Georges Martin (photo Renseignements généraux)
Georges Martin : né en 1913 à Ivry-sur-Seine (Seine / Val de Marne) ; domicilié à Vitry-sur-Seine (Seine / Val-de-Marne) ; maçon, margeur en imprimerie ; communiste, CDH ; arrêté le 22 avril 1941 ; condamné à huit mois d’emprisonnement; maison d'arrêt de Fresnes et prison de la Santé, interné aux camps de Rouillé et de Compiègne ; déporté le 6 juillet 1942 à Auschwitz, où il meurt le 25 octobre 1942.

Georges Martin est né le 5 août 1913 à Ivry-sur-Seine (Seine / Val de Marne).
Il habite au 16, rue Broussais à Vitry-sur-Seine au moment de son arrestation.
Il est le fils de Georgette, Emilie, Denise Collot, née à Paris en 1888 (24 ans), sans profession et d’Auguste, Hippolyte Martin, 24 ans, maçon, son époux, né le 21 juillet 1889 à Saint-Maurice (94). Ses parents qui se sont mariés le 26 août 1911, habitent au 27, rue des Lilas à Ivry.
En 1914, ils déménagent au 16 bis, rue Hoche à Ivry, puis au 44, rue des Lilas.
Son père, mobilisé au 147è Régiment d’Infanterie, est tué sur le front au Mesnil-les-Hurlus (Marne) le 28 février 1915. Cinq de ses oncles sont également victimes des combats de la Première guerre mondiale.

1930, Georges Martin avec sa sœur Edmée

Georges Martin a deux sœurs, Jacqueline et Edmée, née en 1909. Le 12 novembre 1919 il devient « pupille de la Nation ». En 1921, Georges et Edmée habitent seuls avec leur mère au 2 bis, rue Hoche, appartement 86, à Ivry.
Georges Martin travaille comme maçon à Ivry en 1920. Puis il est margeur dans une imprimerie du Faubourg Poissonnière à Paris 10è.

Chez Mme Delisle 1930

Il quitte Ivry pour Vitry avec sa sœur Edmée. Celle-ci se marie le 14 janvier 1928 à Vitry avec Raymond, Eugène, Victor Broville (né le 18 juin 1908 dans la Marne). Son mari s’engagera en 1937 dans les Brigades Internationales.
Appelé au service militaire en 1933 (troisième bureau de la Seine),Georges Martin est réformé définitif pendant ses classes pour des séquelles d’une pleurésie.
En 1935, il s’inscrit sur les listes électorales de Vitry-sur-Seine où il habite au 16, rue Broussais.

Fête de l’Humanité à Montreuil

Georges Martin est membre du Parti communiste à la cellule Bel Air de Vitry, et diffuseur de la presse communiste avec Le Père Froment (1) dont il est un familier (sur cette photo prise lors d’une fête de l’Humanité à Montreuil, on aperçoit celui-ci assis de dos à droite de la photo (xx) où Georges Martin est debout à gauche.
Georges Martin est un vendeur régulier de l’Humanité. En 1936, il est en ménage avec Raymonde Clabaut. Le couple habite au 16, rue Broussais à Vitry (recensement).

Le 22 août 1936, il se marie à Vitry avec Raymonde, Renée, Clabaut, née le 10 avril 1915 à Paris 14°. Elle est manœuvre à L’Œillet Métallique à Ivry.

Vendeurs de l’humanité de Vitry (les CDH), Georges Martin est sous le point rouge.

Le 14 juin 1940 les troupes de la Wehrmacht entrent dans Paris, vidée des deux tiers de sa population. La ville cesse d’être la capitale du pays et devient le siège du commandement militaire allemand en France. Les troupes allemandes occupent Ivry, et Vitry le 15 juin.  L’armistice est signé le 22 juin. Le 10 juillet 1940 le maréchal Pétain, investi des pleins pouvoirs par l’Assemblée nationale, abolit la République et s’octroie le lendemain le titre de « chef de l’Etat français ». Il lance la « Révolution nationale » en rupture avec nombre de principes républicains (confusion des pouvoirs législatifs et exécutifs ; rejet du multipartisme, suppression des syndicats et du droit de grève, antisémitisme d’état…).

Avec sa sœur Germaine à l’hiver 1940

Au début de l’Occupation, il s’inscrit à la Défense passive, pour pouvoir diffuser plus aisément le matériel anti-allemand : tracts et journaux.  

Fiche des Renseignements généraux (BS1)

Le 22 avril 1941, il est arrêté, ainsi que les frères Martin (Angel et Raymond) (2), par des gendarmes français de Vitry. Il est accusé d’avoir collé des affichettes du Parti communiste.
Sur sa fiche des Renseignements généraux (Brigade Spéciale 1), il est écrit « sollicité par Froment, responsable du quartier de la ferme à Vitry. A diffusé du matériel clandestin en compagnie de « Ba. » et de « Bu. ». Envoyé au Dépôt le 31 mars 1941« .

Lire dans le site La Brigade Spéciale des Renseignements généraux

Le 7 avril 1941 il est condamné à huit mois d’emprisonnement par la 12è chambre du Tribunal correctionnel de la Seine.
Le 29 avril, Georges Martin est transféré à la Maison d’arrêt de Fresnes. Il est écroué à la prison de la Santé, puis interné le 9 octobre 1941 au Centre de séjour surveillé de Rouillé, le 9 octobre sur mandat du Préfet de Paris (en date du 1er octobre 1941).
Lire dans ce site :  le camp de Rouillé
Début mai 1942, les autorités allemandes adressent au directeur du camp de Rouillé une liste de 187 internés qui doivent être transférés au camp allemand de Compiègne (le Frontstallag 122). Le nom de Georges Martin (n°124) y figure.
C’est avec un groupe d’environ 160 internés (3) qu’il arrive à Compiègne le 22 mai 1942. La plupart d’entre eux seront déportés à Auschwitz dans le convoi du 6 juillet.

Pour comprendre la politique de l’Occupant qui mène à la déportation de 14 vitriots, voir les deux articles du site : La politique allemande des otages (août 1941-octobre 1942)  et «une déportation d’otages». lire également : La solidarité au camp allemand de Compiègne et Le « Comité » du camp des politiques à Compiègne .
Depuis ce camp administré par la Wehrmacht, il va être déporté à destination d’Auschwitz. Pour comprendre la politique de l’Occupant qui mène à sa déportation, on lira les deux articles du site qui exposent les raisons des internements, des fusillades et de la déportation : La politique allemande des otages (août 1941-octobre 1942) et «une déportation d’otages». Le 6 juillet, à six heures du matin, il est conduit sous escorte allemande à la gare de Compiègne avec ses camarades, puis entassé dans un des wagons de marchandises qui forment son convoi. Le train s’ébranle à 9 heures trente.

Depuis le camp de Compiègne, Georges Martin est déporté à Auschwitz dans le convoi du 6 juillet 1942

Cf Article du site : Les wagons de la Déportation. 

Ce convoi est composé au départ de Compiègne, de 1175 hommes (1100 « otages communistes » – jeunes communistes, anciens responsables politiques et élus du Parti communiste, syndicalistes de la CGT et délégués du personnel d’avant-guerre, militants et syndicalistes clandestins, résistants – de cinquante  « otages juifs » et de quelques « droits communs »). Il faisait partie des mesures de terreur allemandes destinées à combattre, en France, les judéo-bolcheviks, responsables aux yeux de Hitler, des actions armées organisées par le Parti communiste clandestin contre des officiers et des soldats de la Wehrmacht, à partir d’août 1941.
Lire dans le site le récit des deux jours du transport : Compiègne-Auschwitz : 6-8 juillet 1942.
Sur les 1175 otages partis de Compiègne le 6 juillet 1942, 1170 sont présents à l’arrivée du train en gare d’Auschwitz le 8 juillet 1942. Ces derniers sont enregistrés et photographiés au Stammlager d’Auschwitz (camp souche ou camp principal, dénommé en 1943 Auschwitz-I) entre les numéros « 45 157 » et « 46 326 », d’où le nom de « convoi des 45 000 », sous lequel les déportés du camp désignaient ce convoi. Ce matricule – qu’il doit apprendre à dire en allemand et en polonais à toute demande des Kapos et des SS – sera désormais sa seule identité.
Lire dans le site : Le KL Auschwitz-Birkenau.

Entrée du camp d’Auschwitz I

Son numéro d’immatriculation à son arrivée à Auschwitz le 8 juillet 1942 n’est pas connu.
Le numéro « 45 846 ? » figurant dans mes deux premiers ouvrages sur le convoi du 6 juillet 1942 correspondait à ma tentative de reconstitution de la liste du convoi par matricules. Ce numéro, quoique plausible, ne saurait être considéré comme sûr en raison de l’existence des quatre listes alphabétiques successives que j’ai partiellement reconstituées, de la persistance de lacunes pour quatre noms, mais d’incertitudes sur plusieurs centaines de numéros matricules. Il ne figure plus dans mon ouvrage Triangles rouges à Auschwitz. Par ailleurs la photo du déporté portant ce matricule n’a pas été retrouvée, il est donc impossible d’en faire la comparaison avec les photos de Georges Martin que nous possédons.

Lire dans le site le récit de leur premier jour à Auschwitz : L’arrivée au camp principal, 8 juillet 1942. et 8 juillet 1942 : Tonte, désinfection, paquetage, « visite médicale ».
Après l’enregistrement, il passe la nuit au Block 13 (les 1170 déportés du convoi y sont entassés dans deux pièces). Le 9 juillet tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau (Brzezinka), situé à 4 km du camp principal. Le 13 juillet il est interrogé sur sa profession. Les spécialistes dont les SS ont besoin pour leurs ateliers sont sélectionnés et vont retourner à Auschwitz I (approximativement la moitié du convoi. Les autres, restent à Birkenau, employés au terrassement et à la construction des Blocks.
Aucun des documents sauvés de la destruction ordonnée par les SS peu de temps avant l’évacuation d’Auschwitz, ne nous permet de savoir dans quel camp il est affecté à cette date

Georges Martin meurt à Auschwitz le 25 octobre 1942 d’après le certificat de décès établi au camp d’Auschwitz et destiné à l’état civil de la municipalité d’Auschwitz (in Death Books from Auschwitz Tome 3 page 784).
Lire dans le site : 80 % des « 45 000 » meurent dans les six premiers mois

La mention Mort en déportation est apposée sur son acte de décès (arrêté du 10 novembre 1994 paru au Journal Officiel du 11 janvier 1995). Cet arrêté mentionne décédé le 15 octobre 1942 à Auschwitz : il serait souhaitable que le ministère prenne désormais en compte par un nouvel arrêté rectificatif la date portée sur son certificat de décès de l’état civil de la municipalité d’Auschwitz, accessible depuis 1995 (Death Books from Auschwitz, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau).

Georges Martin, vendeur de l’Humanité
Plaque de rue à Vitry

Une rue de Vitry porte son nom, qui est également honoré sur la plaque située place des Martyrs de la Déportation à Vitry, inaugurée à l’occasion du 50è anniversaire de la déportation : 6 juillet 1942, premier convoi de déportés résistants pour Auschwitz – 1175 déportés dont 1000 otages communistes – Parmi eux 14 Vitriots.
Son nom est aussi inscrit sur le monument situé place des Martyrs de la Déportation à Vitry : A la mémoire des Vitriotes et des Vitriots exterminés dans les camps nazis.

  • Note 1 : Paul Froment,  adjoint au maire de Vitry, déchu de son mandat le 29 février 1940 pour appartenance au Parti communiste. Dans un rapport du 25 mai 1941, la police estimait qu’il participait aux activités du parti clandestin, aux distributions de tracts, à la diffusion de matériel de propagande. Arrêté en mars 1941 malgré son âge, il est condamné à 18 mois de prison. Il est interné à Fresnes, Poissy, Compiègne. Déporté à Dachau, il meurt à Bergen Belsen le 19 janvier 1945 : il avait 70 ans.
  • Note 2 : Ils sont tous arrêtés le 27 ou le 28 avril 1941, très vraisemblablement afin d’enrayer d’éventuelles manifestations le 1er mai, à partir des fiches établies en octobre 1940 par le commissariat de Vitry (lire l’article du site Le rôle de la police française dans les arrestations des «45000» de Vitry) : il s’agit majoritairement d’ouvriers communistes ou de militants aux Amis de l’URSS, deux sont conseillers municipaux communistes : Bonnefoix Lucien, Bournigal Georges (XX), Brahim Georges (X), Bretonneau Louis (XX), Brice (XX), Calavia Félix (XX), Crespo José (XX), Darras Louis (XX), Delbos Julien, Tarquis Gabriel (X), Tavert Antoine (XX), Talout Robert (X), Tortel Maurice (XX), Tremblay Edouard (XX). Voir dans l’article précité la signification des croix (X, XX, XX).
  • Note 3 : Dix-neuf internés de cette liste de 187 noms ont été soit libérés, soit transférés dans d’autres camps, ou sont hospitalisés. Trois se sont évadés. Cinq d’entre eux ont été fusillés.

Sources  

  • Témoignages et photos d’avant-guerre de José Martin, frère d’Angel Martin (ils ne sont pas de la même famille que Georges Martin).
  • Rencontre avec José Martin (pèlerinage à Auschwitz, 1987).
  • Etat civil d’Ivry. © Site Internet Mémorial-GenWeb, Ivry et Vitry.
  • Death Books from Auschwitz, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, 1995 (basé essentiellement sur les registres (incomplets) des certificats de décès destinés à l’état civil de la ville d’Auschwitz ayant enregistré, entre le 27 juillet 1941 et le 31 décembre 1943, le décès des détenus immatriculés).
  • Liste de détenus transférés du camp de Rouillé vers celui de Compiègne en mai 1942. Archives du Centre de documentation juive contemporaine : XLI-42.
  • La Résistance à Vitry,brochure édité peu de temps après la Libération par la municipalité, sans date.
  • De l’occupation à la Libération, témoignages et documents, brochure éditée par la Ville de Vitry-sur-Seine, pour le 50ème anniversaire de la Libération, Paillard éd. 1994.
  • © Photo de la porte d’entrée du camp d’Auschwitz : Musée  d’Auschwitz-Birkenau.
  • © Site Internet Légifrance.gouv.fr
  • © Archives en ligne du Val de Marne, élections et recensement d’Ivry et Vitry.
  • © Archives en ligne d’Ivry.
  • Carton Brigades Spéciales des Renseignements généraux (BS1), par dérogation aux Archives de la Préfecture de police de Paris.

Notice biographique rédigée en 2003, mise en ligne en 2008, complétée en 2015, 2019, 2020, 2022 et 2024 par Claudine Cardon-Hamet, docteur en Histoire, auteur des ouvrages : «Triangles rouges à Auschwitz, le convoi politique du 6 juillet 1942 » Editions Autrement, 2005 Paris et de Mille otages pour Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 dit des «45 000», éditions Graphein, Paris 1997 et 2000 (épuisé). Prière de mentionner ces références (auteur et coordonnées de ce site) en cas de reproduction ou d’utilisation totale ou partielle de cette notice biographique.
Pour la compléter ou la corriger, vous pouvez me faire un courriel à deportes.politiques.auschwitz@gmail.com

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