Le convoi du 6 juillet 1942 était composé de près de 1100 « otages communistes », de cinquante « otages juifs » et d’une vingtaine de « otages asociaux » (auteurs de délits de droit commun) dont la déportation faisait partie, au nom de la lutte contre le «judéo-bolchevisme», des représailles décidées par Hitler pour porter la terreur parmi les communistes dont les groupes armés attaquaient des officiers et des soldats de la Wehrmacht afin de lancer la résistance armée sur le sol de France.
Voir en bas de la page, les liens vers les articles complémentaires
Combien de Juifs déportés le 6 juillet 1942 ?
On ignore le nombre exact d’otages communistes et juifs déportés le 6 juillet 1942 car la liste de départ au camp allemand de Compiègne n’a pas été retrouvée. Plusieurs rescapés ont indiqué que leur convoi était composé de 1175 détenus au moment de leur départ du camp de Compiègne .
Au cours du transport, trois d’entre eux (au moins) s’évadèrent. Selon un (seul) témoignage, un autre aurait été « liquidé comme mouton » par ses camarades qui le soupçonnaient de les avoir dénoncés.
Le 8 juillet 1942, le convoi arrive à Auschwitzet 1170 de ces déportés furent immatriculés au camp principal (Stammlager).
Le chiffre le plus vraisemblable est celui de1175 déportés au moment du départ du camp de Compiègne.
Parmi eux, se trouvaient 50 « otages juifs » retirés le 5 juillet 1942 du « camp des Juifs » et inscrits sur une liste particulière (voir plus loin). On ignore le nom de 3 des 50 « otages juifs ». Par ailleurs, des communistes dont les origines juives n’avaient pas été décelées (7 au moins) par les services allemands ont été déportés comme « otages communistes » et leur nom figure sur les 3 autres sous-listes qui composaient la liste définitive de départ du convoi.
Au total, sur les 57 Juifs qui furent déportés le 6 juillet 1942, les noms de 54 d’entre eux ont été retrouvés grâce aux documents des archives du camp d’Auschwitz, du Bureau des Archives
des Victimes des Conflits Contemporains (DAVCC, ministère de la Défense à Caen) et du Mémorial de la Shoah (Paris).
Quand les camps de concentration furent libérés, seuls deux de ces déportés juifs avaient survécu à leur détention.
Les noms des Juifs déportés
Leurs noms étaient présents de manière très inégale sur les quatre sous-listes alphabétiques successives qui composaient la liste de départ du convoi – que j’ai pu presque entièrement reconstituer. Sur la liste de départ, 5 noms manquent encore et beaucoup de matricules n’ont pas pu être certifiés.
La première et la deuxième sous-listes
Elles rassemblaient les internés du camp A, arrêtés comme communistes ou pour une petite minorité d’entre eux, soupçonnés à tort ou à raison de proximité avec ceux-ci ou avec les gaullistes. Des Juifs qui n’avaient pas été « identifiés » furent en conséquence déportés comme « otages communistes ». Au cours de leur enregistrement à Auschwitz, l’administration SS leur attribuèrent le même triangle que les « otages communistes » (vert, pendant quelques jours, puis rouge) jusqu’à ce que l’administration SS du camp décèle leurs origines juives et leur octroie l’étoile jaune.
La troisième sous-liste des « otages juifs » du convoi
La plus grande partie de ces déporté (50) figuraient dans la troisième sous-liste du convoi et furent déportés en tant qu’ « otages juifs ». La plupart d’entre eux avaient été arrêtés en France parce que « Juifs » selon les critères du régime de Pétain et/ou des services du MBF (Commandant militaire en France occupée) – qu’ils aient été ou non des résistants – .Dans cette liste figuraient également des hommes arrêtés comme communistes notoires ou pour activité communiste (interdite depuis septembre 1939) ou pour faits de résistance. Placés dans un premier temps, dans le camp A des internés politiques de Compiègne (dit « camp des communistes »), ils avaient été transférés dans une section du camp C, appelée « camp des Juifs », après qu’ils aient été « identifiés comme Juif » par l’administration allemande de ce camp de détention de police dirigé par la Wehrmacht.
Lors de leur arrivée au camp principal d’Auschwitz, ces 50 Juifs furent appelés et séparés de leurs compagnons et reçurent au cours de leur enregistrement, l’étoile jaune réservés aux détenus juifs d’Auschwitz arrêtés dans l’ensemble des pays occupés par l’Allemagne.
Il faut mentionner ici un cas exceptionnel qui est à l’inverse de cette procédure et dont allait bénéficier Davydas Badasas (David Badache), résistant gaulliste de Caen, originaire de Lituanie, dont la mère était juive et le père de religion orthodoxe. En France, il avait été « défini » comme Juif à partir des critères de la législation du régime de Pétain et avait dû se faire recenser comme tel. Son nom figurait en tête de la liste des « otages juifs » du convoi.Cependant, selon la législation nazie, il était mischling (= de « sang mêlé »). Il n’était donc, à leurs yeux ni juif, ni aryen car son ascendance aryenne – pourtant censée être « dominante » pour les nazis – avait été « abâtardie » par le sang juif de sa mère.Grâce à ses relations avec des détenus d’un réseau de résistants autrichiens, son cas fut réexaminé par l’administration du camp au printemps 1943. Il reçu alors le triangle rouge des détenus politiques. Ce qui, a-t-il estimé, lui avait sauvé la vie.
La quatrième sous-liste
Elle a été très vraisemblablement établie au dernier moment pour atteindre le nombre d’otages à déporter préalablement fixé et donc de compenser l’absence des otages qui n’ont pu être déportés pour une raison ou pour une autre.
Les numéros suivis d’un point d’interrogation (?) sont les plus probables, mais n’ont pu être certifiés, faute d’avoir été attestés par des documents ou des témoignages fiables.
Première liste
45369 CHLEVITZKI Henri 22/09/1915
45663 ? HIRTZ Jacques, Eugène, 13/07/1918
45880 ? MIGDAL HENRI 26/11/192
45881 ? MIKLICHANSKY ABRAM (dit Albert) 05/05/1910
Seconde liste
46220 ? BLOCH Lucien 28/06/1908
46245 ? HOFFMANN ISIDORE 17/10/1918
Troisième liste (les 50 « otages juifs » extraits du « camp des Juifs » de Compiègne
Trois noms restent inconnus.
46267 BADASSAS DAVYDAS (Badache David) 28/04/1913 Rescapé
46268 BERNHEIM ARMAND 07/06/1896
46269 BLUMENFELD CHAIM
SZIGA dit Jean 8/01/1903
46270 B… ou C… ou D… (inconnu)
46271 B… ou C… ou D… (inconnu)
46272 DRIMER ISRAEL
12/09/1899
46273 FEITLOWICZ ISAAC
15/04/1894
46274 FERSTLA MAURICE 27/01/1893
46275 FRUCHT SAUL
04/05/1901
46276 ? GAWRON JOSEPH 03/03/1924
46277 GOLDSCHMIDT HARTWIG
27/11/1892
46278 ? GOLDSTEIN ARON
15/10/1892
46279 ? GOLDSTEIN SAMUEL 18/10/1901
46280 GRUNBERG MARC 21/09/1906
46281 GRYNBERG JACQUES 22/10/1897
46282 HADJADJE CHARLES 10/08/1913
46283 HASMAN HENRI
19/06/1890
46284 INDICTOR ABRAHAM
17/02/1893
46285 JANOS ALBERT 08/01/1894
46286 KATZ ARON 14/07/1910
46287 KINSBOURG ROGER
22/08/1890
46288 ? KIRZNER JACOB
22/05/1897
46289 KRAEMER JULIUS 18/02/1897
46290 KRONENFELD MENDEL
21/03/1911
46291 KUPFERMAN ISRAEL MEYER 25/05/1904
46292 LATMANN SMIEL
15/11/1902
46293 LEHMAN LUCIEN LEOPOLD 16/07/1895
46294 LEVILION ROBERT
10/05/1906
46295 LEVY JACQUES
SALOMON 19/02/1905
46296 LEVINSKY CHAIM
18/08/1888
46297 ? LEVINSKY RENE
02/04/1922
46298 LUBELSKI ABRAM
20/12/1893
46299 MARMELZTEJN JOSEF
18/06/1899
46300 MAR…à MIA…(inconnu)
46301 MIASKOVSKY SAMY
MICHEL 20/03/1896
46302 NEIMAN ISRAEL 31/08/1901
46303 ? NOVAK MOISE
28/08/1887
46304 PECKER
Marc Raphaël
46305 POLOSECKI JULES
15/06/1909Rescapé
46306 ROSENBLATT EMMANUEL
18/03/1913
46307 ROTSZTAJN JANKIEL (Jacques) 30/07/1894
46308 SCHARF MAURICE
13/08/1909
46309 ? SOMMER ROGER
10/05/1922
46310 STURM MOSES
21/10/1899
46311 VAJDA ERNST ISRAEL 13/05/1909
46312 WAJSBROD ABRAM 18/11/1887
46313 WOLF DAWID matricule 46313
46314 WOLFF MARCEL
RAPHAEL 09/10/1897
46315 ? WYSZYNSKI
Majer 01/03/1910
46316 DOKTOR JEAN 12/06/1910
Quatrième liste
46320 CHOURAQUI WILLIAM 11/04/1909
Cliquer pour lire les articles
- La politique allemande des otages (août 1941 – octobre 1942)
- Une déportation de représailles contre le « judéo-bolchevisme »
- La solidarité à Compiègne envers les Juifs du camp C
- Les Juifs rapidement assassinés après leur arrivée à Auschwitz
- L’horrible assassinat d’un déporté juif, témoignage de René Maquenhen
- Marcel Vaisse tente de préserver une jeune Juive du viol des SS
-
Trois « 45000 » assistent à l’ouverture des portes d’une chambre à gaz
- La « sélection » pour la chambre à gaz du poète Benjamin Fondane
- Les dates officielles de décès des « 45000 » à Auschwitz
- Des Juifs communistes arrêtés comme comunistes et déportés comme Juifs le 5 juin 1942