Matricule « 45 171 » à Auschwitz
Henri André : né en 1909 au Havre (Seine-Inférieure / Seine-Maritime), où il est domicilié ; marin ; arrêté le 23 février 1942 ; interné au camp de Compiègne ; déporté le 6 juillet 1942 à Auschwitz où il meurt le 18 septembre 1942.
Henri André est né le 7 novembre 1909 au Havre (Seine-Inférieure / Seine-Maritime). Il habite au 36, rue Bazan au Havre au moment de son arrestation (la rue Bazan – ancienne rue de l’Hôpital –
était parallèle à la rue Jean Macé et au quai Videcocq d’alors. Seuls les tracés de ces deux rues ont été conservés lors de la reconstruction du Havre).
Il est le fils de Jeanne, Emilienne, Marie André, 33 ans, sans profession.
En 1927, il habite au 4, rue des Etoupières au Havre.
Le 9 décembre 1927 au Havre, Henri André épouse Germaine, Marie Millet. Elle a 18 ans, sans profession, née le 21 janvier 1909 au Havre, domiciliée chez ses parents au 9, rue des Gallions.
Le couple aura un garçon (Louis, Fernand).
Henri André est marin.
Les troupes allemandes entrent dans Le Havre le jeudi 13 juin 1940, et transforment la ville et le port en base navale (on comptera jusqu’à 40.000 hommes de troupe). Après la capitulation et l’armistice du 22 juin, La Feldkommandantur 517 est installée à l’hôtel de ville de Rouen et des Kreiskommandanturen à Dieppe, Forges-les-Eaux, et Rouen. Une Kreiskommandantur est installée à L’Hôtel de ville du Havre. Le 10 juillet 1940 le maréchal Pétain, investi des pleins pouvoirs par l’Assemblée nationale, abolit la République et s’octroie le lendemain le titre de « chef de l’Etat français ». Il lance la « révolution nationale » en rupture avec nombre de principes républicains (confusion des pouvoirs législatifs et exécutifs ; rejet du multipartisme, suppression des syndicats et du droit de grève, antisémitisme d’état…).
A partir de l’année 1941, les distributions de tracts et opérations de sabotage par la Résistance se multipliant, la répression s’intensifie à l’encontre des communistes et syndicalistes. Dès le 22 juillet 1941, le nouveau préfet régional, René Bouffet, réclame aux services de police spéciale de Rouen une liste de militants communistes. Une liste de 159 noms lui est communiquée le 4 août 1941 avec la mention : « tous anciens dirigeants ou militants convaincus ayant fait une propagande active et soupçonnés de poursuivre leur activité clandestinement et par tous les moyens ». Ces listes, comportent la plupart du temps – outre l’état civil, l’adresse et le métier – d’éventuelles arrestations et condamnations antérieures. Elles seront communiquées à la Feldkommandantur 517, qui les utilisera au fur et à mesure des arrestations décidées pour la répression des actions de Résistance.
Henri André est arrêté le 23 février 1942 au Havre à la suite de l’attentat de la place de l’Arsenal. Après l’attentat, les Allemands raflent au jugé des hommes dans les cafés place de l’Arsenal. La rafle se poursuit le lendemain au Pont de La Barre en direction des milieux communistes et syndicalistes.
Lire dans le site Le Havre, sabotages et attentats : avril 1941-février 1942.
Les autorités allemandes l’internent au camp allemand de Royallieu à Compiègne (le Frontstalag 122).
Lire dans ce site : La solidarité au camp allemand de Compiègne et Le « Comité » du camp des politiques à Compiègne .
Depuis ce camp administré par la Wehrmacht, il va être déporté à destination d’Auschwitz.
Pour comprendre la politique de l’Occupant qui mène à sa déportation, on lira les deux articles du site qui exposent les raisons des internements, des fusillades et de la déportation : La politique allemande des otages (août 1941-octobre 1942) et «une déportation d’otages».
Le 6 juillet, à six heures du matin, il est conduit sous escorte allemande à la gare de Compiègne avec ses camarades, puis entassé dans un des wagons de marchandises qui forment son convoi. Le train s’ébranle à 9 heures trente.
Depuis le camp de Compiègne, Henri André est déporté à Auschwitz dans le convoi du 6 juillet 1942.
Cf Article du site : Les wagons de la Déportation.
Ce convoi est composé au départ de Compiègne, de 1175 hommes (1100 « otages communistes » – jeunes communistes, anciens responsables politiques et élus du Parti communiste, syndicalistes de la CGT et délégués du personnel d’avant-guerre, militants et syndicalistes clandestins, résistants – de cinquante « otages juifs » et de quelques « droits communs »). Il faisait partie des mesures de terreur allemandes destinées à combattre, en France, les judéo-bolcheviks responsables, aux yeux de Hitler, des actions armées organisées par le parti communiste clandestin contre des officiers et des soldats de la Wehrmacht, à partir d’août 1941. Lire dans le site le récit des deux jours du transport : Compiègne-Auschwitz : 6-8 juillet 1942. Sur les 1175 otages partis de Compiègne le 6 juillet 1942, 1170 sont présents à l’arrivée du train en gare d’Auschwitz le 8 juillet 1942. Ces derniers sont enregistrés et photographiés au Stammlager d’Auschwitz (camp souche ou camp principal, dénommé en 1943 Auschwitz-I) entre les numéros « 45157 » et « 46326 », d’où le nom de « convoi des 45000 », sous lequel les déportés du camp désignaient ce convoi. Ce matricule – qu’il doit apprendre à dire en allemand et en polonais à toute demande des Kapos et des SS – sera désormais sa seule identité. Lire dans le site : Le KL Auschwitz-Birkenau.
Il est enregistré à son arrivée à Auschwitz le 8 juillet 1942 sous le numéro «45171» .
Sa photo d’immatriculation que nous avions choisie avec mon éditeur pour illustrer la première page du livre sur le convoi des « 45.000 », a été identifiée à sa sortie en 1997 par sa petite fille, bibliothécaire à Villejuif.
Cette photo d’immatriculation à Auschwitz (1) a été retrouvée parmi celles que des membres de la Résistance
intérieure du camp avaient camouflées pour les sauver de la destruction, ordonnée par les SS peu de temps avant l’évacuation d’Auschwitz.
Lire dans le site le récit de leur premier jour à Auschwitz : L’arrivée au camp principal, 8 juillet 1942. et 8 juillet 1942 : Tonte, désinfection, paquetage, « visite médicale ». Après l’enregistrement, il passe la nuit au Block 13 (les 1170 déportés du convoi y sont entassés dans deux pièces). Le 9 juillet tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau (Brzezinka), situé à 4 km du camp principal. Le 13 juillet il est interrogé sur sa profession. Les spécialistes dont les SS ont besoin pour leurs ateliers sont sélectionnés et vont retourner à Auschwitz I (approximativement la moitié du convoi. Les autres, restent à Birkenau, employés au terrassement et à la construction des Blocks.
Henri André meurt à Auschwitz le 18 septembre 1942 d’après le certificat de décès établi au camp d’Auschwitz et destiné à l’état civil de la municipalité d’Auschwitz (in Death Books from Auschwitz Tome 2 page 26). Il a trente deux ans et 10 mois.
Son acte de décès établi le 28 janvier 1947 porte la mention : « Mort en déportation » et la date de décès du 18 septembre 1942.
Son nom est honoré sur le monument commémoratif de la Résistance et de la Déportation «Le 29 avril 1990, l’urne contenant des cendres de nos héros et de nos martyrs morts en déportation a été transférée dans ce monument».
- Note 1 : 522 photos d’immatriculation des « 45 000 » à Auschwitz ont été retrouvées parmi celles que des membres de la Résistance intérieure du camp avaient camouflées pour les sauver de la destruction, ordonnée par les SS peu de temps avant l’évacuation du camp d’Auschwitz. A la Libération elles ont été conservées dans les archives du musée d’Etat d’Auschwitz. Des tirages de ces photos ont été remis par Kazimierz Smolen (ancien détenu dans les bureaux du camp d’Auschwitz, puis directeur du Musée d’Etat d’Auschwitz) à André Montagne, alors vice-président de l’Amicale d’Auschwitz, qui me les a confiés.
Sources
- Acte de décès daté du 28 janvier 1947. Listes électorales 1939 (Documents fournis par Madame Sylvie Barot, conservateur des Archives du Havre. (communication du 18 juin 1992, 20 janvier 1993 et 23 mars 1994).
- Liste de déportés de Seine-Maritime établies à son retour de déportation parLouis Eudierin «Notre combat de classe et de patriotes, 1934-1945» (annexes).
- Liste établie par Claude-Paul Couture, instituteur, auteur de «En Seine Maritime de 1939 à 1945» CRDP Rouen, 1986, correspondant du comité d’histoire de la deuxième guerre mondiale.
- Liste «de noms de camarades du camp de Compiègne», collectés avant le départ du convoi et transmis à sa famille par Georges Prévoteau de Paris XVIIIème, mort à Auschwitz le 19 septembre 1942 (matricules 283 à 3800). (BAVCC, Ministère dela Défense, Caen.
- Death Books from Auschwitz, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, 1995 (basé essentiellement sur les registres – incomplets – de l’état civil de la ville d’Auschwitz ayant enregistré, entre le 27 juillet 1941 et le 31 décembre 1943, le décès des détenus immatriculés).
- Fichier national du Bureau des archives des victimes des conflits contemporains. Fiche individuelle consultée en octobre 1993.
- « Liste communiquée par M. Van de Laar, mission néerlandaise de Recherche à Paris le 29.6.1948 », établie à partir des déclarations de décès du camp d’Auschwitz. (DAVCC, Ministère de la Défense, Caen).
- © Site Internet Mémorial-GenWeb Le Havre (relevé Thierry Prunier).
- « Communistes au Havre » de Marie Paule Dhaille-Hervieu. Publications de l’Université de Rouen et du Havre (11 janvier 2010).
Notice biographique rédigée en 2003 (complétée en 2012, 2016, 2017, 2020 et 2022, par Claudine Cardon-Hamet, docteur en Histoire, auteur des ouvrages : «Triangles rouges à Auschwitz, le convoi politique du 6 juillet 1942 » Editions Autrement, 2005 Paris et de Mille otages pour Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 dit des «45000», éditions Graphein, Paris 1997 et 2000 (épuisé). Prière de mentionner ces références (auteur et coordonnées du site) en cas de reproduction ou d’utilisation totale ou partielle de cette notice biographique.
Pour la compléter ou la corriger, vous pouvez me faire un courriel à deportes.politiques.auschwitz@gmail.com