Prière de mentionner ces références (auteur et coordonnées de ce site) en cas de reproduction ou d’utilisation totale ou partielle de cette notice.
Pour la compléter ou la corriger, vous pouvez me faire un courriel à deportes.politiques.auschwitz@gmail.com

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