Matricule « 46 079 » à Auschwitz Rescapé
Georges Rousseau : né en 1894 à Vierzon-Villages (Cher) ; à Puits-Berteau-Vierzon (Cher) ; plombier ; maire communiste du grand Vierzon ; arrêté le 22 juin 1941 ; interné à Compiègne ; déporté le 6 juillet 1942 à Auschwitz, Flossenbürg, Buchenwald ; rescapé, décédé le 8 mai 1976.
Georges Rousseau (surnommé « Cabochon ») est né le 2 février 1894 dans le quartier du Puits-Berteau à Vierzon-Villages (Cher).
Il habite rue de la Bidauderie, à Puits-Berteau-Vierzon (Cher) au moment de son arrestation.
Il est le fils naturel de Joséphine Rousseau, 20 ans, sans profession. Le 3 août 1901, sa mère a épousé Louis Surget, né en 1868, maréchal ferrant puis forgeron, veuf d’Ambroisine Plisson. En 1906, Georges Rousseau habite au 2, rue du Puits Berteau à Vierzon-villages, avec son demi-frère Lucien, né la même année que lui à Issoudun, sa mère et son beau-père. Il aura eu 6 demi-sœurs et frères qui meurent tous en bas âge.
Son registre matricule militaire indique qu’il habite à Vierzon au moment du conseil de révision et travaille comme ferblantier (mention raturée), puis chaudronnier, soudeur autogène. Georges Rousseau mesure 1m 67, a les cheveux noirs, les yeux châtain clair, le front ordinaire, le nez cave, la bouche grande, les sourcils drus et le visage rond. Il a un niveau d’instruction « n° 3 » pour l’armée (sait lire, écrire et compter, instruction primaire développée).
Conscrit de la classe 1914, il est mobilisé « mis en route et sans délai » par le décret de mobilisation générale du 1er août 1914. Le 3 septembre 1914, il est incorporé au 29è Régiment d’infanterie, affecté à la 8è compagnie. Le 18 novembre 1915, il est nommé caporal. Le régiment est engagé dans les Vosges, à Verdun, en Champagne. Il aura 2000 morts et 5000 blessés durant les 4 années de guerre.
Les soldats sont exténués. « Georges Rousseau, mobilisé pendant la Première Guerre mondiale, prit part à un début de mutinerie en 1917. Rousseau est arrêté, mais les gradés préférèrent étouffer l’affaire » (Le Maitron). Son registre matricule militaire n’en faisant pas état, la citation du Maitron est sans doute issue de l’interview de Georges Rousseau mentionnée dans les sources. Et compte tenu de sa forte personnalité, cette participation est fort vraisemblable. Du 28 juillet au 3 septembre 1918, il est évacué malade.
Le 8 janvier 1919 (ordre du régiment n° 608), il est d’ailleurs cassé de son grade et « remis soldat de 2è classe ». Le 19 septembre 1919, il est envoyé en congé illimité de démobilisation par le dépôt démobilisateur du Génie à Mâcon et « se retire » à Vierzon-Ville, « certificat de bonne conduite accordé ».
De retour à Vierzon-Villages, il adhère à la SFIO pour renforcer le courant favorable à la IIIè Internationale, sur les conseils d’un conseiller municipal socialiste (sans doute Robert Poubeau – qui sera son 2è adjoint à la mairie en 1929 – in le Maitron).
Georges Rousseau adhère au Parti communiste en 1921 après le Congrès de Tours. «Son rôle resta faible dans la section de Vierzon, il ne prit pas part aux vives discussions qui opposèrent les communistes vierzonnais en 1923-1924». Georges Rousseau est à la tête de la liste Bloc ouvrier et paysan aux élections municipales de 1925 à Vierzon-Villages « il fut élu en compagnie de dix communistes. Les socialistes avec douze conseillers étant majoritaires, Jules Béguineau devint maire socialiste SFIO. » (Le Maitron). On notera que dans les compte-rendu de La Dépêche du Berry et l’Emancipateur, le nom du « citoyen Maire » de Vierzon Villages élu le 27 mai 1925 et jusqu’en 1927 est M. Vigé. Jules Béguineau n’est élu qu’après les élections partielles du 27 février (qui consacrent une poussée du BOP) en mars 1927, au deuxième tour par le conseil municipal par 14 voix, contre 5 à Georges Rousseau et 4 à Delatte (seul ce dernier était candidat au 1er tour).
En juin 1926, il fait voter une subvention de 500 F pour le « Gardon Rouge » société de pêcheurs à la ligne dont le nom est tout un programme !
Le journal du Parti communiste, « L’Emancipateur » rapporte que Georges Rousseau fait partie des délégations chargées d’assister le citoyen maire « le cas échéant » lors de rencontres importantes (« L’Emancipateur » du 4 septembre 1926).
En 1928, avec ses camarades communistes, il s’oppose à un projet d’adjudication du traitement des eaux… néanmoins voté. « Aux élections de mai 1929, la liste communiste passa entièrement ; Georges Rousseau accéda à la première magistrature municipale. Pour fêter la victoire dans le « bastion rouge », les communistes accrochèrent à la mairie le drapeau rouge. Le commissaire de police rappela au nouvel élu l’interdiction d’apposer sur un édifice public un drapeau non tricolore. Rousseau déclara en refusant, qu’il consulterait son conseil municipal. Il fut convoqué à la préfecture et menacé de révocation » (Le Maitron).
Les petites filles de Georges Rousseau ont eu une autre version (familiale) de l’épisode : « Cabochon » – c’est le surnom affectueux et ravi que tout le monde lui donnait – répondit au commissaire de police « c’est pas moi qui l’ai accroché… Et c’est pas moi qui le décrocherait non plus ! » . Autre anecdote, rapportée par Maurice Renaudat : la société de pêche, créée à son initiative, s’appelle « le Gardon rouge« . Maurice Demnet écrit également « Georges Rousseau avait aussi créé une société de musique « les Bigophones », une bande de joyeux drilles qui accompagnaient la société de pêche le « Gardon rouge » dans ses déplacements, de même qu’un groupe théâtral et le Patronage Laïque municipal, qui n’existent plus. La société de gymnastique « l’Eglantine Rouge » a été transformée en club de football, mais elle n’est plus rouge« . Féru de sport, Gorges Rousseau est présent lors des manifestations sportives, par exemple lors de la traditionnelle course de l’Etoile cycliste vierzonnaise, dont il donne le départ (La Dépêche du Cher, 23/09/1933).
Le 14 juillet 1927, à Vierzon-Villages, Georges Rousseau épouse Angéline Badou. Elle est née le 13 avril 1897 à Massay (Cher). Le couple a deux enfants : Madeleine, Gilberte née le 22 octobre 1917 et Roger, Jacques né le 31 octobre 1926, tous deux à Vierzon-Forges.
Georges Rousseau est trésorier de la section communiste de Vierzon en 1931 et 1932, puis pendant quelques mois secrétaire du rayon de Vierzon, avant d’abandonner cette fonction pour se consacrer à sa municipalité.
En 1934, la mairie de Vierzon-Villages accorde des subventions à « l’espérance prolétarienne » (société sportive », à l’Orphelinat ouvrier ‘l’Avenir social », à l’orphelinat de Chemins de fer, accorde deux jours de congés mobiles aux enseignants (L’Emancipateur du 17/03/1934).
Georges Rousseau est réélu maire de Vierzon-Villages en 1935.
Les 22-25 janvier 1936, il est délégué au congrès du Parti communiste à Villeurbanne.
Au recensement de 1936, il est domicilié avec sa famille au 5, rue du Puits Berteaux à Vierzon-Villages.
Il milite pour la fusion des quatre communes de Vierzon.
Le 8 avril 1937, le préfet du Cher François Taviani. publie un arrêté officialisant la réunification des quatre Vierzon. Ce qu’on appela le « grand Vierzon » était né.
De Vierzon-Villages, séparée administrativement de Vierzon-Ville depuis 1790, Vierzon-Bourgneuf s’était détaché en 1886, puis Vierzon-Forges en 1908.
Il aura fallu près de dix ans pour concrétiser le projet de fusion lancé à la fin des années 1920 par le maire communiste de Vierzon-Villages, Georges Rousseau. Une vision qui, alors, n’était pas partagée par tous les élus des quatre « Vierzon ».
Après bien des avancées et des coups de frein, les conseils municipaux ont fini par adopter des résolutions concordantes approuvant la réunion, qui devait être entérinée par l’État ce 8 avril 1937 (d’après le Berry Républicain, lors de l’inauguration du « carrefour du 8 avril 1937 » le 9 avril 2017 par le maire communiste Nicolas Sansu).
En avril 1937, un grand meeting réunit les trois maires communistes vierzonnais sortants, un membre du Comité central (Marcel Gitton) et des maires venant de grandes communes de la région parisienne (Marcel Capron (Alfortville), Venise Gosnat (Ivry).
Le 2 mai 1937 après une intense campagne, la liste de Georges Rousseau « Liste populaire du Grand Vierzon, présentée par le Parti communiste« , se présente face à une « liste de Front populaire » Parti socialiste SFIO, Union socialiste et républicaine, et une liste dissidente d’anciens élus sortants. Le PPF s’était retiré. La liste communiste est élue dans son entier avec une moyenne de 600 voix devant la liste SFIO. Georges Rousseau est élu maire du Grand-Vierzon.
En avril 1938, Georges Rousseau est élu président de « l’Eglantine Vierzonnaise« , club sportif généraliste dont le siège social est au 14, rue des Ateliers. Le club résulte de la fusion de l’Eglantine de Vierzon Villages, du Boxing-Club et de l’Eglantine Rouge (de 1899 jusqu’au Front populaire, l’églantine ou l’églantine rouge fut un symbole de ralliement des socialistes, puis des communistes à partir de 1920, en opposition aux œillets blancs de la droite nationaliste. Avec le muguet elle était un des symboles du premier mai).
On notera que Maurice Agogué, vice-président était le secrétaire de l’Union locale CGT et Maurice Deligny, le secrétaire général de l’Eglantine était secrétaire du syndicat CGT des cheminots du Cher.
Pour la réserve de l’armée active, Georges Rousseau a été affecté (fictivement et successivement) dans le cadre du plan A aux 9è, 131è et 95è régiments d’infanterie, à la 5è section d’infirmiers militaires (1928), au centre de mobilisation d’artillerie n° 25 (1932) et à l’Ecole Centrale de Pyrotechnie de Bourges (1933 et 1938). Le décret de mobilisation générale du 1er septembre 1939 le « rappelle à l’activité ». Il arrive à la C.R. Hypomobile n° 32 le 3 septembre et il est renvoyé dans ses foyers le 6 septembre 1939 (père de deux enfants il est donc recensé avec la classe 1910 depuis 1935 et n’était donc pas mobilisable à cette date).
Mais il est néanmoins rappelé le 1er octobre au dépôt d’Artillerie PRREM (Parc Régional de Réparation et d’Entretien du Matériel) n° 5 à Orléans. Il y arrive le 10 et il est affecté à la première compagnie du parc d’Orléans. Il est renvoyé dans ses foyers le 29 octobre 1939 et classé cette fois-ci sans affectation à cette date. Georges Rousseau est révoqué de son titre de Maire en octobre 1939 par le conseil de préfecture sur requête du Préfet du Cher, François Taviani.
Le 14 juin 1940, l’armée allemande d’occupation entre dans Paris. La ville cesse alors d’être la capitale du pays et devient le siège du commandement militaire allemand en France. Les troupes allemandes occupent Bourges dès le 19 juin 1940. L’armistice est signé le 22 juin. Le 10 juillet 1940 le maréchal Pétain, investi des pleins pouvoirs par l’Assemblée nationale, s’octroie le lendemain le titre de « chef de l’Etat français ».
Avec un terrain d’aviation, une usine d’avions, des Etablissements militaires, Bourges ne suit pas la logique de la « zone de démarcation » – l’Yèvre prolongeant le Cher – et reste en zone occupée.
Dès le début de l’Occupation allemande, la police de Vichy a continué de surveiller les anciens élus, candidats ou militants communistes « notoires », procédé à des perquisitions et des arrestations. Vichy entend ainsi faire pression sur les militants communistes connus ou anciens élus pour faire cesser la propagande communiste clandestine.
Après la défaite et l’occupation allemande, la police spéciale de Bourges l’appréhende et perquisitionne son domicile le 31 janvier 1940, sans résultat. Elle le considère comme un « militant communiste sincère, mais loyal […] il semble que sa libération ne peut présenter aucun danger pour l’ordre public, car il paraît s’être sérieusement amendé avant son internement » (Le Maitron).
Mais en fait, il cache bien ses activités clandestines ! Il est un des organisateurs des premiers groupes armés du Cher, tient des réunions dans son atelier, diffuse des tracts, héberge et fait passer le Cher (la ligne de démarcation) à des prisonniers évadés.
De nombreux témoignages en feront état (voir les lettres ci-contre) :
Pierre Serpaud (commandant FFI-FTP), « certifie que Georges Rousseau faisait partie de la Résistance : distributions de tracts antiallemands, un organisateur des premiers groupes armés de Vierzon« .
Jean-Baptiste Magnon (commandant à l’état-major FFI) : certifie que « Georges Rousseau fut un résistant de la première heure en participant dès août 1940 à la rédaction et à la diffusion de tracts antiallemands Organisation des premiers groupes FTPF armés à Vierzon« ,
Marcel Cherrier, député du Cher (ex-commandant Abel) « organisation de groupes de 3 antiallemands, participa à la rédaction et à la diffusion appelant à la lutte contre l’occupant allemand, puis il constitua les premiers groupes armés FTPF.
Jean Picot (pour le Comité local de Libération).
Dès septembre 1940, on note des actions de Résistance dans le Cher : sabotages, manifestations pour les salaires durant l’hiver, grève à l’usine d’aviation (SNAC).
Le fils de Georges Rousseau est élève à l’Ecole normale d’instituteurs (1943).
Georges Rousseau est arrêté par des soldats allemands accompagnés de policiers français le 22 juin 1941, à Vierzon, le même jour que Lucien Michel (ancien conseiller général), Isidore Thiais, Lucien Millerioux et Faiteau Magloire, Germain Joseph (qui seront avec lui déportés dans le convoi du 6 juillet 1942).
C’est ce 22 juin 1941, jour de l’attaque hitlérienne contre l’Union soviétique, que les Allemands arrêtent plus de mille communistes dans la zone occupée, avec l’aide de la police française, sous le nom de code «Aktion Theoderich».
D’abord placés dans des lieux d’incarcération contrôlés par le régime de Vichy (prison de Bourges), ils sont envoyés, à partir du 27 juin 1941, au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré par la Wehrmacht et qui ce jour là devient un camp de détention des “ennemis actifs du Reich”.
Georges Rousseau est parqué avec une quarantaine de militants communistes et cégétistes dans l’une des caves de l’Hôtel de ville de Vierzon, puis le même jour transféré à la prison de Bourges (« le Bordiot« ). Il est interné à Compiègne le 27 juin 1942.
Le nom de Georges Rousseau figure avec celui de 43 autres militants sur une liste de communistes de la région militaire susceptibles d’être choisis comme otages. Parmi ces militants 6 d’entre eux seront déportés à Auschwitz avec lui : Faiteau Magloire, Germain Joseph , Michel Lucien, Millerioux Louis, Thiais Isidore, Kaiser (Keyser) Albert et son fils Jacques (condamné à un an de prison). Cette liste a été établie après un attentat « auf der Frontbuchland in Chartres » (contre une librairie militaire de Chartres). Elle est datée du 24 octobre 1941 à Bourges (In document XLIV- 66, document du 22 avril 1942. Source CDJC. Echange de correspondances, datées du 04/09/1941 au 29/12/1941, entre la Feldkommandantur 668 de Bourges et l’état-major du chef du district militaire A à Saint-Germain-en-Laye, sur la finalisation (compléter par informations…) de la liste de 44 otages (tampon « Militärverwaltungsbezirk A » (district A de l’administration militaire allemande en France) tampon « Geheim » (confidentiel).
Depuis le camp de Compiègne, Georges Rousseau est déporté à Auschwitz dans le convoi du 6 juillet 1942.
Cf Article du site : Les wagons de la Déportation.
Ce convoi est composé au départ de Compiègne, de 1175 hommes (1100 « otages communistes » – jeunes communistes, anciens responsables politiques et élus du Parti communiste, syndicalistes de la CGT et délégués du personnel d’avant-guerre, militants et syndicalistes clandestins, résistants – de cinquante trois « otages juifs » et de quelques « droits communs »). Il faisait partie des mesures de terreur allemandes destinées à combattre, en France, les judéo-bolcheviks responsables, aux yeux de Hitler, des actions armées organisées par le parti communiste clandestin contre des officiers et des soldats de la Wehrmacht, à partir d’août 1941. Lire dans le site le récit des deux jours du transport : Compiègne-Auschwitz : 6-8 juillet 1942. Sur les 1175 otages partis de Compiègne le 6 juillet 1942, 1170 sont présents à l’arrivée du train en gare d’Auschwitz le 8 juillet 1942. Ces derniers sont enregistrés et photographiés au Stammlager d’Auschwitz (camp souche ou camp principal, dénommé en 1943 Auschwitz-I) entre les numéros « 45 157 » et « 46 326 », d’où le nom de « convoi des 45 000 », sous lequel les déportés du camp désignaient ce convoi. Ce matricule – qu’il doit apprendre à dire en allemand et en polonais à toute demande des Kapos et des SS – sera désormais sa seule identité. Lire dans le site : Le KL Auschwitz-Birkenau.
A son arrivée à Auschwitz, le 8 juillet, il reçoit le n° matricule « 46 079 ».
Sa photo d’immatriculation (1) à Auschwitz a été retrouvée parmi celles que des membres de la Résistance intérieure du camp avaient camouflées pour les sauver de la destruction, ordonnée par les SS peu de temps avant l’évacuation d’Auschwitz.
Lire dans le site le récit de leur premier jour à Auschwitz : L’arrivée au camp principal, 8 juillet 1942. et 8 juillet 1942 : Tonte, désinfection, paquetage, « visite médicale ». Après l’enregistrement, il passe la nuit au Block 13 (les 1170 déportés du convoi y sont entassés dans deux pièces). Le 9 juillet tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau, situé à 4 km du camp principal. Le 13 juillet il est interrogé sur sa profession. Les spécialistes dont les SS ont besoin pour leurs ateliers sont sélectionnés et vont retourner à Auschwitz I (approximativement la moitié du convoi. Les autres, restent à Birkenau, employés au terrassement et à la construction des Blocks.
Affecté à Auschwitz I compte tenu de sa profession de plombier, il est affecté au Kommando « Plomberie » et Buna (in « Häftlings Personal Karte« , sa carte de prisonnier d’Auschwitz). D’après Maurice Demnet, sa spécialité (il est artisan plombier) lui a certainement sauvé la vie, puisque selon ce qu’il a raconté à son retour, son travail l’amenait fréquemment près des cuisines.
Entre le 14 août 1943 et le 12 décembre 1943, il est en quarantaine au Block 11 avec la quasi totalité des français survivants. Lire l’article du site « les 45000 au block 11.
Il est transféré le 28 août 1944 pour Flossenbürg avec 28 autres 45000. Lire dans le blog , « les itinéraires suivis par les survivants ».
A Flossenbürg il reçoit le 31 août 1944 le matricule « 19895 » et est affecté au Kommando Altenhammer à Rochlitz (kommando de Flossenbürg).
Le 27 octobre 1944, avec Lucien Tourte, il est transféré à Buchenwald-Wansleben (n° « 93423 ») où il est interné du 1er novembre au 12 ou 13 avril 1945.
On trouve dans les archives d’Arolsen une carte raturée le concernant avec mention de son métier de Klemper (plombier) – à la date du 2 avril 1945 – mentionnant Budapest et Ravensbruck.
Ce transfert est manifestement annulé puisque, le 12 avril 1945, Wansleben est évacué à marche forcée. Onze « 45 000« , parmi lesquels Georges Rousseau, contournent Halle par le nord. André Gaullier et Maurice Rideau s’évadent le 13. Georges Rousseau et ses 8 camarades sont libérés par les troupes américaines le 14 ou le 15 avril 1945 entre les villages de Quellendorf et de Hinsdorf.
Georges Rousseau regagne la France le 24 mai par le rail. Très éprouvé (de très nombreuses séquelles sont relevées par la commission de réforme d’Orléans en 1963), il ne reconnait pas son fils, Roger, qu’il a quitté âgé de 17 ans. Celui-ci en sera marqué toute sa vie.
Georges Rousseau est homologué Déporté politique en septembre 1953.
Le titre de Déporté Résistant lui a été refusé le 23 septembre 1953 (motif : « étant donné date d’arrestation et s’agissant d’un isolé : refusé RIF »), malgré les nombreuses attestations et un avis favorable de la commission départementale du Cher.
Lire l’article du site : La carte de « Déporté-Résistant«
Avant même son retour des camps, Georges Rousseau est désigné comme Maire de Vierzon fin 1944, et le restera jusqu’en 1947.
« Le 15 novembre 1944, le Préfet du Cher rétablit le conseil municipal issu des élections de mai 1937. A cette différence près : il doit désigner de nouveaux conseillers pour remplacer ceux qui ont disparu ou qui sont restés en captivité. C’est le cas de Georges Rousseau, le maire, toujours déporté. Léo Mérigot, adjoint, fait fonction de maire en attendant le retour de Georges Rousseau. Le 29 avril 1945, les élections municipales adoubent Georges Rousseau ! Il n’est toujours pas rentré de captivité. Ce n’est qu’à l’été 1945 qu’il retrouve son siège de maire jusqu’au 26 octobre 1947…». in blog © Vierzonitude.
Le 8 juin 1945, le journal du Parti communiste du Cher, l’Emancipateur, rend hommage à ses camarades morts dans les camps. Sur cette liste figurent les noms de presque tous les militants déportés le 6 juillet 1942 à Auschwitz :
Buvat Louis, Germain Joseph, Kaiser Albert, Thiais Isidore, Faiteau Magloire, Jouffin Henri, Lanoue Moïse, Michel Lucien, Millérioux Joseph, Perrin Marcel, Rivet Roger, Trouvé Maurice. Les deux seuls chériens survivants du convoi sont le maire de Vierzon Gorges Rousseau et Roger Gauthier.
Gorges Rousseau est élu président de l’Amicale des déportés du Cher en juillet 1945 (L’Emancipateur 20-07/1945).
En septembre 1947, c’est en tant que maire sortant de Vierzon, qu’il expose longuement dans les colonnes de l’Emancipateur (25/09/1947) le programme municipal qu’il entend mettre sur les rails, expliquant à la fois les retards pris avant la fusion des 4 communes, les deux seules années de mandat avant la dissolution du Conseil en 1939, les années de gabegies et les destructions de l’occupation et de la guerre. Concernant le logement, il lance un programme de construction de 2000 maisons en 5 ans.
Mais lors des élections municipales d’octobre 1947, si la liste communiste obtient 13 élus, les 4 élus socialistes s’allient avec les 10 élus MRP et RPF : le socialiste Caron est élu maire. Georges Rousseau et ses camarades se retrouvent dans l’opposition, jusqu’au 8 mars 1959, où un communiste, Léo Mérigot, est à nouveau élu maire.
Maurice Renaudat a été témoin des démêlées orageuses de Gerges Rousseau avec André Marty chargé de « suivre » le département du Cher pour le Comité central du PCF. Il les a évoquées avec mon mari lors de la conférence que j’ai donnée à Bourges en à 2011 (Maurice Renaudat connaissait bien sa cousine, Maguy Cardon-Krivopisko, résistante, maire adjointe et conseillère générale d’Argenteuil).
L’épouse de Georges Rousseau décède le 18 novembre 1965 à Vierzon.
En 1967, le maire communiste de Vierzon (de 1959 à 1969), le docteur Léo Mérigot, chirurgien, son ancien adjoint à la Libération, lui remet la médaille d’honneur de la ville.
Jusqu’en 1971, Georges Rousseau est régulièrement réélu conseiller municipal.
Georges Rousseau est décédé le 8 mai 1976.
Une rue de Vierzon (l’ancienne rue du Parc) porte son nom depuis le 2 septembre 1994, ainsi qu’un foyer, le Club Georges Rousseau (action sociale).
- Note 1 : 522 photos d’immatriculation des « 45 000 » à Auschwitz ont été retrouvées parmi celles que des membres de la Résistance intérieure du camp avaient camouflées pour les sauver de la destruction, ordonnée par les SS peu de temps avant l’évacuation du camp d’Auschwitz. A la Libération elles ont été conservées dans les archives du musée d’Auschwitz. Des tirages de ces photos ont été remis à André Montagne, alors vice-président de l’Amicale d’Auschwitz, qui me les a confiés.
Sources
- Questionnaire biographique (contribution à l’histoire de la déportation du convoi du 6 juillet 1942), envoyé aux mairies, associations et familles par Roger Arnould, rempli par madame Rousseau aidée par Aimé Obeuf.
- Témoignages de Maurice Renaudat recueillis lors de la conférence du 24 mai 2011 à Bourges. Maurice Renaudat, une des grandes figures de la Résistance dans le Cher, ancien secrétaire fédéral du PCF à la Libération, fut le premier directeur du Musée de la Résistance et de la Déportation de Bourges, après sa création en 2010.
- Témoignages de ses petites filles pour la « saga » familiale, lors de cette même conférence.
- Correspondance de Georges Rousseau avec Roger Arnould.
- Témoignages recueillis à Vierzon par Aimé Oboeuf, rescapé du convoi, à partir des souvenirs de Georges Rousseau et Roger Gauthier, du Cher, également rescapés du convoi.
- Pièces photocopiées : Commission d’homologation du Cher (1950), Commandant Magnon, Comité départemental de Libération (6 décembre 1950), attestation de Marcel Cherrier, député du Cher.
- Liste d’otages de Bourges (cote XLIV-66 au CDJC), liste établie le 24 octobre 1941, in document allemand du 23 avril 1942 établie à la suite de l’attentat du « Buchhandlung Front » (bibliothèque du Front), à Chartres (même région militaire).
- Photo d’après guerre © in annexes de « Combattants de la liberté. La Résistance dans le Cher ». Cherrier Marcel et Pigenet Michel. Éditions Sociales, 1976.
- Fichier national de la Division des archives des victimes des conflits contemporains (DAVCC), Ministère de la Défense, Caen. Fiche individuelle consultée en novembre 1993.
- Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier français, Le Maitron, Claude Pennetier (dir), éditions de l’Atelier, CD-Rom. tome 40, p. 379 (notice Claude Pennetier)
- Courriel de Françoise Porcheron (petite-fille aînée de Georges Rousseau), et de sa sœur cadette Yvette Micouraud (28 juin 2011) concernant la date d’inauguration de la rue Georges Rousseau.
- 12 juillet 2011 : courrier de M. Marcel Demnet (président de la section FNDIRP de Vierzon, ancien FTP, interné Résistant, qui en 1942 était employé à la mairie de Vierzon), à qui j’avais fait parvenir les biographies des 45000 du Cher et qui m’a transmis de précieux renseignements… et corrections. Il fut en 1945 directeur du service secrétariat, bureau militaire et élections chargé de régulariser l’ensemble des catégories de victimes civiles et militaires de la guerre 1939/1945.
- Archives départementales du Cher : état civil et registres matricules militaires.
- Photos Archives Municipales de Vierzon.
- Photo cartes de Flossenbürg et Vansleben © International Center on Nazi Persecution, Bad Arolsen Deutschland
Notice biographique rédigée en novembre 2010, complétée en 2015, 2018, 2019, 2021 et 2024 par Claudine Cardon-Hamet, docteur en Histoire, auteur des ouvrages : « Triangles rouges à Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 » Editions Autrement, 2005 Paris et de «Mille otages pour Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 dit des « 45000 », éditions Graphein, Paris 1997 et 2000. Prière de mentionner ces références (auteur et coordonnées de ce site) en cas de reproduction ou d’utilisation totale ou partielle de cette notice biographique.
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